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Les conditions de travail sont parfois très pénibles : on peut être victime d'agressivité, de dévalorisations de soi, de harcèlement, d'irrespect, d'empiètements sur son espace ou sur son temps, etc... Tout cela use le système nerveux, dévore l'énergie et a une influence néfaste sur la vitalité et sur la santé – et parfois même sur la vie (comme de récents et terribles faits divers l'ont démontré).
Dans ce livre l'auteur :
• Vous montre comment décrypter ces agressions – délibérées ou non – que l'on subit trop souvent dans le monde du travail
• Et surtout : elle vous donne les moyens de vous préserver et, quand ce n'est plus possible, de vous défendre – et aussi de (contre)attaquer si nécessaire !...

Car pourquoi faudrait-il vous soumettre et plier sous des violences morales ?
Non, bien au contraire vous devez :
• Savoir reconnaître l'agresseur et le type d'agression
• Savoir faire cesser cela
• Et surtout vous faire respecter...

Ce livre a été écrit pour que vous appreniez à le faire...

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Published by Michel Nachez, 2020-02-14 15:07:07

Au travail : faites-vous respecter !!

Les conditions de travail sont parfois très pénibles : on peut être victime d'agressivité, de dévalorisations de soi, de harcèlement, d'irrespect, d'empiètements sur son espace ou sur son temps, etc... Tout cela use le système nerveux, dévore l'énergie et a une influence néfaste sur la vitalité et sur la santé – et parfois même sur la vie (comme de récents et terribles faits divers l'ont démontré).
Dans ce livre l'auteur :
• Vous montre comment décrypter ces agressions – délibérées ou non – que l'on subit trop souvent dans le monde du travail
• Et surtout : elle vous donne les moyens de vous préserver et, quand ce n'est plus possible, de vous défendre – et aussi de (contre)attaquer si nécessaire !...

Car pourquoi faudrait-il vous soumettre et plier sous des violences morales ?
Non, bien au contraire vous devez :
• Savoir reconnaître l'agresseur et le type d'agression
• Savoir faire cesser cela
• Et surtout vous faire respecter...

Ce livre a été écrit pour que vous appreniez à le faire...

Keywords: développement personnel, psychologie, bien-être, guide pratique, travail,Erica Guilane-Nachez,harcèlement,harcèlement moral,harcèlement sexuel,hypnothérapie

– De toutes façons, ça fait un moment que je n’ai
plus qu’une envie, c’est de faire un exercice de
relaxation que je n’ai pas encore trouvé le temps de
pratiquer. Grâce à vous, je vais enfin pouvoir m’y
mettre.

– Ah ? Et c’est efficace, ça ? m'a demandé l’autre,
subitement intéressé.

– Oui, cela me réussit à tous les coups.

– Et vous faites ça comment ?

J’ai alors entrepris de lui expliquer tout en lui
montrant (il s’agit d’un exercice de respiration
contrôlée) et il n'a pas tardé à imiter ce que je faisais.
Dix minutes après, il était tout à fait apaisé et aimable
et s’est excusé de m’avoir si mal reçu. Nous avons fait
d’excellentes affaires ensemble. »

Dans ce récit, si le client s’était, pour des raisons qui
lui étaient propres, senti envahi dans ses territoires
de l’espace, du temps, du confort/plaisir et peut-être
d’autres encore, le représentant, lui, pouvait à bon
droit se sentir agressé au moins dans ses territoires de
l’ego, du temps et du dû (le temps perdu et le dû du
rendrez-vous fixé). Pour résoudre la difficulté, il lui a
suffi de mettre l’accent sur savoir se déstresser.

Ce représentant au sens psychologique si fin devait
avoir bien intégré ce principe du fonctionnement
humain : la dialectique agréable/désagréable que
nous allons voir dans ce qui suit.

Savoir renoncer à gagner toutes les petites ba-
tailles

On devrait toujours se souvenir qu’autrui,
également, préfère l’agréable au désagréable. Cela
semble évident, non ?

Mais tout évident que cela paraisse, tout se passe le
plus souvent comme si on ne tenait pas compte de
cette évidence. L’on a bien plus souvent tendance à
estimer que l’« autre » envenime les choses exprès,
probablement parce qu’« il aime les embêtements » ?!
Les gens assez « maso » pour préférer nager dans les
problèmes et les conflits sont rares – si tant est qu’ils
existent – et il est bien plus probable que chacun
cherche à préserver à la fois son capital et son
territoire de confort/plaisir. Par ailleurs, on ne peut ici
supposer une subjectivité culturelle dans les notions
de plaisir/déplaisir lorsque l’on reste dans le domaine
professionnel : être agressé dans un ou plusieurs de
ses territoires relève toujours du déplaisir.

Si l’on part de cette idée – chacun préfère l’agréable
au désagréable – il devient facile de se comporter de
manière positive même lorsqu’on s’est montré par
maladresse envahisseur dans un territoire d’autrui.

Comment générer de l’agréable après le
désagréable ? Vous avez déjà des moyens : s’excuser,
s’expliquer, pratiquer l’humour, exprimer son respect.

Dans un ordre d’idée voisin, on peut ajouter
également : ne pas tenter de gagner toutes les petites
batailles. Il est bien mieux de garder sa précieuse
énergie pour gagner les grandes, n’est-ce pas ?

Par exemple, voici Serge et Olivia. Ils ont la même
particularité psychologique : ils ont besoin d’avoir
toujours raison et d’avoir le dernier mot. Le problème,
c’est qu’ils travaillent ensemble – et qu’il n’y en a
qu’un seul qui peut avoir le dernier mot.

Olivia :

– Nous avons réussi à augmenter le chiffre d’affaires
de 10% cette année. C’est bien.

Serge :

– 9,1% en réalité : ce n’est pas tout à fait 10%.

Olivia :

– Vous avez un regard bien réducteur, Serge !

Serge :

– Peut-être. Mais le chiffre exact est 9,1%. Ça ne sert
à rien de rosir le tableau.

Olivia :

– C’est possible. Mais ça peut donner du courage,
de l’optimisme et de l’enthousiasme en plus pour
qu’on améliore encore la performance. Mais je
comprends bien que vous avez du mal à saisir cela !!!

Serge :

– Ou ça peut faire cultiver une illusion – ce qui serait
assez votre genre !

Etc.

Olivia empiète ici sur le territoire du j’ai raison, elle a
tort ! de Serge, qui est imbriqué dans le territoire de
l’ego de cet homme. Serge, lui, empiète aussi sur le
territoire de l’ego d’Olivia en mettant en cause
l’exactitude de son propos.

Qui a raison ? Qui a tort ? Qui est l’agresseur,
l’agressé ? Ne jetons la pierre à aucun d’entre eux,
mais voyons plutôt comment cela aurait pu se passer
mieux :

Olivia :

– Nous avons réussi à augmenter le chiffre d’affaires
de 10% cette année. C’est bien.

Serge :

– 9,1% en réalité : ce n’est pas tout à fait 10%.

Olivia :

– Oui, vous avez raison. J’ai simplement arrondi
pour que cela donne de l’énergie et de
l’enthousiasme à toute l’équipe qui constate ainsi, en
chiffres, l’efficacité de son travail. Mais vous avez
raison : c’est bien 9,1%.

Serge :

– Ok. Comme ça, ça va.

Ou encore :

Olivia :

– Nous avons réussi à augmenter le chiffre d’affaires
de 10% cette année. C’est bien.

Serge :

– 9,1% en réalité : ce n’est pas tout à fait 10%.

Olivia :

– Vous avez un regard bien réducteur, Serge !

Serge :

– Peut-être. Mais le chiffre exact est 9,1%. Ça ne sert
à rien de rosir le tableau. Mais vous avez peut-être une
raison pour arrondir ainsi ?

Olivia :

– Oui : cela stimulera l’équipe. Elle sera ainsi fière de
son travail et encline à continuer dans la bonne
direction.

Serge :

– Ok. Cela se défend.

Dans ces deux cas de figure de la petite bataille du
0,9% en plus ou en moins, qui a perdu, qui a gagné ?
Personne n’a perdu mais l’ambiance y a gagné, les
systèmes nerveux de Serge et d’Olivia y ont gagné, la
suite de leur collaboration y a gagné : tout bénéfice,
donc.

La plupart du temps, comme l’être humain préfère
l’agréable au désagréable, il tend à se couler
rapidement dans le « moule » du plus agréable (ou du
moins désagréable) si on lui en laisse la possibilité. Ce
n’est que quand il y est acculé qu’il s’ancre dans le
déplaisant. Cela signifie qu’il est presque toujours
possible d’offrir à l’« agressé » une porte de sortie par
rapport à son réflexe de défense d’un de ses territoire
ou/et de son ego.

C’est là toute la science de l’esquive : permettre à
celui qui se considère agressé de sauver la face, voire
lui montrer un moyen de s’en tirer sans qu’il y ait de
dégâts ni pour son ego ni pour le vôtre.

Comment faire cela ? Un des meilleurs moyens est
de présumer que soi-même ou l’autre ne connaissait
pas tous les faits. Ainsi, on leur trouve des excuses.
Mieux, on les fournit toutes prêtes :

– N’importe qui aurait réagi comme vous dans le
même cas. Toutefois, à la lumière de ces nouvelles
informations...

Ou bien :

– Je pensais comme vous. Cependant depuis que
j’ai vu ces derniers développements...

Ou bien :

– Bien sûr, Serge, le chiffre réel est de 9,1%. Mais un
petit coup de pouce pour stimuler l’équipe à
continuer la progression...

Ou bien :
– Olivia, vous avez peut-être une raison pour
arrondir ainsi ?

Un autre moyen « d’arrondir les angles » est de
placer un mot aimable avant et après le commentaire
explicatif :

– Oui, Serge, vous avez raison. J’ai simplement
arrondi pour que cela stimule l’équipe à... mais vous
avez raison : c’est bien 9,1%.

Ou bien :
– Olivia, je sais qu’en général vous êtes précise.
Toutefois, ici... Mais, telle que je vous connais, vous
avez sûrement une bonne raison pour...

La vie professionnelle est faite aussi de batailles, de
grandes et de petites batailles. Le bon stratège sait
accepter d’en perdre des petites au bénéfice des
grandes, de même que le champion d’échec sait
sacrifier de petites pièces pour assurer la victoire
finale. Alors, pourquoi ne serait-ce pas une bonne
façon de fonctionner au service à la fois du
confort/plaisir et de l’avancement des choses

professionnelles ? Au service aussi d’une harmonie
dans le territoire de l’ego pour chacun, saine
condition pour que l’équipage gagne les inévitables
grandes batailles dans l’entreprise et que le bateau
arrive à bon port : celui du succès de chacun...

Savoir ne pas généraliser

– Victor, tu es toujours grognon !

– Vous n’en ferez jamais d’autres, Didier !

– Pourquoi, Marcel, n’arrivez-vous jamais à vous
adapter aux nouvelles données !?

– Clément, pourquoi es-tu toujours en train
d’hésiter ! N’arriveras-tu donc jamais à prendre une
décision ferme et définitive ?

Non : Victor n’est pas toujours grognon, pas plus
que Clément n’est incapable à tout jamais de prendre
une telle décision. Il y a de très nombreux moments
où Victor est drôle, gai, souriant, coléreux,
enthousiaste, endormi, évanescent, distrait, abattu,
pétillant, etc. Il y a aussi de très nombreux moments
où Clément sait choisir vite et bien une option –
lorsqu’il fait des achats, qu’il conduit sa voiture, qu’il
met sur pied l’organisation de la prochaine réunion,
etc. Et si on parle de Marcel ou de Didier : l’un en a
déjà fait bien d’autres et le deuxième s’est moult fois

adapté déjà – sinon ils ne seraient probablement pas
à leur poste dans l’entreprise...

Toujours, jamais... Voilà des mots bien définitifs ! Ils
sont sans nuances et quand on vous accuse d’être
toujours comme ceci ou jamais comme cela, on peut
douter de votre franche bonne humeur à encaisser
semblables propos : ils piétinent au minimum votre
ego !

Lorsqu’on s’est laissé aller à généraliser ainsi, qu’on
a donc empiété sur un territoire d’autrui, il pourrait
être utile de se rendre compte qu’une telle
généralisation ne correspond à rien de réel et qu’on
est donc soi-même dans l’erreur. Cette prise de
conscience est la première étape pour corriger le tir.

La suite, c’est par exemple ceci :

– Non, Victor, c’est idiot de dire que tu es toujours
ainsi. Je sais bien que ce n’est pas vrai. Toutefois, dans
le cas présent...

– Non, Didier. Je sais bien que vous avez
parfaitement réussi à maintes reprises. Cependant,
cette fois-ci...

– Non, Marcel, j’ai tort d’affirmer que vous ne savez
pas vous adapter. Vous ne seriez pas dans cet emploi
si c’était le cas. Mais cette fois-ci...

– Non, Clément. En réalité je vous ai souvent vu
décider avec fermeté. Cependant, aujourd’hui...

Ce n’est pas plus difficile que cela.

Savoir se remettre en question

Cela a déjà été dit : l’être humain, de par son
humanité, a droit à l’erreur. Le problème commence
le plus souvent réellement lorsqu’il s’obstine dans
cette erreur et cela se produit quand on ne parvient
pas même à concevoir l’idée de se remettre en
question :

– C’est la faute à l'autre – évidemment

– Si je me suis égaré ainsi, c’est parce qu’il..., qu’elle...

Une façon plus constructive de concevoir les choses
pourrait bien être, au contraire, de s’accepter
responsable de soi et de ses actes car alors – et alors
seulement – on peut entreprendre de les guider vers
le mieux. Il est vrai que, tant que c’est la faute des
autres, comme on n’a guère le pouvoir d’infléchir leur
comportement, on reste tributaire de leur bonne, ou
mauvaise, volonté... Non : il paraît bien plus salutaire
de prendre soi-même les rênes de sa vie et, pour cela,
de savoir se remettre en question.

Se remettre en question, c’est chercher
comment mieux faire encore, c’est se donner
de nouveaux atouts, de nouveaux moyens pour
aller plus loin et mieux réussir. C’est servir son

ego tout en bénéficiant des avantages de

l’altruisme : on va de l’avant et cela est
également positif pour autrui.

Savoir se remettre en question peut aussi impliquer
de prendre conscience que ma réalité n’engage pas
la réalité. La réalité est mouvante et varie d’un individu
à l’autre : il est illusoire de croire que nous vivons tous
dans la même réalité. Chacun de nous interprète ce
qu’il vit et perçoit en fonction de ce qu’il est aussi bien
que de l’humeur du moment. Cela signifie bien que
personne n’a accès à une réalité vraie – revendiquer
le contraire relève de l’auto-illusionnement.

Donc, si ma réalité n’engage pas la réalité, cela veut
dire que la réalité du voisin de bureau, ou du chef de
service, ou du DRH, a autant droit à l’existence que la
mienne. Et même que peut-être, il peut y avoir
quelque chose d’intéressant à glaner pour moi dans
une autre de ces approches du réel ?

Vous avez été perçu comme l’« agresseur »,
l’empiéteur-dans-un-territoire, par votre voisin de
bureau, ou par le chef de service, ou par le DRH ? Si
vous acceptez de vous remettre en question, vous
pourrez donc enrichir votre vision des choses en y
adjoignant un angle de vue inédit : celui de l’autre.

Un des plus grands principes de la communication
est le suivant : si l’un des deux se trompe, c’est vous.
On ne doit voir là aucune culpabilité misérabiliste

mais, bien au contraire, la marque d’une personnalité
de qualité, d'un ego fort, capable de prendre en
considération ce qui se passe et de corriger le tir
lorsque cela s’avère nécessaire ou utile. Cette
personnalité de qualité ne perd pas de temps à
chipoter ou à discutailler, elle veut parvenir au but, de
la façon la plus économique en énergie vitale et
mentale et la plus rapide possible aussi. Cette
personnalité va alors modifier sa façon de faire, sa
stratégie, pour parvenir ainsi à l’objectif.

La totalité des difficultés de territoire sont des
difficultés de communication. Cela est certain, car il y
a toujours moyen (sauf peut-être dans le cas de
quelques rares irréductibles) de parer à ces problèmes
en communicant autrement et mieux.

Savoir se remettre en question, c’est :

• Se demander ce que l’autre a compris ou cru
percevoir dans ce que j’exprimais (que telle ait
été, ou non, mon intention). En d’autres
termes, chercher à comprendre en quoi on
est perçu comme un agresseur, un
empiéteur-dans-un-territoire

• Se demander s’il est utile ou positif de faire
l’effort de modifier cette interprétation du vis-
à-vis

• Si oui, trouver comment faire pour modifier
cette interprétation

• Appliquer : modifier sa stratégie, c'est-à-dire
communiquer différemment.

Comment ? Les clés sont dans ce qui précède :
s’excuser, s’expliquer, dédramatiser... Et aussi dans ce
qui suit.

Savoir réparer le tort causé

Se remettre en question permet aussi de réparer le
tort parfois bien involontairement causé.

Juliette, avocate, éclate en sanglots après que
Damien, un de ses associés, soit ressorti de son
bureau. Qu’avait fait Damien ? Il était entré, avait
demandé le dossier numéro 43 et a dit à Juliette :

– Je vais terminer en la préparation. Je n’ai rien à
faire d’urgent et ce dossier m’intéresse pour le plaider.

Juliette vient d’arriver dans cette étude et elle est la
plus jeune et la moins expérimentée de quatre
avocats y officiant. Le dossier numéro 43 représentait
pour elle sa première affaire intéressante, une de celle
qui, si réussie, peut permettre le commencement de
son ascension professionnelle. Damien vient
d’empiéter sur ses territoires du pouvoir, des
possessions, d’autonomie/responsabilité, de l’argent
et, bien sûr, de l’ego. Catastrophe ! Juliette, trop
fraîche émoulue de sa fin d’études, n’ose pas
s’opposer à Damien et craque aussitôt celui-ci sorti.

Damien ne peut pas réparer le tort qu’il a causé,
n’ayant pas vu le cataclysme émotionnel que sa
demande avait provoqué. Ce n’est que des mois plus
tard que Juliette, ayant bien avancé dans sa carrière,
lui raconte l’épisode. Mais si Damien avait pu
constater, ce fameux jour, l’effet sur Juliette de cette
agression territoriale, il aurait pu bien rapidement
corriger le tort involontairement causé : il lui aurait,
par exemple, suffit de rendre le dossier numéro 43 à
Juliette en l’encourageant à gagner ce litige, en y
ajoutant peut-être quelques conseils à sa collègue
pour y parvenir, ou autre chose analogue.

– Finalement, je me rends compte que plaider ce
dossier est plus important pour toi que pour moi. Il est
vrai que cela peut t’aider à t’affirmer dans ce milieu où
il faut sacrément se battre pour arriver. As-tu pensé à
la jurisprudence du... pour étoffer ton
argumentation ? Bon, je te souhaite bonne chance et
si tu as besoin d’un conseil, je suis à ta disposition.

Trop simple ? Mais c’est, la plupart du temps, aussi
simple que cela. Bien sûr : il y a des personnes pour
qui ce « trop simple »-là serait insurmontable à cause
de résistances de l’ego ou du besoin de s’approprier
des morceaux de territoires supplémentaires. Mais à
quel prix...

Savoir négocier

Dans ce qui précède, nous avons vu des moyens de
calmer les conflits territoriaux en sachant
intelligemment se comporter aux abords des
territoires d’autrui.

Mais il peut aussi se produire qu’il soit nécessaire
d’avoir accès à ce qu’autrui considère comme son
territoire – que l’on doive alors trouver le moyen d’y
entrer avec le moins de dégâts possibles. S’excuser,
s’expliquer, demander la permission, exprimer son
respect sont de tels moyens. Savoir négocier en est un
autre.

Si Damien, que nous avons vu au passage
précédent, avait absolument dû, ou voulu, s’occuper
du dossier numéro 43 tout en se rendant compte de
la détresse de Juliette, il aurait pu réagir ainsi :

– Juliette, tu es une excellente avocate et tu as de
grands jours devant toi – tu sais bien que, si ce n’était
pas le cas, nous ne t’aurions pas prise comme
associée. Je vois bien que le fait que je prenne ce
dossier te pose un problème. Toutefois, il vaut mieux
que je m’occupe de cette affaire, parce que notre
étude commune a tout à y gagner – et donc toi aussi.
Maintenant, on peut peut-être discuter ensemble des
différents éléments juridiques utilisables pour que
nous gagnions dans ce procès. Et on peut envisager

aussi de te confier très prochainement une grosse
affaire qu’on pourra également préparer en commun.
Ainsi, tu auras pris de la bouteille et de l’expérience et
tu auras des atouts en plus pour ta réussite dont, moi,
je suis de toutes façons sûr.

Négocier, c’est proposer quelque chose (de
matériel ou non) de désirable en échange d’une autre
chose de valeur subjective équivalente. Lorsque l’on
négocie avec quelqu'un, il est meilleur de considérer
que ce quelqu'un est un allié potentiel et non un
ennemi qu’il « faut rouler dans la farine ». Évaluer les
nécessités d’emprise sur son/ses territoires et ses
besoins à lui que l’on peut combler, voilà les bases
d’une saine négociation et qui a, de ce fait, bien des
chances d’aboutir.

Parfois, c’est vraiment d’une simplicité enfantine : la
valeur d’échange peut être tout bonnement le fait de
dire que l’on remettra tout en place dans le bureau de
Paul lorsqu’on partira. Cela peut l’amener à autoriser
de bon cœur à étaler tous les documents que l’on doit
y placer pour l’instant. Parfois, c’est plus compliqué. En
tous cas, il n’y a pas de règle élémentaire ou de recette
magique pour asseoir des négociations
avantageuses. Là, le flair, l’instinct, l’intuition, la bonne
volonté, le respect d’autrui, l’honnêteté et, pourquoi
pas, la gentillesse, sont les grands leviers d’une saine

négociation par rapport à des incursions dans les
territoires possédés par autrui.

Ajoutons encore un conseil : il est toujours meilleur
de négocier selon le schéma suivant, non pour
manipuler son vis-à-vis mais pour créer une
atmosphère positive et amicale :

• Commencer par un mot gentil

• Poursuivre par la négociation en elle-même

• Terminer sur une note agréable pour l’ego de
l’autre personne.

Savoir être souple, flexible, adaptable

Beaucoup de « guerres » territoriales dans
l’entreprise (et ailleurs) sont liées au fait que l’on ne
parvient pas à sortir de son propre point de vue et
que, malheureusement, le point de vue de l’autre est
irréductiblement différent. La solution se trouve
souvent dans l’élargissement de l’angle de vue, dans
le « recadrage » de la difficulté. Un des meilleurs
moyens serait de voir les choses de différentes
manières, avec différentes interprétations, en se
souvenant que la « réalité réelle » est inaccessible et
que c’est l’interprétation qu’en fait chacun qui crée sa
réalité subjective.

Or, modifier son point de vue est souvent difficile
parce que, précisément, il est le résultat de notre

arrière-plan et que des arrière-plans « exogènes » font
défaut. C’est là qu’interviennent la souplesse, la
flexibilité de comportement et l’adaptation, alliées à
de la bonne volonté et à de l’astuce.

Il n’est certainement pas nécessaire de souligner à
nouveau que la souplesse et l’adaptabilité sont des
voies royales pour dépasser presque toutes les
difficultés que pose la vie – y compris, bien sûr, dans
ce bateau commun qu’est l’entreprise. Souplesse et
adaptation ne veulent nullement dire laxisme, laisser-
aller ou comportement de girouette – mais
intelligence de réaction à ce qui se passe, pour
« ajuster le tir » au mieux des objectifs personnels et
communs. Être flexible et adaptable, c’est donc ne pas
rester à camper sur des frontières fermées ou se
cramponner à des raideurs nuisibles. C’est, bien au
contraire, savoir se remettre en question et surtout,
surtout, savoir comprendre les choses de l’intérieur de
l’autre. C'est, presque littéralement, entrer dans sa
peau, chausser ses souliers.

Imaginons que vous ayez été l’« agresseur », c'est-à-
dire celui qui a empiété sur ce qu’autrui identifie
comme son territoire. Vous avez été remis en place.
Vous vous en êtes plus ou moins bien tiré : l’ego de
votre « victime » et votre ego ont été plus ou moins
égratignés.

Peut-être n’avez-vous pas pleinement compris la
riposte de l’autre ou, peut-être, voulez-vous éviter que
ce genre d’incident ne se reproduise. Que pouvez-
vous faire ? Être souple, adaptable et tout prêt à
accepter de voir d’autres « réalités » que la vôtre
première, de manière à enrichir votre savoir et aussi
vos moyens d’agir juste. Et comment ferez-vous cela ?
Voici une astuce qui vous le permettra facilement :

• Mettez sur le sol trois feuilles de papier. Sur
l’une, vous aurez écrit votre prénom ; sur la
deuxième, le nom de l’autre personne ; sur la
troisième, les mots : Observateur Neutre

• Ensuite, mettez-vous d’abord sur le papier
marqué « Mon prénom » et vivez et jouez la
scène litigieuse de l’intérieur de vous, c'est-à-
dire selon votre propre point de vue

• Puis, allez sur le papier marqué du nom de
l’autre personne et faites de même, avec
autant de sincérité et d’ouverture que
possible : vivez la même scène de l’intérieur
de l’autre, jouez-la en tenant compte de son
angle de vue – qui n’est pas le même que le
vôtre. Voyez votre propre personnage dans la
scène – symbolisé là-bas par la feuille de
papier marquée de votre prénom – avec les
yeux de l’autre ; percevez-vous avec ses sens ;
réagissez à vous avec son émotivité et ses

sentiments. Comprenez les choses avec son
arrière-plan à lui.

• Ensuite, allez-vous mettre sur la feuille sur
laquelle vous aviez inscrit « Observateur
Neutre ». Et maintenant, observez, regardez,
en toute neutralité bien sûr, c'est-à-dire du
point de vue de quelqu'un qui n’est pas du
tout impliqué dans le problème. Et voyez ces
deux-là, vous et l’autre, en interaction et
toujours dans la même séquence.

• Si, à ce moment-là, vous ne voyez pas les
choses avec un autre œil qu’initialement,
recommencez le tout encore une fois : vous
n’avez pas encore été assez souple et
adaptable pour enrichir votre regard de deux
autres angles de vue, celui de l’autre et celui
de l’observateur neutre.

Il est facile de corriger les choses lorsqu’on a été soi-
même l’« agresseur ». C’est parfois plus compliqué
lorsqu’on est « victime ». Mais les moyens existent.
Découvrez-les maintenant.

Comment restaurer la saine coopéra-
tion

Être soi-même victime d’une agression du territoire
est désagréable. Sans doute est-ce à l’agresseur de
réparer les torts – même s’il ne le fait pas toujours.
Alors, voyons comment on peut réagir au bénéfice de
la meilleure ambiance professionnelle.

Vous êtes la « victime »

Souvent, l’« agresseur » considère qu’il a d’abord
été victime et souvent la « victime » s’était montrée
« agresseur » auparavant : qu’il est donc difficile de
faire la part des choses. Empiéter, consciemment ou
non, sur le territoire d’autrui provoque une réaction
déplaisante, laquelle est perçue comme un
envahissement de son propre territoire, ce qui génère
une riposte négative. Laquelle, à son tour, est perçue
comme une invasion du territoire de l’autre,
produisant une réponse en proportion, etc. Quel
micmac ! On ne sait pas forcément où cela a
commencé et, si on laisse faire, on ne sait pas non plus
où – et quand – cela va se terminer !

Alors ? Alors, il est peut-être sage de décider que
cela va s’arrêter ici et maintenant et d’employer les
moyens pour cela.

Certains des moyens utilisables ont déjà été décrits
dans la partie de ce livre intitulée « Vous êtes
l’agresseur ». Nous les reverrons donc très rapidement
ici avant d’en aborder de plus spécifiques.

Ce que vous savez faire déjà :

SAVOIR NE PAS GÉNÉRALISER

– Ce type m’agresse toujours ! – problème de
territoire de l’ego.

– Pourquoi faut-il que Véronique ne suive jamais les
instructions que je lui donne ? – problème de
territoire de pouvoir, de l’ego.

– Cet insupportable Sylvain passe son temps à me
contredire ! – problème de territoire des idées, de
l’ego.

– Je ne peux plus accepter que Sophie dise à tout
bout de champs à tout le monde que je gagne moins
qu’elle ! » – problème de territoire de l’argent, de
l’ego.

Toujours, jamais, passe son temps, à tout bout de
champs, à tout le monde... Voilà certainement des
généralisations hâtives et donc des façons de voir
fausses. Non. Sachons donner aux choses une plus
juste mesure : « cette fois-là », « maintenant », « en ce
moment », à Untel. Cela change la perspective,

modifie le cadre et réduit d’autant l’ampleur de
l’offense que vous avez encaissée – et donc,
parallèlement, la proportion de votre réaction
défensive.

SAVOIR S’EXPLIQUER

Vous vous sentez agressé, vous êtes en colère, vous
éprouvez le besoin de défendre quelque chose : vous
avez été atteint dans un de vos territoires. Mais ce
territoire-là peut devoir être partagé. Et, même si ce
n’est pas le cas, il peut être utile de remettre les
« pendules à l’heure », c'est-à-dire aussi,
probablement, d’éviter que de tels désagréments ne
se reproduisent ! Savoir s’expliquer peut permettre
cela aussi bien que, peut-être, de vous faire prendre
conscience que, oui, en effet, il convient d’accepter un
partage du territoire en question.

Savoir s’expliquer, lorsqu’on est « victime » d’une
atteinte territoriale, c’est s’éviter la rumination et le
ressentiment risquant de pervertir des relations
humaines dans l’entreprise. C’est éclaircir des choses
qui pouvaient être étrangères à (ou inconnues de)
l’« agresseur ».

Bien sûr, le ton revanchard et la vindicte ne sont pas
de bons paramètres pour une saine explication. Non,
bien au contraire : calme, force tranquille, intelligence,
maîtrise, sourire et humour (pas ironie mordante !)...

– Tu es un type super et très précis d’habitude,
Philippe. Toutefois, sais-tu que tu viens de m’humilier
affreusement (sourire gentil) en oubliant de
transmettre mon message à X – qui me prend à
présent pour un incompétent. Qu’est-ce qu’on peut
faire maintenant pour corriger le tir ?

SAVOIR SE RELAXER, SE DÉSTRESSER

Voilà qui sert également à prendre du recul : les
réactions immédiates sont souvent plus virulentes que
le stimulus ne le justifierait. Ainsi, cette prise de recul
permet de modifier le dosage de l’« offense », de la
recadrer, de stimuler à l’humour, de réfléchir à
comment négocier par exemple. Mais vous savez déjà
comment, concrètement et vite, faire cela, n’est-ce
pas ?

SAVOIR RENONCER À GAGNER TOUTES LES PETITES BA-
TAILLES

Vous avez été agressé dans votre ego ou dans un
de vos territoires. Vous le savez, parce que votre
réaction est vive : « coup au cœur », colère rentrée ou
sortie, humiliation, sentiment du genre : « Tu dois me
le payer ! »

L’offense est-elle lourde ? Est-elle légère ? Vaut-elle
l’érosion nerveuse et l’épuisement émotionnel qu’elle
provoque ? Est-ce une grande ou une petite bataille ?

Met-elle en cause la construction de l’issue finale
positive ? Et puis : qui est l’agresseur ? Quelle est sa
motivation – « crasse » délibérée ? Ou gaffe,
maladresse sans intention nuisible à votre encontre ?

Des réponses que vous apporterez à ces questions
dépendent la suite des événements et votre réaction
ainsi que la stratégie consécutive : si s'agit d'une petite
bataille, il n’est certainement pas nécessaire de
consommer une précieuse énergie vitale et
émotionnelle. Si c'est une grande : alors, au combat !

SAVOIR SE REMETTRE EN QUESTION

Il n’y a toujours pas là l’ombre de quelque chose qui
ressemblerait à de la culpabilité misérabiliste. Cela vise
encore à vous amener à une salutaire prise de recul
pour adapter au mieux la riposte. Voici quelques
bonnes questions à se poser en toute lucidité :

– Ai-je fait ou dit quelque chose qui explique ceci ?
– Ai-je empiété sur son territoire ? Et si oui : quel
territoire, comment, quand et pour quelles raisons ?
Sur le vu des réponses à ces questions, il convient
ensuite d’adapter la tactique au mieux : négocier,
humour, relaxation, souplesse ou... boum !

SAVOIR ÊTRE SOUPLE, FLEXIBLE, ADAPTABLE

Pour continuer dans un ordre d’idées analogues :
prendre du recul afin de comprendre les choses de

différents points de vue est toujours porteur
d’enrichissement et souvent de solutions. Alors,
souvenez-vous de la technique des trois feuilles de
papier au sol, marquées de votre prénom, du nom de
l’« adversaire » et « Observateur Neutre ».

De plus, lorsque grâce à cette technique vous aurez
compris, de l’intérieur de l’autre littéralement, quel est
le fin mot de l’histoire, votre attitude sera infiniment
plus juste et ciblée pour calmer le jeu ou... contre-
attaquer.

SAVOIR NÉGOCIER

Vous vous souvenez du sens de la négociation :
c’est proposer quelque chose de désirable en
échange d’une autre chose de valeur équivalente.

– Félicia, je sais que tu n’es pas une méchante fille.
Je suis blessée par le fait que tu m’aies dévalorisé
auprès du chef d’atelier. Je voudrai que nous gardions
de bons rapports parce que c’est plus agréable pour
nous de travailler dans une ambiance sympathique.
Comment peut-on faire pour que ce genre de
problème ne se produise plus et que l’on s’entende
bien à nouveau ?

Celle qui parle ainsi commence par dire un mot
gentil, expose le problème et conclut par un autre
concept plaisant, but de la négociation : s’entendre
bien à nouveau. De plus, elle offre même à Félicia le

choix de la solution. Le but ciblé est tout à fait
désirable : retrouver une atmosphère de bonne
qualité pour les deux après avoir pansé la plaie
infligée à l’ego de la locutrice (bien sûr, on peut aussi
soi-même pointer la solution).

SAVOIR FAIRE PREUVE D’HUMOUR

Martial a été indiscret : il a révélé aux cadres que
Francis est le moins bien payé d’entre eux. C’est très-
très désagréable pour Francis : il ressent cela comme
une véritable invasion dans son territoire de l’argent –
et dans son ego.

Que peut faire Francis ? Se fâcher ? Agresser
Martial ? Chercher une « petite bête » chez Martial
pour lui rendre la monnaie de sa pièce ? Lui intimer
l’ordre de garder ses informations pour lui ? Lui faire
honte de son indiscrétion ?

Il y a fort à parier qu’aucun de ces moyens ne sera
efficace. Certains, même, pourraient être
dommageables pour l’image de Francis. Une fois bien
réfléchi, celui-ci décide d’utiliser l’humour. Il attend un
jour où presque tous les cadres sont réunis, choisit le
bon moment pour dire en souriant, l’œil pétillant :

– Martial, grâce à toi, tout le monde sait que mon
salaire est le moins élevé de nous tous. Mais ce que
l’on ne sait pas, c’est que je me contente d’un grain de
riz par jour pour ma ligne et, qu’en conséquence, c’est

moi qui ai le plus d’argent de nous tous : un seul
paquet de riz me dure plusieurs mois ! Vue la brioche
de certains d’entre vous, qui dit mieux ?

L’humour est ainsi une arme possible lorsque
d’autres modes de fonctionnement ne sont pas
adéquats. C’est toutefois une arme à mener avec
quelques précautions : il y a des personnes
inaccessibles à l’humour et qui analysent largement
au premier degré.

Savoir contre-attaquer

Eh oui !

Et qui a dit qu’il fallait nécessairement toujours
trouver des solutions pacifiques ? Pas moi en tous cas,
parce que l’adaptation la plus serrée interdit d’exclure
une des options possibles.

Vous voilà donc « victime » d’incursions dans vos
territoires et le résultat de vos intelligentes et calmes
cogitations vous amène à penser que la réaction
vigoureuse est la seule judicieuse ? Alors, avant
d’engager le combat, assurez-vous que vous avez les
meilleurs atouts pour gagner : aucun stratège ne se
lance dans la bataille avant d’avoir compté ses forces,
estimé ce qu’il est disposé à sacrifier et mis en place sa
stratégie. De même, aucun général (sauf s’il est
« malade du pouvoir » et ivre d’appétit de conquête,

ce qui n’est pas votre cas, n’est-ce pas ?) n’entame le
conflit avant d’avoir épuisé les différentes voies
diplomatiques possibles. De plus, aucun chef d’armée
digne de ce nom n’attaque sans avoir une idée précise
des avantages qu’il attend de la victoire et des
inconvénients à assumer en cas de défaite.

Vous aussi, avant d’en venir à l’agression en retour,
mettez vos idées au clair avec ceci :

• Quelle est l’ampleur de l’incursion dans votre
territoire ?

• L’engagement armé est-il la seule solution
pour résoudre ce problème ?

• Quel doit être l’ordre de grandeur de votre
riposte ?

• Quelle doit alors être votre stratégie de
contre-attaque ?

• En avez-vous les moyens ?

• Que gagnerez-vous si vous êtes victorieux ?

• Quels seraient les inconvénients de cette
victoire ?

• Quel serait le prix à payer en cas de défaite ?

• Avez-vous les moyens de payer ce prix, si cela
se produisait ?

Vue sous cet angle, on se rend bien compte que
l’entrée en campagne ne peut guère, valablement, se

faire sans un minimum de réflexion préalable.
Nombreux sont ceux qui s’y sont jetés sur un coup de
tête (ou un coup d’orgueil), ont été vaincus et ont dû
payer un prix très coûteux : de la mise à l’index
jusqu’au licenciement, avec tous les étages
intermédiaires entre ces deux pôles. Bien sûr, pour
d’autres, la contre-attaque « armée » instinctive leur a
réussi — mais ils sont rares.

Alors, à vous de voir, en fonction du résultat de
votre introspection quant aux tenants et aboutissants
de la riposte « armée » et de vos réponses aux
questions ci-dessus.

Si la contre-attaque agressive est parfois aussi une
solution, la plupart du temps d’autres alternatives sont
bien meilleures, plus puissantes en potentiel de
résolution des difficultés et très souvent mieux
adaptées et plus intelligentes.

Il convient donc de ne s’y résoudre qu’en dernier
ressort lorsque les autres voies de recours ont fait la
preuve de leur inefficacité.

Savoir pratiquer l’« Aïkido verbal »

L’Aïkido est un art martial japonais mis au point par
l’étonnant Senseï (Maître) Ueshiba. Ce qui caractérise
l’Aïkido est qu’il est un art de défense – et non
d’attaque. Il existe quelques vieux films en noir et

blanc où l’on voit le vieux et frêle Maître Ueshiba
attaqué par plusieurs grands gaillards – chacun
faisant plus du double de son poids et, tout de même,
tous ceintures noires avec quelques Dan en plus – et
les faisant valser l’un après l’autre à l’aide de simples
petits mouvements de la main.

Le principe de l’Aïkido est de se servir de la force
que met l’adversaire dans son attaque pour le
déséquilibrer et le faire tomber. Il se sert aussi de la
surprise opérée sur l’assaillant par le type de la riposte,
toute en souplesse et sans opposition directe. Grâce à
cela, l’aïkidoka n’utilise presque pas de force
personnelle dans l’engagement – et il gagne.

Bien sûr, je ne vous invite pas à vous inscrire à un
cours d’Aïkido pour, au bout de nombreuses années
d’entraînement, devenir Senseï à votre tour. Mais je
vous invite à passer maître dans un art de défense que
j’appelle l’« Aïkido verbal ». Souvenons-nous que,
dans ce chapitre, vous êtes la victime, c'est-à-dire celui
qui a écopé d’un raid dans un de ses territoires. Que
pouvez-vous faire ? Surprendre l’envahisseur et
l’amener plus loin qu’il ne voulait/voudrait aller.

Luc vient d’empiéter (en public) sur les territoires de
l’ego et de l’identité de Éric :

– Décidément, Éric, tu n’en feras jamais d’autres ! À
chaque fois que tu es face à ce genre de difficultés, tu
cales ! Mais quand donc apprendras-tu à (etc...).

Comment Éric peut-il pratiquer l’Aïkido verbal ?
Comme ceci, par exemple (d’un ton mi-sérieux, mi-
amusé) :

– Seigneur ! Si tu savais à quel point je m’en veux !
Chaque fois que je me regarde dans la glace, je me
dis : « Éric, tu es un minable ! Comment peut-on te
supporter, avec tous les énervements que tu
provoques, en particulier chez ce pauvre Luc qui est
obligé d’éponger lorsque (etc...) »

Autre exemple : Coralie a vu, sur le bureau de
Marie-Thérèse, une photo de la fille de quinze ans de
cette dernière. Très impulsive, Coralie s’est laissée aller
à se moquer de la coiffure de la jeune fille, chose assez
étrange en vérité, mélange de punk, de grufty et de
grunge. Elle a ainsi mis « les pieds dans le plat » dans
le territoire des sentiments-émotions – et de la famille
– de Marie-Thérèse.

Le premier réflexe de Marie-Thérèse est de penser :

– Comment peut-on faire des réflexions aussi
débiles sur la coiffure d’une adolescente – comme si
on n’avait pas tous eu nos fantaisies de look à cet âge-
là ! Cette femme est d’une stupidité !

Puis, Marie-Thérèse se souvient du principe de
l’Aïkido verbal. Tout à fait sérieusement, elle dit :

– Coralie, si tu savais le chagrin que ça me fait de
voir ma fille affublée ainsi. J’ai beau lui dire que c’est
affreux, elle ne veut rien entendre. La nuit, il m’arrive

de me réveiller en sursaut à la suite d’un cauchemar
où je la vois, jugée par un jury, sur sa coiffure (etc...).

Je vous laisse imaginer les réactions de Coralie et de
Luc après ces commentaires : cela pourra vous
convaincre, mieux que par de longs discours, de la
valeur de l’Aïkido verbal en cas d’irruption dans
certains de vos territoires. Vous noterez également
qu’il y a toujours au moins une pointe d’humour dans
l’Aïkido verbal (même si le ton employé est sérieux) et
qu’il demande souvent un talent (à cultiver, car il n’est
pas si fréquent que cela) : une certaine aptitude à
l’autodérision drôle. Mais vous connaissez déjà les
vertus de l’humour...

Savoir « recadrer »

Recadrer, ici, signifie placer les choses dans un autre
cadre, c'est-à-dire leur donner une interprétation
différente de l’interprétation initiale – et meilleure (de
préférence, évidemment : c'est-à-dire apportant plus
d'avantages).

Matthieu, chef de service, se comporte avec ses
collaborateurs de façon sèche et autoritaire, à la limite
de l’insupportable. Tout le monde le juge mal,
appréhende d’entrer en contact avec lui et le fuit
autant qu’il est possible. À chaque fois que Matthieu
dit quelque chose : regards entendus entre les

collègues et employés (« Encore cet ogre de Matthieu
qui enquiquine le monde. »). Matthieu existe donc
pour ses collaborateurs dans le « cadre » suivant :
ogre, ours mal léché, enquiquineur et autres
étiquettes analogues.

Matthieu est vécu par les autres comme un
agresseur permanent dans nombre de leurs
territoires : ego, émotions-sentiments, pouvoir, spatial,
temps, dû, confort/plaisir, liberté...

Voici qu’arrive une nouvelle employée, Déborah,
jeune femme vouée à remplacer la secrétaire de
Matthieu, partie en congé de maternité. Rapidement,
Déborah est mise au courant du « caractère de chien »
de Matthieu et se dit :

– Ou je vais m’user les nerfs comme, visiblement, les
autres, ou j’essaye de m’en tirer le mieux possible.

Elle prend la peine de s’informer sur Matthieu et
apprend ainsi qu’il a perdu, il y a trois ans, sa femme
dans un horrible accident de voiture dont il a
réchappé de justesse avec la cage thoracique
enfoncée et de multiples fractures au bassin et aux
jambes. Ces informations suffisent pour que Déborah
place Matthieu dans un autre cadre : pauvre homme
qui a perdu un être des plus chers et qui souffre sous
sa carapace de dureté. Bien sûr, le comportement de
Déborah envers Matthieu est alors différent de celui
des autres employés et, oh surprise, Matthieu se

comporte tout à fait courtoisement envers elle – dont
tout le monde pensait qu’elle craquerait au bout de
deux semaines !

C’est cela, recadrer. Il vous sera extrêmement positif
de vous entraîner à recadrer les problèmes et
difficultés diverses que vous pouvez être amené à
rencontrer. Lorsqu’un recadrage est réussi, cela
provoque souvent quelque chose comme une mini-
illumination, le genre bon-sang-mais-c’est-bien-sûr !
C’est alors que, subitement, vous voyez les choses
sous un autre angle, avec d’autres yeux.

Pour illustration, imaginons que Margot, par
inadvertance, efface une partie d’un fichier que vous
avez peiné à entrer dans l’ordinateur (agression dans
vos territoires des possessions et du temps). Le
problème peut être vu comme :

• Cette fichue idiote qui n’en fera jamais
d’autres !

• Cette petite perverse qui, sous couvert
d’erreurs, ne cherche qu’à me mettre des
bâtons dans les roues.

• Cette incompétente créature qui devrait être
renvoyée depuis longtemps.

• Cette jeune femme si ennuyée maintenant de
m’avoir causé du tort et qui ne sait plus où se
fourrer.

• Cette jeune femme qu’il serait bon que
j’informe davantage sur les manipulations à
faire et à ne pas faire lorsqu’on touche un
clavier d’ordinateur. Ainsi, cela évitera de
telles erreurs à l’avenir et, de plus, Margot
deviendra alors une collaboratrice plus
efficace.

• Ça m’apprendra à ne pas prendre toutes les
précautions d’usage pour sauvegarder mes
données...

Cette liste n’est pas limitative. En lisant ces phrases,
chacun peut sentir les différences de sentiments et
d’émotions qu’elles véhiculent en fonction du cadre
dans lequel on place la difficulté.

Alors, vous le voyez maintenant, l’intérêt de savoir
recadrer ?..

Savoir se servir de « modèles »

Il n’est pas toujours facile de trouver comment
recadrer. Aussi, je vous offre un moyen royal pour y
parvenir :

Trouvez-vous quelques « modèles », c'est-à-dire des
personnages que vous admirez parce qu’ils gagnent
toujours, ne s’en laissent pas compter, sont intelligents
et successfull. Ces modèles peuvent être des humains
vivants ou ayant vécus, des personnages de contes,

de cinéma, de la littérature, de la bande dessinée,
légendaires... Peu importe, pourvu que vous sachiez
que, pour vous, ils ont les qualités requises pour
toujours s’en sortir à leur avantage, quelles que soient
les circonstances (notons qu'il est bien évident qu’on
ne s’en sort pas à son avantage lorsqu’on récolte des
haines farouches qui nous poursuivront).

Lorsque vous ne parvenez pas à recadrer,
demandez-vous comment le(s) modèle(s) aurai(en)t
réagi à l’offense ou à la difficulté : c’est alors que vous
verrez des choses à travers les yeux du modèle – c'est-
à-dire selon un point de vue différent du vôtre initial.

C’est très facile à faire, riche d’enseignements et
souvent étonnamment transformateur pour sa
personnalité : on peut y gagner l’accès à de nouvelles
ressources, à une nouvelle compréhension et à des
modes de comportement inédits – et auxquels elle
n’aurait jamais eu accès hors de cette technique
faisant appel aux modèles.

Pour vous inspirer, voici quelques exemples de
modèles parmi ceux que j’ai pu rencontrer, proposés
par mes patients ou coachés : Marie Curie, la grande
Catherine de Russie, Thérèse d’Avila, Angélique-
marquise-des-anges, Candy et Élisa (personnages de
bande dessinée), Rambo, Arnold Schwarzenegger, le
personnage de David Carradine dans la série télévisée
Kung Fu, Gengis Khan, Jean-Paul Belmondo...

Ce qui est important, ce n’est pas la réalité de la
personnalité du modèle, mais ce que l’on greffe sur lui
en tant que ses qualités, talents et ressources, c'est-à-
dire la façon dont on s’imagine qu’il est et se
comporte.

Alors, offrez-vous l’aide de ces modèles que vous
allez vous choisir : c’est gratuit, cela ne demande
qu’un peu de temps et de réflexion – et cela peut
changer la vie et vous permettre de toujours trouver
de bonnes solutions aux vexations territoriales dont
vous pourriez être la cible.

Savoir ne pas en faire un problème de personne,
mais d’acte raté « cette fois-ci »

Cette idée-là est dans le droit fil de la précédente : le
recadrage. Aussi, je ne m’y attarderai pas trop.

Être rabroué et critiqué pour une faute commise
envers vous peut laisser un goût amer, humilier l’autre
– et parfois pour très longtemps. C’est souvent peu
efficace et cela peut générer sur la suite des
événements nombres d’embarras inutiles. Pourtant, il
peut être parfois nécessaire de remettre les pendules
à l’heure et de dire ce qui ne va pas. Alors là, il y a l’art
et la manière, car un des grands principes de la
communication interpersonnelle est : il convient de

critiquer l’acte raté cette fois-ci et non l’ensemble de la
personne.

Au lieu de :

– Schneider, vous êtes un fichu maladroit pour avoir
(fait ceci...).

Il est mieux de dire :

– Schneider, en général, vous y arrivez bien. Mais
cette fois-ci vous avez complètement raté (ceci...).

Vous voyez la différence ? Dans un cas, c’est la
totalité de l’être de Schneider qui est mis en cause
pour l’erreur ou la faute, dans l’autre ce n’est qu’une
petite portion du temps et des actions de Schneider
qui sont mis en cause.

Ce deuxième cadre dans lequel chacun des deux
protagonistes voit et vit le problème est différent du
premier et, ici, il n’y a que peu de risques de dégâts
obérant la suite de la collaboration. Pour vous aider,
voici la structure qui me semble la meilleure pour
dépasser un tel problème :

• Avant la critique, un mot gentil (« Schneider,
je sais qu’en général vous y arrivez bien »).

• Puis le corps du problème, en mettant en
cause l’acte et non la personne.

• Ensuite fournir la solution : dire à Schneider
comment il peut réparer les dégâts et

comment il peut faire, à l’avenir, pour que la
difficulté ne se réitère pas.

• Demander la collaboration en ce sens (pas
l’exiger ! : « Schneider, pourriez-vous faire en
sorte que... ? » Et pas : « Schneider, arrangez-
moi ça – et en vitesse ! »)

• Terminer sur une note gentille (« Schneider, je
sais que vous avez tout à fait l’étoffe pour que
cela ne se reproduise pas. »)

• Et, bien sûr : savoir ne pas revenir
indéfiniment (une semaine après, six mois
après, un an après, vingt ans après...) sur la
bévue commise par Schneider le vingt
octobre mille neuf cent et quelques !

Savoir focaliser le regard sur l’objectif à atteindre
ensemble

Il n’y a rien de tel que cela pour ne pas voir les petits
à-côtés et les embûches du chemin. Lorsqu’on marche
avec les yeux fixés sur la « ligne bleue des Vosges », on
ne voit pas les plaques de neiges résistant encore au
printemps naissant ni les ronces commençant à
envahir le sentier...

Si on a le but présent à l’esprit, « gros comme une
maison », il est facile de passer outre aux menus ou

moins menus problèmes, vexations et irruptions
maladroites d’autrui dans nos territoires.

En fait, on s’est rendu compte que ceux qui
réussissent, s’imposent, atteignent leur cible – quelles
que soient les difficultés rencontrées – avaient une
particularité : ils focalisent le maximum de leur
attention sur l’objectif que leurs actions visent. Ils
adaptent judicieusement alors leur comportement et
leurs façons de réagir au fur et à mesure des besoins
et de ce qui se produit.

À l’inverse, ceux qui sont vite obnubilés par les
incidents de parcours et qui, de ce fait, déplacent leur
attention du but à atteindre à ces incidents-là,
dilapident beaucoup de temps et d’énergie – temps
et énergie ainsi retirés de la poursuite de la finalité. Si
le capitaine du bateau ne sait pas garder à l’esprit la
destination à atteindre parce que le second-maître
l’ennuie, le navire n’y arrivera jamais !

Travailler ensemble dans l’entreprise, c’est
privilégier la collaboration, c’est savoir dépasser les
inconvénients et les événements plus ou moins
désagréables que l’on peut rencontrer dans toute
communauté humaine – et cela au bénéfice de
l’aboutissement ciblé, qui est la raison d’être de
l’action commune.

Ainsi, un des meilleurs moyens pour être
invulnérable aux agressions dans nos propres

territoires est de se souvenir de cela : on ne peut avoir
que peu d’éléments simultanément présents dans le
champ de conscience. Si c’est le but qui est
intensément présent, tout le reste perd en intensité.

Et les pouvoirs d’action, de décision,
d’adaptation, de souplesse s’amplifient
d’autant, en même temps que le potentiel de

succès.

Savoir communiquer

La communication est la clé de toute interrelation
humaine et toute interrelation humaine est
communication.

Il y a différentes façons de communiquer : des
bonnes, des moins bonnes, des franchement
désastreuses. Regardez autour de vous pour voir
toutes ces manières-là à l’œuvre !

Si toute interrelation humaine est communication,
toute agression territoriale est communication, toute
aggravation d’une situation interpersonnelle l’est
aussi et tout apaisement, pacification ou (re)mise en
place de l’harmonie l’est également.

Ainsi, le talent de bon communicateur est la voie de
l’excellence pour résoudre les difficultés et les
malentendus liés aux réflexes territoriaux (ainsi que
tous les autres problèmes relationnels).

Bien communiquer, cela s’apprend. Cela sert à
arrondir les angles lorsque les problèmes sont là et
aussi, largement, à en éviter l’apparition. Ce qui nous
amène au chapitre suivant : après la « guérison », la
« prévention ».

Prévenir vaut mieux que de devoir
guérir

On le sait bien, prévenir vaut mieux que guérir. Cela
est valable aux différents niveaux de la santé physique
et psychique tout autant qu’à celui de la bonne
« santé » du vécu professionnel. Les moyens pour
prévenir les difficultés territoriales existent et ils sont
faciles d’accès pour chacun qui consent à les
appliquer.

Savoir se construire un ego fort

La parade majeure aux difficultés de territoire dans
l’entreprise est la mise en place pour chacun d’un ego
fort, bien structuré et équilibré. En effet, rien de tel
qu’un authentique sentiment de force personnelle –
ce que les Maîtres d’arts martiaux japonais appellent
force tranquille. Cela n’est ni raideur, ni crispation, ni
« mégalo », mais simple et calme confiance en soi et
en son aptitude à gérer les choses de façon paisible,
efficace, souvent cordiale et, en tous cas, indulgente
et tolérante – y compris pour les petits travers et
insuffisances d’autrui. D’ailleurs, on se rend même
compte à l’usage que celui de qui émane cette force
tranquille est rarement agressé ou en butte à des

tentatives de vexation, d’emprise ou de harcèlement
de quelque nature. En effet, personne, en dehors de
cas pathologiques, n’est enclin à se mettre de soi-
même dans des situations où on sait (ou sent) qu’on
sera vaincu.

Quelqu'un qui dispose de cette force tranquille, de
cet ego fort et bien structuré, c’est quelqu'un qui tout
naturellement émane cette assurance à la fois
pacifique et ferme. C’est aussi quelqu'un qui ne
ressent nul besoin de se prouver quelque chose à lui-
même – il sait ce qu’il vaut – et donc ne sera pas enclin
à agresser autrui ou à le dévaloriser. Il s’accorde le
droit à l’erreur (faire une erreur est humain) et se
donne le devoir de la corriger s’il y a lieu. Il ne se sent
pas déchoir quand il; a commis une erreur.

L’ego fort ne s’accroche pas à de petits bouts de
territoire, il n’a pas besoin de gagner toutes les petites
batailles, mais il tend son énergie pour gagner les
grandes. Il sait garder son regard sur l’objectif à
atteindre et ne s’use pas sur les détails annexes.

Vous vous doutez bien que quelqu'un
d’authentiquement fort ne sen sent pas blessé
lorsqu’on lui déplace ses affaires (territoire des
possessions) ou lorsque l’on critique sa nouvelle
coiffure (territoire de l’ego). Il ne se sent pas humilié
lorsqu’on le contredit (territoire des idées) ni affolé
lorsqu’on le presse (territoire du temps). Il ne se sent

pas agressé dans son espace (territoire spatial) si
quelqu'un y fait irruption, ni ne se sent diminué
lorsqu’un autre se met en avant.

Renforcer son ego est à la portée de chacun – c’est
ce qu’on appelle le développement de la personnalité,
dans le jargon technique – et cela a bien plus d’effet
que de seulement résoudre les problèmes de
territoires au niveau professionnel : renforcer son ego
est même un des leviers majeurs pour ouvrir dans sa
vie le compartiment marqué « bonheur ».

Comment ferez-vous pour en venir à bénéficier de
cette force tranquille ? Il y a bien des façons et des
moyens pour renforcer votre Moi et il ne m’est pas
possible de vous les détailler ici. Voici néanmoins
quelques pistes que vous pouvez suivre très
facilement et que l’ego fort et bien structuré parcourt
couramment.

Savoir demander la permission

– Puis-je vous couper la parole un instant, Martine ?
Je voudrai souligner un élément utile et je pense que,
à ce point de votre exposé, c’est le bon moment.

– S’il vous plaît, permettez-moi de...

– Voulez-vous me permettre de... ?

C’est là de la politesse élémentaire – et la politesse
est un des moyens qu’a implantée la culture pour

permettre la cohabitation harmonieuse entre
humains. Chaque société humaine a ses règles de
politesse qui peuvent être différentes de celles de la
société d’à côté mais, toutes, elles visent l’équilibre
relationnel dans la paix et la coopération maximales.
Or, l’entreprise est comme une mini société, une sorte
d’ethnos 1 particulier, qui peut avoir ses
particularismes et ses aspects spécifiques – on parle
bien aujourd’hui de culture d’entreprise.

Il est très rare que l’on essuie un refus après avoir
demandé une permission (à condition, bien sûr, de ne
pas demander quelque chose d’impossible, du genre :
« Me permettez-vous de vous barbouiller le visage de
confiture ? »). Cela signifie que l’on peut, avec une
demande de permission, obtenir bien des choses que
l’on n’obtiendrait pas autrement : un accord, une
autorisation, un passe-droit, un privilège...

Que perd-on à demander la permission ? Tombe-t-
on du haut d’un piédestal ? Dégringole-t-on du haut
de sa superbe ? Je ne le pense vraiment pas, bien au
contraire. Il me semble que ce sont plutôt les petits
esprits (les ego faibles) qui se sentent humiliés à
demander une permission : leur besoin de prestance

1 Ethnos : groupe humain ayant des éléments culturels
ou/et des intérêts communs et se reconnaissant comme
tel.

personnelle est si mal assuré que cela leur
« écorcherait la bouche » de le faire ; ils viennent
comme en terrain conquis – et sont tout étonnés
lorsqu’ils sont remis à leur place...

Non, on ne perd rien à demander, en toute
simplicité et respect d’autrui, une permission
lorsqu’on s’en vient empiéter sur d’autres territoires.
C’est là, me semble-t-il, plutôt la marque d’une
personnalité de bonne qualité, d'un ego fort.

– Michel, me permets-tu de poser mon porte-
documents sur ton bureau ?

Et Michel, de répondre :

– Oui, bien sûr.

Ou :

– Je préférerai que tu le mettes plutôt sur le
radiateur – j’ai plein de désordre sur ce bureau.

Ou :

– Viens, passe-le-moi : on va le poser là, derrière ma
chaise, c’est le meilleur endroit.

Ainsi, que la réponse soit « oui » ou « non », il n’y a
là aucune place pour le conflit ou la vexation – et tout
se passe bien. Mais si Michel était un mauvais
coucheur, ou exceptionnellement d’une humeur
massacrante (parce qu'il a une rage de dent ou qu'il a
reçu une mauvaise nouvelle...), il peut, bien sûr, aussi
répondre :

– Non ! Mets ton truc où tu veux, mais pas chez
moi ! J’en ai ras-le-bol de me faire envahir !

Que faire alors ? Adopter la solution suivante.

Savoir s’excuser

Nous avons déjà vu cela au chapitre guérison. Il
n’est donc pas utile de faire ici de longs
développements. Toutefois, savoir s’excuser sert aussi
à éviter que ne s’ancrent et se prolongent de ces
antipathies tenaces et c’est pour cette raison que cela
doit figurer dans l’aspect prévention des suites
négatives possibles. Entre humains de bonne
composition, il est facile de s’excuser, mais face à
quelqu'un de réactif (comme ce Michel deuxième
version ci-dessus) cela peut devenir plus difficile.
Pourtant, non : celui qui dispose d’un ego fort n’a
aucun mal à cela. Il ne rentre pas dans l’émotion
négative de son vis-à-vis, garde son calme et dit, par
exemple :

– Excuse-moi, je ne voulais pas envahir ton espace
vital, je suis désolé d’avoir pu te donner cette
impression.

Dans une situation comme celle-ci, vous auriez alors
la surprise de constater ceci : à 80% de chances, le
mordant Michel se radoucit et devient conciliant.

– Ce n’est pas si grave que ça. Ne t’en fais pas pour
ma réaction, j’ai quelques problèmes en ce moment.

Pour les 20% de chances restantes, Michel peut
dire :

– Allez, va-t’en ! J’en ai assez de te voir dans les
parages !

Toutefois, il ne restera en lui aucun ressentiment et
les rapports ultérieurs avec lui ne seront entachés par
rien.

Demander la permission et savoir s’excuser sans se
sentir déchoir, je le répète : voilà qui est la marque
d’une personnalité saine et forte. Peut-on réellement
croire que celui qui agit ainsi en toute sérénité est un
être faible ? Non. D’autant moins qu’à bien y regarder,
ce sont précisément les personnalités faibles,
incertaines d’elles ou en état de fragilité passagère,
qui se sentent rapidement dévalorisées, se hérissent
vite et ensuite « ruminent » longuement sur le
problème. Au contraire de cela, un ego fort et bien
structuré sait adopter cet autre inestimable talent
suivant.

Savoir « passer l’éponge »

C’est là, très précisément, le contraire de la
rumination. Passer l’éponge, c’est à la fois pardonner
à l’autre et aussi – et surtout – faire en sorte que rien


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