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Published by pboue, 2019-09-13 05:53:09

AE38, cote d'alerte à la BNF

ae38-numerique-complet

AE38, cote d'alerte à la BNF
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AE38, cote d'alerte à la BNF
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AE38, cote d'alerte à la BNF
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AE38, cote d'alerte à la BNF

AE38,
cote d’alerte à la BNF

par les 4eA et les 4eC du collège Pierre Suc de Saint-Sulpice-la-Pointe
avec l’écrivain-animateur Hervé Jubert
et le professeur Pascal Boué,

en collaboration avec M. Clanet, Mme Aspect, Mme Lavaud
Avec le soutien de la DAAC, du Conseil départemental du Tarn et du FSE du collège

Pierre Suc.

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AE38, cote d'alerte à la BNF

Introduction

Le projet Écritures Numériques, projet
d'incitation à la lecture, à l'écriture, à la
créativité, à l'expression orale, au travail en
groupes et aux usages du numérique, est un
vaste projet en plusieurs volets:

1) Dans le cadre d’un EPI Écritures numériques
(Lettres, Histoire, EMI, Éducation musicale):
réalisation d'un livre collectif en ateliers d'écriture à distance avec un écrivain
(titre définitif : AE38, cote d’alerte à la BNF).

Création d'un livre collectif concernant deux classes de 4e (4eA et 4eC)
avec travail en interdisciplinarité (Français, Histoire, Éducation musicale et
Éducation aux médias et à l'information) et ateliers d'écriture à distance avec
l'écrivain Hervé Jubert (Framapad) - en deux fois huit séances. Ces ateliers
favorisent le travail de groupe avec une distribution de rôles précis et
complémentaires (voir notre blog).

Le projet a été amorcé par la rencontre au collège, en septembre 2018,
de l'écrivain Benoît Séverac, ce qui a permis aux élèves d'échanger avec lui
sur les conditions de l'écriture collaborative (Séverac a co-écrit avec Hervé
Jubert un roman paru en 2018 intitulé Wazhazhe).

Ce livre collectif prend les dix
mots de Dis-moi dix mots,édition
2019, comme mots déclencheurs
d'écriture et de recherche sur le
site Gallica de la BNF et exploite les
formes graphiques et la sémantique
de ces mots , notamment par dix
exercices de transformation
numériques et manuelles et
l'utilisation d’œuvres littéraires
dans Gallica correspondant à chacun
de ces dix mots. De plus les dix mots
et leurs transformations numériques formeront dix énigmes dans le livre
collectif.

Sont aussi associés à ces mots dix lieux de Paris et dix œuvres
musicales du XIXe. Enfin dix œuvres picturales ont une fonction particulière...

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AE38, cote d'alerte à la BNF

Le projet se complète par la création d'un Journal, le Journal de
l'Escampette, numéro 1 réalisé notamment avec Madmagz (articles sur les
dix mots) et numéro 2 réalisé avec le service blog de l’ENT du collège
(différents domaines abordés dans le livre collectif : œuvres littéraires, lieux de
Paris, œuvres musicales, picturales et outils numériques).

Les dix récits réalisés par dix groupes de travail de janvier à mars 2019
se déroulent au XIXe. Ils sont encadrés par un récit au XXIe mais le récit
comporte quelques surprises.

L’ensemble du livre constitue un exemple de littérature combinatoire (cf.
Oulipo) dans la mesure où plusieurs lectures sont possibles.

A la fin de l’écriture du récit principal il a été fait appel au site Un Livre à
part qui a permis aux élèves de voter pour le meilleur épilogue et les meilleurs
derniers textes.

Les dix mots porteurs de dix œuvres
littéraires

Les dix mots inspirés de "Dis-moi dix mots
sous toutes les formes" ont joué le rôle de
déclencheurs d'écriture. Ces mots ont été
recherchés dans Gallica de la BNF par les
dix groupes de travail pour la création des
dix héros-narrateurs des dix récits du livre
collectif. Ils ont été aussi à l'origine de dix
transformations numériques de textes.
Arabesque, composer, coquille, cursif/-ive, gribouillis, logogramme,
phylactère, rébus, signe, tracé.

Les dix œuvres littéraires

Les dix œuvres trouvées dans Gallica sont les suivantes :

Le Mutilé, de X. B. Saintine (Xavier Boniface), 1832.

Les deux fous, boutade classique. Signé : Clés D.1831.

La véritable histoire de Gribouille, 1880, d’après Comtesse de
Ségur, George Sand (1804-1876).1880.

Nouveaux Tableaux exposés aux bureaux du "Régénérateur", galerie
d'Orléans et passage du Saumon, intitulés "le Chemin du salut à

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AE38, cote d'alerte à la BNF

l'extérieur" et "le Chemin du salut à l'intérieur». Chabannes, Jean-Frédéric
de (1762-1836 ; marquis de Curton), 1851.

Les poltrons dramatiques : discours d'ouverture, Belfort-Devaux, Pierre-
Louis (18..?-1867?).1861.

L'immortalité de l'âme : poème, dédié à l'ombre de Camille. de Gouttière,
Henri-Auguste, 1837.

L'Alcazar havrais. Anonyme. 1864.

Chéirologie, ou Nouveau système de signes pour communiquer avec les
sourds-muets par J.-M.-A. Pineau,1850.

Le noceur, conclusion par R... jeune,1866.

Sur un sculpteur et des peintres, Yves Bonnefoy – à propos des
logogrammes de Christian Dotremont, 1989.

Les dix héros de AE38 :

Eugène Hugle, acteur, chanteur d'opéra. Incarne Tamino dans La Flûte
enchantée de Mozart. Victor Du Pont, homme âgé d'une vingtaine d'années.

Gribouille, écolier.

Mr. Perrier, 32 ans, marié postier depuis 7 ans.

Mr. Poltron, travaille dans les catacombes de Paris.

Hugo Artus Gouttière, l’amour de sa vie, Camille, l'a quitté.

Jean Alcazar, sculpteur.

Jean-Marie Auguste Pineau, Instituteur, inventeur d’un langage pour sourds-
muets.

Louis le Noceur, pourvu d'un bras mécanique.

Christian Dotremont, sculpteur, dessinateur, écrivain.

Les dix lieux de Paris :
- L'opéra Garnier.
- L'ancienne Bibliothèque Nationale
- Notre-Dame et son quartier : l'île de la Cité, l'Hôtel-Dieu, l'ancienne morgue
qui se trouvait au chevet de Notre-Dame

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- La morgue

- Les catacombes et, par extension, le Paris souterrain

- Le passage du Saumon, contrepoint de surface aux catacombes.

- Le Bon Marché

- Un immeuble haussmannien

- La gare Paris Montparnasse

- L’atelier de Nadar

Les dix œuvres musicales :

Mignon d’Ambroise Thomas tragédie lyrique, d'après Les Années
d'apprentissage de Wilhelm Meister de Goethe, créée à l'Opéra-Comique à Paris
le 17 novembre 1866.

La Symphonie fantastique, d’ Hector Berlioz (titre original : Épisode de la vie
d’un artiste, symphonie fantastique en cinq parties) œuvre dédiée à Nicolas
Ier de Russie et créée le 5 décembre 1830 au conservatoire de Paris.

La Traviata , opéra de Giuseppe Verdi créé le 6 mars 1853 à La
Fenice de Venise sur un livret de Francesco Maria Piave d'après le roman
d'Alexandre Dumas fils, La Dame aux camélias(1848) et son adaptation
théâtrale (1852).

Faust , opéra de Charles Gounod, fondé sur la légende éponyme et
la pièce de Goethe, créé au Théâtre Lyrique le 19 mars 1859.

Les Brigands, opéra bouffe de Jacques Offenbach, créé au théâtre des
Variétés le 10 décembre 1869.

Robert le Diable de Meyerbeer, opéra. Adapté de la légende médiévale
de Robert le Diable. La création eut lieu à l’Opéra de Paris, le 21 novembre 1831.

Ernani de Verdi, opéra en quatre actes de Giuseppe Verdi sur
un livret de Francesco Maria Piave tiré du drame romantique de Victor Hugo,
Hernani, et créé au Teatro La Fenice, de Venise le 9 mars 1844.

La Muette de Portici, opéra de Daniel-François-Esprit Auber, créé le 29 février
1828, à l'Opéra de Paris.

Tristan et Isolde, opéra de Richard Wagner créé le 10 juin 1865 au Théâtre
royal de la Cour de Bavière à Munich.

Geneviève de Brabant, Premier tableau – Le philtre, opéra bouffe
de Jacques Offenbach,d'après la légende de Geneviève de Brabant, créé le 19
novembre 1859 au théâtre des Bouffes-Parisiens.

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AE38, cote d'alerte à la BNF

Les dix œuvres picturales ou les dix tableaux d'Eugénie (choisies parmi les
œuvres du Louvre qui devaient être sauvées du péril prussien lors de l'été
1870)
Dante et Virgile aux enfers dit aussi La barque de Dante, d'Eugène
Delacroix, daté et signé 1822.
Les Noces de Cana de Paolo Caliari, dit Véronèse, 1563 .
Ixion, roi des Lapithes, trompé par Junon qu'il voulait séduire, tableau du
peintre flamand Pierre Paul Rubens, réalisé vers 1615.
La femme hydropique de Gérard Dou, peint vers 1663.
Le sacre de Napoléon, peint par Jacques Louis David entre 1805 et 1807.
L'Inspiration du poète, tableau de Nicolas Poussin, réalisé entre 1629 et
1630.
La belle jardinière de Raphaël, de 1505 à 1508.
Le couronnement de la Vierge de Fra Angelico, vers 1430.
L'Infante Marie-Marguerite par Diego Vélasquez, œuvre
exécutée entre 1661-1673.
La Joconde de Léonard de Vinci, réalisé entre 1503 et 1506 ou peut-être
jusqu'à 1519 .

Les dix exercices de transformations numériques
(voir blog sur l'ENT du collège).

DOCUMENT DE PRESENTATION OFFICIELLE

LIRE, ÉCRIRE, DIALOGUER, AVEC LE NUMERIQUE

AE38, cote d'alerte à la BNF, qui s'inscrit dans le cadre d'une pédagogie de
projet avec le numérique, est d'abord l'histoire des lectures de 52 élèves de
4e. Après avoir lu des nouvelles réalistes et fantastiques, partant de dix mots,
les groupes de travail ont recherché dans Gallica des œuvres littéraires pour
s'en inspirer et créer leurs personnages. Ils ont ensuite fait évoluer sur internet
leurs héros au travers de dix lieux de Paris au Second Empire et au son de dix
œuvres musicales du XIXe. Dix exercices de transformation numérique ont
permis de créer des productions visuelles. Au final dix œuvres picturales du
Musée du Louvre ont une fonction décisive.

Des rôles spécifiques ont été attribués à tous les élèves répartis en dix

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AE38, cote d'alerte à la BNF

groupes de travail: dix Maîtres d’œuvre furent désignés puis, à tour de rôle, les
participants furent Rapporteurs de séances, Scribes, Experts numériques,
Gardiens du Temps et du Point de Vue, Légendaires ou illustrateurs,
Répartiteurs de parole dans le groupe car les compétences orales jouent aussi
un grand rôle dans ce projet du collège Pierre Suc de Saint-Sulpice-la-Pointe,
dans le Tarn.
▬ Lire, écrire, dialoguer avec Framapad

Le professeur de Français, Pascal Boué, a travaillé en collaboration avec
l'écrivain Hervé Jubert qui propose des ateliers d'écriture à distance.
Sur Framapad, les pads d'écriture incitent chaque groupe de travail à
respecter les consignes,en temps réel, à vérifier la cohérence du récit et des
dialogues. Ils stimulent la créativité. De plus, les groupes communiquent avec
l'écrivain soit par la messagerie instantanée soit par une communication audio
ou vidéo. L'enseignant, qui pilote l’opération, intervient aussi dans les pads ou
dans le "chat". Professeur et animateur, suivant le plan qu'ils ont concocté,
deviennent des influenceurs d'écriture exploitant l'aspect ludique de la situation
créée avec l'aide du numérique. L'écrit devient dynamique, stimulé par un effet
de distanciation de l'enseignant et de l'animateur qui personnalisent leurs
interventions.

▬ Lire, Écrire, Élire avec UN LIVRE A PART: la citoyenneté numérique

Les derniers textes du livre collectif AE38, cote d'alerte à la BNF ont été
rédigés sur le site Un Livre à part, https://www.unlivreapart.fr/. Ce fut aussi
l'occasion pour les élèves de voter en faveur de leur texte préféré: l'épilogue
de leur livre. .L'utilisation du Bureau de vote a permis à chacun d'exprimer son
plaisir de lecteur et de pratiquer une activité quasi citoyenne.

ATELIERS D'ECRITURE

Sur FRAMAPAD avec l'écrivain Hervé Jubert: ce furent 16 séances de 55 mn
sur 7 semaines de janvier à mars 2019 (8 séances par classe).

Sur UN LIVRE A PART: 3 séances de 55 mn par classe, soit 6 séances, en
mai.

DES REFERENCES LITTERAIRES ET ARTISTIQUES,

DES FENÊTRES POUR INTERROGER LE RÉEL

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AE38, cote d'alerte à la BNF

Les histoires rédigées par les dix groupes de travail s'appuient sur les dix mots
de "Dis-moi dix mots sous toutes les formes". Le héros créé par chaque
groupe affronte des épreuves particulières . C'est ainsi que chacun des dix
héros se retrouve dans des situations dignes d'un escape book.
Les histoires se complètent, sont encadrées par un récit qui se déroule de nos
jours à la BNF et au Louvre, et convergent vers un texte unique délivrant les
clés du livre.
Le livre collectif comporte des qr-codes qui renvoient à un journal
documentaire éclairant les éléments historiques, culturels et artistiques se
situant au Second Empire (1870).
Il se double d'un safari-lecture pour tout lecteur qui peut tenter de trouver le
véritable épilogue du livre après un ultime rebondissement de l'histoire...,
L'expérience de ce projet permet de se constituer un bagage culturel qui
pourra être présenté lors de l'Oral du DNB en 3e dans le cadre du parcours
culturel et artistique au collège Pierre Suc de Saint-Sulpice-la-Pointe, dans le
Tarn.

AE38 ET APRÈS?
BLOG ET INTERACTION. DU TEXTE A L HYPERTEXTE
Le blog ECRITURES NUMERIQUES présente le livre numérique collectif
complet, les illustrations réalisées dans le cadre du projet ainsi que des
interviews, des clips et des questionnaires sur les livres-référents.

AE38, UN VRAI LIVRE
AE38, cote d'alerte à la BNF sera imprimé en version papier par
l'intermédiaire d'un site en ligne. Des spécimens seront distribués aux élèves.

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AE38, cote d'alerte à la BNF
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AE38, cote d'alerte à la BNF

INVENTAIRE AE38 – Archives 04-19. Fonds anciens XIX-XXIe s.
Fonds P.Suc.

AE38 – A-01S - Dossier : AE38, le Trésor des maudits

1. Sous le masque de Cana
2. La Lune sanglante
3. La Lettre fatale
4. Le Paradoxe de l'Ange
5. Terreur sous terre
6. Camille
7. Au Bon Marché
8. La Malédiction
9. La Valise secrète
10. Le Sculpteur fou

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« Lasciate ogne speranza, voi ch'intrate »,
Dante, La Divine Comédie, L’Enfer.

Les quatre tours de la Très Grande Bibliothèque qui
se dressaient en bord de Seine m'avaient toujours fait
penser à une table renversée par un Titan1. Je préférais
l'ancien site, la vieille Bibliothèque Nationale avec ses
salles de lecture du XIXe siècle. Mais la modernité avait
rattrapé le livre. Désormais, ils étaient conservés dans ce
coffre-fort géant et acheminés par des navettes
automatiques jusqu'aux lecteurs dans des espaces au
taux d'humidité constant et aux éclairages tamisés.
Je descendis le tapis roulant, entrai dans l'édifice, déposai mes affaires
aux vestiaires, ne gardais que de quoi écrire et ma carte de lecteur. Avant de
passer les bornes d'accès, je me rendis aux toilettes et m'aspergeais le visage.
Je me contemplais dans la glace. J'étais à la fois fatigué et excité par ce qui
m'attendait trente mètres plus bas : le document correspondant à la cote Ae-
38, tiré de l'Enfer. J'avais enfin obtenu l'autorisation de le consulter après des
mois de négociations avec ceux qui en avaient la garde.
Ae-38. Deux lettres et deux numéros qui allaient peut-être changer ma
vie. Du moins, m'aider à la comprendre.
Je sortis des sanitaires, plaquais ma carte de chercheur sur la borne de
contrôle, pénétrais dans le Saint des Saints. Un nouvel escalator, vertigineux
celui-là, me fit lentement descendre dans les fondations. La moquette, rouge
feu, et les parois de béton d'un gris sombre comme une cheminée de volcan
donnaient effectivement l'impression de se rendre dans le royaume d'En Bas.
Nouveau contrôle. La lumière sur le haut du portique vira au vert. Je poussais
la porte métallique et me retrouvais... dans un jardin. Un parc invisible depuis

1

Cher lecteur, joueur, mon frère, sauras-tu trouver la clé de ce labyrinthe et découvrir la
véritable fin de cette histoire? Le véritable épilogue?

Les cinq premières bonnes réponses gagneront un livre gratuit d'Hervé Jubert.
S'adresser à [email protected].

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AE38, cote d'alerte à la BNF

les quais avait été planté entre les quatre tours. La lumière tombait à flots dans
le corridor qui reliait les entrées est et ouest. Je le remontais sur la moitié de
sa longueur, croisant des lecteurs conversant à voix basse ou plongés dans
leurs pensées.

Salle de recherches. Documents précieux. J'y étais.
Un homme mince, blafard, aux pommettes saillantes, on aurait presque
pu dessiner son crâne, m'attendait derrière le comptoir. Il prit ma carte, la mit
de côté, alla chercher un carton dans une étagère. Pas très lourd le carton, de
la taille d'une boîte à chapeaux et fermé par une lanière de tissu blanc.
L'homme me fournit une paire de gants que j'enfilais, et m'attribua un numéro
de place à l'écart.
J'étais seul. J'inspirais profondément, défis la lanière et ouvris la boîte.
A l’intérieur se trouvaient dix livrets jaunis, édités à compte d’auteur,
anonymes et sans aucune indication de date..
Le premier portait le titre : Sous le masque de Cana.
Cana... Cana... Cela m’évoquait étrangement un tableau de Véronèse
mais cela n’avait probablement aucun rapport...
En voici le texte…

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1 - Sous le masque de Cana

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L’Opéra
Eugène Hugle incarnait Tamino, dans le chef-

d'œuvre de Mozart La Flûte enchantée, lorsqu'un
fantôme apparut en plein milieu de la scène, celle dans
laquelle il combattait le monstre en étant désarmé.
Tamino portait un arc, mais il n'avait plus de flèches. Il
pâlit en voyant le fantôme, mais continua à jouer.

Celui-ci portait une tunique de moine noire dont les
bouts partaient en lambeaux. Un masque couvrait une
partie du visage, brûlé. Il n'avait plus de joue droite ce qui
laissait apparaître ses dents jaunies par l'âge.
— À l'aide ! À l'aide ! Il vient sur mes traces ! À l'aide ! À l'aide ! Je suis sans
défense ! Le monstre s'approche !
Un grand serpent approcha côté cour et poursuivit Tamino.
— Il rampe vers moi ! O Dieux puissants ! De grâce ! O Dieux puissants ! Pitié
pour moi !
Tamino tomba, épuisé et sans connaissance, sur le banc de rocher.
"Qu'est ce qui s’est passé, ce n'était pourtant pas dans la scène ? Est-il
vraiment mort ? Comment cet individu est-il donc entré dans l'opéra ? Va-t-il
revenir ? Je suis confus. » songea Hugle.

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Le public crut à une improvisation. Mais le fantôme se jeta sur l'acteur
jouant le monstre. Il le mit à terre et lui mutila les membres antérieurs avec un
sabre. Il l’acheva d'un coup en plein cœur.

C'est à ce moment que le public comprit que cela ne faisait pas partie
de la pièce. Tous fuirent de la magnifique salle dorée en hurlant de peur et de
dégoût.

Quant à Eugène, il s’enfuit par les coulisses.

La préfecture de police

Le lendemain, Eugène alla témoigner auprès de l'enquêteur, le
commissaire Louis Berfier :
— Bonjour.
— Monsieur Hugle. Asseyez-vous. Alors que puis-je faire pour vous ?
— Je suis venu pour vous parler du meurtre de la nuit dernière.
— A l'Opéra ?
— Oui, c'est bien ça. La victime était un chanteur de la troupe.
— Vous la connaissiez ?
— Oui, nous nous voyions pour les répétitions du mercredi.
— Quel était son nom ?
— Norbert
— Ah oui ! Norbert Detresingle ! Un chanteur brillant... Vous étiez à côté de lui.
Que s'est-il passé ?
— Nous jouions la scène du monstre attaquant Tamino dans La Flûte

Enchantée, et je me trouvais en face de lui, effectivement.
— Et ?
— Et à ce moment-là, il a surgi de derrière le rideau et...
— Et... ? Et d'abord, qui est ce "il" ? Eh bien ? Vous avez perdu votre langue ?
— Désolé. Je suis bouleversé par l'horreur avec laquelle... cette créature
monstrueuse et barbare l'a…
— Une créature ? Allons... Ce pauvre Detresingle a été tué par un être de
chair et de sang.
— Non, il n'était pas humain, on aurait dit une créature sortie tout droit des
enfers, un fantôme.
— Un fantôme... Vos origines insulaires. Sans aucun doute.

Le commissaire Berfier maugréa.
— En parlant de ça, j'ai vu dans votre dossier que vous veniez d'Irlande ?
— Oui effectivement, mais je suis venu à Paris pour entrer au Conservatoire.
— Et vous êtes resté. Puis-je voir votre passeport ?
— Désolé, je ne l'ai pas sur moi, je l'ai oublié dans mon appartement.
— Pas bon, cela, monsieur Hugle. Je vais être obligé de vous garder !

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AE38, cote d'alerte à la BNF

C'est alors qu'Eugène se saisit de sa chaise et qu'il la jeta à la figure du
commissaire avant de se ruer en courant sur la poignée et de fuir par la rue.
— Rattrapez-le ! hurla le commissaire.

Deux personnes se joignirent au commissaire qui poursuivait Eugène
sur le trottoir de la rue Lafayette. L'un avait un pistolet chargé et tenta de lui
tirer dessus à trois reprises. Il fit mouche et toucha Eugène au poignet qui
hurla de douleur.

Il continua à courir, atteignit le Champ de Mars. Il se fondit dans la foule.
"Je ne peux plus rentrer chez moi. Où vais-je donc pouvoir bien aller ? Je vais
me rendre dans l'auberge de mon cousin Jean, il aura de quoi soigner mon
bras meurtri par cette balle "

Eugène se rendit donc dans l'auberge de son cousin qui l'accueillit et lui
laissa une chambre au troisième étage.

De son côté, le fantôme avait fui l'opéra en empruntant une trappe
dissimulée sous la scène par une étagère.

L'Opéra Garnier était une grande bâtisse construite sur un marécage
devenu par la suite un lac artificiel qui servait de réserve d'eau aux pompiers
de l'Opéra.

Cette trappe menait directement au lac souterrain. Là l'attendait une
barque munie d'une lanterne qu'il prenait pour circuler sur le lac.

Il rama une vingtaine de minutes avant de parvenir à ce qui semblait
être sa cachette. Elle se situait exactement sous le Louvre. Il s'arrêta et enleva
sa cape et son masque.

L’auberge du cousin

Jean sortit du désinfectant et un tissu propre pour nettoyer la plaie.
Eugène fit une vilaine grimace.
— Qu'est-ce qui t'est arrivé mon pauvre Eugène, qui t'a fait ça ?
— Ne t'inquiète pas pour moi, je t'expliquerai une prochaine fois.
— D'accord, mais il va falloir que je t'enlève la balle sinon ça pourrait s'infecter.

Mais je ne te garantis pas que j'arriverai à extraire tous les morceaux.
Il lui fit mordre dans un torchon pour faire passer la douleur.
— Tu feras attention, la balle était rouillée, tu pourrais mourir ...

Pendant ce temps dans le poste de police...
— Il faut retrouver cet homme ! hurla le commissaire Berfier.
— On va faire le nécessaire, commissaire.
— Il me le faut vivant ! C'est une affaire entre lui et moi ! Cherchez les lieux de
vies de sa famille et de ses amis ! On le retrouvera et je m'en occuperai moi-
même...

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Eugène sortit de l'auberge peu après avoir été soigné.
— Je dois retrouver l'assassin de mon ami ! Pauvre Norbert… Mais par où
commencer ?

Il retourna à l'Opéra pour trouver des indices. Il monta donc dans un
fiacre qui le mena à travers Paris, en une trentaine de minutes, au pied de la
bâtisse. Mais c'était presque trop simple pour le commissaire qui, malin,
l'attendait depuis longtemps déjà.

Eugène ne l'ayant pas vu se dirigea vers l'entrée. Il pénétra dans le
bâtiment, se rendit sur la scène pour trouver des indices que le commissaire
n'aurait pas vus. Il emprunta le chemin que le fantôme avait pris pour fuir. Il se
retourna après avoir entendu des bruits de pas.

Il n'y fit pas attention et descendit les marches qui menaient au sous-
sol. En descendant il vit le lac présent sous les fondations. Le lac qui menait
sous le Louvre ! ...

Un choc sur le crâne envoya Eugène dans les limbes. Il se réveilla, la
tête couverte d’une cagoule bleue.
— Retirez-lui son capuchon, grinça une voix.

Eugène découvrit une table, une lampe à gaz sur cette table, deux
types en redingotes noires avec des gueules d’assassins assis en face de lui.

Et dans un coin, sur un trône…
— Votre Majesté ?

Napoléon III se leva, s’approcha. Son visage paraissait machiavélique.
— Première question, commença-t-il.

Le récit était brusquement interrompu à cet endroit. La suite des pages
avait disparu…

Le deuxième manuscrit s’intitulait La Lune sanglante , un titre
prometteur…

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2 - La Lune sanglante

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La bibliothèque impériale

Vêtu de son habituel costume bleu marine et de son
grand chapeau noir, Victor Du Pont entra dans la
bibliothèque impériale, une bâtisse impressionnante. Le
parquet en bois ancien grinça sous le poids de son
corps.Sur le porte-manteau situé à sa droite, il déposa sa
gabardine et son chapeau. Il alla choisir le livre qu'il allait
dévorer ce jour-là, tout en observant les lecteurs de la
bibliothèque. Et il les observa dans le détail.

Paul, un homme âgé d'une vingtaine d'années,
toujours installé à la table 13, avec à la main ce même livre Londres et ses
secrets.

Margaux Roberts, vêtue entièrement de rouge sang, avec son fidèle sac
à main noir que personne n'a réussi à entrouvrir.

Adam O'Connor qui errait souvent dans la réserve, comme s'il était à la
recherche d'une chose qu'il n'a jamais réussi à trouver. Et plein d'autres
personnes comme perdues dans cette bibliothèque.

Victor était atteint depuis tout petit de troubles mentaux. Il souffrait de
« démence précoce ». A cause de sa maladie il avait du mal à trouver un
travail. Il s'était donc mis à écrire en pensant un jour que ses livres seraient
publiés.

Victor écrivait très souvent des romans romantiques ou bien
fantastiques mais cela n'allait guère loin.

En attendant, il avait réussi à être employé dans la bibliothèque
impériale et cela l'avait bien aidé afin de se renseigner pour écrire ses propres
livres.
Tout en passant minutieusement ses doigts sur les livres posés sur ces
immenses étagères, il aperçut une femme qu’il n'avait jamais vue auparavant.

Ses cheveux blonds étaient semblables aux champs de blé un jour
d'été, ses yeux bleus avaient la couleur de l'océan et elle portait un manteau
en coton couleur cannelle.

Victor, lui, lisait le livre intitulé Le Champ du berger. La fille s'installa en
face de lui et commença sa lecture. Il l'observa de très près et nota ses
moindres faits et gestes dans un de ses carnets.

Les jours passèrent et chaque fois cette fille était là aux mêmes heures
que Victor.

Dans un premier carnet il écrivait tous ses déplacements, dans un
second, il écrivait tous ses contacts à Paris, ses connaissances et dans un
troisième tous ses rendez-vous, les endroits qu'elle fréquentait...
Grâce à quelques billets qu'il avait fournis à la bibliothécaire, il réussit à trouver
son nom. Elle se nommait Beck Cooper et elle était Anglaise.

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AE38, cote d'alerte à la BNF

Sur les toits de Paris
Beck Cooper, une jeune anglaise, âgée de 17 ans, venue tout droit de

Londres, était issue d'une famille bourgeoise et venait d’emménager à Paris
pour ses études. Elle suivait des études de littérature dans une grande école
française.

Beck avait un caractère très ambitieux tout en étant très discrète, elle
aimait les choses simples et les gens libres d'esprit.
Elle avait grandi dans l'immense ville qu'est Londres. Dans sa famille tout avait
toujours été très strict. Elle avait toujours eu de bonnes notes et fait en sorte
que tout soit parfait.

Elle était l'aînée de sa famille qui était composée d'un frère et d'une
sœur à peine plus jeune qu'elle.

Une fois arrivée à Paris, elle avait vite fait la découverte de magnifiques
bâtiments comme cette bibliothèque où elle allait chaque jour pour entretenir
ses connaissances et sa nouvelle langue qu'était le français.

Ce vendredi de pluie, Beck courut vite pour se réfugier dans la
bibliothèque et poursuivre la lecture de son livre. Elle bouscula ce jeune
homme vêtu d'un costume bleu marine et d'un chapeau noir. Beck s'excusa et
ils firent connaissance. Il s'appelait Victor Du Pont.
Pour se faire pardonner, elle l'invita à aller prendre un café un prochain jour,
quand il ne pleuvrait plus et que le soleil serait de nouveau de sortie.
En vérité Beck avait déjà bien observé cet homme en bleu qui la fixait parfois.

Mais ils n'avaient jamais échangé entre eux un seul regard ou même
quelques mots.

Désormais elle connaissait son identité.

Le jour de leur rendez-vous, ils allèrent prendre un café ensemble dans
un bar pas très éloigné de la bibliothèque. Le bar s'appelait « Au Petit Creux ».
Pendant une heure, ils parlèrent de leur vie dans une ambiance très
sympathique et amicale autour d'un bon café chaud, ils se racontèrent leurs
passions, leurs points communs et bien évidemment ils examinèrent leurs
différences qui étaient d'un plaisant bonheur.

Elle aimait beaucoup les romans qui finissaient mal, lui préférait les
romans à l'eau de rose, elle aimait bien vivre une vie pleine de
rebondissements, lui préférait avoir une vie simple sans dérangements.
— Ah, Paris ! Quelle merveille !
— Je suis tout à fait d'accord avec vos propos, moi je suis né ici et tout le
charme de cette ville me plaît merveilleusement !
— Comme vous parlez bien ! Dites-moi, je cherche quelqu'un... enfin une
personne de bonne volonté qui accepterait de discuter avec moi. Pour
améliorer mon français.
— Je suis tout à vous si vous le voulez, je vous aiderai pour votre français et je
pourrai ensuite vous faire visiter la ville un de ces jours, cela ne me

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dérangerait point.
— Marvelous !
Elle tapa dans ses mains.
— Donc, là, nous allons admirer une éclipse.
— Parfait je vous emmène sur les toits de Paris. Vous verrez, c'est merveilleux
et grandiose !

La nuit tomba et ils gravirent les escaliers d'un immeuble au cœur de
Paris afin de voir la plus belle éclipse de lune qui avait lieu ce soir même. Ils
s’installèrent et Victor descendit dans une rue chercher quelque chose pour les
abreuver.

Il remonta et commença à lancer des injures à Beck qui, perdue comme
un enfant, ne savait plus où se mettre.
— Mais… Que fais-tu à fouiller dans mes affaires, personne ne t'a jamais
appris la politesse, je ne pensais pas que vous seriez ainsi ! dit-il à Beck.
— Victor vous hallucinez ! Un de vos carnets est tombé de votre sac je ne
faisais que le remettre à sa place !
— Tu n'es qu'une profiteuse !
— Mais… mais… Victor... comment peux-tu penser cela de moi ?
— Tais-toi donc, la vérité est que vous êtes qu'une usurpatrice !

Et il perdit l’esprit au point de ne plus se contrôler lui-même.

Quand Victor se réveilla, il était toujours sur le toit. A ses côtés il vit
Beck ensanglantée et sans vie.

Il cria à l'aide. Un homme arriva, affolé par ses cris. Ce devait être un
habitant de l'immeuble, il était encore en robe de chambre.
— Oh seigneur ! Mais que s'est-il donc passé ici ? dit l'homme catastrophé par
ce qu'il était en train de voir.
— Monsieur, s'il vous plaît, aidez-moi, je vous en conjure, je me suis réveillé et
j'ai vu ce massacre. Je pense qu'un meurtrier l'a tuée et m'a aussi assommé.
— Je vais appeler la police, mais je ne pense pas qu'ils vont pouvoir faire quoi
que ce soit, ils sont tellement débordés, Paris est bombardée de catastrophes.
Ils vont juste prendre votre déposition et vont ensuite laisser cette affaire de
côté surtout avec une étrangère…
— Je pense qu'elle voulait me faire du mal, ou dérober quelque chose !
— D'accord, rentrez chez vous, je vais en parler à la police, reposez-vous.

Victor marcha dans la rue, seul, dans le froid. Il vit une silhouette, on
aurait dit l'ombre de Beck. Victor courut, courut si vite que l'ombre disparut.
Victor éclata en sanglots et cria : " BECK ! "
— Je peux vous aider.
— Mais qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ?

Un homme en noir se tenait devant Victor, comme s'il était apparu, d'un

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coup.
— Je parle aux esprits. Du moins, je les entends.
— Mais vous êtes fou, les esprits n’existent pas !

L'homme posa une main glacée sur le front de Victor.
— Pourtant, ils vous habitent.
— Mais, mais qui ?
— Cette anglaise... elle dit... elle hurle...

L'homme recula, épouvanté.
— Vous.... vous l'avez...
— Je l'ai quoi... ?

L'homme sortit un sifflet de son manteau et souffla dedans. Trois
hommes en redingote noire accoururent depuis l'autre côté de la rue.
— Que se passe-t-il ? Qui êtes-vous ?

Les hommes se jetèrent sur Victor, puis l’assommèrent.
Victor ouvrit petit à petit les yeux. Ses paupières étaient lourdes, il avait
un mal de crâne pas possible.
Il s'aperçut très vite qu'il était attaché dans une petite prison. Tout était
très raffiné. Les murs étaient en marbre, les barreaux plaqués or et son lit
recouvert de velours rouge avec des abeilles brodées.
Il entendit une voix, une voix grave et rocailleuse. Des pas se
rapprochèrent. Victor écouta attentivement. C'était des talonnettes. Était-ce
une femme ? Victor se posa cette question.
— Napoléon III !
— Victor du Pont, bibliothécaire à la Bibliothèque Impériale de Paris.
— Les hommes en noir ?
— Appelez-les comme vous voulez. Apparemment vous avez tué Beck
Cooper!
— Mais c'est impossible.
— Pourtant mes hommes ont lu dans votre esprit, je vais devoir le récupérer et
te couper ta tête car ton cerveau vaut des milliers de francs.
— Jamais je ne vous donnerai mon cerveau !

Des jours et des jours passèrent, Victor était toujours enfermé dans
cette petite prison. Mais il vit à sa droite une fissure dans le marbre blanc. Il
demanda donc à Napoléon III de déplacer son lit devant la fissure, afin de
cacher sa future évasion.
— Que se passe-t-il ? Veux-tu à manger ? Nous avons du magret sur son lit
de haricots.
— Non, c'était juste pour vous demander de déplacer mon lit de manière à ce
que je puisse voir la belle lueur du soleil quand je me réveille. Mais je
prendrais bien le magret en plus.
— Oui, si tu veux, mais fais-le toi-même, je ne vais pas appeler mes hommes
pour ça ! Je t’amène le magret.

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Encore mieux pour Victor, Napoléon ne verrait donc jamais cette fissure.
Quelques minutes plus tard Napoléon arriva, accompagné de ses chefs de
cuisine. Ils servirent le magret à Victor avec de beaux couverts en argent,
parfait pour creuser.

Napoléon couvrait Victor de cadeaux comme un enfant qu'on pouvait si
facilement adoucir avec quelques bonbons.

Il voulait son cerveau, peu importe le prix qu'il allait coûter mais Victor
lui, laissait croire à cet Empereur qu'il gagnerait. Mais jamais il ne laisserait un
homme lui ôter la vie.

En attendant de pouvoir s'échapper, Victor profitait bien de tous ces
cadeaux si chers, qu'il n'aurait jamais pu acheter un jour.

Après son repas, jour après jour, il attendait que Napoléon fasse sa
balade de l'après-midi pour creuser dans le sol de sa chambre. Il se doutait
qu'il y avait les égouts en dessous. Et il avait raison !

Quand il arriva aux égouts, il courut comme jamais.
Il continuait de progresser rapidement et il était presque arrivé aux
immenses grilles de la demeure. A bout de souffle il continuait de courir car sa
vie ne tenait qu'à sa course et à sa rapidité...

Un choc sur le crâne envoya Victor dans les limbes. Il se réveilla, la tête
couverte d’une cagoule rouge.
— Retirez-lui son capuchon, grinça une voix.

Victor découvrit une table, une lampe à gaz sur cette table, deux types
en redingotes noires avec des gueules d’assassins assis en face de lui. Et
dans un coin, sur un trône…
— Votre Majesté ?

Napoléon III se leva, s’approcha. Son visage était machiavélique.
— Première question, commença-t-il.

Ce récit était lui aussi interrompu à cet endroit. La suite des pages avait
disparu…

Le troisième manuscrit s’intitulait « La Lettre fatale », un titre
inquiétant...

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3 - La Lettre fatale

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Notre-Dame
Gribouille sortit du taudis dans lequel il occupait une

chambre misérable, un garni sous les toits. Rue de la
Licorne. Elle portait bien mal son nom...

Il se dirigea vers la cathédrale où il retrouvait, tous les
matins, avant de partir à l'école, son ami, Victor. Là, il s'assit
sur les marches de Notre-Dame, et commença à manger
son maigre petit déjeuner sans son ami qui était en retard.

Gribouille était un pauvre petit garçon plein de ressources
mais ignorés par ses parents qui le traitaient comme un moins que rien. Avec
ses cheveux d'un roux flamboyant et ses yeux d'émeraude, il avait tout pour
plaire mais ses camarades le trouvaient trop étrange et le mettaient à l'écart
sauf Victor avec qui Gribouille était devenu proche très vite.

Quand huit heures sonnèrent, il leva la tête vers la cloche et fut pris
d'effroi devant ce spectacle. Une corde était accrochée au bourdon de Notre-
Dame et à son bout pendait un corps inerte et sanglant.

Il entra dans la cathédrale et courut jusqu'au corps. Il le retourna. Là, il
vacilla. Il se laissa tomber contre la rambarde et hurla à la vue de son meilleur
ami.

Des pas résonnèrent dans l'escalier et un moine surgit :
— Sacrebleu ! cria-t-il. Que s'est-il passé ?
— Ce n'est pas moi, mon père ! Je vous le jure ! Victor est mon ami, je n'aurais
jamais pu faire ça !
— Bien sûr ! Je te connais. Tu aurais été incapable de le tuer... Oh... Mon
Dieu!

L’école
La tête dans les mains, Gribouille repensait au cercueil de son ami

passant devant lui. Il n'avait même pas pu lui faire ses adieux, même pas un
petit signe de main. Ses parents l'avaient ramené chez lui avant que le prêtre
ne fasse sa prière. Victor n'avait pu prononcer ses dernières volontés.
Pourtant, il était son meilleur et son seul ami. Il avait toujours été là pour lui.

Quand Gribouille s'était cassé la jambe en tombant des escaliers de
l'école, Victor l'avait porté jusqu’à l'infirmerie. C'est lui qui l'avait hébergé à
chaque fois que les parents de Gribouille l'avaient mis dehors. Mais
maintenant Victor n'était plus là et il devait se débrouiller seul, sans son ami...

Une voix interrompit ses réflexions et la maîtresse le ramena à la
réalité:
— Gribouille ! Je t'ai posé une question !
— Comment ? Excusez-moi, je n'étais pas concentré...
— Ça fait déjà deux semaines que tu n'es plus avec nous et que tu ne
travailles plus ! Qu'est ce qui se passe ? Tu viendras me voir à la fin de l'heure.

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— Oui madame... bredouilla Gribouille qui se demandait qui pouvait bien être
le meurtrier.

Après le cours, Gribouille se faufila entre les élèves mais au moment où
il atteignait la porte, une voix l'interpella :
— Gribouille, viens ici, s'il te plaît ! dit l’institutrice.
— Désolé, madame, mais je n'ai pas le temps. Dit Gribouille qui s’échappa en
courant.

La morgue
Il fonça à travers les rues désertes et atteignit la cathédrale
en un temps record. Là, il se dirigea vers la morgue et y
entra. Il s’approcha d’un homme assis au fond de la pièce
pour l’interroger sur son ami.
— Tu es Gribouille, c’est ça ?
— Oui, c’est moi… hésita celui-ci.
— J’ai trouvé un papier à ton attention dans la poche de
Victor, dit le croque-mort en se dirigeant vers un bureau. Il

ouvrit un tiroir et en sortit une enveloppe froissée au nom de Gribouille qu’il lui
tendit. Gribouille remercia l'homme.

Dehors, il faisait déjà nuit. Il leva la tête et aperçut une lune sanglante
dans le ciel.

Il marcha jusqu'à chez lui avec le sentiment d'être suivi mais il n'y avait
personne aux alentours. "Sûrement l'éclipse de Lune qui me tourne le
cerveau" se dit-il.

Arrivé chez lui, il s'assit à son bureau et ouvrit la lettre qui, sans le
savoir, allait changer sa vie.

La lettre
Gribouille
Je te suis, je t'observe et je te connais par cœur.
J'ai tué ton seul ami et je sais où te trouver.
Obéis-moi et il ne t'arrivera rien.
Ne fais pas ce que je te demande et tu mourras ainsi que toute ta famille.
Voici les instructions :
Rends-toi au 8 rue de la Licorne.
Neutralise la vieille dame qui y habite.
Vole la clef qu'elle a au cou.
Elle te servira à ouvrir une porte cachée derrière l'étagère située au fond du
couloir.
Là, tu trouveras un coffre fermé.
Prends-le et apporte-le en haut du clocher de notre Dame.

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Et repars sans poser de question.
N'oublie pas que même si je ne suis pas là, je t'observe.
Q.

Gribouille se réveilla sur les coups des sept heures. Il avait passé la
moitié de la nuit à réfléchir. Tout engourdi, il descendit prendre son petit
déjeuner à la cuisine quand il remarqua deux yeux jaunes qui l'observaient
derrière la fenêtre. Gribouille cligna des yeux et ils disparurent dans l'obscurité.
Il attrapa une pomme rouge et sortit de la maison après avoir dit au revoir à
ses parents. Il se sentit suivi pendant tout le trajet mais ne remarqua personne
d'étrange. Toujours dans ses pensées, il franchit la grille de l'école sans s'en
rendre compte quand une voix l'interpella :
— Gribouille ! Viens me voir dans mon bureau, s'il te plaît !

Le petit garçon suivit la maîtresse dans une pièce située au fond de la
cour et s'assit sur une chaise en bois, derrière le bureau.
— Maintenant, j'aimerais que tu m'expliques ton comportement bizarre depuis
quelques jours.
— Depuis la mort de mon ami Victor, comme vous le savez, je remets en
question ma raison de vivre...
— Mais, Gribouille, comment peux-tu dire cela ! C'est atroce ! Tu n'as que
douze ans et toute la vie devant toi ! Victor est mort, c'est vrai, mais il y a
d'autres personnes autour de toi qui t'aiment. Tu sais, moi...

Gribouille n'écoutait plus. Il venait de voir, derrière la fenêtre, les mêmes
yeux jaunes aperçus le matin même.

Après les cours, Gribouille prit le chemin de sa maison avec la même
sensation d'être suivi. Quand il entra chez lui, il sentit comme une odeur de
brûlé. Il courut dans la cuisine où il vit un corps inerte au milieu d'une fumée
noire. Gribouille se couvrit le nez de sa manche et avança dans cette fumée.
Là, il se dirigea vers la cheminée, déversa un seau d’eau. Il ouvrit grand les
fenêtres en toussant et se dirigea vers le corps inerte.

Il ne distingua qu'une chevelure rouge au milieu de toute cette fumée et
tomba à genoux. Il voulut hurler mais la fumée l’empêchait de respirer
correctement. Il se pencha sur sa mère, lui attrapa le poignet et tenta de sentir
son pouls mais il ne perçut rien. Les joues baignées de larmes, il relâcha la
main de sa mère et resta immobile pendant plusieurs minutes.

Quand la fumée fut assez dissipée, Il aperçut un bout de papier qui
dépassait de la poche du pantalon de sa mère. Il le sortit, le déplia et reconnut
l'écriture : "Fais ce que je te dis ou ce sera au tour de ton père". Gribouille se
releva tout tremblant et tourna sur lui-même mais il ne vit personne.

En quelques secondes, il prit sa décision : il allait suivre les instructions
de la lettre. Il attrapa un couteau dans un tiroir, son manteau dans le couloir et
sortit de la maison. Là, il se dirigea vers la maison de sa voisine et sonna à la
porte. Une vielle dame lui ouvrit :

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— Oh ! bonjour Gribouille ! Entre, je t'en prie !
— Merci madame, bredouilla-t-il.

Il entra dans la maison et la vielle dame lui proposa de manger quelque
chose. Le petit garçon accepta. Elle attrapa une boîte de gâteaux dans le
placard et la posa sur la table. Gribouille fit tomber la boîte par terre et attendit
que la vieille dame se penche pour sortir le couteau de son manteau. Il
l'approcha du cou de la retraitée...

Mais il ne put se résoudre à la tuer. Il retourna son couteau et assomma
la grand-mère avec le manche. Il se précipita vers la porte du fond cachée
derrière l'étagère après avoir pris la clef au cou de cette dame. Il ouvrit la
porte, prit le coffre caché derrière et courut en dehors de la maison...

Un choc sur le crâne envoya Gribouille dans les limbes. Il se réveilla, la
tête couverte d’une cagoule orange.
— Retirez-lui son capuchon, grinça une voix.

Gribouille découvrit une table, une lampe à gaz sur cette table, deux
types en redingotes noires avec des gueules d’assassins assis en face de lui.
Et dans un coin, sur un trône…
— Votre Majesté ?
Napoléon III se leva, s’approcha. Son visage était machiavélique.
— Première question, commença-t-il.

Encore un récit interrompu. La suite des pages avait disparu…
Le quatrième manuscrit s’intitulait « Le Paradoxe de l’Ange», un titre qui
me laissa sceptique...

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4 - Le Paradoxe de l'ange

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La morgue
Autrefois, les gens désespérés se suicidaient dans la
Seine ou des gens inconscients se baignaient et le courant
les emportait puis les noyait. La morgue était pleine et les
gens venaient régulièrement contempler les corps.
Mr Perrier, un postier de trente-deux ans, faisait partie de
ceux qui inspectaient les nombreux défunts. Il passait une
heure par jour à observer chaque corps au visage
boursouflé.
A cause de la forte odeur de putréfaction qui donnait des

nausées, Mr Perrier portait un masque qui datait du XIVè siècle. Dedans, il y
avait des herbes pour l’empêcher de vomir.

Ce jour-là, à la fin de son inspection, il discutait avec le gardien.
— Eh bien, monsieur Perrier. Encore en visite dans l'antichambre de la mort ?
— Eh bien oui, monsieur. Je fais de mon mieux pour aider.
— Mouais. Pour aider...
— Ben oui, ne pensez-vous donc pas que je suis sadique à ce point ?
— Non. Pardonnez-moi. Vous avez perdu votre femme, c'est cela ?
— Malheureusement...la souffrance est grande mais il y a peut-être un moyen
de la sauver ?
— Euh... Si je ne me trompe, votre femme repose dans un de nos tiroirs
réfrigérés depuis près de deux semaines.
— Oui, mais il faut beaucoup de temps, vous comprenez, pour accepter la
mort d'un être proche....
— N'empêche, comme vous le savez, demain on l'inhume. L'enquête n'a rien
donné. On ne connaîtra jamais son assassin.
— Je n'abandonnerai pas si facilement, je me battrai ! Je compte bien le
retrouver et la venger à mon tour.
"Oui, oui, c'est ça !" Pensa le gardien.

Le fleuve
Sur le chemin du retour, Mr Perrier, du bord de la Seine vit, au loin, un

nageur imprudent, ivrogne. Il eut un mauvais pressentiment. Il courut. Le
courant emportait l'homme à la dérive sans qu'il ne s'en aperçoive. Petit à
petit, il se noyait, ivre.

Mr Perrier s’empressa de sauter sur la péniche depuis un pont en aval.
Il récupéra la bouée de sauvetage et la jeta sur l'homme. La bouée, dure, tapa
l'homme en plein crâne. Il perdit connaissance.

Mr Perrier se jeta dans la Seine pour le sauver. Il le remorqua mais une
vague le submergea. Sans perdre espoir, il continua de nager de toutes ses
forces.

Ils finirent par rejoindre la berge.
— Qui êtes-vous ? demanda l'homme.

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Il n'avait même pas remarqué qu'on l’avait sauvé de la noyade.
— Cela n'a pas vraiment d'importance, mais votre état en dit long.

L'homme s'était ouvert le crâne à cause de la bouée.
— Quel est votre nom ? Pourquoi êtes-vous là et pourquoi suis-je ici ?
— Je m'appelle Mr Perrier, Hervé Perrier. Vous avez été emporté par le
courant de la Seine. Je ne voudrais pas me jeter des fleurs, mais en quelque
sorte, je vous ai sauvé...
— Merci infiniment. J’ai une de ces douleurs au crâne...
— Vous n'avez qu'une petite égratignure. Allons à l'hôpital pour désinfecter ça.
— Je préfère rentrer chez moi, me reposer...
— Non, monsieur, vous devez aller à l’hôpital !
— Pour tout vous dire je ne me sens pas à l'aise avec un infirmier dans les
parages.
— Eh bien, venez chez moi, alors ! Je vis seul, depuis...
— Depuis ?
— Ma femme est à la morgue et en plus, je n'ai plus de compagnie pour
regarder l'éclipse totale !
— Juste quelques heures alors...

Les deux personnages allèrent chez Mr
Perrier.

L'homme était mal à l'aise en voyant les
portraits nombreux de la femme morte.
— Merci de m'accueillir dans votre demeure,
Mr...
— C'est la moindre des choses !
— En ce moment, je ne suis pas très bien...
— Comment ça ?
— J'ai fait des choses antipathiques...
— Comment ça ?
— Je ne peux pas vous le décrire, c'est trop cruel.
— Ça ne doit pas être si terrible...
— Vous ne pouvez pas imaginer.
L'homme admira un portrait de Madame Perrier réalisé par le grand
Nadar.
— C'est votre femme ?
— Effectivement, elle est morte, je l'ai retrouvée à la morgue.
— Je suis désolé. Que lui est-il arrivé ?
— Je ne sais point.
— C'est affreux ! Et vous supportez ce chagrin ?
— Malheureusement non...
Mr Perrier vit la gêne de l'homme et commença à avoir des doutes.
L'homme se leva.

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— Bien. Je me sens mieux. Je vais vous laisser.
— Pas si vite...
— Que se passe-t-il ?
— Vous avez oublié votre manteau...
— Ha, oui, merci !

Mr Perrier suivait à bonne distance l’homme qu’il avait sauvé de la
noyade. L’autre se méfiait et se retournait souvent. Il finit par s'arrêter dans un
café. Mr Perrier, sans prendre de risque, s'arrêta dans le café en face. La
filature reprit.

Après l'avoir suivi jusqu'à son domicile, il mit en place un plan pour le
faire avouer.

Chaque soir après la fin de sa dure journée de travail, il passait par la
maison du meurtrier présumé pour y déposer un colis mystère. Le contenu
était toujours différent : une carte de mariage, un couteau...

Quelques jours plus tard, cet homme décida de mettre une petite
clôture autour de sa maison. Tourmenté par le remords, il voyait la Faucheuse
en personne rôder près de chez lui.

Après des semaines et des semaines passées sans sortir, il devint fou.
Il s'alcoolisait énormément pour enlever cette vision de la tête. C'était
un peu comme le cheval de Troie.
Trois mois plus tard, Mr Perrier prit la grande décision de lui laisser une
lettre lui donnant rendez-vous à la bibliothèque impériale. Sans succès.
Il eut une autre idée, plus directe : aller droit au but en lui rendant visite.
Devant sa maison, il toqua à la porte et attendit. Pas de réponse.
Il entra alors par effraction, sentit une odeur épouvantable, vit le corps
de l'homme affalé...
Il ausculta le corps et regarda son état. Aucun signe de vie. Allumant
une bougie, il prit le temps de fouiller toute la maison dans tous les recoins.
Après avoir fait le tour de la demeure, il vit une porte en bois entre
ouverte, et il décida de s'approcher.
Avec un peu de mal, il réussit à entrer dans une petite salle
poussiéreuse. Avec maladresse il appuya sur un bouton qui déclencha une
petite explosion avec un peu de fumée.
Reprenant ses esprits, il s'enfonça dans la pièce, toujours rien en vue.
Quelques dizaines de mètres après, il vit une trappe.
Mais un cadenas la verrouillait, rien autour ne permettait de l'ouvrir sauf
une petite boîte avec quelques dessins d'enfants à l’intérieur et une clef.
Il la tourna et la trappe s'ouvrit !
Un petit escalier descendait vers une lumière éblouissante verte,
étrange... Il commença à descendre les escaliers grinçants, inconscient.
Des corps et des corps s’étalaient à perte de vue. Il y en avait peut-être des
dizaines ou des centaines, peu importe, ce qui comptait c'est qu'il y avait le

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corps de ses quelques voisins qu'il n’avait hélas point vus depuis quelques
semaines....

Soudain la bougie s'éteignit.
Un choc sur le crâne envoya Mr Perrier dans les limbes. Il se réveilla, la
tête couverte d’une cagoule violette.
— Retirez-lui son capuchon, grinça une voix.
Mr Perrier découvrit une table, une lampe à gaz sur cette table, deux
types en redingotes noires avec des gueules d’assassins assis en face de lui.
Et dans un coin, sur un trône…
— Votre Majesté ?
Napoléon III se leva, s’approcha. Son visage était machiavélique.
— Première question, commença-t-il.
Ce récit était lui aussi interrompu à cet endroit. La suite des pages avait
disparu…
Le cinquième manuscrit s’intitulait « Terreur sous terre ». Je m’attendais
au pire...

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5 - Terreur sous terre

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Les catacombes
Moi, M.Poltron, travaillai dans les catacombes de

Paris car je craignais les vivants. Je préférais les morts
car je savais qu’ils ne me faisaient pas de mal.

La nuit dernière, j’ai eu très peur. J’ai entendu des
cris. Je me suis réfugié dans l'ossuaire, là où je loge, en
fermant la porte à clé. Le lendemain, j’ai découvert un
homme avec un os planté dans le thorax. J’ai compris
que ce n'était pas normal.

J’ai voulu l'examiner. Une rangée d'os m’est tombée
dessus. La salle se refroidissait de plus en plus. Les os
commencèrent à geler puis j'eus un frisson. J'eus l'impression que l'on
m'observait... Mais pourtant toujours rien.
Le lendemain, je me réveillai en sueur, avec une sensation de vertige et
tout faible. Le climat avait tout d'un coup changé. Je voulus affronter ma peur
et aller voir le mort. Mais le corps avait disparu. Je vis des traces de sang au
sol et je les suivis. Jusqu’à ce que je me cogne à un corps pendu, nu. Une
phrase écrite sur son ventre avec du sang disait " Si tu continues tu seras à sa
place ". Je sentis mon cœur battre à vive allure et mon sang se glacer. Je
courus me cacher entre les squelettes.

L’Hôtel-Dieu
Je me réveillai sur un lit d'hôpital, je venais de me rappeler une scène

que j'avais vécue vingt ans plus tôt. Je me levais et sortis.
— Une minute mon ami !

Le médecin de garde venait de m'arrêter.
— Qu’y a– t– il ?
— On ne sort pas comme cela, Mr. Qui me dit que vous avez toute votre tête ?
— Comment ça toute ma tête ?
— Vous avez pris un gros coup sur la caboche, hier soir. Vous ne vous
rappelez de rien ?
— Heu...OUI ! Je m'en souviens ! J’étais dans les catacombes, n’est– ce–
pas ?
— Quelqu'un vous a donné un coup de tibia sur le crâne.
— Pourquoi la lune est– t– elle rouge ?
— C'est une éclipse. On appelle cela une lune de sang.

La lune de plus en plus rouge avait l’air de me suivre. Étais-je fou ?
— Je veux rentrer chez moi, laissez-moi partir s' il vous plaît ! ! !
— Ola ! Je ne vous retiens pas ! On a assez de fous, merci. Et vous avez l'air
de tenir sur vos guibolles. Allez ! Du balai !
— Merci pour tout.

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AE38, cote d'alerte à la BNF

Je décidai de retourner dans les catacombes. Quand j'arrivais, les corps
n'étaient plus là mais les traces, si ! J'avais l'impression que tout avait disparu !
L'assassin avait commis le crime parfait !

Pourtant, quelque chose me chagrinait. Les os n'avaient pas la même
disposition que la dernière fois.

Tout d'un coup, j'entendis un bruit sordide ! Les squelettes se mirent à
bouger...
— Poltron ! Poltron !
— QUI ME PARLE ?
— Ici ! Ici !
— Je ne vois personne ! ! A part des os ! Suis-je fou ! ?
— Mais non. Tu as toute ta tête !

Un crâne rebondit sur le mien, de crâne. Un squelette m’interpellait.
— Mais...mais... vous êtes vivant ? Depuis tout ce temps que je vous confiais
tous mes secrets !
— Ne vous en faites pas. Bon. Il y avait bien un mort. Enfin, plusieurs. On
aurait bien aimé les garder. Ça nous aurait fait de la compagnie. Mais ils sont
venus les prendre.
— Qui ? Qui sont venus pour les prendre ?
— Des hommes en noir. Des assassins.
— Avez-vous une idée de qui sont ces assassins ?
— Noooonnnn ! Mais ils faisaient peur. J'en avais les os qui tremblaient !
— Arrêtez ! Arrêtez ! Vous me faites peur !
— D'ailleurs... On les entend. Ils reviennent !

J'eus juste le temps d'aller me cacher. J'essayais de m'enfuir mais ils
me virent. Alors une course poursuite s'engagea. Au moment où ils
s'approchaient, je tombai sur un tas d'os qu'ils avaient fait tomber juste devant
moi. J'eus la chance de trouver une autre issue mais la porte était bloquée.
Par chance un tremblement de terre fit tomber tous les os sur eux.

Je pris un fémur et défonçai la porte avec tellement de force que je fus
éjecté à plus de deux mètres. Je me relevai quand soudain, ils me repérèrent
et me poursuivirent à nouveau. Ils me suivirent, et j'eus peur de tout, des
hommes, et des chiens qu'ils avaient lâchés et qui me suivaient à la trace.

En face de moi, je vis une armée de rats prêts à me sauter dessus ! Pas
d’issue, pris entre les rats, les chiens et les redingotes…

A ce moment, il y eut un nouveau tremblement de terre. Le sol s'ouvrit
devant moi. Venait d'apparaître une sorte de taupe mécanique. Une écoutille
s'ouvrit dans le flanc métallique. Une voix me lança :
— Venez !
— Ah, vous tombez à pic !

Je décidai de monter dans la taupe avec cette inconnue, car il s'agissait
d'une jolie jeune femme.

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Je sentis une sensation étrange, je n'avais pas peur d'elle, moi qui suis
si craintif avec les humains.
— Fermez l'écoutille. Sinon nous ne partirons pas, dit-elle avec un charmant
sourire.
— Oui, capitaine !

Trois rats parvinrent à se glisser dans le navire. Deux s'enfuirent. Le
troisième se transforma... en redingote noire!
— Mon dieu ! Nous ne sommes pas sortis du pétrin !

La belle pirate sortit un sabre et en deux temps, trois mouvements elle
éjecta la redingote hors de la taupe mécanique.

Quelques minutes plus tard, la taupe remonta à la surface et je pus
sortir. Autour de nous, personne. Les rues de Paris étaient désertes. Un
silence assourdissant régnait. Paris semblait aussi vide que le fond de ma
poche. Puis, je remarquai un petit café. Alors ma partenaire et moi nous y
rendîmes.

A l’intérieur, nous vîmes qu'il y avait l'un des plus grands écrivains de
France, Victor HUGO. Il déclamait :

— Puis il descendit seul sous cette voûte sombre.
Quand il se fut assis sur sa chaise dans l'ombre
Et qu'on eut sur son front fermé le souterrain,
L’œil était dans la tombe et regardait Caïn.
Nous fîmes connaissance.

Après deux, trois verres, et d’autres vers (l'étang mystérieux, suaire aux
blanches moires) Victor me demanda de le suivre. Nous étions ivres, et nous
sortîmes. Il me montra toutes ses œuvres qu'il stockait dans un coin.
— Regardez ! La première version de Notre-Dame de Paris ! Je la croyais
perdue dans un déménagement. Mais non, elle est là.
— Magnifique !

Il continua à me montrer ses exploits littéraires quand un bruit résonna.
Victor courut et se cacha un peu plus loin.
— Sur la porte on grava : « Défense à Dieu d'entrer » ! lança-t-il.

Quand j’entendis cette phrase, je pris peur. Je n'eus pas le temps de
comprendre ce qui m'arrivait. Je courus me cacher à mon tour.

Un choc sur le crâne envoya Mr Poltron dans les limbes. Il se réveilla, la
tête couverte d’une cagoule noire.
— Retirez-lui son capuchon, grinça une voix.

Mr Poltron, qui avait repris forme humaine, découvrit une table, une
lampe à gaz sur cette table, deux types en redingotes noires avec des gueules
d’assassins assis en face de lui. Et dans un coin, sur un trône…
— Votre Majesté ?

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Napoléon III se leva, s’approcha. Son visage était machiavélique.
— Première question, commença-t-il.
La suite des pages avait disparu… Le manuscrit suivant s’intitulait
« Camille». Je m’interrogeais...…

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