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Ce travail de recherche s’attache à montrer les similitudes que l’on peut constater entre certains états non ordinaires de conscience (ENOCs), tels la transe ecsomatique (OBE), le rêve lucide, les expériences de mort rapprochée (NDE), les expériences décrites comme des « enlèvements par les extraterrestres » et la transe chamanique induite par les postures de transe découvertes par l’anthropologue Felicitas Goodman. <br>Cette recherche décrit aussi comment l’anthropologie expérimentale peut se révéler être un outil d’exploration du chamanisme. Les séances impliquant les postures de transe, présentées dans cette thèse, montrent comment des sujets occidentaux, n’ayant eu aucun contact notable avec le chamanisme, délivrent des contenus de nature chamanique.<br>Enfin, ce travail met en relief les liens entre les ENOCs et les « géographies de l’invisible », i. e. les différents plans et niveaux de l’outre monde.

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Published by Michel Nachez, 2020-02-17 06:34:50

LES ÉTATS NON ORDINAIRES DE CONSCIENCE - Essai d&#39;Anthropologie Expérimentale

Ce travail de recherche s’attache à montrer les similitudes que l’on peut constater entre certains états non ordinaires de conscience (ENOCs), tels la transe ecsomatique (OBE), le rêve lucide, les expériences de mort rapprochée (NDE), les expériences décrites comme des « enlèvements par les extraterrestres » et la transe chamanique induite par les postures de transe découvertes par l’anthropologue Felicitas Goodman. <br>Cette recherche décrit aussi comment l’anthropologie expérimentale peut se révéler être un outil d’exploration du chamanisme. Les séances impliquant les postures de transe, présentées dans cette thèse, montrent comment des sujets occidentaux, n’ayant eu aucun contact notable avec le chamanisme, délivrent des contenus de nature chamanique.<br>Enfin, ce travail met en relief les liens entre les ENOCs et les « géographies de l’invisible », i. e. les différents plans et niveaux de l’outre monde.

Keywords: chamanisme, transes, états non ordinaires de conscience, états de conscience modifiés, transe ecsomatique (OBE), rêve lucide, expériences de mort rapprochée (NDE), chamanisme, anthropologie expérimentale, géographies de l’invisible, enlèvement par les extraterrestres, abduction

selon la Qabal, un des centres d’énergie séphirotique.
Ces centres réagissent sur les énergies des cellules
corporelles et c’est le début du processus. Car la voie
est SEL, corps, MERCURE, sang, SOUFRE, énergie.
Quand le sel est réharmonisé, le sang modifie sa
composition et agit sur les centres séphirotiques du
cerveau qui relient les plans plus élevés et deviennent
ainsi perceptibles. »

Source : Les Philosophes de la Nature

~ 551 ~

Figure X-3 : l'Arbre des Séphiroth
~ 552 ~

Le but de ce travail alchimique est donc de produire
sept élixirs1 planétaires qui seront ensuite consommés
afin d’induire des modifications dans le corps et
l’esprit. Voici ce que les Philosophes de la Nature
expliquent à ce propos (notice 32) :

« La Qabal, qui est une théorie de la magie
naturelle, explique qu’il y a quatre mondes. Il est
rarement dit que la hiérarchie de ces mondes fait que
l’accès conscient à l’un d’eux permet de transcender
les mondes qui lui sont inférieurs. Le monde de Briah
transcende Yetzirah et le monde de Yetzirah ne
transcende que le monde physique. Les causes
profondes des lois naturelles qui régissent un monde
se tiennent dans le monde qui lui est immédiatement
supérieur. Si notre conscience a accès à Yetzirah,
nous aurons accès aux lois qui transcendent le monde
physique, et nous aurons ses pouvoirs. L’état de Mage
ou d’Alchimiste n’est que la conséquence du niveau
de conscience atteint. (...) Notre étude alchimique doit
nous aider à réaliser progressivement que les mondes
de conscience supérieure ne sont ni illogiques ni
contraires à la raison. Ils sont différents. En fait, ils
sont hyper rationnels et hyper logiques. »

1 Préparations alchimiques de teintures mères à base de
plantes.

~ 553 ~

Ce qui est important à retenir ici est ce concept de
conscience : c’est elle qui nous donne la connaissance
et la liberté.

D’après les Philosophes de la Nature, l’Arbre des
Séphiroth (ou Arbre de Vie) est un outil de travail
puissant, un outil de méditation et de découverte qui
parle à l’inconscient par résonance symbolique. Cet
arbre est une carte de l’univers mais aussi du
psychisme humain comportant dix Séphiroth et vingt-
deux sentiers les reliant.

L’Arbre des Séphiroth est généralement figuré en
deux dimensions mais il se déploie en une
représentation multidimensionnelle en tout lieu et en
tout temps, car chaque Séphirah renferme la structure
des dix Séphiroth et ainsi de suite. C’est une structure
fractale qui se répète dans l’infiniment grand et dans
l’infiniment petit en multipliant les points d’énergie.
Voici deux figurations de C. Knorr de Rosenroth
(Kabbala Denudata, Sulzbach, 1684)1 qui illustrent
cette idée :

1 Roob Alexander, Alchimie et Mystique, pp. 314 et 315.

~ 554 ~

Figure X-4 : l'Arbre des Séphiroth - structure fractale 1
~ 555 ~

Figure X-5 : l'Arbre des Séphiroth : structure fractale 2

Chaque Séphirah est donc un point d’énergie qui
« ... correspond à un taux vibratoire donné (...),

pour la conscience de l’homme cela est perçu en tant
qu’état de conscience, état de l’être. Il est dit
également que les Séphiroth ont un caractère féminin
en regard des sentiers qui, eux, représentent un
caractère masculin, dans le sens où au niveau d’une
Séphirah, l’énergie se trouve à des taux vibratoires
constants, par conséquent statiques, alors que

~ 556 ~

l’énergie évolue le long d’un sentier qui est donc, lui,
dynamique, actif. (...) »1

Ces dix Séphiroth correspondraient donc à dix
niveaux de conscience ou à dix états d’être chez
l’homme. Le niveau 10 (Malkuth) correspond à notre
état terrestre avec son niveau de conscience
spécifique. Ce niveau est séparé par le Voile de la
Naissance et de la Mort des trois niveaux suivants 9
(Yesod ), 8 (Hod) et 7 (Netzach) ; eux-mêmes séparés
par le Voile de la Seconde Mort des trois niveaux
suivants 6 (Tiphereth), 5 (Geburah) et 4 (Chesed) ;
ceux-ci séparés par le Voile de l’Éternité ou Voile des
Abysses des trois derniers niveaux : 3 (Binah), 2
(Chokmah) et 1 (Kether).

L’homme au niveau 10 possède un corps physique ;
un corps subtil pour chacun des niveaux 9 à 4. Les
trois derniers niveaux n’ont pas de corps.

Pour les Philosophes de la Nature, on peut atteindre
ces niveaux de conscience de deux manières : soit par
la voie alchimique, soit par la voie magique de la
Qabal. Dans la première option, comme dit plus haut,
l’opérateur élabore les sept élixirs planétaires, chacun
correspondant au niveau de conscience visé. Ces
élixirs se comportent comme des clés qui ouvrent des
« serrures » en modifiant la composition sanguine et,

1 Notice 12 du cours de Qabal des Philosophes de la Nature.

~ 557 ~

par conséquent, la chimie du cerveau. Ces
modifications chimiques au niveau cérébral ouvrent à
de nouvelles perceptions du monde, donnent accès à
d’autres réalités dans lesquelles l’opérateur pourra
puiser savoir, connaissance, intuition, moyen d’action
sur lui, les autres, le monde matériel. La deuxième
méthode, magique celle-là, consiste à pratiquer des
rituels basés sur la Qabal. Au niveau symbolique, le
résultat est identique à la prise des élixirs, on observe
la modification des états de conscience afin d’entrer
en contact avec ces niveaux de réalité différents.

Plus concrètement, Alex, mage et alchimiste
contemporain, nous informe1 :

« C’est très simple. Chaque rituel est spécifique à
un certain plan d’existence. Et chaque plan
d’existence est habité par des entités. Je prends les
Sylphes par exemple. Si je veux entrer en contact avec
elles, je vais faire mon rituel et une de ces créatures
va se manifester. Mais pour être sûr que je ne suis pas
berné par une autre entité qui prendrait l’apparence
des Sylphes, je dois faire un test. Il y a toute une
procédure de tests qui permet de savoir avec
exactitude si je suis bien en contact avec ceux que je
veux contacter. Puis, je dois les soumettre à ma

1 Éléments rapportés lors d’un entretien informel avec Alex en
juillet 1996 dans le cadre de mon enquête concernant cette
thèse.

~ 558 ~

volonté ; après tout, j’ai pris contact avec ce plan pour
un objectif précis et je veux réussir. Après avoir
accompli ma tâche, il me faut renvoyer la créature et
fermer le passage vers ce plan. Pour ça, j’utilise un
rituel de clôture et de bannissement. C’est nécessaire
pour éviter d’être envahi ensuite par les habitants de
ces plans. Car, même s’ils ne sont pas très puissants
en tant que tels, ils peuvent polluer le mental humain.
Il n’est jamais bon de laisser s’infiltrer des influences
étrangères dans son mental. Il est donc impératif de
suivre la procédure avec rigueur. Sinon, on n’est plus
maître chez soi. »

Ainsi, Alex utilise un rituel très élaboré dont la cible
est bien déterminée. Ce rituel agit comme une clé
donnant accès à un état de conscience déterminé. Cet
ENOC ouvre à une autre réalité codifiée dans la vision
du monde de Alex : le plan d’existence des Sylphes. Ce
rituel, avec tous ses ingrédients, ses procédures et ses
incantations ressemble à une sorte de programme
informatique dont l’exécution est sensée donner
toujours le même résultat : ce pour quoi il a été
programmé.

Cette notion de programmation ou de code est
confirmée par Alex :

« Alors là, il y a deux choses. Primo, il y a un
training très spartiate concernant l’exécution
extérieure du rituel. Il faut que tout soit parfait.
Secundo, il y a un training non moins spartiate qui

~ 559 ~

passe par la méditation, qui passe par la
concentration, pour que les forces qui sont exprimées
à l’extérieur, soient vraiment bien réalisées par celui
qui les fait.

Et c’est pour ça que, dans le training qui est
proposé dans la Golden Dawn1, il est recommandé,
avant de s’endormir, de faire des rituels. Rituels très
simples, les rituels du Pentagramme qui sont très
allégés, qui sont vraiment le squelette du rituel. Et
justement pour permettre cet apprentissage entre
l’action extérieure et l’action intérieure. Maintenant,
là, c’est le témoignage du pratiquant qui va
intervenir. Il est vrai que, ayant suivi ce training,
l’ayant observé à la lettre, l’ayant enseigné aussi,
l’ayant observé chez les autres, et surtout sur moi-
même, il y a un changement radical, définitif, qui

1 Hermetic Order of the Golden Dawn (l’Ordre Hermétique de
l’Aube Dorée). « Cette organisation initiatique rosicrucienne fut
fondée en 1888 par S.L. Mathers et W.W. Wescott. La Golden
Dawn était hiérarchisée en trois classes et comprenait dix
grades. (...) Les rituels étaient très complexes et
particulièrement approfondis. Parmi les membres de cette
organisation qui exista jusqu’en 1901, on comptait de grands
écrivains : W.B. Yeats, Arthur Machen, Bram Stocker, mais aussi
des grands noms de la science, comme l’astronome William
Peck, et, bien sûr, les grandes figures de l’ésotérisme, dont
Aleister Crowley. » Pierre Riffard, L’ésotérisme, p. 883. La
Golden Dawn existe toujours, elle est répartie en de nombreux
groupuscules travaillants peu ou prou ensemble.

~ 560 ~

s’opère au moindre geste rituélique qui est opéré
physiquement.

C’est-à-dire qu’on peut venir vraiment chargé de
tous les problèmes de la journée, chargé de toutes les
autres occupations et quoi que ce soit. Une fois qu’on
commence un rituel, eh bien, ce rituel va opérer un
changement j’allais dire mécaniquement,
automatiquement, sur l’état de conscience qui nous
occupe, c’est-à-dire qu’il va automatiquement nous
débrancher parce qu’on l’a chargé, lui, d’une certaine
intention, il va nous le rendre automatiquement. C’est
comme une espèce de Golem, on lui a donné un
devoir et il doit faire ce devoir. (...)

Donc, il y a une sorte de coopération qui s’opère
entre l’exercice du corps, qui va faire le rituel, qui va
allumer les bougies, qui va allumer l’encens, qui va
faire tout le travail, qui va tracer les pentagrammes,
les hexagrammes et les sceaux des anges et des
archanges et des esprits. Il y a une espèce d’échange
qui s’opère. Et c’est là où on sort de cette dichotomie
entre le corps d’une part et l’esprit, de l’autre,
dichotomie très cartésienne. On crée, grâce au rituel,
un harmonieux échange entre les deux. Parce que le
corps, lui, recèle plein d’énergie, plein de sagesse et
grâce au rituel, il peut se libérer et communiquer. Si
bien qu’on peut aborder un rituel d’une manière très
froide, très cartésienne. Mais si on est entraîné, si le
corps est entraîné, une fois qu’on a commencé le

~ 561 ~

rituel, automatiquement, on change d’état de
conscience. (...) Et ce plan de conscience, autant je
suis lié à mon corps quand je suis engagé dans mon
travail quotidien, autant là, je suis sorti de mon corps,
je le vois, et c’est comme si j’étais autour de mon
corps. Et je vois mon corps en train d’opérer. C’est
assez difficile à exprimer, il faut l’expérimenter. C’est
tout le problème phénoménologique à ce genre de
descriptions.

C’est un conditionnement, et c’est ce qui m’a le
plus surpris, moi qui suis un esprit assez cartésien et
qui me méfie de tous les conditionnements. Et là, je
me suis rendu compte que, effectivement, c’est un
conditionnement favorable. Dans la mesure où il me
permet, de sortir d’un autre conditionnement, celui de
la société qui m’entoure. »

Ainsi, le rituel est un code, un programme mental
qui permet d’atteindre un état de conscience
déterminé. Chez le chaman, le code c’est le battement
de tambour qui déclenche la transe, (cf. supra, page
53). Le mage, donc, défriche le terrain de la
conscience humaine grâce à cette carte qu’est l’Arbre
des Séphiroth, cette carte qui le guide et lui permet de
diriger sa quête spirituelle avec le maximum
d’efficacité. L’Arbre des Séphiroth est non seulement
une carte mais aussi un véritable parcours initiatique
dont le but ultime est la réalisation spirituelle, la fusion
avec Dieu.

~ 562 ~

Chaque point de cette carte est donc accessible
grâce à une symbolique précise et structurée dans ses
moindres détails.

Les rituels sont bâtis suivant cette symbolique et
comportent les éléments qui vont permettre un accès
à l’état de conscience désiré. Les composants de ces
rituels sont les gestes, les couleurs, les symboles, les
lettres de l’alphabet hébreux en tant que symboles et
phonèmes. En annexe, je donne la description, à titre
d’illustration, du Rituel mineur du Pentagramme de la
Golden Dawn.

Dion Fortune1 donne quelques précisions quant à
l’utilisation de l’énergie rencontrée dans ces plans
séphirotiques. Ainsi, par exemple, Hod stimule la
compréhension intellectuelle, Yesod, le côté intérieur
de notre psychisme, l’inconscient. Et en ce qui
concerne la sortie hors du corps :

1 Dion Fortune est une ésotériste du début du siècle (1891-
1946), d’abord adepte de la Golden Dawn puis dissidente.
Dans sa pratique, fortement influencée par le système
qabalistique, se greffent aussi des éléments hindouistes
(d’origine théosophique) dont le système des chakras. (...) En
1919, elle fut initiée à la Stella Matutina, organisation
rosicrucienne relevant de la Golden Dawn. Cinq ans plus tard,
elle fonda la Confrérie de la lumière intérieure. Elle écrivit des
traités et des romans. Ses préoccupations tournaient autour de
la défense psychique de la personne. » Pierre Riffard,
L’ésotérisme, p. 878.

~ 563 ~

« Pour projeter le corps astral sur les Voies (les
sentiers), il est indispensable, pour plusieurs raisons,
de posséder les degrés d’initiation qui leur
correspondent. Une des principales est, qu’à moins
d’être en possession du grade, on ne sera pas
reconnu par les gardiens de la Voie qui seront hostiles
au lieu d’être amicaux, et feront tout en leur pouvoir
afin de repousser l’intrus. En second lieu, si l’on
réussit à écarter les gardiens du seuil, on n’a aucun
moyen de contrôler sa vision, et de savoir si l’on est
ou non sur la Voie, et il y a quantités d’êtres dans les
Sphères inférieures qui ne sont que trop prêts à
prendre avantage d’une telle ignorance
présomptueuse. (...)

L’Arbre, du point de vue initiatique, est le lien entre
le Microcosme, qui est l’homme, et le Macrocosme,
qui est Dieu manifesté dans la Nature. Un rituel
d’initiation est l’acte qui relie la Séphire
microcosmique (ou chakra)1 avec la Séphire
macrocosmique. »2

Les traditions magique et alchimique occidentales
nous montrent, de manière claire, les liens existant
entre la géographie de l’invisible et les états non

1 La Golden Dawn étant un système philosophique et magique
puisant à diverses sources, il n’est pas étonnant de rencontrer
des éléments de l’hindouisme dans son corpus, dont les
chakras, par exemple.
2 Op. cit., p. 91.

~ 564 ~

ordinaires de conscience. Toute une procédure
alchimique ou rituélique a été élaborée pour cibler des
points précis de la géographie de l’invisible, donc pour
piloter des états non ordinaires de conscience. Nous
l’avons vu précédemment, les Tibétains ont eux aussi
mis en relation états de conscience et géographie de
l’invisible.

Voyons maintenant des cartographies de l’invisible
issues de la recherche occidentale récente. Ce sont des
expérienceurs contemporains tels John Lilly avec
l’invention du caisson d’isolation sensorielle, Robert
Monroe et sa technique HemiSync pour induire l’OBE
et Florence Ghibellini et le rêve lucide que je vais
présenter. Ces personnes ont toutes expérimenté
personnellement des ENOCs. C’est en fait l’irruption
des ENOCs dans leur vie qui les a menées à
approfondir la question et à développer une
géographie de l’invisible qui leur est propre.

John Lilly et le caisson d’isolation sensorielle
(CIS)

Il existe une structure lourde pour opérer la
déprivation sensorielle : le caisson d’isolation aussi
dénommé CIS. C’est un espace conçu de manière à ce
qu’il n’y ait là ni bruit, ni clarté, ni odeur, ni goût. Ni
même, autant que possible, toucher, et cela dans la
mesure où on peut y flotter sur de l’eau maintenue à la

~ 565 ~

température de 34° centigrades. On y installe aussi
une protection contre les vibrations et les champs
électriques et magnétiques. C’est donc un lieu
totalement isolé du monde extérieur, dans lequel rien
ne peut pénétrer.

En 1954, John Lilly était directeur de recherches en
neurophysiologie au National Institute of Mental
Health dans le Maryland et il a commencé à y
expérimenter l’isolation sensorielle sur lui-même en
caisson. Il y a obtenu des ENOCs tels que OBE, transes,
contacts avec des intelligences supérieures, des êtres
de l’invisible. Voici ce qu’il écrit :

« J’ai découvert que j’avais été dans la plupart des
espaces immenses décrits dans la littérature mystique
de l’Orient, bien que sans leur ‘‘bagage’’ intellectuel
et sans leurs programmes détaillés de protection.
Satori, Samadhi ou nirvâna enveloppent d’immenses

Figure X-6 : le caisson d'isolation sensorielle - coupe
~ 566 ~

séries d’états de conscience bien au-delà de ce qui
peut être décrit par des mots. »1

Et aussi :

« J’entrais dans des états voisins du rêve, des états
de transe, des états mystiques. Dans toutes ces
phases, j’étais totalement intact, centré, présent. À
aucun moment, je ne perdis conscience du fait que je
faisais une expérience. Toujours une partie de moi
savait que je flottais dans le réservoir sombre et
silencieux. »2

Il décrit encore :

« Je me trouve au-delà de la galaxie, au-delà des
galaxies telles que nous les connaissons. Le temps est
apparemment accéléré cent milliards de fois. L’univers
tout entier se contracte jusqu’à devenir un point. Une
explosion formidable se produit et de ce point
jaillissent d’un côté, de la matière et des énergies
positives (...) et de l’autre côté, l’antimatière. »3

John Lilly entend des guides lui parler. Ses
expériences l’amènent à cette conviction :

1 Paul Gérôme, Le Vaisseau d’Isolation Sensorielle, p. 41. du
2 Oleg Poliakov, « Le caisson d’isolation sensorielle,
fantasme à la transe », in : L’hypnose et la transe, p. 172.
3 Ibid., p. 173.

~ 567 ~

« C’est une de mes croyances bien ancrée que
l’expérience des états supérieurs de conscience est
nécessaire pour la survivance de l’espèce humaine. Si
chacun d’entre nous peut faire l’expérience au moins
des niveaux les plus bas du satori, il existe un espoir
que nous ne détruirons pas la planète... »1

De nombreuses personnes ont utilisé le caisson
d’isolation sensorielle pour « y flotter » hors du monde
ordinaire, et ont témoigné y avoir vécu des sentiments,
des sensations, des émotions analogues à ceux de
John Lilly, c’est-à-dire des ENOCs.

John Lilly est né en 1915 à Saint Paul dans le
Minnesota (USA). Il a étudié en Californie à l’Institut de
Technologie et a eu son Doctorat de Médecine en
1942 à l’Université de Pennsylvanie. Il a mené
différentes recherches dans les domaines de la
biophysique, de la neurophysiologie, de l’électronique
et de la neuro-anatomie jusqu’aux expériences sur les
dauphins (communication et physiologie) et sur le
caisson d’isolation sensorielle (CIS). Il a développé la
théorie du bio-ordinateur et de ses programmes et
métaprogrammes.

« Tous les êtres humains, tous ceux qui, dans le
monde d’aujourd’hui, parviennent à l’âge adulte, sont

1 Ibid.

~ 568 ~

des bio-ordinateurs programmés. Personne ne peut
échapper à sa nature d’entité programmable. »1

« La différence fondamentale entre nous et un
ordinateur est que nous sommes incapables, dans
l’état actuel de nos connaissances, dans l’état présent
de nos systèmes de croyances, de faire disparaître
complètement un programme inscrit. Le réseau
organique de neurones (wetware) du cerveau n’est
pas conçu comme l’appareillage matériel (hardware)
d’un ordinateur, conçu pour pouvoir ‘‘changer de
mémoire’’ à l’infini. Tout ce qui relève du logiciel
(software) dans le bio-ordinateur humain peut être
facilement changé par la mise en œuvre de nouveaux
logiciels (‘‘prise de conscience’’, acquisition de
connaissances, nourriture par de nouvelles
informations, reprogrammation par l’intelligence). En
revanche, ce qui fait partie du domaine que Lilly
appelait (...) les ‘‘programmes incorporés’’ (in
corpore) : dans le corps, dans le système nerveux,
dans le réseau organique de neurones (wetware),
peut présenter des résistances au changement très
puissantes. Bien sûr, si l’on applique le principe de
Lilly et que l’on métaprogramme que les
‘‘programmes incorporés sont facilement
changeables’’, cette croyance deviendra vraie. (...) Or,
les programmes incorporés ont cette particularité de

1 Cité par Paul Gérôme, op. cit., p. 113.

~ 569 ~

n’être pas faciles à déloger des zones d’inconscience
dans notre psyché. Donc le premier travail consiste à
provoquer une expansion de conscience, laquelle
poussera ladite conscience à voyager jusque dans les
recoins les plus obscurs des limites corporelles, où les
programmes sont enfouis. Certains programmes
existent dans les synapses nerveuses, les connexions
entre les segments nerveux, d’autres sont situés
jusqu’au cœur du programme génétique sur la double
hélice de l’ADN. »1

Ces programmes et métaprogrammes sont nos
systèmes de croyances dont voici la définition qu’en
donne Lilly :

« Système de croyance : chez un sujet donné un
système de croyances est cette panoplie
consciente / inconsciente de croyances de base, de
présomptions, d’axiomes, de préventions, de
préjugés, de modèles, de simulations qui déterminent,
à un moment donné, les décisions, les actions, les
pensées, les sentiments, les motivations et le sens du
réel et du vrai.

L’homme cumule en général plusieurs de ces
systèmes qui se chevauchent ou ne se chevauchent
pas, suscitent ou ne suscitent pas de contradictions, se
confirment ou se contredisent, commandent et se
soumettent l’un à l’autre, sont organisés ou

1 Paul Gérôme, Ibid., pp. 130-131.

~ 570 ~

désorganisés, logiques ou illogiques, mobiles ou
immuables. »1

Les programmes sont donc des systèmes de
croyance relatifs à un consensus de réalité défini par
des référents personnels et sociaux liés à la culture et à
la religion. Les métaprogrammes ou métacroyances
sont des croyances sur les croyances :

« Le concept de « métacroyance » est défini comme
une croyance relative aux croyances elles-mêmes :
elle est « méta » (au-dessus, au niveau supérieur) par
rapport aux croyances. Ainsi, un opérateur de
métacroyance est un concept / une fonction / un
agent qui opère sur des systèmes de croyances, les
transforme, y introduit des changements. L’opérateur
de métacroyance intervient sur un système de
croyances donné depuis l’extérieur. Le rôle conceptuel
primordial de l’opérateur de métacroyance est de
transformer les croyances et par conséquent de
changer les réalités qu’elles produisent. »2

Et la métaprogrammation est :

1 John Lilly, Les simulacres de Dieu, Paris, Ed. Retz, 1980, p. 37,
cité par Paul Gérôme dans Le vaisseau d’isolation sensorielle, p.
143.
2 John Lilly, The Deep Self, New York, Warner Books, 1977, p.
91, cité par Paul Gérôme dans Le vaisseau d’isolation
sensorielle, p. 145.

~ 571 ~

« ... une opération au cours de laquelle un système
central de commandes contrôle des centaines de
milliers de programmes qui fonctionnent
simultanément et parallèlement. »1

Ainsi, cette métaprogrammation est capable de
contrôler et aussi de modifier la conception même de
la réalité du métaprogrammeur et de permettre à
celui-ci de modifier son système de croyances, sa
réalité en agissant directement sur les métacroyances.
Il s’agit là d’un acte créateur de réalité qui est à la base
des conceptions des systèmes de magie, de sorcellerie
et de chamanisme.

Trois conditions sont nécessaires pour permettre de
réaliser cette opération de modification des
métacroyances. Tout d’abord un lieu adéquat comme
le CIS — pour Lilly, le caisson représente le meilleur lieu
possible pour explorer et modifier les univers
intérieurs. Ceci dit, il n’est pas le seul et les mages,
sorciers et chamans de tous temps et tous lieux ont
aussi déterminé leur meilleur lieu possible. En second,
une discipline adaptée à l’objectif fixé c’est-à-dire la
reprogrammation des croyances et métacroyances —
c’est le rôle des rituels et des disciplines spirituelles. Et
en dernier lieu, une série de « logiciels » de référence

1 Ibid., p. 30, cité par Paul Gérôme, p. 144.

~ 572 ~

qui permettent de construire des modèles ou
d’élaborer des simulations alternatives.

Ainsi, le bio-ordinateur est composé de programmes
et de métaprogrammes. Et :

« (...) Le cerveau humain est un immense bio-
ordinateur dont les propriétés ne sont pas toutes
décryptées ni comprises en profondeur. L’interaction
entre les bio-ordinateurs mis en groupe est également
pleine d’inconnues. (...) »1

Lilly définit la structure du bio-ordinateur de la
manière suivante :

Tableau 1 : structure du bio-ordinateur
10 L’inconnu
9 métaprogrammation de l’essence (essence de l’être)
8 métaprogrammation du Soi
7 métaprogrammation de l’ego
6 métaprogrammation générale (sans tenir compte du

système de contrôle)
5 programmation
4 l’action cérébrale
3 le cerveau comme structure physique
2 le corps comme structure physique
1 la réalité extérieure dans tous ses aspects (incluant le

corps et le cerveau)

1 John Lilly, Programming and metaprogramming the human
bio-computer, p. 80, cité par Paul Gérôme, op. cit., p. 125.

~ 573 ~

Pour mieux comprendre ce tableau, voici le sens des
concepts suivants :
— l’ego est caractérisé ici en ce qu’il intègre les

métacroyances sur notre identité, notre valeur,
notre image.
— le soi est vu dans le sens jungien1, l’esprit non
conditionné par le monde extérieur
— l’essence est, d’après Lilly, la plus haute expression
de la loi universelle en tant qu’elle s’applique aux
humains, aux personnes, aux corps et aux bio-
ordinateurs.

Un de ses axes de recherche a été de cartographier
les états de conscience. Se basant sur ses expériences
personnelles dans le caisson d’isolation sensorielle, il a

1 « Le soi est notre totalité psychique, faite de la conscience et
de l’océan infini de l’âme sur lequel elle flotte : Mon âme et ma
conscience, voilà ce qu’est mon soi, dans lequel je suis inclus
comme une île dans les flots, comme une étoile dans le ciel.
Ainsi le soi est infiniment plus vaste que le moi. » C.G. Jung,
L’Homme à la découverte de son âme, Paris, Payot, 1975, p.
335. Le Soi « embrasse non seulement la psyché consciente,
mais aussi la psyché inconsciente et constitue de ce fait pour
ainsi dire une personnalité plus ample que nous sommes aussi.
(...) Le Soi est non seulement le centre mais aussi la
circonférence complète qui embrasse à la fois conscient et
inconscient ; il est le centre de cette totalité comme le Moi est le
centre de la conscience. Le Soi est aussi le but de la vie. » Ma
vie, p. 462.

~ 574 ~

été en mesure, au bout de plusieurs années, de
présenter une première classification, en se basant sur
les données de Gurdjieff, dont voici la description1 :

Tableau 2 : classification des états de conscience

États de Description

Conscience

+ 3 Dharma-Megha (...) Satori classique. Fusion avec

Samadhi l’Esprit universel, unification avec

Dieu (...)

+ 6 Sasmita-nir bija Une source ponctuelle de la

Conscience, de l’Énergie, de la

Lumière et de l’Amour se

manifeste. Point de la Conscience,
voyage hors du corps,

clairaudience, clairdivination,

fusion avec d’autres Êtres dans le

temps. (...)

+12 Sananda Béatitude. (...) Amour et énergie

cosmique. Hyperconscience lucide

du corps, conscience planétaire

(...)

+24 Vicara Stade du Satori de base. (...) Le Soi

s’extériorise dans des activités

agréables que l’on maîtrise.

±48 Vitarka Stade neutre. État de réceptivité et
de restitution de nouvelles idées,

1 John Lilly, Das Zentrum des Zyklons, p. 155 et suivantes.

~ 575 ~

de nouvelles données (...) ;
enseigner et apprendre avec
grande facilité, dans un état ni
positif ni négatif, neutre. (...)
-24 Stade négatif. Douleur, sentiment
de culpabilité, peur. (...)
-12 Sentiment très négatif, Très
grande douleur comme dans un
accès de violente migraine dans
lequel la conscience se rétrécit et
la perception se focalise sur la
douleur. (...) Isolation, paralysie.
- 6 Ressemble à +6, mais dans le
négatif. (...) Peur, douleur,
sentiment de culpabilité extrême,
sentiment d’inutilité.
- 3 Comme dans +3, lorsque l’on est
fondu avec d’autres entités mais ici
elles sont toutes mauvaises,
négatives et l’on est soi-même
mauvais et sans utilité. La
quintessence du mal, l’enfer le plus
profond que l’on puisse imaginer ;
cela peut être un sentiment
intense qui dure éternellement
alors qu’en temps terrestre il ne
dure que quelques minutes.
Aucune chance d’en réchapper.
On y est pour toujours.

~ 576 ~

Voici comment Lilly décrit le Point 0, son point de
référence1 :

« Dans ma première expérience de CIS avec le LSD,
le premier espace (Raum) dans lequel que je me
trouvais était totalement noir, totalement silencieux,
un espace vide sans corps. L’obscurité s’étendait dans
toutes les directions jusqu’à l’infini. Le silence
s’étendait de tous côtés à l’infini et je restais centré
dans l’unique point de la conscience et de la
perception. Il n’y avait absolument rien dans l’Univers
en dehors de mon centre, moi, dans l’obscurité et le
silence. J’ai appelé cela le “point zéro absolu”. Celui-
ci devint un point de référence vers lequel je pourrai
retourner lorsque cela deviendrait chaotique ou trop
agité dans d’autres espaces. C’était le cœur central
de moi-même, mon essence dans un univers sans
étoiles, sans galaxies, sans entités, sans êtres
humains, sans d’autres intelligences. C’était mon lieu
de sécurité. »

John Lilly a établi une classification personnelle des
stades 3 à 48 d’après ses expériences des états non
ordinaires de conscience. Il définit le stade 48 de la
façon suivante :

« Stade de la conscience dans lequel le bio-
ordinateur fonctionne de manière tout à fait

1 Op. cit., p. 56.

~ 577 ~

rationnelle sans émotions positives ni négatives. Les
émotions se trouvent à un état neutre dans lequel
toutefois, l’énergie peut être élevée. Dans cet état de
conscience, on enregistre des données, des
programmes et des métaprogrammes. On enregistre
de nouveaux métaprogrammes ou de nouvelles idées
dans la mémoire du bio-ordinateur. On peut aussi se
trouver en 48 lorsque l’on transmet de nouvelles
idées à d’autres personnes. Une des manières de
vérifier que l’on se trouve en 48 est d’observer son
interaction avec un autre individu. Quand il n’y a pas
d’émotions — ni positive ni négative — on est en 48.

Parfois il est difficile de savoir si les composantes du
bio-ordinateur qui se trouvent en dehors de sa propre
perception sont aussi au stade 48. »1

D’après Lilly, différentes instances du bio-ordinateur
peuvent être à des stades différents au même
moment. Ainsi

« ... un centre de contrôle peut être à -12, un autre
à -24 et de nouveau un autre à 48. »2

Pour être sûr d’être au stade 48, il faut donc
s’assurer que les différentes composantes de son bio-
ordinateur sont toutes au même stade. D’après Lilly,
être sûr d’être dans un stade bien défini, consiste à

1 Op. cit., p. 167-168.
2 Op. cit., p. 168.

~ 578 ~

être dans une forme physique et psychique d’excellent
niveau. Si l’on ne sait pas ce que c’est par expérience
personnelle, il est difficile de se représenter cette
condition et par conséquent, il est également difficile
de déterminer si l’on est vraiment au stade désiré. Pour
déterminer cela, Lilly suggère de suivre un
entraînement physique, sous forme d’exercices de
yoga, par exemple, ou une bonne course
d’endurance. Les critères nécessaires pour être au
stade 48 sont : unité de soi, silence intérieur,
concentration.

Pour aller au stade +24 et au-delà, il convient
d’effectuer des exercices physiques, bien entendu,
mais aussi spirituels — qui peuvent être extraits de
différentes traditions et sources, le principal étant
qu’une attitude psychique adéquate soit appliquée.

Pour revenir à la structure du bio-ordinateur (voir
tableau 1 ci-dessus) — qui se structure en 10 niveaux :
de l’inconnu à la réalité qui nous entoure — le niveau
10, l’inconnu, représente ce qui se trouve au-delà de
ce qui est connu, de toutes les représentations et de
toutes les idées. Cependant l’inconnu existe en nous, à
l’extérieur de nous et entre toutes les idées et les
représentations. Cette part d’inconnu en nous et en
dehors de nous est énorme et sa compréhension,
impossible dans les limites du consensus de réalité que
notre culture nous accorde, peut être transcendée par
une expansion de la conscience.

~ 579 ~

La métaprogrammation de l’essence est celle qui
mène au plus degré de conscience positive et au
Satori. D’après Lilly, ce niveau de la
métaprogrammation peut être peu présent sinon
inexistant chez certains individus. Autrement dit,
l’expérience du Satori leur est quasi inaccessible. Il ne
serait pas possible d’atteindre le niveau de la
métaprogrammation de l’essence sans avoir atteint la
métaprogrammation du Soi. Et c’est seulement à partir
de là que des efforts peuvent être faits pour atteindre
le niveau supérieur. Cette métaprogrammation doit
être effectuée en pleine conscience. Au niveau 9 de la
structure du bio-ordinateur, l’essence dans les niveaux
+24, +12, +6, +3 se retrouve à des degrés divers : de
faible à +24 à 99% à +3.

La métaprogrammation du Soi — et du niveau 48 —
correspond à l’état dans lequel Lilly se trouve lorsqu’il
écrit. C’est un état de transe caractérisée par une forte
concentration du mental, focalisé sur les informations
qui sont traitées pour être mises à plat dans l’écriture.
C’est cet état où les idées et les liens entre les idées
s’enchaînent de façon quasi automatique, comme
dirigées par un écrivain intérieur qui écrirait au travers
du corps d’un autre. C’est un état neutre, où l’on peut
être l’observateur, le témoin de processus internes où
les données se réorganisent, se mêlent en de
nouvelles connexions originales et qui produisent de
nouvelles données, de nouvelles informations. Il arrive

~ 580 ~

ainsi lors de la relecture de ses écrits, que l’on se dise
avec étonnement : « Est-ce moi qui ait écrit cela ? ».

La métaprogrammation de l’ego contient les
niveaux négatifs -24, -12, -6, -3. C’est la structure 7,
celle où notre représentation de nous-même nous
suggérerait l’idée que nous sommes des êtres
puissants, indépendants et que nous ne sommes reliés
à aucune forme de Sacré ; le monde est mécanique, il
n’y a pas de vie après la mort, la vie est due au hasard.
Lilly rapporte que la croyance en l’ego sans la
croyance en l’essence mène à des émotions négatives,
à l’autodestruction, aux phobies... D’après son
expérience du niveau -3, l’angoisse, la panique, la
douleur serait si forte que la force pour en sortir ne
serait plus disponible, comme si des sables mouvants
entraînaient, aspiraient, vers le fond, mus par un
maelström de sentiments négatifs ; alors que +3 donne
de la force, de la puissance, de la confiance en soi et
propulse vers des niveaux supérieurs dans une joie et
une extase qui peut atteindre l’extase mystique. « La
peur de la mort est en -3, la joie de la vie éternelle en
+3. »1 Ces niveaux négatifs n’ont pas de localisation
précise, ils sont plutôt imaginés, projetés, de manière
négative dans les niveaux correspondants des espaces
positifs.

1 Op. cit., p. 175.

~ 581 ~

Lilly décrit le niveau +24 comme étant celui de
l’action pratique et +48, celui de l’apprentissage, de
l’intégration et du traitement des informations. +24 est
le niveau où l’action se déroule d’elle-même comme
un programme informatique grâce au parfait contrôle
et à la connaissance de la discipline que l’on maîtrise :
un sportif de haut niveau pendant une compétition,
un artisan sur son métier, un peintre en pleine
création... Le niveau +48 correspond donc à la
programmation, et +24 au déroulement du
programme. -24 serait le niveau où l’on accompli son
action dans une ambiance de contrainte, dans un état
d’esprit négatif.

À +12 correspond un état de réceptivité où
l’harmonie entre les choses et leur magnificence —
êtres, animaux, plantes, minéraux et objets
manufacturés — apparaît, un état où la sensation de
sentir l’énergie cosmique traversant le corps et un
bien-être total, physique et psychique, se répand ; être
relié aux autres et aux objets, sentir la joie intérieure ;
une sensation proche de celle ressentie sous l’emprise
du LSD, une sensation de type extatique : « Pas de
contradiction ; en complète harmonie avec l’Univers.
Précédemment, je n’avais jamais su ce que cela
représentait d’être en totale harmonie avec tout —

~ 582 ~

avec le Cosmos et la Nature, avec tous les êtres
humains, absolument sur la même longueur d’onde. »1

+6 est un niveau où la conscience se regroupe
autour d’un point. À +6, le langage n’est plus, ni la
quantification, ni la logique, ni la réalité ordinaire. C’est
à +6 que Lilly rencontre ses deux guides, deux points
de conscience et d’amour, lors d’une expérience de
coma suite à un empoisonnement. Voici ce qu’il
rapporte à propos de +6 :

« ... lorsqu’on est devenu un point, on peut se
mouvoir dans le corps, on peut aller dans la tête ou le
corps d’autres personnes ou se promener sur la
planète, dans d’autres lieux de la galaxie, dans le
Cosmos. Tant que l’on est une identité unique, que
l’on se rassemble en un seul point, on reste au niveau
+6 quel que soit la distance ou la profondeur dans
laquelle on se meut. Lorsque l’on est un point
identifiable qui fonctionne sur lui-même, l’on reste au
niveau +6, même si l’on est programmé par d’autres.
J’ai ressenti cela comme étant un moyen très
commode pour différencier +12 de +6 et +6 de +3.
À +12, le corps est encore présent, pas en +6. À +6,
on est encore plus ou moins soi-même ; à +3, on
perd ce Soi et l’on devient essence (...).

Les anciens textes psychologiques ont donné des
indications pour atteindre le niveau +6 en conseillant

1 Op. cit., p. 189.

~ 583 ~

de créer un corps astral avec un cordon de liaison1,
de manière à rester en contact avec le corps physique.
Ceci est un lest dont on peut se passer. Cela consiste
à utiliser une partie de la machinerie à calculer pour
la gaspiller en une opération de sécurité narcissique.
Le moyen le plus efficace de voyager dans ce plan est
le point sans la construction artificielle de ce corps
inutile.

La même remarque vaut pour les êtres que l’on
rencontre en +6. Il n’y a aucune utilité pour les
revêtir d’un corps d’ange ou d’autres types de
projections humaines. Cela pourrait consommer une
partie de la faculté de calcul nécessaire pour les
tâches à remplir en +6. »2

À ce propos, voici ce qu’en pense Florence
Ghibellini :

1 Mircéa Éliade précise : « L’image de la corde est parfois utilisée
afin de suggérer les rapports entre l’esprit (noús) et l’âme
(psyché). Dans son opuscule Sur le Daimon de Socrate,
Plutarque affirme que la partie "plongée dans le corps est
appelée psyché, mais la partie non corrompue est nommée
noús". Et, continue Plutarque, le noús "se balance au-dessus de
la tête et touche l’extrémité du crâne : on peut le comparer à
une corde qu’on doit tenir et avec laquelle on doit diriger la
partie inférieure de l’esprit, aussi longtemps que celle-ci se
montre obéissante et n’est pas subjuguée par les appétits de la
chair." », Méphistophélès et l’Androgyne, pp. 229-230.
2 John Lilly, Das Zentrum des Zyklons, p. 201

~ 584 ~

« Finalement, le corps onirique n’est qu’une affaire
de croyance, ou d’image que nous avons de notre
propre corps. Si je le crois dur, il est dur, si je le crois
mou, il est mou. Je n’ai pas encore essayé de me faire
pousser un troisième bras, mais j’ai dans l’idée que
cela doit être très facile visuellement, le problème
étant de rendre ce troisième bras fonctionnel, dans la
mesure où nous n’avons pas de troisième bras dans
notre schéma corporel habituel. »1

Plus loin, Lilly décrit encore une autre caractéristique
de ce niveau +6, après avoir rapporté la difficulté à
décrire avec les mots le vécu de ce qui se passe « là-
bas ». Il a développé une technique lui permettant de
se rendre facilement en +6 qui consiste à se dire : « Je
ne suis pas le bio-ordinateur ; je ne suis pas le
programmeur ; je ne suis pas le programme ; je ne suis
pas la programmation ; je ne suis pas ce qui est
programmé. » Ceci est la phrase-code qui lui permet
de se rendre en +6 rapidement. Pour revenir à la
caractéristique que j’évoquais plus haut, il s’agit de la
faculté d’être en même temps dans son corps et en
dehors de son corps. C’est une caractéristique que l’on
retrouve souvent dans le chamanisme, lorsque le
chaman est en transe et qu’il danse, bat le tambour et
raconte son périple dans le monde des esprits tout en
étant en même temps dans le monde invisible au

1 Florence Ghibellini, op. cit., p. 43.

~ 585 ~

commun des mortels en train d’effectuer la tâche
rituelle. Ainsi Lilly est-il capable d’effectuer ce
dédoublement : une partie de lui-même en +6 et une
autre partie de lui-même en +24 et +12. Lors d’un
séminaire au Chili en 1970, Lilly, faisant un exercice, se
retrouve brusquement en +6 tout en restant dans son
corps par ailleurs :

« ... Pendant que je faisais tout cela, je suis monté
brusquement. Je me suis retrouvé au-dessus de mon
corps. J’observais comment le métaprogrammeur du
Soi maintenait le corps en mouvement et compris que
je n’avais absolument rien à faire, que tout cela était
un superbe magnifique programme automatique. Je
pouvais rester là-haut et observer tout le
programme. »1

D’après ses observations, Lilly en déduit que
l’essence de l’être, au niveau +6, est capable de se
connecter à tous les métaprogrammes des autres
niveaux, même à ceux des autres niveaux de réalités et
cela, simultanément. Ainsi l’essence de l’être peut-elle
programmer les métaprogrammes et ensuite les laisser
fonctionner seuls en toute confiance pour s’en aller
explorer d’autres dimensions de l’univers. La définition
que donne Lilly de l’essence de l’être est la suivante :
c’est un tout composé de conscience, de chaleur
(humaine), d’amour et de mémoire.

1 Op. cit., p. 205.

~ 586 ~

L’étape suivante est le passage en +3 que Lilly
qualifie d’identique au Samadhi-Satori. La différence
essentielle entre +6 et +3 consiste en ce que en +3, la
fusion des essences de l’être se concrétise : on se fond
avec toutes les autres essences de l’Univers en une
communion-fusion.

Lors du retour en des niveaux inférieurs — pour
retrouver son corps physique —, l’essence de l’être se
trouve face à des millions de possibilités, de choix
d’expériences dans des univers multiples et
multidimensionnels. Lilly décrit comment, au retour
dans son corps, il conçoit ce corps comme un véhicule
qui pourrait être utilisé par n’importe quelle essence
du niveau +3, comme si le véhicule était disponible
avec le mode d’emploi dans la boîte à gant et le
moteur qui tourne. Car toutes les essences sont
identiques, anonymes et pareillement capables et
toutes en relation les unes avec les autres.

Lilly considère que ces espaces qu’il visite sont de
double nature, ils sont à la fois intérieur et extérieur. Il
déduit aussi la possibilité que nous ne soyons pas
forcément lié à notre cerveau, à notre corps physique
et que nous pouvons ainsi le quitter, voyager dans
d’autres réalités.

« Mon programme est que je suis un agent
indépendant dans cette sphère particulière et que je
ne suis pas relié à un cerveau précis bien que si je
parle à quelqu’un j’utilise ce système de croyance. (...)

~ 587 ~

La question est d’avoir l’esprit libre de manière à
pouvoir vivre différents scénarios et tester différentes
idées. C’est ainsi que j’utilise le caisson. Le test de
scénarios temporaires — un système de croyance
temporaire (...). »1

La terminologie de Lilly est dérivée de
l’informatique ; il considère en effet le système
corps / esprit humain comme un ensemble de
programmes et de métaprogrammes qui lui
permettent de fonctionner. La plupart de ceux-ci sont
inconscients et sont vitaux pour notre survie et
s’étagent du niveau de la cellule, des différents
organes jusqu’aux nombreux éléments de notre
comportement et de ce qui fait notre identité. La
pratique du CIS lui a permis de mettre en évidence,
pour lui-même d’abord et plus généralement pour les
autres ensuite, ces programmes et métaprogrammes
et lui a aussi montré qu’il était possible d’influer sur ces
programmes, de les modifier, d’en supprimer, d’en
rajouter... Il lui a ainsi été possible de comprendre et de
mettre en pratique une reprogrammation qui lui a
permis de transcender ses problèmes psychologiques
et relationnels et, finalement, de se considérer comme
n’étant plus identifié à son corps, mais simplement le
conducteur d’un véhicule. Certains y verront une
forme de psychose, de schizophrénie. Pourtant Lilly ne

1 J. Lilly & E.J. Gold, Tanks for the memories, p. 47.

~ 588 ~

souffre pas, il est en harmonie avec lui-même, a résolu
ses conflits intérieurs, dépassé ses phobies et s’est
finalement tourné vers les autres. Durant toutes ces
années de recherches, Lilly a toujours mené son
activité avec l’attitude du scientifique, il a longuement
expérimenté et vérifié ses hypothèses. Il reste
certainement un des pionniers de la recherche dans le
domaine des états non ordinaire de conscience et son
modèle du bio-ordinateur1 a le mérite d’être
suffisamment clair et explicite pour être facilement
compris et assimilé.

En guise de conclusion de cette partie dévolue au
CIS, j’aimerais porter l’attention sur un développement
de E.J. Gold lors d’un séminaire destiné à de futurs
utilisateurs du CIS. Pour Gold, le CIS est une porte
dimensionnelle :

« Si vous pensez au caisson en tant qu’espace, que
vous entrez dans cet espace du caisson et que vous
explorez cet espace, vous êtes dans le caisson et c’est
un cul de sac. C’est comme de passer une porte,
d’ouvrir une porte et de rester sur le seuil , vous allez
rester coincé dans l’espace du caisson. (...) Le caisson
est essentiellement un passage. N’y restez pas. (...)
Vous pouvez considérer le caisson comme un point

1 Lilly n’a jamais assimilé l’être humain a un calculateur
électronique. Son modèle du bio-ordinateur est une
métaphore.

~ 589 ~

d’entrée et de sortie dans et hors de l’univers
matériel. Vous pouvez le considérer comme un pont
d’entrée et de sortie dans votre moi profond, vos états
de conscience intérieurs. »1

Le travail de John Lilly nous donne un outil — le CIS
— et une méthode pour développer les états non
ordinaires de conscience et s’en servir. Lilly a le mérite
d’être méthodique, précis et n’hésite pas à nous
donner des points de référence issus du yoga. Le
travail de John Lilly a eu un immense succès dans
toute la zone occidentale (Europe et États-Unis) et il se
vend encore aujourd’hui beaucoup de CIS en
Amérique du Nord. En Europe, le CIS a été à la mode
dans les années 1980 puis a disparu à cause de la
difficulté de mise en œuvre : c’est en effet une
structure lourde qui demande un emplacement fixe
avec une solution saline pour le bain de sustentation
du corps, des systèmes de filtres et une installation
sanitaire adjacente. De plus son prix est élevé. Il n’est
donc pas étonnant que le CIS ne soit plus très présent
en Europe.

Des procédés de substitution existent : la technique
du Ganzfeld — qui est aussi une technique de
déprivation sensorielle —, peu onéreuse et tout aussi
efficace à long terme. Encore faut-il avoir la patience

1 J. Lilly & E.J. Gold, op.cit., pp. 98-100.

~ 590 ~

de s’entraîner à reconnaître les programmes et
métaprogrammes et à reprogrammer. Mais cela est
vrai pour toutes les disciplines dans tous les domaines.

En tous cas, et en conclusion de cette section, les
recherches de John Lilly montrent également que :

— les différents états de conscience peuvent être
cartographiés ;

— que intérieur (psyché) et extérieur (géographie de
l’invisible) se confondent.

John Lilly a travaillé relativement seul, mais d’autres
chercheurs, tel Robert Monroe, se sont octroyés l’aide
d’une véritable équipe de spécialistes et ce sont ces
résultats que je vais exposer maintenant.

Robert Monroe et la cartographie de
l’invisible

J’ai déjà évoqué les travaux de Robert Monroe dans
le chapitre concernant les OBE (cf. supra page 122) et
j’ai décrit sa méthode d’induction d’ENOCs :
l’HemiSync.

Ses travaux, qui ont été menés pendant de
nombreuses années avec l’aide de chercheurs connus
et moins connus et un nombre important de sujets —
visiteurs et participants à des séminaires —, ont permis
de mettre à jour une somme énorme d’informations

~ 591 ~

sur les ENOCs. Beaucoup de ces informations ne sont
accessibles qu’aux membres-chercheurs attitrés de
l’Institut Monroe — dont je ne fais pas partie — et il
n’est donc pas simple d’avoir une idée nette de
l’ampleur des découvertes faites par l’équipe Monroe.

Cependant, les publications grand public, les
informations présentes sur leur site Internet, les
comptes rendus de visiteurs et chercheurs qui ont
publié, sont assez riches pour se faire une idée de
l’ampleur des connaissance acquises.

Dans cette partie, c’est donc la classification des
ENOCs selon Monroe qui nous intéresse.

Robert Monroe a balisé de manière claire le chemin
vers les profondeurs du psychisme en établissant des
repères, des sortes de balises ; il a nommé ces balises
focus. Chaque focus, dont la numérotation est
arbitraire, représente un état de conscience déterminé
et bien défini.

« Les focus, qui constituent un étalonnage
numérique arbitraire des différents états de
conscience (...) désignent également des zones
“géographiques” de l’invisible. Il serait d’ailleurs plus
exact de parler de niveaux de fréquence
énergétique. »1

1 Jérôme Bourgine, Le voyage astral, note p. 83.

~ 592 ~

Ces focus, ces niveaux de fréquence énergétique,
sont en fait en relation directe avec des
fonctionnements spécifiques du cerveau. Comme déjà
explicité, Monroe utilise la technique HemiSync (qui
sont des fréquences audio simulant des fréquences
interprétables par le cerveau, les ondes cérébrales)
pour produire des patterns cérébraux précis qui vont
influencer le fonctionnement du cerveau. Un grand
nombre de ces patterns ne jouent que sur l’humeur et
n’induisent aucun ENOC. Mais d’autres de ces patterns
induisent des ENOCs dont le plus important pour
Monroe (en fait celui pour lequel toute sa recherche a
été engagée), est la sortie hors du corps.

Cela ne veut pas dire qu’il suffise de se passer une
cassette audio de 30 minutes de sons HemiSync pour
avoir une OBE réussie. Cela serait trop simple et
personne n’avance cela. Il s’agit en fait d’un
apprentissage accéléré à l’aide d’une « béquille »
sonore. Avec cette « béquille », le cerveau peut
beaucoup plus facilement atteindre le pattern
responsable de l’ENOC OBE. Mais au lieu d’y passer la
moitié de sa vie, on peut y arriver beaucoup plus vite,
en tous cas, pour ceux qui n’ont pas d’OBE spontanée.

Que sont donc ces focus, à quoi correspondent-ils ?
En voici la description1 :

1 Robert Monroe, Ultimate journey, pp. 248 et suivantes.

~ 593 ~

• Focus 3 : synchronisation des hémisphères
cérébraux.

• Focus 10 : esprit éveillé, corps endormi. Voici ce
qu’en dit Monroe :

« Le nombre 10 n’avait pas de signification
particulière et je ne sais plus très bien d’où il provient.
Nous voulions également être sûrs de ne pas
confondre cet état avec d’autres formes de
conscience. C’est pourquoi il devint simplement DIX.
Nous étions parfaitement capables d’identifier cet état
et d’y revenir sans cesse avec nos sujets. Facilement
définissable, focus 10 est un état dans lequel l’esprit
est éveillé et le corps endormi. Toutes les réactions
physiologiques sont celles d’un état de sommeil léger
ou profond. Cependant, les ondes cérébrales sont
différentes. L’électroencéphalogramme montre un
mélange d’ondes habituellement associées au
sommeil léger ou profond et de signaux bêta
superposés (état de veille). »1

• Focus 12 : état de conscience étendu, contact avec
la réalité non matérielle. Après focus 10, il y a une
barrière de peur qui doit être franchie. C’est la peur
de l’inconnu et du changement et son dépassement
demande un entraînement assez minutieux qui
consiste en petites étapes de reconnaissance à partir

1 Robert Monroe, op. cit., pp. 34-35.

~ 594 ~

de focus 10 pour se familiariser avec le « terrain ». En
se familiarisant ainsi avec la topographie autour et
au-delà de focus 10, la barrière de la peur finit par se
dissoudre et on peut atteindre la prochaine balise
qui est focus 12.

« Lorsque la barrière de peur est franchie, l’un des
dons les plus importants de l’espèce humaine entre
en jeu : la curiosité. Le participant est alors libre
d’agir à sa guise. Il accepte son autonomie et la
responsabilité de ses actes. L’individu, de son propre
consentement et sans que rien ne lui soit suggéré,
mais par l’expérience directe, commence à savoir,
plutôt que croire, qu’il survit vraiment à la mort
physique. (...) Inévitablement, les frontières entre ce
qui précède et d’autres systèmes de réalité-énergie
sont franchies. Il en résulte, nous rapporte-t-on, des
réunions avec des amis ou parents “décédés”, ainsi
que des confrontations avec d’autres formes d’énergie
intelligente qui, en général, ne sont ni reconnues ni
admises par les grands courants de l’opinion
américaine. »1

• Focus 15 : état de non-temps, conscience hors du
temps. Voici le témoignage d’un sujet de Monroe :

« Pour moi, l’expérience la plus sensationnelle fut
celle des vibrations croissantes en focus 15 : je sentais

1 Ibid., p. 50

~ 595 ~

que l’énergie montait lentement d’un côté de mon
corps et redescendait de l’autre, puis de plus en plus
vite. J’avais l’impression de devenir une spirale, puis
un point, et c’est bien ce qui se passait, et comme un
bloc compact, je volais de plus en plus haut... Mais
ensuite, je pensais : je ne peux pas aller plus loin,
plus haut, et en un éclair, j’“entends” : Eh, tu te
limites toi-même ! O.K., alors je me maîtrisais,
j’acceptais, et me voilà parti, je me sentis propulsé
comme un spoutnik dans l’univers, parmi les étoiles,
une autre entité intégrée dans la totalité. Sentir cette
harmonie en soi-même était une joie et un bonheur
indescriptibles ! »1

Focus 15 : c’est un état où l’attention se tourne
encore plus activement vers les perceptions internes.
Les perceptions issues de l’univers matériel habituel
— c’est-à-dire issues des sens du corps physique —
s’éloigne un peu plus encore qu’en focus 12. La
perception du temps change : focus 15 est perçu
comme un état de « non-temps ».

• Focus 21 : ce stade est équivalent au sommeil
profond, à l’état Delta [état de conscience dans
lequel l’EEG mesure une dominante d’ondes
cérébrales Delta]. Cependant, en focus 21, le sujet
est parfaitement conscient et actif. Focus 21 est le
carrefour de l’espace-temps où il est possible de

1 Ibid., pp. 51-52

~ 596 ~

contacter d’autres systèmes énergétiques. C’est une
balise-frontière et les stades suivants concernent
l’au-delà de la mort et l’on passe en quelque sorte
dans un autre continuum...

• Focus 22 : dans cet état, l’humain encore vivant n’a
qu’une conscience limitée. Ici l’on trouve ceux qui
souffrent de délire, de dépendance chimique ou
d’alcoolisme, ou de démence. Focus 22 concerne
aussi les personnes anesthésiées et les comateux.
Les expériences vécues à ce stade sont remémorées
en tant que rêves ou hallucinations.

• Focus 23 : c’est un niveau habité par ceux qui ont
récemment quitté l’existence physique mais qui
n’ont pas pu le reconnaître ou l’accepter et qui sont
donc incapables de se libérer de l’attirance de la vie
terrestre. Toutes les périodes temporelles sont
concernées.

• Focus 24-26 : recouvre les territoires du système de
croyances occupés par des humains décorporés de
toutes périodes et lieux qui ont accepté divers
concepts. Cela inclut des concepts religieux ou
philosophiques qui postulent certaines formes de vie
post-mortem.

• Focus 27 : le lieu nommé Centre de Réception ou
Parc. C’est un lieu artificiel créé par des esprits
humains, un endroit pour soulager les traumatismes
ou les chocs subis par le passage de la vie terrestre à

~ 597 ~

la vie post-mortem. Cela ressemble à différents lieux
terrestres de manière à être accepté par l’énorme
variété de nouveaux arrivants.
• Focus 28 : au-delà de l’espace et du temps, mais
aussi au-delà de la pensée humaine. Être à ce niveau
ou au-delà limite le retour dans un corps physique
humain.

« Le focus 28 est le dernier “point-état de
conscience” appartenant à ce que Monroe dénomme
“the bridge” [le pont], la zone de transition entre
monde physique et monde non-physique. La
graduation se poursuit au-delà jusqu’en focus 49 et
s’étage en trois sphères de sept focus chacune,
constituant le “advanced non physical”, le monde non
physique avancé. »1

Jusqu’à focus 22, tout semble être rationnel. À partir
de focus 23 apparaissent des concepts incluant une
survie des morts et une visite en sortie hors du corps
des lieux où « vivent » ces morts. Comment Monroe a-t-
il développé une telle vision du monde ?

C’est son expérience et celles de ses sujets qui ont
permis de collecter ce matériel en relation avec la
survie. Une chose est certaine : pour Monroe, il ne fait

1 Jérôme Bourgine, op. cit., note p. 170.

~ 598 ~

aucun doute que l’invisible soit peuplé d’esprits de
personnes décédées et également d’esprits qui n’ont
jamais été incarnés.

Voici comment Robert Monroe classe les différents
lieux de l’invisible avec les « habitants » y afférents :

* Lieu I :

« Le Lieu I est le plus crédible. Il concerne des
personnes et des endroits qui existent dans le monde
matériel connu au moment de l’expérience. C’est le
monde que nous présentent nos sens physiques et
dont la majorité d’entre nous sont convaincus de
l’existence. Les visites au Lieu I, lorsque vous êtes
dans votre Corps Second [corps astral, corps subtil ou
double], ne devraient pas comprendre d’êtres,
d’événements ou d’endroits étranges. Non familiers
peut-être, mais ni étranges, ni inconnus. Dans le
dernier cas, la perception risque d’être déformée. »1

* Lieu II :

« Seule une partie des visites dans le Lieu II via le
Corps Second ont fourni des données vérifiables, car
ces incursions ne se prêtent pas aisément à
confirmation. Aussi, la majeure partie du matériau
relatif au Lieu II relève d’une extrapolation prudente.
Quoi qu’il en soit, plusieurs centaines d’expériences

1 Robert Monroe, Le voyage hors du corps, p. 67.

~ 599 ~

[année 1971] dans cette région particulière ont
permis de dégager des convergences précises. (...).

Postulat : le Lieu II est un environnement non
matériel possédant des lois du mouvement et de
matière très différents de celles en vigueur dans le
monde physique. Il s’agit d’une immensité dont les
limites sont inconnues (en ce qui me concerne en tous
cas) et dont la profondeur et les dimensions sont
incompréhensibles pour un esprit fini, conscient. Cette
immensité englobe tous les aspects que nous
attribuons au paradis et à l’enfer (cf. chapitre 8), mais
ceux-ci ne représentent qu’une partie du Lieu II. Ce
dernier est habité, si tel est le mot, par des entités
possédant des degrés d’intelligence divers, avec
lesquels la communication est possible. (...) le Lieu II
est un état d’être dans lequel ce que nous nommons
pensée est la source de l’existence. C’est la force
créative vitale qui produit de l’énergie, donne forme à
la ‘‘matière’’ et assure les canaux de perception et de
communication. (...) L’aspect intéressant de ce (ou de
ces) monde(s) de pensée du Lieu II est que l’on perçoit
ce qui semble être de la matière solide aussi bien que
des objets propres au monde physique. »1

1 Ibid., pp. 81-83.

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