ספר השיחות
120 Enseignements et Perles
de
AVRAHAM ZAGDOUN HAΪM
של אברהם זגדון חיים
120 Conversations et Perles
Des conversations qui ont eu lieu à la Yéshiva ou en
chemin, au beau milieu de la vie quotidienne, en
rendez-vous ou au téléphone.
Ce sont de courts enseignements, un aperçu
d’un grand savoir que nous avons eu le privilège
d’entendre de notre Maître et notre Rav :
Avraham Zagdoun Haïm
Rédaction
Eliran Malka et Hagaï ‘Harif
Que le mérite de cet ouvrage puisse accorder
la bénédiction et la réussite à
Eliran Malka et sa famille
Qui est à l'initiative de ce livre et qui l'a rédigé en hébreu
Puisse Dieu l'assister dans toutes ses entreprises
Que le mérite de cet ouvrage prodigue joie,
bénédiction et bonheur à
La Famille Dahan
Qui a généreusement contribué à l'édition de cet ouvrage
Que le mérite de cet ouvrage prodigue joie,
bénédictions et bonheur
A toute la famille Levy :
Qui a généreusement contribué à l'édition de cet ouvrage
Table des matières
Prologue 9
Préface de l’auteur 13
Préface du traducteur 17
Introduction 21
Les 120 conversations 25
Conclusion 301
Présentation d’Avraham Zagdoun 306
Table des matières des 120 conversations 317
Prologue | 9
Prologue
Il était une fois un cœur immense, si grand qu’il
remplissait le monde entier… Ce cœur était très spécial :
chaque petit morceau de cœur contenait le cœur
entièrement ! Ce cœur ne pouvait pas battre dans la
solitude… Alors il décida de battre dans le cœur de tous
les enfants d’Israël… Et le cœur se brisa en 600 000 petits
morceaux qui vinrent donner vie à chaque enfant chéri…
Pour entendre le grand cœur battre, il faut se mettre à
l’écoute des battements de son propre cœur… C’est alors
qu’on entend, dans une merveilleuse mélodie, tous les
autres petits cœurs battre à l’unisson, en harmonie avec les
battements du grand cœur de l’origine…
Le livre des conversations rapporte de nombreux
enseignements dispensés par Avraham Haïm Zagdoun et
recueillis par l’un de ses élèves, Eliran Malka. Des nombreux
sujets abordés, sous forme de conversations relativement
courtes, une idée lumineuse s’en dégage : Ahavat Israël,
l’amour de chaque juif… Nos maîtres de mémoire bénie
nous enseignent que l’âme d’Israël est indestructible, elle
demeure une véritable énigme pour l’humanité… Après
tant de souffrances, comment un petit peuple, envers et
10 | LIVRE DES CONVERSATIONS
contre tout, s’accrocha désespérément à ses traditions et à
sa foi, au cœur des tempêtes de l’Histoire ? Il est possible
d’approcher ce secret : les jours où nous sortons le Sefer
Torah, les fidèles se rapprochent tous du rouleau sacré et
viennent l’embrasser… Cela signifie que la puissance de la
Torah dont les messages véhiculés par nos saints maîtres,
dans toutes les générations, surent nous guider, se dévoile
et s’exprime essentiellement à travers un peuple uni, dans
l’amour et l’affection, autour de notre Torah…
C’est de cette manière que nos ancêtres la reçurent, il y
a plus de 3300 ans : un seul peuple, un seul cœur… Et c’est
aussi de cette manière qu’elle se dévoilera dans un proche
avenir, en laissant transparaître sa lumière, cachée jusqu’à
présent, irrésistiblement attirante : dans le cœur d’un
peuple empli de paix et d’amour les uns envers les autres.
Le Machia’h est prêt : à nous de faire taire nos différences,
pour étendre, sous ses pas, un tapis brodé d’amour et de
paix.
Peuple d’Israël ! Ecoutez votre cœur palpiter, partez
donc fusionner avec l’essence de votre être, rappelez-vous
de l’amour infini que D.ieu vous témoigne en vous offrant
le plus beau des cadeaux : être vous-mêmes ! Remerciez,
chantez, consolez, réparez, et vivez !
Afin de suivre le chemin qui mène à votre cœur,
Avraham Zagdoun vous prend par la main : n’ayez crainte!
Il vous emmène sur des routes que vous n’auriez jamais
pensé emprunter ! Il vous apprend à quitter la routine, pour
Prologue | 11
penser autrement, sortir des sentiers battus pour découvrir
de nouveaux coloris, des nuances inédites, qui se dégagent
de notre plus beau diamant : notre sainte Torah qui n’est
autre que notre cœur… Car le cœur d’un juif contient tout
l’univers, et l’amour et l’union au sein de notre peuple,
c’est cela le but ultime de la Création du monde ! Alors, en
route ? Que la lumière de D.ieu guide vos pas partout où
vous irez, et que l’amour embrase votre cœur…
Le Perroquet… (rapportée brièvement dans la conversation 18)
Un soir, Avraham Zagdoun fut sollicité pour dispenser
un cours de Torah chez un ami. Alors qu’il était en train de
développer une notion fondamentale, en relation avec la
nature profonde dissimulée au sein de chaque créature (une
notion qu’il nomme ‘Atsmo, le Soi, et dont une tentative
de définition sera élaborée en conclusion de cet ouvrage),
toute l’assistance entendit de grands cris, qui, répétés,
devinrent de plus en plus perceptibles. Ils émanaient d’un
perroquet dont la cage se trouvait à proximité du lieu où
Avraham Zagdoun était en train de dispenser son cours. De
façon absolument incroyable, l’animal, qui, aux dires de ses
propriétaires, n’émettait généralement que quelques sons
très limités (en dépit du fait qu’un perroquet soit cependant
en mesure d’étendre quelque peu son vocabulaire), se mit
à prononcer une phrase entière et intelligible, largement
comprise par l’auditoire qui parlait uniquement hébreu :
« Avraham ! Ohavim otkha ! Avraham ! Ohavim otkha ! »,
ce qui signifie en français : « Avraham ! On t’aime !
Avraham ! On t’aime ! ». Etant donné que Monsieur
12 | LIVRE DES CONVERSATIONS
Zagdoun a l’habitude de filmer ses cours, lui et ses proches
possèdent la vidéo dans laquelle il est possible d’entendre
distinctement les sons presque humains du perroquet
surdoué… Cette histoire, authentique, est d’autant plus
troublante que le perroquet n’avait jamais entendu le
prénom « Avraham » auparavant, d’après la déclaration
des propriétaires de l’animal, totalement abasourdis…
Dans plusieurs conversations, Avraham Zagdoun
aborde cette notion de Soi (Lui-même ou ‘atsmo en hébreu),
qui n’est pas étrangère à la transformation soudaine du
perroquet… Afin de mieux cerner ce concept, une tentative
de définition sera proposée à la fin de cet ouvrage.
Préface de l’auteur | 13
Préface de l’auteur
Voilà maintenant déjà plus de deux ans que ce livre est
paru en langue hébraïque en Israël et connaît, grâce à Dieu,
un grand succès.
Il est une compilation de conversations recueillies sur
le vif, qui traitent de tous les sujets de la vie en cherchant
toujours où se trouve un lien avec Dieu. Ce n’est pas un
livre d’étude dont l’approche se veut méthodique, mais
plutôt une invitation à la réflexion.
Cette œuvre possède une histoire assez particulière.
Le « Livre des Conversations » est le résultat d’une
succession de rencontres que j’ai eu le privilège d’avoir
avec Avraham Zagdoun, mon Rav et ami.
A la suite de chacune d’entre elles, je me suis efforcé de
retranscrire le plus fidèlement possible son message.
Au départ, il n’était pas prévu d’en faire un livre.
Nous avons pris avec Avraham l’habitude de nous
rencontrer une ou deux fois par semaine, au café, et de
discuter de sujets divers du quotidien, toujours en gravitant
autour de la Torah.
14 | LIVRE DES CONVERSATIONS
A chaque fois, j’ai pris soin de noter les points importants
de la conversation, puis, un jour, l’idée d’en faire un livre
me vint tout naturellement à l’esprit.
Par souci d’authenticité, j’ai laissé sous sa forme
originale la retranscription de chaque conversation.
Parfois, le caractère parlé ressort nettement. Parfois,
Avraham commence sur une idée puis dévie sur une autre.
Parfois, j’avoue ne pas avoir bien compris son intention
profonde dans certaines conversations que j’ai malgré tout
consignées.
Rosh Hashana approchant, c’est à la hâte que ce livre
fût achevé car il était important qu’il puisse être apporté
à Ouman en Ukraine, chez Rabbi Nachman, lieu de
rencontres et d’échanges de tous horizons.
Dès sa sortie, cet ouvrage connut un immense succès.
D’ailleurs, peu après les fêtes de Tichri, il fallut déjà envisager
une réimpression de plusieurs milliers d’exemplaires.
La notoriété de ce livre allant grandissant, Avraham
Zagdoun commença à attirer la curiosité et c’est ainsi qu’un
grand journal de Jérusalem lui accorda une interview de 5
pages avec sa photo en grand format à la une.
Aujourd’hui, au regard du succès de l’édition originale,
la nécessité d’une traduction française s’est tout de suite
imposée.
C’est ainsi que Daniel Ecabert, un ami proche
d’Avraham, avec qui j’ai eu l’occasion d’échanger quelques
Préface de l’auteur | 15
idées pour la rédaction du livre en hébreu, s’est mis à la
tâche pour proposer ce livre à la communauté francophone.
Le livre en hébreu étant rédigé dans un style parlé,
il a été jugé nécessaire de le remanier légèrement pour
qu’il soit plus compréhensible et plus agréable au public
francophone.
Puisse ce livre trouver le même accueil en français qu’il
a reçu en hébreu!
Eliran Malka*
* Eliran Malka est un jeune et brillant cinéaste israélien, auteur entre autres du film «The
Unorthodox». Il revendique publiquement fonder son œuvre cinématographique sur la
base des enseignements d’Avraham. Ses films ont reçu plusieurs récompenses dans le
milieu cinématographique en Israël et à l’étranger.
Préface du traducteur | 17
Préface du traducteur
""אודה ה' בכל לבב בסוד ישרים ועדה
«Je louerai l’Eternel de tout mon cœur, dans le cercle des
justes, dans l’assemblée.» (Psaumes 111:1)
Je remercie le Ciel de m’avoir permis de mener à terme
cette tâche sainte qui, au-delà de la traduction et l’adaptation
en langue française du Livre des conversations, m’amène
également à pouvoir présenter Avraham Zagdoun à la
communauté francophone.
Aujourd’hui, j’éprouve une grande joie à la sortie
de ce livre car la possibilité de pouvoir partager avec la
communauté francophone un aperçu de cette sagesse
encore inconnue est enfin arrivée.
A ce jour, plus d’une cinquantaine de livres basés sur les
enseignements d’Avraham ont déjà été écrits en hébreu et
de nombreux autres ouvrages restent encore à paraître. Le
Livre des conversations est le premier du genre ayant pour
vocation de s’adresser également au grand public.
On ne pourrait dissocier l’œuvre de son auteur, ni la
sagesse de celui qui la transmet. Ainsi, il s’avérait nécessaire
18 | LIVRE DES CONVERSATIONS
d’adjoindre à la fin du livre une présentation d’Avraham
Zagdoun.
Je tiens à cet égard à remercier chaleureusement
Avraham de m’avoir permis de le côtoyer pendant plus de
20 ans et d’avoir partagé avec moi, à part le contenu de
ce livre, de nombreux enseignements et secrets de Torah
incroyables que je n’ai jamais entendu ailleurs.
Je remercie le Ciel d’avoir eu également le mérite de
participer à la diffusion du feuillet de la paracha, qui connait
un succès énorme aussi bien en hébreu qu’en français, avec
une distribution dans de nombreux pays dans le monde.
Je suis parfaitement conscient que ma description
d’Avraham pourra parfois sembler excessive, mais j’insiste
sur ce point : ce n’est pas par exaltation que je l’ai fait, c’est
au nom de la vérité, car Avraham est une personnalité hors
du commun et que je n’avais d’autre choix que de le décrire
ainsi.
Sa vie est parsemée de manifestations de la providence
divine et de miracles. Il était d’ailleurs prévu d’en raconter
un certain nombre dans le livre, mais finalement le temps
a manqué pour mener cette tâche à bien. Cela pourra faire
l’objet d’un autre livre.
Quoi qu’il en soit, cela n’est pas primordial, car, comme
il est ramené dans la conversation 95, l’essentiel n’est pas de
s’attacher aux manifestations extérieures d’un Sage, mais à
son esprit et son message. Et à ce titre, la Torah d’Avraham
Préface du traducteur | 19
constitue certainement sa plus grande merveille car elle
est vraiment originale. Elle offre pour celui qui s’y plonge,
une relecture nouvelle de la Torah où tout s’assemble dans
une harmonie parfaite et, surtout, où l’on ressent derrière
chaque ligne la présence de Dieu et le lien intime qui Le
relie à chaque âme juive
Je ne pourrais finir cette introduction sans remercier
Yona Benchimol pour l’aide précieuse qu’elle m’a apportée
en m’assistant dans mon travail de rédaction, tant pour
le feuillet hebdomadaire que pour ce livre. Que Dieu lui
accorde Sa bénédiction, à elle et à toute sa famille et la fasse
réussir dans toutes ses entreprises.
Je tiens aussi à remercier ma mère pour son aide et
son dévouement. Que Dieu lui donne la bénédiction et
l’abondance et lui accorde une prompte guérison et une
longue vie.
Daniel Ecabert
Introduction | 21
Introduction
"( "בראשיתBéréshit), premier terme par lequel la
Torah écrite débute est communément traduit par « Au
commencement ». La première lettre du terme en hébreu
a pour valeur numérique 2. Cela vient nous indiquer, de
façon allusive qu’il y a, en réalité ראשית-ב, c’est-à-dire deux
commencements, ou encore, deux approches, deux lectures
possibles de la Sainte Torah.
La première se rattache à notre propre histoire et à
notre mise en application du choul’han arou’h (code de la
loi), c’est son sens simple.
La seconde fait référence à un autre ordre, un autre
agencement, une façon de comprendre radicalement
différente.
Or cet ordre-là nous est aujourd’hui dissimulé. C’est au
Mashia’h (le Messie) qu’il appartiendra de le reconstituer et
de le remettre à notre portée. En effet, cet ordre est porteur
d’une lumière d’une telle intensité qu’il nous est difficile de
la recevoir dans son intégralité.
Dieu, Tout Puissant, en créant le monde a choisi de la
22 | LIVRE DES CONVERSATIONS
dissimuler. Car il est impossible de supporter une vérité
de cet ordre-là. Une vérité à ce point authentique et
éblouissante n’aurait pas permis à Ses créatures de survivre
ne fut-ce qu’une seconde. Dieu l’a pour ainsi dire mise en
réserve, dans un endroit secret pour nous permettre de
vivre en ce monde.
Cette lumière, nous étant quasi-inconnue, nous ne
pouvons ni la rechercher, ni l’invoquer. C’est un peu
comme si, nous en avions oubliée jusqu’à l’existence. Nous
nous en tenons donc aujourd’hui au sens simple («pschat»)
de la Torah, c’est-à-dire à une compréhension littérale et
première en nous disant : « c’est ce dont nous disposons et
c’est tout ! ».
Cela est comparable à un agent envoyé en mission pour
espionner l’ennemi. On lui prépare ce que l’on appelle «une
couverture», un autre nom, une autre identité, une autre
nature…Cette couverture temporaire a pour fonction de lui
permettre de s’intégrer, de se fondre en territoire ennemi.
Or après un certain, temps, cet espion s’adapte si bien à
sa nouvelle identité et à son rôle de couverture qu’il en finit
par oublier son vrai nom. Il se fond si bien dans ce nouveau
personnage, qu’il finit par l’adopter au point d’en oublier
son identité originelle.
Cette situation ressemble à ce que nous vivons
actuellement. Notre approche de la Torah est partielle. Notre
connaissance se limite à une seule facette alors que nous
pensons être toute la vérité. Nous avons oublié qu’il existe
Introduction | 23
un autre ordre.
Nous avons coutume de penser que le principe de la
résurrection des morts, ne s’applique qu’à la résurrection
des corps. En réalité, il concerne en premier lieu et dans
son sens le plus profond, à la remise de la Torah dans un
ordre qui a été oublié.
Le propos de notre ouvrage est de partir à la recherche
de cet ordre, de faire resurgir ces fragments de lumière, de
les rappeler à notre mémoire, de nous rechercher et, avec
l’aide de Dieu, de nous retrouver en elles.
Ce livre et les conversations qu’il contient sont de petites
« résurrections » dont l’objet est de nous donner un avant-
goût de cet ordre authentique à retrouver.
Les 120 Conversations
LIVRE DES CONVERSATIONS | 27
1
L’homme avant tout
Sache que la finalité de la Torah et des mitsvot a pour but
de nous mener à la connaissance de Dieu. Or aujourd’hui,
pour y parvenir, l’essentiel est de se concentrer sur les
relations avec son prochain.
Avraham raconta l’histoire du Rav Frank, de mémoire
bénie, un des anciens ‘hassid Breslev décédé il y a peu. Le
Rav s’était engagé dans la recherche d’un chidou’h (fiancée)
pour un homme célibataire déjà d’un certain âge. Il lui
trouva une compagne avec laquelle ils fixèrent rendez-vous.
Le Rav Frank se présenta chez le jeune homme. Celui-ci
refusa de le suivre car, n’ayant pas encore prié min’ha, il
risquait de dépasser l’heure limite de la prière. Le Rav le
saisit par le bras et le força à le suivre.
Il lui affirma que cette rencontre était pour lui maintenant
plus importante que sa prière. Il lui expliqua que, la raison
pour laquelle nous prions vient du fait que n’avons pas une
vraie connaissance de Dieu. Si tel était le cas, nous n’aurions
plus besoin de prier. Or, voici que la femme qu’il devait
rencontrer en vue d’un mariage incarnait précisément
28 | LIVRE DES CONVERSATIONS
cette facette de Dieu que l’homme a besoin de connaitre.
C’est pour cela que, dans ce cas précis, il valait mieux, qu’il
se concentre sur cette rencontre afin de maximiser ses
chances d’aboutir. (Il pourrait par la suite réciter deux fois
la prière du soir, la seconde étant en rattrapage).
Toujours à propos de la grandeur de la relation entre
deux juifs, Avraham mentionna une fois la loi du choul’han
arou’h (code de la loi juive) qui interdit de dire «chalom» à
son prochain avant la prière du matin. En effet, en saluant
son prochain à la première heure, l’homme devient exempté
de sa prière. Car en connaissant le secret de cette loi à sa
racine, ce salut équivaudrait à une dispense de l’obligation
quotidienne de prier.
Mais l’homme serait perdant au final, car Dieu se délecte
de la prière de chacun de ses enfants.
LIVRE DES CONVERSATIONS | 29
2
A deux endroits à la fois
Il existe un endroit qui serait concomitamment en phase
de montée et de descente.
J’ai entendu au nom d’Avraham, qu’il parla de
scientifiques spécialisés dans la recherche sur le vide et leur
affirma qu’aucun intellect n’était en mesure de comprendre
ce sujet. Pour illustrer son propos, il donna l’exemple
théorique d’une personne pouvant se mouvoir à une si
grande vitesse qu’elle en viendrait à se trouver, pour ainsi
dire, à deux endroits en même temps, comme si elle était à
la fois vivante et morte.
Les scientifiques cernent le phénomène de loin, le
ressentent, mais ne parviennent pas vraiment à l’expliquer.
En fait, notre intellect nous pousse à nous accrocher
à quelque chose de rationnel afin de comprendre un
phénomène. Par exemple, lorsqu’un homme voit une table,
il est capable de l’identifier, définit ses propriétés et peut
ainsi la qualifier, la nommer. Ainsi, il distinguera une table
d’un verre, par exemple.
30 | LIVRE DES CONVERSATIONS
Pourtant, dans l’absolu, il existe un endroit qui inclut
tout : objets, personnes, phénomènes. Il comprend aussi le
Nom ineffable de Dieu que nous ne connaissons pas.
Et à sa racine se tient le Saint béni Soit-Il Lui-même. Il
possède un nom qui inclut tout, le nom d’une chaise, le
nom d’une table, le nom d’une femme qui peut enfanter.
Et tout est désigné par le même nom à cet endroit. Car
ce lieu est le point de convergence de tout ce qui existe.
Il est enfoui dans le secret du Nom ineffable que nous ne
connaissons pas aujourd’hui, mais qui est appelé bientôt à
dévoiler.
Et c’est cela qu’a dit Avraham à Loth : «Si tu vas à gauche,
j’irai à droite, si tu vas à droite, je prendrai à gauche.» (Genèse
13:9)
Loth symbolise l’intellect d’aujourd’hui, forcé
d’apparaitre sous une facette tangible, comme se trouver
à un seul endroit à la fois. Tandis que l’esprit d’Avraham
parvient à être à deux endroits au même instant. Et c’est cela
le Mashia’h. Il viendra dévoiler cette forme d’intelligence
encore absente de nos consciences. Or la délivrance du
monde entier dépend essentiellement de cela.
Lorsqu’à Ouman, Avraham essaya d’en parler aux
nombreux ‘hassidé Breslev présents, ils refusèrent de
l’écouter et se moquèrent de lui. Il affirma alors :
«Ils ne sont pas prêts à accepter Rabénou (Rabbi Nachman). Ils
ont conçu un «Rabénou» à leur convenance».
LIVRE DES CONVERSATIONS | 31
3
L’annulation de soi
J’ai entendu que selon Avraham, nous n’avions pas du
tout compris le concept du mot " "ביטול- « annulation ».
On s’imagine que « l’annulation de soi » consiste à être
humble, à ignorer les besoins de son corps, à lutter contre
ses passions et ses désirs.
Cela est vrai, mais cela ne constitue qu’un premier niveau
de cette notion.
Car le véritable sens du terme « annulation » que
Rabénou lui prête est tout autre. Selon lui, la vraie vie
consiste à parvenir à ce point de néant. Si l’homme possède
une forme, cette dernière sera amenée un jour à disparaître.
C’est pour cela que l’homme doit bien mourir un jour.
En réalité, tout ce que l’être humain perçoit dans ce
monde ce sont des formes, à commencer par la sienne,
auxquelles il accorde un excès de crédibilité. Elles sont
diverses, changeantes et éphémères et envahissent son
esprit.
Il croit connaître son environnement et se connaître lui-
32 | LIVRE DES CONVERSATIONS
même, mais fonde cette pseudo connaissance sur ce qui
n’est en réalité qu’une galerie d’apparences. Il doit savoir
qu’il possède en lui un autre personnage qui est son propre
futur et qui lui seul a le pouvoir de l’aider. Pour accéder
à cet être authentique et parvenir à connaitre ce véritable
«Soi-même», il doit au préalable passer par le «Bitoul»
auquel le Tsadik fait référence et qui est en fait la mise à
distance de son enveloppe extérieure.
A cet effet, Avraham précisa à plusieurs reprises :
«Une personne qui souhaite arriver à cette annulation-là,
ne doit rien demander. Si elle se comporte ainsi, parvenant à
se taire et à se conduire normalement dans la vie, alors elle
recevra tout. Tandis qu’en demandant, elle ne recevra que ce
qu’elle a formulé et rien de plus».
Il ramena une parabole qui illustre cela :
Un homme qui s’est fait dérobé toutes ses économies,
erre triste et effondré, comme si le ciel s’était abattu sur sa
tête. Il réfléchit, se lamente et interroge Dieu sur les motifs
de son infortune. Pourquoi lui ? Que va-t-il devenir ?
Pourtant, si cet homme possédait une conscience plus
élevée, convaincu que Dieu dirige à son égard le monde
de manière parfaite, dans le bien comme dans le mal, il
comprendrait qu’en réalité, son cas est similaire à celui
d’une personne ayant déposé ses économies à la banque.
De la même façon que cet argent lui a été donné puis repris,
il pourra lui être restitué plus tard, intérêts en sus.
LIVRE DES CONVERSATIONS | 33
C’est exactement ce qui s’est produit lorsque les enfants
d’Israël, après des années de manque et d’oppression,
sortirent d’Egypte en emportant avec eux de grandes
richesses. Le salaire de deux cent dix ans de labeur fut,
d’une certaine façon, mis en dépôt par le Tout Puissant Qui
le leur restitua le moment venu.
A l’inverse, quand une personne est obnubilée par ses
comptes et ses calculs, Dieu lui renvoie une réalité similaire
à ses spéculations, conforme à ses certitudes. Chaque
somme reçue est comptabilisée. Il recevra son dû selon les
lois de la nature sans rien de plus.
Et c’est cela aussi le sens que le Zohar prête au verset
«…Noa’h Noa’h» (Genèse 6:9). Le premier «Noa’h» fait allusion
à l’esprit d’en bas et le second à l’esprit d’en haut. Ceci
en référence aux deux êtres se trouvant en chacun de
nous : l’homme des mondes inférieurs et celui des sphères
supérieures.
34 | LIVRE DES CONVERSATIONS
4
Comment choisir sa femme
Considérons le cas d’un homme à la recherche de sa
future épouse.
Il rencontre une femme chez qui il décèle un point
incompatible à ses attentes. Il devra comprendre que c’est
précisément cette femme qu’il convient de choisir.
Pourquoi ?
L’explication est la suivante :
Nous sommes en présence de deux Torah : celle que
Moché Rabénou a reçue au mont Sinaï et qu’il a transmise
au peuple juif et la Torah de Dieu qui se situe à un tout
autre niveau, dont nous n’avons pas encore connaissance
et qui incarne cette facette divine qui nous est insaisissable.
Elle transparait à travers les épreuves et les difficultés que
chacun doit faire face dans la vie. Elle est au-delà de notre
compréhension et demande une acceptation fondée sur
une foi sans compromis.
C’est là que réside l’essence de la dévotion divine :
reconnaître que cette deuxième facette constitue un visage
LIVRE DES CONVERSATIONS | 35
divin. Et y parvenir implique un jeu permanent avec notre
niveau de confiance en Dieu.
Considérons le principe suivant :
Il existe deux sortes de Tsadikim (Justes) : les Tsadikim
des Tsadikim, c’est-à-dire les Tsadikim qui savent guider
leurs élèves qui sont aussi des Justes. Et il existe des Tsadikim
qui savent même rapprocher et guider les mécréants. Cette
deuxième sorte de Justes constitue l’essentiel, car ils savent
jouer avec les niveaux supérieurs et inférieurs de proximité
divine.
La femme incarne cet esprit insaisissable, elle est porteuse
de l’aspect divin qui transcende toute logique.
Si un homme ne tient compte que de ses affinités et
recherche une femme de façon cartésienne, alors il suit la
voie du Tsadik pour les Tsadikim. Cela sous-entend qu’il
ne souhaite pas découvrir Dieu sous sa deuxième facette.
C’est pour cela qu’un homme devra apprécier à la fois
les ressemblances et les différences qui existent entre lui et
sa femme. Car ces différences de nature créent un espace
qui lui permet de connaître Dieu. De plus, c’est ce même
espace qui permet de concevoir des enfants.
36 | LIVRE DES CONVERSATIONS
5
Une question de limites
Chaque élément dans ce monde possède ses propres
limites.
Comment se détermine une limite ? Elle se définit au
moyen d’un point qui se trouve à l’intersection de deux
éléments. Par exemple, il existe un point qui détermine la
fin d’une pièce et le début de celle qui lui est contiguë.
Ce point qui marque une limite est extraordinaire.
Atteindre ce point sans le dépasser requiert une grande
sagesse.
C’est de là qu’on comprend que tout excès n’est pas bon.
Par exemple, il n’est pas bon d’être triste. À l’opposé,
une joie excessive peut mener à un excès de familiarité avec
son prochain.
De même, chaque jour possède ses limites. C’est en ce
sens que le Zohar nous invite à ne consommer chaque
jour que la ration que Dieu nous accorde sans céder à la
tentation d’en conserver pour le lendemain. Et c’est ce
que Dieu attendit des enfants d’Israël dans le désert qui
LIVRE DES CONVERSATIONS | 37
récoltaient la manne.
Il faut bien comprendre que chaque jour est spécifique,
encadré dans des limites qui lui sont propres. L’homme
qui ne comprend pas ou ne respecte pas ces limites créé
une confusion entre les jours qui se suivent. Il modifie
le système temporel qui gère le monde ce qui est contre-
productif pour sa subsistance, à Dieu ne plaise.
L’homme doit savoir que s’il se laisse envahir par ses
inquiétudes, il introduit dans son quotidien des soucis sans
rapport avec le jour présent. Il se laisse entrainer par ses
pensées dans des «zones interdites». Alors que pour Dieu,
ni le temps ni l’espace ne font obstacle à l’attribution de la
«parnassa» (subsistance).
Avraham évoque souvent le cas de personnes très
équivoques dans leur façon de croire aux miracles. D’un
côté elles admettent que Dieu puisse annuler épreuves et
décrets, mais de l’autre, elles demeurent sceptiques sur
l’immédiateté d’une intervention divine. C’est une erreur!
Si Dieu Le souhaite, Il peut tout arranger en un instant.
38 | LIVRE DES CONVERSATIONS
6
Réunir les deux opposés
En quoi consiste la vraie sagesse ?
C’est celle qui sait réunir deux forces opposées.
Par exemple, concernant le domaine de la guérison,
Rabénou nous demanda d’éviter en cas de besoin, d’avoir
recours aux médecins. Cette injonction peut sembler
surprenante, mais doit plutôt être comprise de la façon
suivante : Rabénou a demandé cela simplement pour qu’en
fin de compte, on garde notre foi en Dieu même en allant
consulter un docteur.
Nous savons tous que le médecin n’est pas à l’origine de la
guérison. Aujourd’hui, prendre son conseil ne signifie pas
s’écarter des principes de la Torah. En allant le consulter,
on permet la conjugaison de ces deux forces qui sont le
jugement (la raison) et la foi, ou dans d’autres termes, les
voies naturelles et le miracle.
Le Roi David aussi gouvernait selon ces deux principes.
Quand un riche et un pauvre se présentaient devant lui
pour régler un litige et que le pauvre était en tort, le roi
LIVRE DES CONVERSATIONS | 39
David était obligé de trancher selon le code de la loi. Et ce,
même si le pauvre devait y perdre tous ses avoirs. Car la
justice est la justice. Ce qui n’empêchait pas le Roi, après
coup, de puiser dans sa caisse personnelle pour venir en
aide au pauvre. C’est l’aspect de la «tsédaka» (l’aumône),
de la foi.
Cette association doit toujours être préservée dans
le monde : révélation et voilement, lumière et obscurité.
C’est dans cette alternance d’éclipses et de rayonnements,
qu’après avoir ressenti la présence du Tout-Puissant, tout
de suite, Il nous échappe à nouveau.
C’est de cette façon qu’il nous sera possible de parvenir
à une vraie connaissance de Dieu, Béni-Soit-Il.
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7
Pas de faute chez Israël
Le Baal Chem Tov nous enseigne que la faute ne concerne
pas les enfants d’Israël. Voilà une révélation surprenante
alors que visiblement, de nombreuses fautes sont commises
tous les jours. Mais en vérité, il y a là un grand secret qui peut
s’illustrer par une parabole : les fautes commises s’inscrivent
dans la copie, sans affecter l’original. Qu’est-il entendu par-
là ?
Pour le comprendre, il faut remonter avant la création du
monde. Il est possible de représenter alors le Créateur par
la lettre י-youd (qui symbolise la sagesse, la lumière divine).
Lorsque ce monde fut créé, ce youd, qui est la plus petite
lettre de l’alphabet, se subdivisa en deux youd.
Comment est-ce possible ?
C’est parce que la lettre youd est porteuse de son double
en elle.
En effet, d’une part, la valeur de lettre youd équivaut à 10.
D’autre part, la lettre י-youd, s’écrit en toutes lettres יוד
(youd vav daleth), dont la somme des valeurs numériques
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cumulées (10+6+4) donne 20.
Or 20, ce sont deux youd. Ainsi cette lettre porte bien
son double en elle.
De ce fait, lors de la création, ce youd originel fit apparaitre
ce deuxième youd qu’il portait en lui. Que devint-il ?
Il se divisa en deux lettres ה-hé de valeur 5 chacune, plus
un ו-vav qui les sépara (car le ו-vav peut jouer le rôle de
séparateur). En conséquence, ce deuxième youd devint
finalement ה-ו-ה.
Ainsi le premier des deux youd resta tel quel tandis que
le second se subdivisa. Et lorsque l’on juxtapose les deux, à
savoir d’un côté יet de l’autre côté ה-ו-ה, on obtient ה-ו- ה-י,
le Nom divin, le tétragramme. C’est cela l’explication de
son origine.
Cela étant clarifié, voici le sens de l’affirmation du Baal
Chem Tov :
Lors de la création du monde, Dieu conserva auprès de
Lui le youd resté intact. Il constitue la copie originale de
chaque âme.
En revanche, le deuxième youd qui se subdivisa en ה-ו-ה,
incarne tout ce que nous voyons dans ce monde.
Le premier youd est comparable à un document de très
grande valeur, conservé précieusement dans un coffre-fort.
De nombreuses copies sont disponibles et peuvent être
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consultées. Mais qu’un ou plusieurs exemplaires viennent
à se détériorer ou à disparaître, l’original reste en lieu sûr,
toujours intact.
C’est exactement le même principe qui s’applique à
l’homme. Lorsqu’il se regarde, il ne voit en réalité qu’une
copie de lui-même. L’original demeure auprès de Dieu. Et si
l’homme faute, se corrompt ou disparaît, l’original demeure
intact dans le coffre du Roi des Rois. Cet original permet
de tout recréer. C’est le principe même de la «téshouva»
rendue possible puisque la faute n’affecte que la copie de
notre âme. L’original est conservé, protégé par Dieu.
Ainsi, Dieu détient le pouvoir de tout recréer, comme s’il
démarrait d’une feuille vierge.
C’est en ce sens que le Baal Chem Tov HaKaddoch
affirmait que la faute ne concernait pas les enfants d’Israël
puisqu’à la source il ne peut y avoir de dégradation.
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8
Ecouter sans comprendre
Une fois, à l’issue d’un cours, un élève téléphona à
Avraham pour lui avouer qu’il n’avait rien compris à son
enseignement. Avraham lui donna le conseil suivant : même
si tu n’as pas tout compris, c’est aussi bien de s’entretenir à
propos du sujet du cours.
Même si l’on a le sentiment de ne pas avoir compris un
enseignement, voire même de l’avoir oublié, il reste malgré
tout gravé dans notre inconscient. Les paroles entendues
progressent dans l’esprit de chacun et peuvent mobiliser le
«Lui-même», (cette notion sera développée plus loin) de la
personne.
Écouter un cours de Torah constitue en soi une «ségoula»
(vertu miraculeuse). Les paroles, les idées, les intonations,
les gestes mêmes, exercent sur l’âme de celui qui les écoute
une action bénéfique susceptible de lui venir en aide le
moment voulu.
Avraham évoqua à ce sujet le cas d’un élève qui réussit à
atteindre un niveau de sagesse très élevé uniquement par le
mérite d’être assis et d’écouter attentivement ses cours en
français alors qu’il ne parlait pas la langue.
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9
Safek – Possek
Rabbi Nachman nous enseigne dans le «Séfer Hamidot»
(le livre des vertus) qu’une personne confrontée à un doute
(«safek» – )ספק, doit étudier un « possek » (décisionnaire
de la loi juive – ) פסק. Tout le monde pense que c’est parce
qu’en hébreu les deux mots sont composés des même
lettres : פסק-ספק.
Mais il y a une autre raison à cela :
Chez chaque homme, réside une Torah dans l’ordre et
une autre dans le désordre. Lorsqu’une personne est assaillie
par un doute, c’est un signe que ces deux Torot sont en
conflit. C’est pour cela qu’il se sent tiraillé intérieurement.
En fait, pourquoi l’homme hésite-t-il ? Parce qu’il a en
lui une voix qui lui dit d’aller à droite et une autre qui lui dit
d’aller à gauche. Et il ne sait pas à laquelle prêter attention.
Or que fait le possek véritable ? Il n’annule pas une
Torah au profit de l’autre. Au contraire, il rétablit le
chalom - l’harmonie entre les deux. Le possek authentique
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harmonise les deux avis, car ils sont vitaux pour le maintien
du monde. Il les préserve et les vitalise.
Malgré tout, le possek sait que l’homme doit prendre
une décision. Il a besoin, pour sortir du doute, d’une
réponse, d’un conseil concret. La vraie grandeur du possek
est de préserver deux opinions opposées tout en indiquant
laquelle suivre concrètement.
A ce sujet, il est écrit à propos du Mashia’h qu’il se
dévoilera trois jours avant la délivrance, pour rétablir
l’harmonie entre toutes les ma’hloket (divergences
d’opinions). Par exemple, la loi juive suit aujourd’hui l’avis
de Bet Hillel. Dans les temps futurs elle suivra l’avis de Bet
Chamaï, puisqu’à la racine ces deux opinions n’en font
qu’une.
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10
Parler à Dieu à travers son ami
Il est possible pour l’homme de méditer avec Dieu
(hitbodedouth) à travers une conversation avec son ami.
Un jour, Avraham nous raconta qu’une personne s’était
longuement confiée à lui. Elle lui dit qu’elle était poursuivie
par la police et par des créanciers. Elle pratiquait très
régulièrement «hitbodedouth» (dialogue avec l’Eternel)
mais ne vit aucune réponse à toutes ces heures de prière.
Avraham lui répondit que maintenant qu’elle venait de
déverser son cœur, elle verrait assurément une délivrance
concrète. Car ouvrir son cœur à un ami est comparable à
faire hitbodedouth.
Une des raisons pour laquelle une personne a le sentiment
que Dieu ne l’écoute pas provient de sa sensation de parler
dans le vide. En revanche, lorsqu’elle s’adresse à un ami,
elle est certaine d’être entendue et gagne en confiance. Et
Dieu, dans Sa bonté, l’écoute à travers son ami.
Ceci est un grand principe, car il est écrit :
«Voici le choix : soit l’amitié (le compagnon d’étude avec
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qui je peux parler), soit la mort «( »או חברותא או מיתותאTalmud
Taanit 23).
Cette assertion sous-entend que sans personne à qui
confier ses problèmes, l’homme court au désespoir parce
qu’il se sent seul et incompris. Exprimer sa peine à un ami,
constitue en soi une forme de prière.
Lorsqu’une personne se trouve avec un ami, cela
s’apparente à un corps relié à son âme. Et quand cette
personne étudie avec cet ami, c’est un peu comme si elle
étudiait avec son âme, ou pour ainsi dire, avec Dieu Lui-
même.
Il existe un préambule qu’il est bon de réciter avant
l’accomplissement d’un commandement :
«Léchem Y’houd Koudcha Béri’hou Ouche’hinté»
""לשם יחוד קודשה בריך הוא ושכינתה
(Pour l’union entre le Saint-béni-soit-Il et Sa présence
sur terre»).
Ce préambule n’est pas valable uniquement avant
l’accomplissement d’une mitsva ou d’une prière, mais il
pourrait tout aussi bien s’appliquer avant une rencontre
avec un ami. Car il se créé par ce biais une union entre
Dieu et Sa présence sur terre.
Beaucoup d’épreuves sont envoyées dans le monde
parce que nous nous sommes éloignés de ce principe
d’unification. Nous l’avons délaissé !
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11
Ne pas manger seul
Un jour, on m’expliqua qu’Avraham n’avait jamais
l’habitude de manger seul. Selon lui, celui qui agit ainsi ne
nourrit que son corps ce qui constitue une forme de passion.
Avraham insiste très souvent sur cet usage à adopter, afin
que nous comprenions à quel point il est important pour
l’homme de partager son repas. C’est une façon de créer
une association entre le corps et l’âme, comme c’est le cas
pour les repas de Chabbat. Car lorsque l’on mange en étant
accompagné, il peut y avoir de l’amour, de l’union, ce qui
répare tout, notamment la passion de la nourriture. Et
même si l’une des deux personnes mangeait avec avidité lors
de ce repas, cela est malgré tout considéré comme s’il avait
associé Dieu à son repas. Il n’y aurait plus de mal. Un peu
comme s’il avait récité « לשם יחוד- Léchem Yi’houde... » (voir
conversation précédente) avant sa prière.
En revanche, si cela n’est pas possible de trouver un ami
avec qui partager le repas, il faudra, avant de passer à table,
donner de la tsédaka qui sera destinée à un pauvre. Cet acte
sera considéré comme si le repas avec été partagé avec lui, ce
qui préservera également de la passion de la nourriture.
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Servir Dieu en homme libre
En Égypte, le peuple juif observait les mitsvot, étudiait
la Torah et mettait les téfilines, mais il le faisait avec
une mentalité d’esclave. Or Dieu ne souhaitait pas être
servi de cette manière. C’est pour cela qu’Il les fit sortir
d’Égypte et les libéra de l’esclavage : afin de les affranchir
spirituellement. Ceci afin de leur accorder autonomie et
liberté de décision.
Car au départ, l’homme était doté d’une volonté
unique, à l’instar des anges dépourvus de libre arbitre,
qui accomplissent les commandements sans sentiment ni
réflexion. Mais au moment où les enfants d’Israël reprirent
leur liberté, Dieu leur donna un pouvoir supplémentaire :
leur propre pouvoir de décision.
Aujourd’hui, ces deux volontés cohabitent en chacun de
nous : la volonté de l’homme et celle plus intime inhérente
à Dieu, béni-soit-Il. Aussi, tout le travail de l’homme
consiste à harmoniser ces deux volontés contraires ainsi
qu’il est écrit :
«J’ai placé devant toi la vie et la mort, le bonheur et la
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calamité; choisis la vie!» (Dévarim 30:19)
C’est pourquoi Dieu n’a pas souhaité nous donner une
volonté unique, à savoir, que celle du Bien. Sinon nous
serions restés soumis accomplissant la Torah et ses mitsvot
comme des esclaves. Nous serions encore en Egypte.
On imagine combien Dieu éprouve de la joie quand Ses
enfants, dotés du libre arbitre et attirés par la matérialité
et les tentations, s’efforcent malgré tout d’accomplir
les mitsvot. C’est ainsi que se définit le véritable בן חורין,
l’homme libre.
C’est aussi la réponse qu’adressa Moché Rabénou aux
anges s’opposant à ce que la Torah soit transmise aux
hommes (jugeant qu’ils n’étaient pas aptes à la recevoir).
Il leur dit :
«Etes-vous en commerce les uns avec les autres ? La jalousie
règne-t-elle parmi vous ? Etes-vous animés par quelque
mauvais instinct ?»
Aussitôt les anges durent admettre leur erreur face à
Dieu.