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« Nous avons essayé de tout contrôler mais nous avons fini par créer quelque chose que nous ne contrôlons pas, et que nous ne pouvons peut-être pas comprendre. Car telle est la caractéristique de la véritable intelligence artificielle : par définition, c’est quelque chose que l’on ne peut pas comprendre. Si on peut la comprendre, alors ce n’est qu’une machine. C’est quand les machines commencent à faire les choses qui nous échappent, que nous ne comprenons pas, que l’intelligence peut vraiment survenir. » George Dyson

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Published by interface.art, 2016-07-27 11:26:03

techno-myst

« Nous avons essayé de tout contrôler mais nous avons fini par créer quelque chose que nous ne contrôlons pas, et que nous ne pouvons peut-être pas comprendre. Car telle est la caractéristique de la véritable intelligence artificielle : par définition, c’est quelque chose que l’on ne peut pas comprendre. Si on peut la comprendre, alors ce n’est qu’une machine. C’est quand les machines commencent à faire les choses qui nous échappent, que nous ne comprenons pas, que l’intelligence peut vraiment survenir. » George Dyson

Keywords: technomyst, aura, Dorothée Smith, Franck Balland, Nicolas-Xavier Ferrand, cybercon-science, antropologie cybernétique, Shana Moulton, cyborg, Clotilde Morette, digital naives, le mythe numérisé, Lauren Huret, Benjamin Blanquart, Céline Poulin, this space between you and me, androïdes, Nolwenn Salun

www.interface-art.com le journal de l’art contemporain, juin. - nov. 2016
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n°37 MTEYCSHTNO-

1 couverture :
Benjamin Blaquart, The gesture of wisdom (Jnana Mudra), 2016

EditoLe techno-mysticisme

ou le retour de l’aura

« Nous avons essayé de tout contrôler mais nous avons fini par créer quelque chose que
nous ne contrôlons pas, et que nous ne pouvons peut-être pas comprendre. Car telle est la
caractéristique de la véritable intelligence artificielle : par définition, c’est quelque chose
qu’on ne peut pas comprendre. Si on peut la comprendre, alors ce n’est qu’une machine.
C’est quand les machines commencent à faire des choses qui nous échappent, que nous ne
comprenons pas, que l’intelligence peut vraiment survenir. » 1

George Dyson, historien de l’informatique

Dans les dernières pages de son texte intitulé En public, poétique de l’auto-design2, le
philosophe allemand Boris Groys profite des lignes qu’il consacre à « La religion à l’âge
de la reproduction numérique » pour réévaluer la pensée de Walter Benjamin à l’aune des
bouleversements technologiques récents. Groys estime que l’idée centrale développée par
Benjamin dans L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique – idée selon laquelle
les moyens techniques de reproduction à l’identique des œuvres d’art ont entraîné la perte
de leur aura –, se voit désormais contredite par le principe même d’opération des fichiers
numériques, dont l’apparition est conditionnée à l’activation sans cesse renouvelée de codes
sources. Impossible, dès lors, de considérer que la machine génère des copies objectives
d’un même, chaque visualisation d’un fichier apparaît comme une nouvelle manifestation
du surgissement de l’invisible dont la machine, seule, se trouve en mesure d’interpréter le
contenu. Cette fameuse perte d’aura prédite aux répliques techniques est ainsi venue se
heurter à une nouvelle puissance mystique, celle d’une technologie « substantifiant » le
résultat de ses opérations, contraignant l’intelligence humaine à accepter dans son champ
d’activité celle, artificielle et pourtant insondable, des machines. C’est dans cette brèche de
l’entendement humain, dans cette faille de la logique commune qu’une nouvelle forme de
croyance, dont les contours érigent un animisme aux frontières élargies, semble être à même
de pouvoir se développer.

Soyons bien clairs, nous ne confondons pas intelligence et conscience, et loin de nous Dorothée Smith
l’idée de céder à une quelconque lubie aveugle qui accorderait aux machines un pouvoir Sans titre, Série Spectrographies, 2014
qui ne serait que le fruit de fantasmes entretenus par une consommation excessive de Courtesy Galerie Les filles du calvaire, Paris
science-fiction. Il nous apparaît cependant que la présence, devenue ordinaire, de diverses
formes d’intelligences artificielles dans nos activités quotidiennes, sous-tend un changement Dorothée Smith
de paradigme relationnel aux objets dont les conséquences sont encore mal évaluées. À la recherche des
La question posée par ce que nous avons ici choisi d’aborder sous le terme de techno- êtres manquants
mysticisme consiste donc à explorer cette situation d’étrangeté, cette cohabitation instable
et en perpétuelle évolution qui unit l’homme à un environnement technologique au pouvoir
indéterminé et en voie partielle d’autonomisation. Ici comme dans de nombreux autres sujets
inscrits dans l’incertitude du présent, l’art contemporain, dégagé des enjeux propres aux
sciences humaines ou aux sciences dures, nous est apparu comme un remarquable outil
d’analyse sensible et prospectif, permettant d’observer un horizon d’hypothèses diverses.

La ligne éditoriale du présent numéro fut donc érigée avec une double intention : acter
ce brouillage de la frontière entre réel et virtuel, montrer que l’un n’est pas l’antagoniste
de l’autre, mais plutôt que tous deux sont, à tour de rôle, fonction de l’autre. Il se passe
des choses réelles dans le monde virtuel : nous payons réellement nos impôts via serveurs,
recevons nos réelles analyses médicales par mail, de réels entretiens d’embauche, comme
de réelles ruptures amoureuses se déroulent sur Skype. La distinction entre un réel concret et
un virtuel éthéré n’a plus la même pertinence. Il était par conséquent nécessaire de préciser
la cartographie des artistes et penseurs ayant acté ce changement de paradigme.

La seconde intention était de réorienter l’appréhension des œuvres d’art contemporaines Cela fait déjà plusieurs années que la photographe Dorothée Smith s’intéresse
traitant de l’usage des nouvelles technologies. La critique a tôt fait de les expliciter par des à la question du spectre. Issue d’une double formation en philosophie ainsi qu’en
généralisations (« nouveaux médias », « post-Internet ») qui nous ont paru hâtives, et surtout photographie, l’artiste mêle à la fois une utilisation des technologies ainsi que des
inopérantes car relevant d’un problème de définition. L’essentiel des productions récentes projets de recherche pour aboutir à une véritable œuvre autour de questions comme
abordant la problématique du virtuel, d’Internet ou des nouvelles technologies est moins l’altération de l’identité, la hantise ou la manifestation de l’être absent. Déjà, au
motivé par la dimension prométhéenne de l’avancée technique que par la relecture possible sein de son œuvre des signes avant-coureurs, comme cette performance lors de
de l’immuable condition humaine. Dire que l’évolution technologique change la vie des gens Paris Photo en 2013 où elle met en place la signature fantôme du livre Löyly. Puis
ne relève en rien de la démonstration intellectuelle. Plus que de se demander quelles seront cette exposition Entre (Deux) fantômes, au Pavillon Vendôme en 2014. Petit à petit
les nouvelles possibilités de demain, il est beaucoup plus fructueux d’interroger la façon apparaît alors dans le travail de Dorothée Smith parmi le trouble de ces corps, ce
dont l’homme a recréé les conditions de sa propre subordination ; soit comment, au seuil qui est là sans être là : une recherche de l’invisible.
de l’Histoire, il a de son propre fait créé un univers qui lui échappe encore et qui retarde C’est par la série Spectrographies, œuvre aux formes multiples créée dans différents
le moment désespérant de la conquête totale de son environnement. Notre volonté, par le contextes, que D. Smith utilise des moyens technologiques pour comprendre la
truchement des différents articles présentés ici, est de proposer une autre définition de notre hantise. Pour Cellulairement (Le Fresnoy, 2012), premier volet de l’installation,
époque, étrange zeitgeist dans lequel le pianotage des surfaces tactiles contemporaines fait l’artiste se fait implanter sous la peau une puce électronique qui lui permet de se
écho aux lointains tam-tams de nos ancêtres primitifs. faire « hanter » par les visiteurs de l’exposition au moyen de capteurs thermiques.
Ainsi, ces spectres, définis par Florian Gaité comme « résidus d’identité caractérisés
Franck BALLAND & Nicolas-Xavier FERRAND par une visibilité invisible, capables d’une existence désincarnée », sont captée par le
corps, qui devient un réceptacle pour toutes ces empreintes uniques. Le deuxième
1. « La technologie possède les qualités que nous cherchons dans la religion » dans L’Obs avec Rue 89, « Le grand volet de Spectrographies est constitué d’une série de thermogrammes, chaleur
entretien » par Antoine Viviani, 22.05.2015 : http://rue89.nouvelobs.com/2015/02/22/technologie-possede-les- colorée de corps captés par une caméra thermique. Comme pour Cellulairement,
qualites-cherchons-religion-257763 Dorothée Smith va s’intéresser à la technologie non pas comme une fin en soi mais
2. Boris Groys, En public, poétique de l’auto-design, Presses Universitaires de France, Paris, 2015 pour ce qu’elle offre de spécifique par rapport à son propos. C’est d’abord une façon
de détourner des moyens ordinairement utilisés pour la science ou bien encore pour
la surveillance des individus (puce, captation thermique) afin d’en extraire une poésie

2

Cybercon-science ou l’anthropologie
cybernétique de Shana Moulton

En 2015, face à la présence exponentielle du à l’information décuplé, la facilité de transmission L’analyse de ce retour à des formes ritualisées tombe
numérique dans les mœurs occidentales, l’exposition de l’information et un apparent anonymat dans la sous le sens d’une autre manière puisque chaque vidéo
Control : Technology in Culture tenue au Yerba Buena consultation des données. pose un tel regard sur le cyber « nouveau monde » qu’elle
Center for the Arts de San Francisco proposait En effet, la « toile », concentration impalpable de en devient le support d’une mise en abyme marquante,
de recueillir les témoignages artistiques imaginés données à laquelle on prêterait facilement un caractère une curiosité anthropologique pour la société et les
sur le phénomène. Parmi les artistes participants, mystique ne cesse de se développer conjointement générations à venir. Les nombreux artefacts utilisés
se présentait l’artiste américaine Shana Moulton, à l’évolution des consciences et à l’ouverture des par l’artiste n’en finissent plus de raconter, de mettre
titulaire d’une formation initiale en anthropologie, cyberutilisateurs (internautes) à la spiritualité contenue en scène, de provoquer la distance du cybermonde
dont l’interprétation théâtralisée des anxiétés de dans la définition de « New Age ». développé chaque jour dans l’interdépendance des
la société contemporaine constitue le socle du Le processus d’accès au « cyber New Age » sature connexions multidimensionnelles permises par la
travail vidéo et performatif. L’installation présentée en lui-même de cérémonies ritualisées du quotidien qui technologie.
y mettait en jeu le rapport entre l’usage individuel forgent l’homme depuis son apparition sur terre. Il se L’univers fragmenté du nouveau monde cyberconnecté
technologique du sacré aussi appelé « cybersacré » concrétise dans les objets, symboles/totems, porteurs reconstitué en vidéo saisit l’importance du
– utilisé comme vecteur de la philosophie « New age » – de pouvoirs mystiques, à commencer par le clavier, multidimensionnel de cette nouvelle culture. Chaque
face au consumérisme actuel. détourné par Shana dans sa configuration. Le tout est individu est ici et là, dans la nature dans laquelle le
Les mises en situation élaborées par Shana Moulton renforcé par l’idée que l’artiste confère à ces objets corps de l’artiste se fond dans un dégradé arc-en-
regroupent un ensemble de pratiques et de croyances un statut de personne, un penchant animiste qui n’est ciel par la magie du numérique 1 tandis que l’esprit
perpétuellement liées à l’humanité et à ses rituels. pas sans rappeler les croyances des druides dont le quotidiennement frappé par l’acte d’achat et le
Ces présentations du « bricolage » syncrétique de retour actuel aux pratiques caractérise une fois de plus matériel saisit l’échappatoire offerte par le « cyber
pratiques et croyances que l’on peut rattacher au le courant « New Age ». New age ».
mouvement « New Age », théorisé en 1980 par Mettre en scène le cyberituel/techno-mysticisme par Ce n’est pourtant pas la masse de cyberutilisateurs
Marilyn Ferguson dans Les enfants du Verseau l’intermédiaire d’un dispositif lui-même ancré dans des technologies qui interpelle dans les vidéos de
comme « l’apparition d’un nouveau paradigme l’ère technologique moderne qu’est la vidéo présente Shana, mais bien sûr l’individu qui, placé au centre du
culturel, annonciateur d’une ère nouvelle dans laquelle un double intérêt anthropologique. D’abord, il permet, mouvement « New Age », achemine une quête vers
l’humanité parviendra à réaliser une part importante sur un même support de figer une mise en regard le mieux-être, le presque ultime bien-être qu’il ne peut
de son potentiel, psychique et spirituel » a contaminé implacable entre le rituel ancestral ultra présent dans atteindre qu’en adoptant une attitude conditionnée.
le web. Mieux, l’espace infini de la toile permettrait le son et les images vidéos de l’artiste et les nouvelles Ce comportement qui effraie la performeuse et
une meilleure propagation de l’esprit « New Age ». sources d’aliénation de la société. vidéaste, l’artiste le substitue sur Cynthia, son alter-
Cette nouvelle interface « cyber New Age » justifie son ego porteuse de ses peurs dans ses mises en scène.
appropriation rapide par les utilisateurs dans l’accès L’individu détient la clé en lui-même, transforme toi
toi-même pour mieux transformer le monde, une part
de l’idéologie « New Age » qui ressurgit au sens figuré
lorsque la performeuse récupère une clé d’un tiroir
sorti de son ventre 2.

L’individu est comme incité à un cybercontrôle de lui-
même, un pléonasme qui traduit à lui seul le malaise
de ce nouveau paradigme. À partir de cette donnée,
l’inter-prétation extralucide que Shana Moulton fournit
dans ses vidéos transcende la sphère éclatée et
onirique de cybersacré.

Pourtant, bien plus qu’un constat sur une société qui
se dématérialise à l’aide de la dépendance matérielle,
Shana Moulton parvient à saisir le techno-mysticisme
et son processus en tant qu’actrice principale de
l’endoctrinement béatifié général.

Reste à déterminer quand, si elle ne l’a déjà
fait, Cynthia, l’alter-ego de Shana dépassera la
femme ancrée dans la réalité de plus en plus
dématérialisée ?

Marie-Pierre BAUDIER

1. Shana Moulton, Whispering Pines 4, 2007, vidéo, 10’53
2. Shana Moulton, The Undiscower Drawer, 2013, vidéo 3’04’’

Shana Moulton, The Undiscovered Drawer, 2013, vidéo

autour de la fabrication de fantômes, par le rapport presque mystérieux à l’empreinte réactiver une présence. Ses photographies
d’un corps laissée par la chaleur. Ces résidus de présence, ces traces formant des reflètent souvent les troubles, les
spectres colorés viennent agir comme une révélation pour l’artiste et constituent le déconstructions de l’identité, l’état de
point de départ pour ses recherches. L’aboutissement sera le troisième volet, le film passage. Ce que l’on ne voit pas mais
Spectrographies qui mêle fiction, documents, références à d’autres œuvres : la longue qui se ressent, lié à une esthétique aux
promenade d’un personnage à la recherche d’un être disparu et aimé, qui rencontre tons froids. Ici, l’utilisation de couleurs
des hommes et des femmes, morts ou vivants, dans des espaces abandonnés. vives et la captation de la chaleur
Spectrographies ne pouvait se construire sans la forte référence à Derrida et sa semble être une tentative de retenir un
réflexion sur les spectres. C’est lui qui nous ramène au lien entre les technologies corps qui n’est plus, et de donner une
et l’existence des fantômes : « l’avenir est aux fantômes » dit-il dans un extrait du matérialité à l’absence.
film Ghost Dance, lui-même présent dans le film de D. Smith. En effet, selon lui, Cette démarche, liée directement à la
loin de faire disparaitre toutes croyances et apparitions, le XXe siècle a connu une pensée Derridienne, s’inscrit peut-être directement dans l’image que nous nous
intensification historique de l’effet de spectralité par les révolutions technologiques. faisons de l’avenir. Entourés de spectres qui nous hantent, nous ne cessons d’en créer
Le cinéma, la TV, le téléphone sont autant de diffuseurs de fantômes. De plus, par de nouvelles formes, le plus souvent par des moyens technologiques. En témoigne
depuis le XIXe siècle, l’invention de la photographie et d’autres outils techniques s’en le site internet Eterni.me créé en 2014, qui propose de créer un avatar post-
rapprochant ont eu pour effet de matérialiser ce qu’on ne pouvait pas voir, et donc mortem, avec qui les vivants pourront ensuite discuter. Un fantôme virtuel, spectre
ce qu’on ne pouvait pas croire. Outre les photographies liées au spiritisme tentant de dans toute sa splendeur, qui prolongerait notre existence, au cerveau condensé par
fixer sur la plaque photographique de (fausses) apparitions de spectres, des artistes nos souvenirs du web. Quel sens prendra alors l’absence, la part d’invisibilité ?
se sont intéressés au lien entre technologie et inconscient. Les Surréalistes, par Gabrielle DE LA SELLE
exemple, ont tenté ce rapprochement, avec la pensée de l’automatisme liée à la
poésie du hasard. Enfin, et c’est aussi un trait essentiel lié à la captation d’image : la 1. Texte de Florian Gaité, doctorant en philosophie (Sophiapol, Université Paris-Ouest-Nanterre), critique,
trace. La trace d’un fantôme laissée, le « ça a été » de Barthes. commissaire d’exposition.
Pour Dorothée Smith, qu’elle s’inscrive ou non dans cet héritage, il s’agit également de 2. Film réalisé par Ken McMullen en 1983.
Actualités : Exposition de réouverture du centre d’art Transpalette, Entropia, du 8 octobre 2016 au 8 janvier 2017

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© alain della negra & kaori kinoshita - édition interface, dijon - 2016

La prophétie du cyborg

Le cyborg est « autre », il est au-delà du genre, de l’humain – tel que nous le définissons
biologiquement – au delà de tout essentialisme et, de ce fait, peut devenir une figure libératrice.
Réconciliant ainsi ce que jadis nous opposions à savoir l’homme et la machine, l’homme et
l’animal, le privé et le public, Harraway, non sans humour, se fait le prophète de cette nouvelle
ère, une ère « cyborgienne » déjà en marche selon elle.

Sur le plan étymologique, le terme cyborg n’a pas grand chose à voir avec la vision
fantasmagorique auquel nous aimons l’accoler – homme machine surpuissant agissant
généralement dans un monde post-apocalyptique tel le personnage de Gunnm. La réalité est
tout autre puisque l’origine de ce mot est purement scientifique. Inventé par deux ingénieurs
de la NASA en 1957, il est le résultat de la contraction du terme cybernétique et de celui
d’organisme. Il apparaît pour la première fois dans un article scientifique intitulé « Les cyborgs
et l’espace ». Les auteurs y expliquent que le cyborg incorpore des composants étrangers
pouvant lui permettre d’adapter son organisme à de nouveaux environnements. En somme, et
que l’on soit dans la définition de Donna Haraway ou celle purement scientifique, le cyborg est
avant tout une version perfectionnée de l’être originel. Si l’humain est perfectible, le cyborg est
son achèvement.

Notre corps peut nous trahir. Il peut s’affaiblir. Devenir une source de douleurs. Il peut être
abîmé. Voir amputé. La chair, le sang, les muscles ont leurs limites. Ces limites Matthew Barney
les utilisent et transforme ces contraintes en terrain d’expérimentation comme dans sa série des
Drawing Restraint débutée en 1987. Il est sans doute important de rappeler qu’avant d’entamer
une carrière artistique il fut un joueur de football de haut niveau et suivit des cours de médecine
à la fac, ce qui explique sans doute cette relation très particulière au corps. Chez Barney, ce
dernier est utilisé sous l’angle mécanique : le corps est une machine, complexe certes, mais aux
rouages identifiables et contrôlable. Perfectibles également.

La série des Cremaster (1994-2002), sorte de récits mythiques dans lesquels chaque
personnage doit surmonter des épreuves données, montre des êtres hybrides qui ne cessent de
se transformer, de se réinventer notamment par le recours de prothèses – tel que le personnage
de Loughton Candidate sans Cremaster 4. Dans l’indétermination la plus totale – son genre de
même que sa nature véritable (est-ce un être humain ?) sont flous, il se plait à jouer avec les
fantasmes propres au transhumanisme, à cette possibilité de réinvention perpétuelle qu’offre la
technologie, de dépassement de soi.

De 1990 à 1993, l’artiste Orlan se lance dans une série d’opérations chirurgicales. Ces
dernières sont filmées et diffusées, parfois en direct dans des galeries et musées (Centre
Pompidou, galerie Sandra Gering,...). Chaque opération commence par la lecture d’un texte.
Je voudrais m’arrêter sur un en particulier, il s’agit de la lecture d’un passage de La Robe de
d’Eugénie Lemoine Luccioni. Voici l’extrait :
« La peau est décevante ... dans la vie, on n’a que sa peau... Il y a maldonne dans les rapports
humains parce que l’on n’est jamais ce que l’on a... J’ai une peau d’ange mais je suis un
chacal... Une peau de crocodile mais je suis un toutou, une peau de noire mais je suis un blanc,
une peau de femme mais je suis un homme ; je n’ai jamais la peau de ce que je suis. Il n’y a
pas d’exception à la règle parce que je ne suis jamais ce que j’ai. »

Ana Rajcevic, Animal - The Other Side of Evolution, 2012, fait main en polyuréthane et caoutchouc La chirurgie, l’ajout de prothèses, les manipulations technologiques sur le corps, ne sont pas tant
© Photo : Fernando Lessa chez Orlan un dépassement de soi mais plutôt une conquête de soi-même.
Et c’est peut-être ici la caractéristique la plus intéressante de cette figure « post-humaine » qu’est
C’est en 1983 qu’est publié, dans sa première version, le Manifeste Cyborg. Texte novateur le cyborg. Dans sa capacité à nous libérer de tout déterminisme, qu’il soit social ou biologique.
au croisement du féminisme, du marxisme et de l’humanisme dans lequel Donna Haraway La technologie n’est pas une fin en soi mais plutôt un moyen de lier intérieur et extérieur, de
repense les relations de pouvoir et d’asservissement à travers une figure tutélaire – celle du rendre palpable à travers le corps les mutations qui affectent l’esprit.
cyborg. Historienne et anthropologue des sciences mais également passionnée par l’étude
des primates, la science-fiction, la biopolitique, le féminisme, les questionnements sur la Dans une société où le développement individuel occupe de plus en plus de place il n’est
notion de genre et son lien avec les sciences, … Donna Haraway convoque tous ces champs pas étonnant de voir se manifester, dans des champs de recherches touchant directement au
de recherches afin de dépasser les impasses dans lesquelles la pensée féministe semble quotidien, une réflexion sur le corps et ses manipulations. Que ce soit dans le travail stylistique
alors bloquée – à savoir une vision essentialiste et une incapacité à dépasser une réflexion d’Iris Van Herpen qui utilise le vêtement comme outil de modification du corps ou chez Anna
binaire. Elle propose de recourir à la fiction afin d’offrir une alternative aux dichotomies par Rajcevic qui crée des prothèses inspirées de squelette animal afin de reconnecter l’homme à la
lesquelles les relations de pouvoir et d’asservissement naissent et se développent. nature, reprenant ainsi le principe d’évolution inversé, le cyborg est bel et bien parmi nous...
même s’il est bien loin de Robocop.

Clothilde MORETTE

Digital Naives constamment soumise à évaluation par la communauté, terme. L’évolution rapide d’une même technologie, pour
la popularité se quantifiant et se réduisant au nombre exemple celle des smartphones – qui, si l’on en croit
Tubes de PVC, tissus blancs, plexiglas, matériaux de like ou de followers. Les webcams qui servent leur nom, réfléchiraient tout seuls – conduit à vouloir
de récupération, found footage, webcams, écrans parfois d’yeux aux sculptures de Jerez évoquent cette toujours obtenir une version plus récente d’un produit
vidéo et panoplies sportswear sont les composants nouvelle forme de filtre à travers lequel les users voient quasiment identique, désir mû par la recherche de la
récurrents des sculptures et installations vidéos de le monde. Internet et les écrans deviennent une fenêtre satisfaction immédiate d’un besoin créé de toutes pièces.
Renaud Jerez. Si la culture post-internet est parfois (la fameuse window de Microsoft) sur le monde et Les individus ne sont qu’utilisateurs et ne peuvent alors
abordée dans un versant optimiste, ce jeune artiste sur un univers numérique complètement irréel. Tout avoir suffisamment de recul ni de connaissance pour
français apparaît comme un archéologue du futur semble alors à portée de main et disponible malgré questionner ces nouveaux médiums ni techniquement
nous tendant un miroir prédictif post apocalyptique une économie de mouvement grandissante. ni intellectuellement. Plus encore, ils participent
de la société contemporaine. Issu de ce qui porte Les applications, les sites Internet, même les moteurs eux-mêmes d’une société de l’hypersurveillance en
aujourd’hui le nom de génération Y, ou digital de recherche sont contrôlés par un marché, des autorisant les applications à scruter leurs informations
natives, qui a connu la naissance et l’évolution rapide dirigeants, mais plus encore, des développeurs et des personnelles, en étalant des contenus privés sur des
d’Internet puis des réseaux dits « sociaux » qui en ont programmeurs. Néanmoins les utilisateurs ont l’illusion réseaux sociaux – tout en croyant que les paramètres
découlé, Renaud Jerez porte un regard extrêmement de contrôler le media et tiennent pour acquis les contenus, de confidentialité ou l’effacement à court terme du
critique sur les pratiques de consommation du les modes d’accès à l’information et les technologies contenu déposé soient garants d’une protection des
net. Ses sculptures anthropomorphes, momifiées, qui les accompagnent. Après ladite génération Y, qui données – ou encore en permettant à tout un chacun
impersonnelles, immobiles sont réalisées à base de a connu l’évolution fulgurante des pratiques Internet, d’accéder en streaming direct à un contenu filmé
tuyaux de récupération n’accueillant aucun flux réel la génération suivante est celle des écrans, née dans à partir d’appareils connectés, via des applications
et leur tendance à l’inertie évoque la double existence un environnement numérique et sans aucun recul ni dédiées. L’objet connecté donne alors l’illusion d’être
des êtres humains aujourd’hui, dans une réalité référent à un monde sans technologie. Il devient alors en contrôle, mais le fonctionnement et l’origine des
physique autant que sous forme d’avatar. Avoir une de plus en plus naturel de faire défiler l’information du applications et environnements restent bien souvent
présence numérique suppose la possibilité d’exister, bout des doigts, à tout moment et à tout endroit et d’en méconnus et mystérieux, sanctifiant alors cet objet
de pouvoir être en représentation par un minimum passer par un écran pour les actions les plus naturelles qui sert d’interface. Incapable de réaliser toutes ces
d’actions dans le monde réel et même, à terme, une de la vie quotidienne. Nul doute que les avancées actions lui-même, l’utilisateur nimbe l’objet et le réseau
nécessité d’accorder plus de temps à son avatar qu’à technologiques futures, transformant à mesure les d’une sorte d’aura, et accorde une valeur sentimentale,
son existence matérielle pour pouvoir entretenir sa individus en hybrides bioniques hyperconnectés, seront sacralisée à ces medias dont le fonctionnement obscur
visibilité. Cette forme de présence sur les réseaux est rapidement acceptées et adoptées. Les utilisateurs lui apparaît presque mystique. Ce flux des contenus, des
sont donc victimes d’un marché de consommation informations, des images ou encore des modes se traduit
dans lequel ils sont asservis à des machines et duquel par une surabondance dématérialisée dont l’existence
ils ne questionnent ni l’origine ni les effets à long de vie est de plus en plus fugace. Les icônes utilisées

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Lauren Huret, Torture IPhone Epic Test Burn Fire Ice Bend Drop, 2015
capture vidéo HD, 12’ - © Lauren Huret

Le mythe numérisé

Entretien avec Lauren Huret

Diplômée de la Head-Genève, où elle est maintenant assistante de recherche, Lauren
Huret (née en 1984 à Paris) est fondatrice de la revue Superstition et du Global Paranoia
Poetry Club. Au croisement des sciences humaines et d’une forme d’occultisme dévoyé à
la technologie, son travail sonde la matière des croyances contemporaines ayant surgi de
l’opacité des machines qui nous entourent.

Franck BALLAND : Pour commencer cet entretien, j’aimerais aborder avec toi des relations dématérialisées… Ton propos est-il là encore de mettre en
cette question de la croyance, qui me semble être un point central dans tes exergue ce rapport irrationnel qui nous lie à la technologie ?
recherches. Plus précisément, j’aimerais que tu me parles de la manière dont LH : Oui, ces images provoquent toujours des réactions et des émotions très variées. Pour ce
tu mets en relation croyance et technologie, alors que ces deux champs de travail, je cherchais des vidéos dans lesquelles des objets technologiques sont détruits pour
pensée pourraient paraître fondamentalement éloignés au départ… le geste politique. Mais je me suis rendue compte que les meilleures images étaient produites
Lauren HURET : Oui, même si ce sont des mots valises avec des significations variées, par les personnes qui testent la résistance des téléphones en employant différentes techniques
complexes et extra-larges, je peux expliciter ces deux notions à partir d’une pièce – Deep Blue pour y parvenir. Ce sont souvent des vidéos où sont comparés les qualités et défauts du
Dream – réalisée avec l’artiste Hunter Longe. Dans le cadre d’un festival organisé au théâtre produit selon les marques ; c’est devenu une activité très lucrative sur Youtube. Je trouve ces
de l’Usine à Genève autour des questions de dépendances et de nouvelles technologies, nous images très troublantes, elles font directement écho à un concept d’Achille Mbembe 1 que je
avons créé une sorte de TED TALK schizophrène, où le conférencier était un ordinateur. Sur trouve particulièrement juste, qu’il appelle le « capitalisme animiste », où comment un certain
la scène, une unité centrale éclairée d’une manière très théâtrale est placée sur un socle un capitalisme cherche « à effacer toute distinction entre le monde des humains et le monde des
peu absurde. L’ordinateur commence par décrire ses propres activités et capacités sur deux choses et des objets » en encourageant « les individus à investir beaucoup d’émotions dans
écrans géants. Puis une sorte de bug survient, tandis qu’il s’essaie à traduire un texte en direct. les objets, à donner vie à des choses qui apparaissent jusque-là inertes ». Le téléphone pour
L’image du public apparait en direct sur les écrans. L’ordinateur « scanne » alors les personnes moi est un objet très lié à l’émotion, au vécu. C’est un objet transitoire « magique ». J’ai aussi
présentes, comme s’il cherchait à effectuer une reconnaissance faciale. Ces personnes sont eu la chance de parler de ça avec Erik Davis 2. Erik explique que même si on essaie d’être
ensuite nommées, une à une, et des informations personnelles les concernant sont données. « rationnel » face à un objet qui parle, il y a toujours une part d’irrationalité ancrée en nous,
Je ne délivrerai pas le turc ici, mais ce n’était en rien l’opération de l’ordinateur. Parce qu’il qui nous pousse à considérer sa présence en tant qu’objet vivant et intelligent. On doit en prendre
y a une interface et personne sur scène ni ailleurs censée avoir le contrôle sur la machine, les soin : il a besoin d’énergie, il nous relie aux voix des autres, il nous manque quand on ne l’a plus.
spectateurs ont tout naturellement comblé le vide sémantique et se sont persuadés qu’une sorte
d’algorithme ou un logiciel les avait identifiés. Cela, parce que nous croyons très fortement à ce FB : Finalement, tout ce que nous avons pu balayer jusqu’à présent a
type de technologie, qu’on s’entend répéter qu’elle est déjà exploitée au quotidien (le système beaucoup à voir avec l’anthropologie. Ton travail n’est cependant pas
de reconnaissance faciale de Facebook – DeepFace – est effroyablement précis mais son celui d’une scientifique mais d’une artiste créant des formes et ménageant
fonctionnement reste un mystère). Nous ne distinguons donc plus les fondements ontologiques des contextes particuliers – comme dans tes performances, qui semblent
des technologies qui nous entourent. C’est en ce sens que je parle de croyance, entre magie de impactées par une esthétique du cérémoniel, voire du religieux – afin de
l’inexplicable et pertes de repères qui concernent ces « avancées technologiques ». donner à voir ce bouleversement que la technologie génère dans notre
appréhension du réel. Qu’est ce que cette position « extérieure » au cadre
FB : Dans cette pièce, ton travail rejoue donc « artisanalement » ce pourquoi strict de la recherche te permet de mettre en jeu ?
la machine peut être programmée. Il est d’ailleurs intéressant de constater LH : J’ai eu l’opportunité de travailler en tant qu’assistante de recherche ces dernières années,
que tu n’utilises pas la machine dans ses opérations célibataires, autonomes et j’ai ainsi pu observer beaucoup de méthodologies de recherche différentes. Ce sont des
: la présence de l’homme reste centrale, indirectement ou directement visible outils que j’ai utilisés, notamment des méthodes sociologiques, principalement pour sonder
dans tes vidéos ou performances. Comment expliques-tu cela ? Qu’est ce les opinions. Quand j’utilise ces méthodes de recherche, c’est moi qui collecte le savoir. Je ne
que cette présence te permet d’introduire ? le tiens pas de quelqu’un d’autre, ou je ne l’ai pas lu sur wiki. Pour Artificial fear, intelligence
LH : Je ne conçois pas du tout la machine comme entité célibataire, bien au contraire. Toute of Death, j’ai soumis un questionnaire à différentes personnes, et de là, je sais que 65% des
technologie est orientée, idéologique et incarnée. Nous avons déjà tout le travail des penseurs gens interrogés pensent qu’une intelligence robotique autonome est réalisable, que 78%
de la technologie pour répondre à ces questions. Toujours dans la performance Deep Blue n’ont que des références fictionnelles et que 89% des hommes pensent qu’ils maitrisent ce
Dream, l’ordinateur explique que Garry Kasparov soupçonnait les ingénieurs d’IBM d’avoir champ de connaissances contrairement aux femmes, qui affirment ne rien y connaître (alors
eu recours à un « turc mécanique » parce qu’il avait senti, en un seul coup étrange, qu’un que les savoirs sont similaires). Cette recherche de « terrain » a été extrêmement utile pour
grand maître des échecs se cachait dans la machine. Apparemment, il s’agissait d’un bug. dessiner les contours du livre et les questions posées aux « spécialistes ». Quant aux résultats
L’erreur dans la machine a laissé penser au joueur que la machine n’en était plus une. « artistiques », ils sont apparus sous la forme d’étranges vidéos, également nommées Deep
Nous voulions simplement signifier que l’humain est toujours au centre, dans la machine ; Blue Dream, où j’essaie de poursuivre une sorte de lien métaphorique entre les profondeurs
il est le turc mécanique, ce fantôme dans la machine. On croit déjà que les ordinateurs océaniques et l’imaginaire technologique.
arrivent à faire plein de choses de manière autonome, mais en réalité, de nombreuses tâches Cela étant dit, je ne crois pas en la prétendue objectivité de la science et mes questions
répétitives sont souvent exécutées par des êtres humains. Pour l’intelligence artificielle, nous concernant l’intelligence artificielle étaient au final très orientées. Je ne suis pas une
voulions aussi souligner qu’il s’agit d’un type spécifique d’intelligence qui est mis en avant. scientifique, donc mes résultats n’en sont pas : je suis attachée à une sorte de « pensée
Qu’une machine puisse nous reconnaître suscite l’effroi. Pourquoi ? Parce que malgré nous, magique ». Il y a quelque part en moi cette idée que la science est aussi une forme de
nous lui attribuons une conscience – alors qu’il n’y a que calculs et « pattern recognition ». croyance, et que les recherches sont souvent dirigées économiquement et politiquement.

FB : Continuons de parler d’effroi et évoquons ta vidéo Torture IPhone Epic 1. Achille Mbembe (1957) est un philosophe camerounais, théoricien du post-colonialisme.
Test Burn Fire Ice Bend Drop (2015), dans laquelle on assiste à la destruction 2. Erik Davis (1967) est un écrivain et journaliste américain. Ses écrits portent entre autres sur la dimension ésotérique
méthodique et plutôt imaginative de différents modèles d’iPhone. C’est un qui hante la technologie contemporaine. L’entretien est disponible dans l’ouvrage « Artificial Fear, Intelligence of Death »
montage de vidéos que tu as trouvées sur le net et, au delà de la manière qu’a publié Lauren Huret avec Link éditions et la Kunsthaus de Langenthal.
dont est pulvérisé un objet de consommation à forte valeur marchande, la
dimension symbolique de cette destruction est très marquante. Il y a quelque
chose de presque sacrificiel dans le fait de s’acharner sur un objet iconique

par Jerez dans ses pièces, directement prélevées sur la esthétiques d’une société de consommation. Cela se ni didactique ni réellement moralisatrice, à laquelle
culture populaire des années 1990-2000, déjà entérinées traduit aussi dans les accessoires sportswear dont le spectateur fait face et dans laquelle il peut se
et passées de mode, déjà oubliées et recouvertes par le sont souvent affublées les momies anthropomorphes reconnaître ou reconnaître une version futuriste de
flux, mettent le spectateur devant la constatation d’une de Renaud Jerez. lui-même. Il assiste à cette remise en scène d’une
société du spectacle et du divertissement, encline à une Les installations de Jerez, à la différence de beaucoup humanité distordue à laquelle il prend part, alors tout
nouveauté sans cesse renouvelée. L’artiste se propose d’œuvres post-internet, ne se proposent pas à une autant mis à distance de cette réalité qu’il peut l’être
encore une fois comme archéologue d’un passé très forme d’interaction participative avec le spectateur. Elles des contenus numériques.
récent mais déjà révolu en exhumant ces icônes des n’offrent pas de distraction, mais une démonstration, Juliette TIXIER
abysses de la culture.
L’utilisation symptomatique de vitres de plexiglas dans
les installations de Renaud Jerez nous ramène à
l’écran, l’interface, cette ouverture qu’il est néanmoins
impossible de traverser. La surface souvent éraflée,
griffée, abimée de ces plaques à la transparence altérée
rend matérielle et palpable la tangibilité de ces skins, ces
habillages et ces écrans par lesquels la vie est vécue,
permettant au spectateur de prendre conscience de
l’omniprésence de cet écran intermédiaire qui tient à
la fois de media, de protection et de cause d’isolement
physique et d’étiolement des relations directes entre les
individus. C’est également par le filtre d’un écran que
les vidéos de Jerez, habiles et subtils détournements
de publicités pour les cosmétiques, nous rappellent
combien nous sommes manipulables et manipulés, à
la merci d’une industrie capitaliste de consommation.
Les montages sont révélateurs de cette industrie
standardisée et standardisante dont le media privilégié
est aujourd’hui numérique – qu’il s’agisse de la
télévision ou encore d’Internet. Ces standards nous
invitent à adopter certains produits ou certains styles
vestimentaires, imposant des modes et des canons

7 Renaud Jerez, BDS, 2015, The Box (Los Angeles)
Courtesy de l’artiste & The Box - © Photo : Fredrik Nilsen

Au nom de tout ce qui nous sépare

Retour sur This Space entre intérieur et extérieur du corps,
Between You and Me de proposant une déambulation dans
Benjamin Blaquart un univers qui relève de l’opération à
coeur ouvert et de l’aquarium géant.

La réalisation d’une telle installation
à la galerie du collège de Dornes met
Le bâtiment se dresse, gris et en abyme son contexte et l’impact
orange, à la lisière du village, derrière
les champs verdoient. Il y a quelques de l’art dans des espaces autres.
En effet, une des problématiques
années, la principale avait essayé de majeures d’un département tel
faire respecter une forme de contrôle
à l’entrée de l’établissement, mais les que celui de la Nièvre est la
question de la circulation : peu
élèves arrivaient de partout, sauf par d’infrastructures (train, bus...)
la grille principale.
permettent le déplacement sur
le territoire. Pour des élèves,
L’espace d’exposition est un peu à souvent isolés et peu connectés
part, sorte de hangar technique en
préfabriqué des années 90. La porte à l’Internet – là encore pour des
raisons d’infrastructures mais aussi
de l’exposition s’ouvre légèrement de moyens, un lieu comme celui de
et une lumière bleue auréole le
sol. Nous pénétrons dans une salle la galerie du collège est une porte
qui s’ouvre sur un autre monde,
aveugle, un organisme composé une traversée du miroir, d’autant
de différents éléments occupe la
totalité de l’espace. Les visiteurs plus que le Parc Saint Léger
favorise depuis plusieurs années la
que nous sommes se déplacent Benjamin Blaquart : This Space Between You And Me, Dornes, 2016 © Centre d’art contemporain - Parc Saint Léger (Pougues-les-Eaux) réalisation d’expositions pensées in
parallèlement aux autres flux qui
ont pris possession des lieux. Eau, situ. L’œuvre de Benjamin Blaquart
lumière, informations circulent autour de nous dans un bruit de cascade artificielle. métaphorise d’ailleurs ce passage, l’entrée de l’exposition semblant mener
à l’intérieur de l’ordinateur lui-même, le bâtiment devenant cette coque grise,
Un des mini-écrans de l’installation s’interroge : Can empathy can exist in this flattened renfermant un monde, posée au milieu de nulle part.
plane, Pushed up between liquid crystals glows and greased glass ? 1
C’est pour le public une véritable expérience de l’altérité. « Par cette sortie de la
La généralisation de l’usage de l’écran est traditionnellement accusée de produire protection communautaire, cette expérience de l’art est un appel à l’universalité
une distance entre les individus, entre celui qui regarde et celui qui est regardé, les et à l’humanité non pas dans leur évidence, mais dans leur complexité. 3 ». Et à
rôles étant souvent interchangeables. La vidéo des artistes Eva et Franco Mattes l’heure du démantèlement des structures territoriales et du travail de proximité
« No FUN » (https://vimeo.com/11467722) est à ce titre particulièrement fait depuis des années par celles-ci, l’exposition de Benjamin Blaquart rappelle
éclairante des différentes réactions possibles face à un stimulus, transmis par le l’impérieuse nécessité de produire hors les murs, d’offrir aux artistes et aux publics
biais d’internet : rire, inquiétude, désintérêt, excitation...les réponses émotionnelles la possibilité d’expérimenter l’art dans une relation forte avec un contexte. Car ces
fusent. Quelle est l’importance du contact (physique, visuel...) pour la formation de expérimentations, à la limite de la production, de l’éducation, où la médiation de
l’empathie ? Le sentiment d’immersion provoqué par l’écran (comme cela se produit l’œuvre est intégrée à sa conceptualisation répondent au souhait formulé par Raqs
aussi par la lecture d’un livre) ramène le corps dans la relation numérique 2. Ainsi de Media Collective d’une institution capable de créer un espace d’incertitude : « L’œuvre
l’installation totalement immersive de l’artiste Benjamin Blaquart qui joue avec cette elle-même deviendrait un portail que franchiraient à la fois l’artiste et le public à la
idée et avec les références qui l’accompagnent : la lumière bleue, les réseaux de recherche l’un de l’autre et de choses différentes que celles contenues dans les
tubes, les prothèses et autres formes organiques architecturées en 3D renvoient confins de leurs êtres et de leur pratique. » 4
à la fois au corps et à notre propre perception comme corps, mais aussi à notre
existence culturelle, marquée, suivant les us de chacun, par Ghost In The Shell, Céline POULIN
Enki Bilal, Druuna, etc.
Benjamin Blaquart, This Space Between You and Me
Je pense à la chanson de Jill Caplan « Tout c’qui nous sépare », dont les personnages Collège Le Rimorin de Dornes, org. Centre d’art contemporain, Parc Saint Léger (hors les murs)
deviennent les fantômes de la relation qu’ils ont auparavant habitée : la distance Commissaire Franck Balland, Exposition du 8 avril au 3 juin 2016

n’est pas uniquement physique, c’est la compréhension de l’autre qui semble avoir
déserté le couple. Néanmoins, le lien persiste au nom de tout ce qui nous sépare.
Et c’est plus exactement ce que Benjamin Blaquart se demande : quelle est la 1. L’empathie peut-elle exister dans ce plan aplati, / Poussé à la hausse entre les cristaux liquides rougeoie
nature de cet « espace entre toi et moi » ? Cet espace qui semble garder la et le verre graissé ?
nostalgie d’une forme de relation antérieure. Il le définit par son installation comme 2. voir Serge Tisseron, dans « Subjectivation et empathie dans les mondes numériques », introduction,
espace à la fois organique et culturel, un espace entre deux, une distance qui lie édition Dunod, 2013
autant qu’elle sépare. On le sait, l’importance d’une réflexion sur l’altérité va de pair 3. François Soulage explique cette complexité dans la suite de sa démonstration « L’expérience d’une œuvre
avec la remise en cause des oppositions traditionnelles (nature/culture, dedans/ d’art est, en effet, toujours un tiraillement entre d’un côté l’historicité et la géographie de l’œuvre (et de ses
dehors, public/privé, vrai/faux). L’œuvre souhaite ainsi invalider les frontières conditions de production) et de l’autre l’appel à l’universalité – impossible de facto. » dans « L’expérience de
l’altérité de l’art ou l’art comme expérience de l’altérité », Marges, 06 | 2007, 83-89
4. Raqs Media Collective, « Une magnifique incertitude », dans Micro-Seminaire, édition Parc Saint Léger,
2013, publication originale « Curating and the Educational Turn », de Appel arts center & Open Edition, 2010

Laisse courir le câble sous la plinthe

Les murs étaient déjà là. Pierres épaisses et froides, lourdes ces mots depuis quelques semaines, maintenant. La paupière enchaînement de réactions quelconques. Une présence
et stables. Émergés d’un ravin, leur surface accueille un lieu inférieure. Pas vraiment celle qui s’actionne le plus. Difficile semble pourtant me faire face.
de prestige, lieu de rencontre de corps à l’origine mâles et de percevoir si c’est un manque interne ou un poids extérieur
nus lors de compétitions sportives. qui la fait trembler. Ça revient toujours quand je pense y On a tous besoin d’une chaleur extérieure. Si le câble
Les entrailles du stade sont aujourd’hui inondées de nouvelles avoir échappé. J’ai commencé à agiter la tête quand ça d’approvisionnement lâche, il peut vite faire froid, il peut
tiges. Elles poussent du sol, ou bien descendent du plafond. refait surface, un mouvement rapide et bref. Un mouvement vite faire vide. Je branche mon câble, et je me branche,
Néfastes ou bienveillantes ? Elles sont là pour ramener à la de chasse, une légère convulsion. Comme si cette étrange littéralement.
vie un cadavre fait de cailloux, de briques immobiles. Ces pulsation pouvait se taire. Se taire, ou être balayée. J’accède à l’activité qui ne m’a pas attendue pour poursuivre
veines grises doivent faire partie du décor. Elles ne cherchent La corde de l’interrupteur a lâché. Je ne dois plus simplement le mouvement. Si le circuit s’ouvre, c’est moi qui me retrouve
pas à se dissimuler, elles sont d’entières parts de ce corps, enclencher mais choisir de dévisser, ou non. Couper court sur la touche. Je ne fais plus partie de la boucle.
organes internes transplantés au cœur de sa structure. Elles ou laisser courir le courant. Démembrer ou ne plus mettre sur Je tombe, ou je me pose, observateur de la course. Mais
s’immiscent et ponctuent par leurs rayons chaque interstice pause, jusqu’à réparation de la jointure, raccordement de cette coupure ne peut qu’être brève : je n’ai plus de prise
; elles interpellent des chairs voisines, de nouveaux visiteurs la couture. Un retour à l’état normal, une connexion entre sur l’énergie environnante, et c’est elle qui m’achève. Figée
attirés, leurs pas sont à présent guidés. Elles ont enfilé un ouvreur et donneur, entre utilisateur et circuit, physiquement sur place ou lâchée en totale apesanteur, je ne peux ni
costume qui pourrait habiller le reste du cadre, un rideau plus logique. m’attacher ni influer sur le cours. Une fois que j’ai rejoint
d’un bleu sombre – un bleu nuit bien choisi – renferme des La fermeture éclair de mon sac à dos s’est désossée. Une le sol ferme du rivage, je ne pense plus qu’à refaire partie
tubes de PVC et autres combinaisons de caoutchouc et semaine avant celle de mon sac de voyage, celui qui du flot. Je vais devoir retrouver un bras plus étroit afin de
d’aluminium, de cuivre. Les tuyaux sont doucement devenus transporte mon linge sale, parfois. Il est plus souvent plein de reconnecter avec le courant principal. Si je ne rentre pas
boyaux de cet ensemble rocheux. Le drap cherche à donner vêtements à laver que de cadeaux à ramener, dernièrement. en contact de manière adaptée, je risque la décharge,
sens à l’ensemble, à connecter les différentes peaux, mais la Mais l’impression de départ est toujours là quand je quitte l’attaque, le choc. Quand les câbles sont dénudés, c’est ma
robe est trop courte. Quand les fils sont visibles, l’invasion ma chambre, le portant sur mon épaule. Délicat de maintenir propre puissance et présence qui sont menacées. « Suis ses
devient évidente, palpable et pesante. ce leurre : il s’est soudainement ouvert au grand jour, aux bordures et tu bénéficieras de sa mixture ».
Je me trouve dans un couloir souterrain du Kallimármaro 1, yeux de tous. Moment de solitude lors du décrochage. J’ai
antique stade olympique d’Athènes. La vue de ce spectacle presque entendu un rire, étouffé, venant du fond du sac. Un choc surgit parfois quand j’approche un autre acteur,
à moitié camouflé résonne avec mon propre état actuel, je L’ascenseur est tombé. un autre corps utilisateur. Un choc qui prend la forme d’un
me reconnais presque dans cette bâtisse occupée. Je me force à rester pragmatique, chose que d’autres léger coup, une touche électrique. Résidu de ce pouvoir qui
qualifieraient d’esprit sain. La tête froide. Il ne s’agit pas agit habituellement sous la surface ? Une trace laissée de
Mon œil gauche saute depuis quelques jours. Et je répète là d’une série de signaux, de symptômes. C’est un simple manière volontaire, ou par erreur.

8

Les androïdes
comptent-ils les
moutons électroniques

avant de s’endormir ? Nicolas Delay, Red Tower #2, 2015, série Empreinte. Courtesy galerie BS (Neuilly-sur-Seine)

Le terme « Robot » prend son origine dans R.U.R, une pièce de l’écrivain la création d’une forme d’archéologie technologique. La notion d’ « hantologie »,
tchécoslovaque Karel Capek jouée pour la première fois en 1922, et dont l’histoire inventée par Derrida pour Marx et qui définit tout objet présent « hanté » par des
conte le développement d’une classe d’esclaves mécaniques mis au point par les traces du passé (notion proche du palimpseste, donc) fut prolifique. Sans réellement
humains afin de se délivrer des tâches pénibles. De plus en plus perfectionnés et la citer, on la retrouve dans le travail de Corey Arcangel, qui réemploie des
intelligents, les robots finissent par se révolter et anéantir l’Humanité, avant de cartouches de jeu Nintendo pour détourner les programmes ludiques et créer des
découvrir les sentiments et de se voir confier le destin du monde par le dernier environnements alternatifs, comme s’il cherchait la trace d’un autre monde virtuel
humain. « Robot » est ici dérivé du tchèque « robota » (« corvée »), lui-même issu dans un environnement digital. Dans ses jeux détournés, Arcangel tend à supprimer
de la racine slave « rob » qui signifie « esclave ». Sans le savoir, Capek mit ici au jour l’action du joueur pour mieux laisser s’exprimer l’espace virtuel et les formes qui y
une dynamique narrative que reprirent les grandes œuvres de la science-fiction. Le sont nées, actant leur autonomie au-delà de l’usage humain.
Metropolis (1927) de Fritz Lang présente aussi un monde où les hommes semblent Grégory Chatonsky cite quant à lui clairement l’influence de la notion hantologique. À la
dominés par les machines, notamment la Maschinenmensch Maria et la structure manière des grands récits mythologiques antiques ou postmodernes, il met en scène
Moloch. À mesure que le siècle avance, l’argument se précise : le H.A.L. de 2001, la destruction programmée de l’Humanité dans Telofossiles « fiction spéculative sur
A Space Odyssey (1968) superordinateur destiné à seconder les astronautes cette terre sans nous » 1, présentant l’événement comme un processus normal. On
lors d’un voyage spatial, acquiert conscience et individualité, et se débarrasse de revient ici au point de départ : l’Humanité, dans son hybris, voit sa propre disparition
ses maîtres un à un. Suivirent le skynet de Terminator (1984), les espers d’Akira comme la fin du monde lui-même – c’est d’ailleurs pour cela qu’elle cherche sa
(1982, 1988) les esprits psychopathes hantant les téléviseurs de Poltergeist propre perpétuation dans l’androïde. En scénographiant sa fin comme un événement
(1982) et Ring (1998), jusqu’à Ghost in the Shell (1998) et à la Matrix (1999). inévitable et au fond sans conséquence pour l’Univers (on peut même penser à
Deux typologies s’établissent : d’un côté, expériences scientifiques qui tournent mal, ce stade que la Terre se porterait singulièrement mieux sans son hôte hominidé),
où la création renverse le créateur, l’asservit et/ou le détruit ; de l’autre, des objets Chatonsky aligne son travail sur les récits ancestraux dans lesquels l’homme est
technologiques apparemment habités par des forces suprasensibles, dont on trouve rendu à sa propre échelle de poussière, après avoir voulu jouer au Grand Architecte.
probablement l’origine moderne chez les Gremlins, croyance folklorique développée Sous une forme plus douce, Nicolas Delay collecte patiemment tous les ordinateurs
par les aviateurs anglais dans l’entre-deux guerres puis popularisée par Roald Dahl hors d’usage qu’il trouve, et transforme ce gâchis en totems. Il use de tout : carte-
en 1943, désignant des esprits frappeurs provoquant l’autodestruction de certaines mère, processeur, ventilateur, armoire de serveur, circuits imprimés, qu’il réarrange
pièces dans les avions. pour créer des compositions hypnotiques. L’artiste prend ici le contrepied du monde
Chacune de ces typologies interroge cependant de la même façon l’idée du pêché de actuel, où la technologie est omniprésente et pourtant perpétuellement obsolète.
création : l’homme, en créant une forme qui excède la nature (une autre forme de vie, Cet immense gâchis de carbone, de terres rares et de métaux, l’artiste s’en empare
un moyen de locomotion ou de transmission de messages), franchit la limite imposée jusqu’à la dernière miette. Il prend alors la double place de l’archéologue et du
par Dieu. Il ajoute quelque chose d’imprévu à la nature, et se voit puni pour cela. shaman amérindien : comme l’archéologue, il collecte et agglomère les traces d’une
En effet, chacun constatera qu’aucune de ces histoires ne propose un dénouement civilisation ; comme l’Amérindien rendait hommage au bison tué, ne laissant aucun
heureux. En s’arrogeant le droit de créer, l’Homme vise à remplacer Dieu. C’est toute os ou organe sans usage, Delay se sert de toutes les parts de la machine, chacune
l’ironie du sort de voir la création de l’Homme reproduire le même geste contre son retrouvant sa place dans une société où on la dit si capitale. Il acte le désastre
créateur. Il n’est pas étonnant de constater que les divinités nouvellement créés écologique (accumulation de déchets toxiques), et géopolitique (conflits armés pour
ressemblent davantage aux dieux anciens, au dieu juif, aux irascibles dieux grecs, le contrôle de l’extraction des terres rares), tout en renversant l’idée d’un « monde
figures capricieuses, esclavagistes, punitives et violentes, qu’aux représentations virtuel », qui n’a en fait jamais été aussi physique. La maintenance d’internet nécessite
aimantes et rédemptrices du christianisme, de l’islam ou du bouddhisme. On des millions de m2 de serveurs, accusant leur besoin en eau et en électricité. Vous-
remarque que dans ces deux sphères culturelles, la création d’une autre forme même, combien d’ordinateurs personnels avez-vous achetés et jetés ? Peut-être
de vie ne se fait pas sans violence, confer le golem juif, le crime que Prométhée nous vend-on cette obsession du virtuel, forcément teintée de légèreté et de liberté,
accomplit en donnant le feu sacré aux fétiches de boue qui deviendront les hommes pour mieux nous faire oublier la facture réelle de cette orgie technologique.
(avec les conséquences que l’on connaît pour lui), ou de son fils Deucalion et son La séparation entre virtuel et réel est décidément de plus en plus complexe à tracer.
épouse Pyrrha qui créèrent la seconde génération à la suite d’un déluge génocidaire Les artistes du technocène, qui mêlent l’archéologie à la mise en place de rapports
provoqué par un Zeus excédé. nouveaux tendant au mysticisme, où la machine n’est plus envisagée pour ses
Dans les environnements fictionnels du siècle passé, les technologies nouvelles-nées usages et performances, mais plutôt sur ce qu’elle dit de nous et de notre usage du
portent en elles le germe du vice et de la destruction. Il est amusant – ou glaçant – monde, établissent un nouveau pacte avec la technologie, pacte fondé sur l’intime,
de constater que les mondes prévus sont advenus. Nous sommes désormais le spirituel, où la machine trouve, comme à l’origine des mythes, sa part d’humanité,
entièrement incarcérés dans l’ivresse technologique, constamment assistés par des pour mieux permettre à ses utilisateurs de réapprendre eux-mêmes à arpenter le
intelligences artificielles. Que reste-t-il à dire aux artistes du technocène ? La plupart contemporain davantage en êtres humains qu’en données et statistiques.
semblent animés par l’envie de faire dérailler cet univers bien huilé. Nicolas-Xavier FERRAND
Les artistes d’aujourd’hui sont clairement à la recherche de traces. Dans le monde
de la surinformation, du surstockage des données, les plasticiens sont tournés vers 1. Kevin Thome de Souza, « Grégory Chatonsky, l’art comme l’archéologie du futur » , dans Amusement.net, 11/02/2013.

Une maladresse qui révèle l’occupation, la profonde infiltration. Un indice
qui dévoile une présence étrangère, à présent incorporée. Insérée et
intégrée. Une fuite.
Je commence à comprendre que l’onde a besoin de moi pour atteindre
l’autre partenaire, un possible membre, potentiel pour agrandir ce cercle
de tension. Elle me traverse, ou plutôt traverse par moi, je suis devenue
une interface parmi d’autres. Ensemble d’enveloppes filtrées par une
même chaîne de correspondance.

Les nervures que ce flux emprunte ornent nos intérieurs. Des câbles.
Grossièrement amassés dans des boîtes, enfouis dans d’inutiles tiroirs,
finement dissimulés sous tapisseries ou parquets. On croit les cacher
mais ils s’insèrent davantage. Toujours et à jamais dans les parages.
L’encerclante masse est agréable à regarder à présent. Moins elle est
visible, plus elle est naturelle, absorbée par façades et membranes. Mais
le câble qui lie et attache peut aussi être celui qui te freine. La connexion
peut vite t’enserrer ; la source de chaleur, exercer une pression trop
chaude. Un bas de contention, qui sait si ça soulage plus que ça ne serre,
lacère, ou du moins marque, creuse, remodèle ton épiderme ? Un fluide
peut nourrir mais il y aura toujours menace de noyade, de fausse route.

Je remarque que plusieurs nageurs stagnent à mon niveau. Il semble
possible de relier nos charges qui s’écoulent ou qui se retiennent, un
possible plan pour dévier les câblages à l’intérieur-même du système.

Nolwenn SALAÜN

1. Terme grec signifiant « d’un beau marbre ».

Nolwenn Salaün, La robe trop courte, 2016

9

annemasse HORSD’ŒUVRE n°37 dole les arques poitiers pougues les eaux
édité par l’association
Villa du parc INTERFACE Musée des Beaux-Arts de Dole Les Ateliers des Arques Musée Sainte-Croix Centre d’art contemporain
12 rue de Genève 12 rue Chancelier de l’Hospital 85 rue des Arènes Rue du Presbytère (org. Frac des Pays de la Loire) Parc Saint-Léger
74100 Annemasse F - 21000 Dijon 39100 Dole 46250 Les Arques 3 bis Rue Jean Jaurès Avenue Conti
tél. 04 50 38 84 61 t. : +33 (0)3 80 67 13 86 tél. 03 84 79 25 85 tél. 05 65 22 81 70 86000 Poitiers 58320 Pougues-les-Eaux
ouvert du mar. au sam. [email protected] ouvert ts les jrs. sauf le lun. et le dim. ouvert du mar. au dim. de 15h à 19h tél. 05 49 41 07 53 tél. 03 86 90 96 60
de 14h à 18h30 www.interface-art.com matin, de 10h à 12h et de 14h à 18h puis à partir d’oct. les sam. de 14h à ouvert du mar. au dim. de 10h à18h, ouvert du mar. au dim.
➤ « Fœhn d’été » Jagna Ciuchta et ➤ « Art Orienté Objet. Microbiota » : 17h et du mar. au ven. sur rdv. jusqu’à 20h le mar., puis à partir de 14h à 19h et sur rdv.
Bettina Samson : jusqu’au 01/10/16 Numéro sous la direction de : jusqu’au 25/09/16 ➤ « Exposition d’été faisant suite à du 19/09 du mar. au ven. de 10h à ➤ « Économie de la tension »
Franck Balland ➤ « Liaisons Équivoques » : la 26e résidence d’artistes » 18h et sam, dim. de 13h à 18h M. Kleybe Abonnenc, L. Abu
belfort & Nicolas-Xavier Ferrand jusqu’au 04/07/16 G. Andreani, D. Coste, S. Hubard, ➤ « -12000 >> 2016 Hamdan, Z. Baladrán,
L. Kropf et J. Laffon : Promenade contemporaine dans É. Baudelaire, J. Bismuth,
Le Granit Conception graphique & foncquevillers jusqu’au 18/09/16 l’archéologie du musée » M. Bondu, A. Mona Chişa &
faubourg de Montbéliard responsable de la rédaction : ➤ « À visage découvert » œuvres Biefer & Zgraggen, É. Bossut, L. Tkáćová, N. Cvijanović,
90000 Belfort Frédéric Buisson La Brasserie de la collection des Abattoirs J. Clareboudt, D. Coindet, J. Creten, L. Martínez Troncoso, R. Ondák,
tél. 03 84 58 67 50 5 rue Basse / Frac Midi-Pyrénées et de F. Curlet, Dewar & Gicquel, C. Panayiotou, S. Rémy,
ouvert du mar. au sam. de 14h à 18h Coordination, contacts agenda : 62111 Foncquevillers l’Artothèque du Lot : B. Dimitrijevic, H. Duprat, M. Saladin, C. Seidel,
le mer. de 10h à 18h Nadège Marreau tél. 06 87 91 57 82 15/10/16 - 02/01/17 H.-P. Feldmann, B. Flanagan, R. Torenbosch, C.Verde,
➤ Clément Richem : ouvert les sam. & dim. de 11h à A. Froment, A. Gaskell, S. Huber, M. Voignier, L. Weinberger,
10/09 - 25/10/16 ont participé à ce numéro : 18h et sur rdv. les-sables-d’olonne J. Julien, U. Koch, B. Martin & C. Zaccagnini, Ainsi que H.A.,
➤ « Appels » V. Beaurin, L. Cerveny, Franck Balland, Marie-Pierre ➤ « (Sus)tentations » agnès b., C. Youle,J. Muyle, H. Nagasawa, Schwartz, Eichstaedt, Kern,
F. Génot et J. Grossmann : Baudier, Nicolas-Xavier Ferrand, M-J. Burki, M. Camillieri, L. Echakch, Musée de l’abbaye Sainte-Croix K. Ortwed, G. Penone, É. Poitevin, Dziurzynski, Ramones, Agrawal,
05/11 - 17/12/16 Clothilde Morette, Céline Poulin, O. Frémineau, D. Fried, E. Frotin, (org. Frac des pays de la Loire) J. Satorre, D. Seidner, K. Smith, Shah, Kosinski, Stillwell,
Nolwenn Salaün, Gabrielle de la A. Gauthier, W. Laïb, Lang/Baumann, Rue de Verdun L. Tixador, D. Tremlett, D. de Seligman, Ungar :
besançon Selle, Juliette Tixier A. Morvan, E. Perrochon, 85100 Les-Sables-d’Olonne Tscharner, J.-L. Vilmouth, R. Zarka : jusqu’au 28/08/16
L. Tornare, N. Tourte : tél. 02 51 32 01 16 jusqu’au 20/11/16 ➤ Igor Galligo - conférence :
Frac Franche-Comté Relecture : Stéphanie Jager jusqu’au 30/09/16 ouvert du mar. au ven. de 14h à 15/09/16 à 18h30
Cité des arts - 2 passage des arts 18h, le week-end de 11h à 13h et pontmain
25000 Besançon Couverture : guéret de 14h à 18h thiers
tél. 03 81 87 87 00 Benjamin BLAQUART, ➤ « Sea without land » S. Acosta, Centre d’art de Pontmain
ouvert du mer. au ven. de 14h à 18h The Gesture of Wisdom Musée d’Art et d’Archéologie F. Alys, K. Blacker, J.-L. Blanc, S. Decker, (org. Frac des Pays de la Loire) Le Creux de l’enfer
et sam., dim. de 14h à 19h (Jnana Mudra), 2016 de Guéret W. Delvoye, H. Fridfinnsson, 8 bis rue de la Grange 85 avenue Joseph Claussat
➤ « Vingt mille jours sur terre » (org. Frac-Artothèque du Limousin) G. Friedmann, A. Froment, 53220 Pontmain 63300 Thiers
Nathalie Talec : jusqu’au 18/09/16 Double page intérieure : Hôtel de la Sénatorerie P.-A. Gette, F. Hyber, A. Veronica tél. 02 43 05 08 29 tél. 04 73 80 26 56
➤ « À rebours » Estefanía Peñafiel Alain DELLA NEGRA & 23000 Guéret Janssens, V. Mauger, G. Pane, ouvert du mer. au dim. de 14h à ouvert tous les jours sauf le mar.
Loaiza : jusqu’au 18/09/16 Kaori KINOSHITA, Le dernier et tél. 05 55 77 08 98 E. Spalletti, B. Streuli, J. Warboys 17h30, jusqu’à 18h les week-end de 13h à 18h - fermé du
➤ « Max Feed » autour de Max le premier jour d’existence d’Hitomi, ouvert jusqu’au 31/10 du mer. au ➤ « SOS AMOR » Edith Deyndt : ➤ « Enfants » R. Dijkstra, A. Eloyan, 19/12/16 au 02/01/17
Neuhaus : 09/10 - 30/12/16 2016, photogrammes issus d’un lun. de 10h à 12h et de 14h à 18h 16/10/16 - 15/01/17 Mrzyk & Moriceau, A. Poincheval & ➤ « Une semaine d’enfer ! »
➤ Dominique Blais : enregistrement vidéo puis les lun., mer., jeu., ven., sam. L. Tixador, P. Tosani, D. de Tscharner : Damien Cabanes :
09/10 - 30/12/16 Courtesy : J. Saint-Loubert Bié et 1er dim. du mois, de 14h à 18h limoges 14/10 - 27/11/16 jusqu’au 11/09/16
➤ « L’Artothèque au musée » ➤ « »
Impression : ICO œuvres du FRAC-Artothèque du Frac-Artothèque du Limousin Si vous souhaitez Damien Deroubaix :
17 rue des Corroyeurs - Dijon Limousin : 17/09/16 - 09/04/17 « Les Coopérateurs » 12/10/16 - 29/01/17
Tirage 5000 exemplaires Impasse des Charentes que vos
ISSN : 1289-9518 - semestriel landerneau 87100 Limoges varennes sous dun
Dépôt légal : juin 2016 tél. 05 55 77 08 98 manifestations
Fonds Hélène et Edouard Leclerc ouvert du mar. au sam. de 14h à 18h, Esox Lucius
bignan Publié avec le soutien de aux Capucins fermé les jours fériés soient annoncées Château de Grandvaux
l’ensemble des structures 29800 Landerneau ➤ « Untied States » Stephen Marsden : 71800 Varennes sous Dun
Domaine de Kerguéhennec annoncées dans l’agenda et du : tél. 02 29 62 47 78 jusqu’au 12/08/16 dans l’agenda du tél. 03 85 84 35 97
Propriété du département du Morbihan ouvert de juin à août, ts les jrs de ➤ « carte blanche à Richard ouvert du jeu. au dim.
56500 Bignan 10h à 19h, puis de sept. à nov. : Fauguet » œuvres du Frac et de prochain numéro, de 15h à 19h30 ou sur rdv.
tél. 02 97 60 31 84 ts les jrs de 10h à 18h l’Artothèque du Limousin, celles des fermé les 29, 30 et 31 juil.
ouvert jusqu’au 18/09 ts les jrs de ➤ « Chagall - de la poésie à la Frac Aquitaine et Poitou-Charentes : une participation ➤ Marie Anita Gaube :
11h à 13h et de 14h à 19h puis peinture » Marc Chagall : 15/09/16 - début 2017 9/07/16 - 28/08/16
du mer. au sam., de 14h à18h jusqu’au 01/11/16 de 30 Euros ➤ « Art et Nature »
le dim., de 11h à 13h morlaix François Bazzoli - conférence :
et de 14h à 18h Galerie de Rohan minimum est 19/08/16 à 20h30
➤ « Paysages contemporains. Les 30 (org. Passerelle) Les Moyens du Bord
ans du parc de sculptures à travers la 9 Place Saint-Thomas Cour des artistes, 41 quai du Léon demandée.
collection du Frac Bretagne » plus de 29800 Landerneau 29600 Morlaix
40 artistes : jusqu’au 06/11/16 tél. 02 98 20 29 10 tél. 02 98 88 25 62
ouvert ts les jrs. du 6/07 au 31/08 ouvert du mer. au dim. de 14h30
brest carquefou de 11h à 13h et de 14h à 19h puis à 18h30 et sur rdv. éditions d’artistes
du 01/09 au 02/11 de 14h à 18h ➤ « Entrées libres »
La Passerelle Frac des Pays de la Loire ➤ « Un peu de soleil dans l’eau N. et F. Le Garrec, L. Guillemot, INTERFACE - HORSD’OEUVRE h or sd ’œuv re n°37
41 Rue Charles Berthelot 24 bis Boulevard Ampère froide » Virginie Barré, Eva Taulois : L. Collavizza, M. Plumet, M. Govaert 12 RUE CHANCELIER DE L’HOSPITAL
29200 Brest La Fleuriaye jusqu’au 02/11/16 & BIVOUAC Architectures : 21000 DIJON
tél. 02 98 43 34 95 44470 Carquefou jusqu’au 18/09/16 tél. : 03 80 67 13 86
ouvert le mar. de 14h à 20h tél. 02 28 01 50 00 le creusot ➤ Carte blanche à [GAUTIER & Co] : [email protected]
et du mer. au sam. de 14h à 18h30 ouvert du mer. au dim. 8/10 - 13/11/16
fermé dim., lun. et jours fériés de 14h à 18h, Écomusée Creusot Montceau ➤ « Multiples, salon de la petite Format : 594 x 420 mm (impression offet)
➤ « Naturally Obscure » fermé le 31/12 et 01/01 Musée de l’homme et de l’industrie édition d’artiste » : 12 - 13/11/16 Diffusion R-Diffusion : http://www.r-diffusion.org
exposition collective d’Étienne ➤ Amar Kanwar : jusqu’au Château de la Verrerie
Bernard et Antoine Marchand 16/10/16 71200 Le Creusot Alain DELLA NEGRA & Kaori KINOSHITA
➤ « Polyregard in the dark » ➤ Raphaël Ilias et Julien Laforge : tél. 03 85 73 92 00 [horsd’oeuvre n°37 - 2016]
Anita Gauran 31/10 - 30/12/16 ouvert jusqu’en sept. ts les jrs de Tirage : 200 ex. signés par les artistes
➤ « Veridis Quo » Lola Gonzalez : ➤ « Journal d’un travailleur 14h à 17h30 - fermé le mar., Prix unitaire : 30 € + 8 € de frais d’envoi
jusqu’au 27/08/16 métèque du futur » J. Creuzet, puis oct. & nov. ts les jrs de 10h
➤ « S’embarquer sans biscuit » A. Minoliti, X. Garrido Lecca, à 12h30 et de 13h30 à 18h30
exposition collective de Martin F. Palma Rodriguez, fermé les jours fériés
Jakob et Nicolas Raufaste G. Porras Kim : ➤ « Chadebec bouscule l’affiche »
➤ « 明年 / Next Year / L’Année 19/11/16 - 29/01/17 02/07 - 15/11/16
Prochaine » Ming Wong
➤ « Gemälde » chateau-gontier le havre salon Multiples Mathieu MERCIER [horsd’oeuvre n°31 - 2013]
Linus Bill + Adrien Horni Tirage : 200 ex. signés à froisser par l’acquéreur
➤ « Arabia 1 » Klaus Lutz : Chapelle du Genêteil Le Portique mulhouse Prix unitaire : 50 € + 8 € de frais d’envoi
30/09 - 30/12/16 rue du Général Lemonnier 30 rue Gabriel Péri
53200 Château-Gontier 76600 Le Havre La Kunsthalle Mulhouse Robert BARRY [horsd’oeuvre n°33 - 2014]
bourges tél. 02 43 07 88 96 tél. 09 80 85 67 82 16 rue de la Fonderie Tirage : 50 ex. signés par l’artiste
ouvert du mer. au dim. ouvert du mar. au sam. de 14h à 18h30 68100 Mulhouse Prix unitaire : 100 € + 8 € de frais d’envoi
Transpalette de 14h à 19h ➤ Claude Closky : tél. 03 69 77 66 47
26 route de la Chapelle ➤ Nina Childress : 09/09 - 10/11/16 ouvert du mer. au ven. Didier TRENET [horsd’oeuvre n°34 - 2014]
18000 Bourges 02/07 - 28/08/16 ➤ « La traversée des apparences » de 12h à 18h, jeu. jusqu’à 20h, Tirage : 100 ex. signés par l’artiste
tél. 02 48 50 38 61 ➤ « Invisible cities » Pierre-Jean K.S. Bigot, A. Boiffier, S. Branellec, sam. & dim. de 14h à 18h Prix unitaire : 50 € + 8 € de frais d’envoi
ouvert du mer. au sam. de 14h Giloux : 17/09 - 13/11/16 A. Caquelard, T. Cartron, L. de ➤ « oool / sound fictions »
à 19h - fermé du 23/12/16 au Ridder, A. Inumaru, R. Lauth, M. Delplanque, L. Ferrari, Erwin WURM [horsd’oeuvre n°35 - 2015]
04/01/17 dijon K. Legrand, P. Lemarié, E. Levesque, E. Ladoire, C. Maridet : Tirage : 50 ex. signés par l’artiste
➤ « ENTROPIA » : R., J. Loppin, L. Martin, G. Millo, 15/09 - 13/11/16 Prix unitaire : 50 € + 8 € de frais d’envoi
08/10/16 - 08/01/17 appartement/galerie Interface S. Montefiore, C. Navarro,
12 rue Chancelier de l’Hospital A. Sement, L. Tillier, J. Tocqueville, nevers
Art Orienté Objet, La persistance déraisonnable à faire 21000 Dijon S. Wavrant : 30/09 - 05/11/16
de l’art, 2010, verre soufflé, ressorts, électro-aimants, tél. 03 80 67 13 86 Tlön
métal. © Blaise Adilon ouvert de 14h à 19h Claude Closky, ‘10%’, 2014, stylo bille sur papier, 30 rue Saint-Etienne
du mer. au sam. et sur rdv. punaises, 24 x 18 cm. Vue d’exposition ‘10, 20, 30 58000 Nevers
➤ « Réouverture - Vernissage » ➤ « CULTE ! » Kenny Dunkan : et 40%’, Summerhall, Edinburgh, 2014. Commissaire tél. 09 84 28 51 21
Art Orienté Objet, D. Smith, jusqu’au 16/07/16 d’exposition Paul Robertson ouvert cet été du mar. au sam. de
F. Chaignaud, Sister Iodine, ➤ « itinéraires » 14h à 22h puis de 14h à 19h
Dj Chloé : 08/10/16 Jérôme Giller : ➤ « Vertes incarnation de
➤ Quimera Rosa : 30/10 - 13/11/16 17/09 - 22/10/16 la pluie » Vincent Valéry :
➤ Donna Haraway - conversation : jusqu’au 18/08/16
13/11/16 Entrepôt 9 - Galerie Barnoud ➤ Antoine Renard :
➤ « finissage » D. Smith, F. Thomassin, 9 boulevard de l’Europe ../10 - ../11/16
J.-P. Uzan, L. Raphmaj : 08/01/17 21800 Quétigny
tél. 03 80 66 23 26
ouvert les mer., ven. et sam.
de 15h à 19h et sur rdv.
➤ Thomas Monin :
01/10/16 - 07/01/17

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