The words you are searching are inside this book. To get more targeted content, please make full-text search by clicking here.
Discover the best professional documents and content resources in AnyFlip Document Base.
Search
Published by IDEFI-CréaTIC, 2019-04-12 06:26:14

Bilan pédagogique 2017/2018

Bilan pédagogique 2017/2018

Keywords: bilan pédagogique,module innovant pédagogique

Pratiques
scéniques
contemporaines :
expérimentations/
création

PAR SABINE QUIRICONI

Cet atelier-laboratoire, adossé au master « théâtre : mise en scène et dramaturgie » de
l’université Paris Nanterre, se proposait, à partir d’un texte de l’auteur contemporain
Mathieu Bertholet, Case study Houses, de faire analyser et éprouver concrètement les
relations possibles entre vidéo, corps et espace au gré d’une série d’expérimentations
et d’exercices croisant cinéma, architecture et travail de plateau.
L’atelier était mené par Ludovic Fouquet, metteur en scène et auteur d’un ouvrage
sur la pédagogie de la vidéo scénique (en collaboration avec Robert Faguy)1 et

1. Robert Faguy et Ludovic Fouquet, Face à l’image. Exercices, explorations et expériences
vidéoscéniques, Québec, L’instant même, coll. L’instant scène, 2016.

PRATIQUES SCÉNIQUES CONTEMPORAINES : 99
EXPÉRIMENTATIONS/CRÉATION

Didier Léglise, concepteur son, lumière et vidéo. Sabine Quiriconi assurait le suivi
dramaturgique.

UN TEXTE
Dans le cadre du programme IDÉFI CréaTIC, Case study Houses de Mathieu
Bertholet a paru intéressant à plus d’un titre : l’écriture, qui appelle une mise en
scène, se déploie sous la double influence du cinéma et de l’architecture. En effet,
l’œuvre est à la fois un hommage aux films hollywoodiens  – dont elle emprunte
la syntaxe particulière - et un hommage à l’architecture américaine du milieu du
20e siècle via les Case Study Houses, construites sur les hauteurs de Los Angeles.
Pour évoquer ces architectures recourant au préfabriqué, l’écriture procède par
montage et recyclage et se divise en séquences. Elle oblige, par sa polymorphie
même et ses jeux d’influences, à une analyse dramaturgique singulière, qui mêle
des questionnements sur le collage, le recyclage, la citation, l’espace, l’image, la
place de l’acteur, celle des spectateurs, etc., et à l’invention d’une écriture scénique
hybride qui permette une traversée non linéaire du texte et offre l’opportunité
d’une exploration en/des images et des modalités de reprises du langage
cinématographique. Le texte a notamment inspiré d’expérimenter des modes de
jeu face ou avec la caméra, mais aussi des manières de filmages et des projections
de maquettes et de documents d’architecture.

UN PROJET
L’objectif était donc, à partir de cette œuvre, d’explorer un processus de
création visant la conception d’images susceptibles de favoriser le dialogue
entre vidéo (espaces et corps filmés), espace scénique tridimensionnel et
acteurs en présence.

UN LIEU
L’approche scénique du texte, volontairement tournée vers la vidéo scénique,
sans exclure néanmoins d’autres formes d’hybridation (notamment sonores),
s’est aussi ancrée sur une intervention in situ dans l’impressionnante architecture
brutaliste du Centre National de la Danse, à Pantin. Ancien centre administratif,
rénové mais gardant trace de ses origines, le Centre National de la Danse avec
ses terrasses, escaliers, passerelles, studios ouverts, foyer des danseurs occupant
l’ancien chenil attenant au commissariat aujourd’hui disparu, offre de multiples

100 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

et singuliers espaces de béton et de verre ainsi que d’étonnantes et vertigineuses
perspectives, que les étudiants ont appris progressivement à investir pendant
plus d’un mois de travail, réparti en plusieurs phases.

L’ATELIER-LABORATOIRE
•  D’abord, à l’Université de Nanterre (du 28 au 29 mars), deux journées inaugurales

ont été consacrées à l’histoire de la vidéo scénique, en France et à l’étranger et à
une lecture du texte, à la table, pour en relever les principaux enjeux.
•  Au Centre de Veille et d’Innovation de CréaTIC, une demi-journée de
workshop (30 mars), animée par Stéphane Saphin, a proposé aux étudiants de
se familiariser avec le logiciel de dessin d’architecture à distance SketSha,  en
inventant le plan d’une Case Study House fidèle aux principes du programme
moderniste des années 50.
•  Au Théâtre Nanterre Amandiers (du 17 au 20 avril), une semaine intensive
d’exploration technique a permis à chacun de tester différents supports
et moyens de diffusion, en s’appuyant sur plusieurs extraits du texte de M.
Bertholet. Pendant cette phase, orchestrée par Didier Léglise, il a, en effet, été
considéré comme nécessaire de ne pas séparer analyse dramaturgique et travail
technique exploratoire, à partir de contraintes très précises, dont il s’agissait
d’évaluer les effets, les limites et les potentialités en écho à l’œuvre écrite.

Ont été ainsi proposés :
• d es exercices avec une caméra vidéo branchée directement sur vidéoprojecteur et

explorant le texte imprimé, des plans de Case Study Houses, les corps, les visages ;
• d es exercices avec deux caméras branchées via mixette vidéo analogique sur

vidéoprojecteur (même explorations que précédemment - textes/plans/visages/
corps - mais en mélangeant les sources) ;
•  des exercices avec caméra/webcam/téléphone connectés à un ordinateur,
diffusion avec vidéo projecteur  (travail avec le logiciel Isadora, que la plupart
des étudiants découvrait, pour utiliser différents moyens de captations
contemporains : téléphone, webcam, Kinnect, etc., initiation à la programmation
et au mapping) ;
•  des exercices d’exploration de différentes surfaces de projection (écrans, tables,
murs, angles, objets, corps humains) et de la multidiffusion.
En outre, chaque groupe a cherché, collecté ou réalisé, en écho au texte, diverses

PRATIQUES SCÉNIQUES CONTEMPORAINES :

101EXPÉRIMENTATIONS/CRÉATION

matières vidéos et sonores afin de pouvoir disposer, pendant le dernier temps
consacré à la réalisation, de différents éléments de conception et de montage
(enregistrements sonores, tournages de scènes en extérieur, en intérieur, etc.).
•  Enfin, au Centre National de la Danse à Pantin (du 2 au 25 mai), encadrés par Ludovic

Fouquet, en collaboration avec Sabine Quiriconi, les étudiants ont pu approfondir
ce qu’ils avaient auparavant ébauché  : les exercices d’exploration technique et
de création ont été renforcés, développés, commentés et systématiquement
suivis de reprises correctives des travaux entrepris (notamment le premier  qui
consistait à composer en images un autoportrait d’une durée de trois minutes).

Le but était de familiariser chacun, quel que soit son niveau de connaissance, avec les
potentialités de la vidéo scénique afin qu’il devienne autonome, sache concevoir une
forme en anticipant les contraintes des techniques sollicitées et puisse passer de la
stricte application d’effets et de moyens à des propositions à la fois plus réfléchies,
plus personnelles et plus libres – plus instinctives aussi.
Surtout, la plupart des exercices techniques et des expérimentations ont été des
moyens de revenir à des questionnements dramaturgiques sur le texte, d’en tester la
plasticité et de soumettre les outils engagés à ses exigences.
Mais il a aussi fallu, pendant cette dernière phase, se confronter et s’adapter à la
singularité des différents espaces proposés dans l’enceinte du Centre National de la
Danse, en vue de la restitution publique.
Dans cette perspective, Ludovic Peireira, chargé des relations avec le public au CND, a
d’abord guidé les étudiants à travers le lieu et raconté l’histoire de ses métamorphoses.
Ludovic Fouquet les a ensuite régulièrement invités à compléter le programme
d’initiation à la technique par de longues phases de déambulation et d’observation,
silencieuses et intimes, dans les espaces, suivis de temps d’écriture libre, pendant
lesquels chacun retranscrivait ce qu’il avait perçu des lieux.
Puis, par des exercices quasi chorégraphiques, il les a amenés à éprouver
physiquement, acoustiquement et visuellement les formes, structures et matériaux
qui composent le CND.
Chaque période et exercice ont été suivis d’une mise en commun des expériences
solitaires et personnelles et de prises de vue collectives, afin que se constituent, à
partir de ces moments d’échanges, des groupes de quatre à cinq étudiants, fédérés
autour d’une séquence de texte et d’un espace, élu pour la faire résonner.
La restitution publique  a pris la forme d’une déambulation du foyer des danseurs,

102 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

obscur et fermé, à la terrasse lumineuse sur les toits, en passant par des espaces
circulatoires des deuxièmes et troisièmes étages. Le spectateur y était à chaque
fois soumis à des situations de regards particulières. Sans que les étudiants en aient
eu conscience pendant qu’ils élaboraient leur projet, se dessinait une histoire très
cohérente, d’un bout à l’autre de la visite et de séquence en séquence, une histoire
d’acteur soumis aux leurres des images et des icônes. À leur insu mais continûment,
le texte de Mathieu Bertholet a agi comme un fil conducteur d’imaginaire, imposant
à tous, malgré les coupes et les collages (d’ailleurs autorisés par l’auteur lui-même),
son écholalie poétique, ses espaces fantasmatiques et les fantômes d’une Amérique
en voie de disparition.

MODALITES D’EVALUATION
L’évaluation a pris en compte la progression de chaque étudiant sur l’ensemble de
l’atelier, au cours des exercices de vidéo scénique proposés, et la réalisation finale.
Elle a porté sur sa capacité à assimiler les contraintes, à évoluer techniquement
selon son niveau initial, à intégrer les remarques et suggestions afin de remodeler
ses propositions, à concevoir et réaliser une dramaturgie plurielle pertinente, visant
à faire entendre la singularité du texte et à proposer une expérience spatiale (et plus
généralement sensorielle) aux spectateurs. Elle s’est aussi appuyée sur la rédaction
d’un journal de bord collaboratif, relatant rétrospectivement le cheminement, de
l’expérimentation à la réalisation, de chaque groupe.

BILAN
Ce qui a constitué l’atout majeur de cet atelier-laboratoire, c’est la façon dont il a
permis aux étudiants d’avancer souvent, de se perdre parfois, de décider finalement
d’une forme, de la décomposer pour la recomposer… en favorisant un constant
mouvement entre réflexion personnelle, exploration intime et discussions/décisions
de groupes. Le temps de l’atelier-laboratoire s’est ainsi calqué, autant que faire ce
pouvait, sur la rythmicité réelle d’une période de création professionnelle.
De même, a été constant l’aller-retour entre travail physique, observations
exploratoires et tests techniques, aller-retour rendu particulièrement efficace de par
la présence de tous les intervenants pendant la phase intensive de réalisation.
À noter aussi la prise en compte systématique et le tissage étroit, dans toutes les
phases de l’atelier-laboratoire, de l’ensemble des éléments qui devait constituer les
mises en scène finales :

PRATIQUES SCÉNIQUES CONTEMPORAINES :

103EXPÉRIMENTATIONS/CRÉATION

• l e texte, ses images et ses principes d’écriture ;
• l es documents à la base du texte, qu’il recycle et transforme à loisir  : plans

d’architecture, photographies, récits de vie (sur les Case Study Houses ainsi que sur
leurs concepteurs ; films hollywoodiens, photographies, musiques, etc.) ;
• l e CND, avec son architecture et son histoire particulière.

Le temps, certes, a manqué pour approfondir la question du jeu devant la caméra
et avec les images projetées. Les modalités de profération du texte en direct,
notamment, n’ont pas été assez questionnées, répétées et élaborées. De plus,
l’intervention prévue d’un architecte sur les nouveaux moyens de maquettage
numérisés et l’histoire du programme architectural n’a pu avoir lieu…
L’atelier-laboratoire a néanmoins rempli ses objectifs: il a favorisé l’expression
singulière et la réflexion critique de chaque groupe ainsi que la valorisation des
expérimentations et des espaces traversés tout au long du travail ; il a particulièrement
répondu aux attentes des étudiants en formation continue, acteurs ou metteurs
en scène professionnels, désireux d’approfondir des compétences qu’ils n’avaient
acquises que de manière très hâtive et circonstancielle au cours de leur carrière ; il a
aussi permis de poser les bases d’un partenariat solide avec le Centre National de la
Danse, partenariat reconduit dès l’année 2018-2019.
D’un point de vue plus général, il a mis en évidence les avantages qu’il y avait à
rattacher les ateliers laboratoires aux workshops spécifiques proposés par le Centre
de Veille et d’Innovation ainsi qu’à des événements scientifiques. La restitution a en
effet eu lieu devant les participants québécois du séminaire international CréaTIC
Petits et grands récits : telling, felling, sharing2, participants qui ont ensuite engagé
le dialogue sur les différentes propositions et leur mode de conception, ainsi que
sur la progression pédagogique de l’ensemble de l’atelier-laboratoire.

2. Séminaire organisé par le programme IDEFI-CréaTIC, en collaboration avec la Chaire Unesco Iten,
le laboratoire Hexagram de l’UQAM et l’Université d’Athènes, les 23, 24 et 25 mai 2018, au Centre
de Veille et d’Innovation.

104 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

E-éducation :
valorisation
pédagogique
des archives
numériques

PAR JEAN-MARC MEUNIER ET SAMUEL SZONIECKY

Cet atelier consiste à concevoir des epubs enrichis à l’aide de ressources
éducatives en ligne (http://www.sup-numerique.gouv.fr/) et d’archives
numériques comme celles des Archives nationales, de l’INA. Cet atelier
prendra appui sur une ontologie dans le domaine des statistiques, un serveur
de ressources éducatives (Omeka S) et sur les résultats d’une étude d’usage
réalisée en 2017.
Le serveur de ressources fournira les éléments de base pour alimenter les epubs
en catégorisant avec l’ontologie OntoStat les ressources venant de sources
diverses comme la plateforme http://www.sup-numerique.gouv.fr/.

E-ÉDUCATION : VALORISATION PÉDAGOGIQUE

105DES ARCHIVES NUMÉRIQUES

CONTEXTE SCIENTIFIQUE
Avec le développement d’internet et de l’usage du numérique en pédagogie, la
production de ressources numériques pédagogiques croît très rapidement. Le
partage de ces ressources est devenu un enjeu majeur à la fois d’un point de
vue économique, mais aussi pour la diffusion et le partage des pratiques entre
enseignants.

Les bibliothèques offrent par ailleurs un large éventail de manuels pour
l’apprentissage des bases d’une discipline (version numérique ou non) que ces
ressources pourraient enrichir. Dans le même ordre d’idée, un manuel suppose
des interactions entre l’enseignant et les étudiants qu’il serait également
intéressant d’intégrer aux éditions numériques. Se pose cependant le problème
du choix de la ressource complémentaire et de la scénarisation de sa mise à
disposition si on ne veut pas que celle-ci soit contreproductive en submergeant
l’apprenant d’informations.

La problématique est à la fois psychologique (aide à l’apprentissage), ergonomique
(utilisabilité, acceptabilité) mais aussi documentaire (réutiliser des ressources)
et éditoriale (valorisation des archives numériques)  ; l’objectif global étant
d’imaginer de nouveaux modes de mise en scène des ressources documentaires
et des moyens d’interaction entre les étudiants et les enseignants.

LE OU LES MODÈLES PÉDAGOGIQUES MOBILISÉS
Nous avons mobilisé le modèle pédagogique par groupe projet pour remplir les
objectifs suivants :
• c omprendre les problématiques de la connaissance et de l’apprentissage ,
•  respecter les contraintes de l'écosystème pour l'E-éducation ,
• m aîtriser les technologies et les méthodes pour le développement agile d’application

Web en particulier pour la gestion des ressources documentaires à l’aide d’Omeka S.

LE DÉROULEMENT DE L’ATELIER :
RETOUR SUR LES DIFFÉRENTES ÉTAPES, LES PROFESSIONNELS
MOBILISÉS ET LES ÉCHANGES AVEC LES ÉTUDIANTS
Séminaires les mardis de 18h à 20h d’octobre à décembre (12 séances) : sous
forme de workshops avec des spécialistes sur les différentes problématiques

106 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

(programme en cours de finalisation)
mar. 3 oct. 18:00 – 20:00 : Présentation de l’atelier, des intervenants, des enjeux,
des attendues
mar. 17 oct. 18:00 – 20:00 : Orages cérébraux à partir des visuels étudiants
mar. 24 oct. 18:00 – 20:00 : Préparation des notes d’intention
mar. 31 oct. 18:00 – 20:00 : Jury des notes d’intention, choix des scenarii
mar. 7 nov. 10:00 – 18:00 : Journée Archives Numériques aux Archives Nationales1
mar. 14 nov. 18:00 – 20:00 : Conception des prototypes
mar. 21 nov. 18:00 – 20:00 : Développement des prototypes
mar. 28 nov. 18:00 – 20:00 : Développement des prototypes
mar. 5 déc. 18:00 – 20:00 : Développement des prototypes
mar. 12 déc. 18:00 – 20:00 : Préparation du jury
mar. 19 déc. 18:00 – 20:00 : Jury Final
26 février au 1er mars 2018 : Conférence Valorisation des Archives Numériques à Dubaï2.

Quatre étudiantes ont été sélectionnées après le jury final le 19 décembre 2017.
lun. 26 févr. 2018 : finalisation des prototypes
mar. 27 févr. 2018 : finalisation des présentations
mer. 28 févr. 2018 : Participation à la conférence
jeu. 1er mars 2018 : Présentation des prototypes

BILAN PÉDAGOGIQUE : POINTS POSITIFS ET NÉGATIFS
Le nombre réduit d’inscrits à l’atelier (huit étudiants) ne nous a pas permis
de produire l’ensemble des prototypes envisagé mais le bilan est positif au
niveau de l’implication des étudiants et de l’expérience très formatrice qu’ils
ont vécu.

LES PRODUCTIONS DE L’ATELIER ET LEUR VALORISATION
L’atelier a produit quatre types de contenus
• D es scénarii d’enrichissement d’un epub dans un contexte d’apprentissage (note

d’intention)3 ;

1. http://valarnum.univ-paris8.fr/
2. http://valarnum.univ-paris8.fr/Arabic-Electronic-Literature-New-Horizons-and-Global-Perspectives
3. http://valarnum.univ-paris8.fr/Proposition-des-etudiantes-Les-Archinautes

E-ÉDUCATION : VALORISATION PÉDAGOGIQUE

107DES ARCHIVES NUMÉRIQUES

• D es prototypes réalisés à partir des scénarii sélectionnés dans les thématiques
suivantes4 ;

•  Un site web relatant l’expérimentation5 ;
•  Des articles scientifiques traitant des problématiques rencontrées6.

4. http://valarnum.univ-paris8.fr/Valorisation-des-archives-numeriques-un-ecosysteme-pour-
cartographier-les
5. http://valarnum.univ-paris8.fr/#rub1
6. J.-M. Meunier et S. Szoniecky, « An ontology-based enriched ebook for teaching statistics », in
ICOTS 10, 10 th International Conference on Teaching Statistics, Kyoto, Japan, 2018.
J.-M. Meunier, S. Szoniecky, et M. Lamolle, « Apports d’une ontologie à l’apprentissage des statistiques »,
présenté à Colloque Francophone International sur l’Enseignement de la Statistique, 2017.

108 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

Imaginer
le changement

PAR EILA SZENDY EL KURDI

Notre proposition d’atelier-laboratoire Imaginer le Changement s’inscrit dans
une réflexion plus globale sur l’apprentissage et la formation au management
dans laquelle la rencontre avec l’art dans sa dimension sensible, politique et
philosophique semble ouvrir des voies nouvelles de compréhension et d’action.
Sa visée était d’initier les étudiants à la démarche réflexive, aux approches
à l’œuvre dans les critical management studies et à l’analyse de l’action en
situation.
L’atelier-laboratoire a été proposé en priorité aux étudiants du master 1 management
du commerce international (MCI). Pour cette première édition, il nous a semblé plus
« pratique » de l’adosser aux cours obligatoires du module de management dispensés
au 1er semestre de l’année 2017/18.
L’atelier-laboratoire s’est organisé en deux temps :
•  Atelier d’écriture en français. Thème  : Auto-Fiction & récit collectif Creative

Writing. Les séances de l’atelier Les Ecrits Vains ont jalonné et rythmé le semestre
en alternance avec des séances du cours de Management auquel s’est adossé cet
atelier-laboratoire.
•  Atelier Performance (en anglais). Thème  : «  What is the future we are creating
now  ?  »  Le workshop, organisé sur deux jours intensifs, est intervenu en fin de
semestre.

109IMAGINER LE CHANGEMENT

Il a concerné un total de 29 étudiants qui ont pu prendre part à tout ou partie du
programme (atelier écriture et/ou atelier performance).

LE OU LES MODÈLES PÉDAGOGIQUES MOBILISÉS
L’Experiential learning ou apprentissage expérientiel est le modèle qui a d’abord
guidé la conception de l’atelier. Il s’agit d’une approche qui s’inscrit dans le
champ plus large des pédagogies dites actives (et dont on a imaginé que le slogan
pourrait être « Learning (mangement) by Doing (art) »). Il est à noter que cette
démarche s’est parfaitement accommodée de celle de la recherche-création
telle que la définit par exemple Ivan Toulouse (qui, au-delà de l’organisation des
ateliers d’écriture, a constitué une importante ressource en matière de réflexion
pédagogique)

LE DÉROULEMENT DE L’ATELIER :
RETOUR SUR LES DIFFÉRENTES ÉTAPES, LES PROFESSIONNELS
MOBILISÉS ET LES ÉCHANGES AVEC LES ÉTUDIANTS
Nous commencerons par reprendre, dans leurs propres termes, les comptes-rendus
réalisés par les professionnels mobilisés pour l’atelier-laboratoire.

Atelier Ecritures créatives
(Ivan Toulouse, Professeur d’Arts Plastiques, Université Rennes 2)
« Si on savait quelque chose de ce qu’on va écrire, avant de le faire, avant d’écrire,
on n’écrirait jamais. Ce ne serait pas la peine. Écrire, c’est tenter de savoir ce

110 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

qu’on écrirait si on écrivait — on ne le sait qu’après."1
Concrètement le travail a consisté à (re)trouver le plaisir d’écrire en s’aventurant,
sans programme préconçu au départ, dans une pratique de l’écriture à partir
d’un système de contraintes, selon des règles du jeu, proche des procédures de
l’Oulipo, proposées sous forme d’enveloppes-surprises. Le travail est individuel
mais par groupes de trois ou quatre sur les mêmes consignes pour pouvoir
partager les trouvailles et, bien souvent, en rire ensemble. Le principe consiste
à surmonter l’  «  angoisse de la page blanche  » en court-circuitant la question
« quoi écrire ? ».
La production proposée est un livret associant du texte et de l’image. La
fabrication de cette dernière ne suppose aucune compétence préalable de dessin
mais elle se fait sur le même principe d’une exploration des possibles, sous la
forme d’empreintes, de découpages-collages et de transformations d’images
pour lesquelles l’usage de l’ordinateur ouvre de multiples voies vers un autre
rapport texte/image que celui de l'illustration redondante, servie le plus souvent
par un dessin indigent. Chemin faisant, chaque étudiant conçoit un livre selon une
programmation simple (douzaine de pages format A5, + 4 pages de couverture,
en un seul cahier agrafé à cheval et massicoté, le tout en noir et blanc pour
faciliter financièrement l’impression d’une édition, chacun pouvant repartir avec
une dizaine d’exemplaires de son propre ouvrage et la collection complète de
toutes les productions du groupe ; on peut aussi travailler dans une optique de

1. Marguerite Duras, Écrire

111IMAGINER LE CHANGEMENT

publication numérique…). À partir des éléments de textes et d’images, une mise
en page est élaborée au moyen d’un logiciel Scribus (logiciel libre et gratuit). Se
posent alors les questions de charte graphique et de typographie. »

Atelier Performance
(A&A : Allan Owens, Professor of Drama Education in the Faculty of Education,
University of Chester et Anne Passila, senior researcher Lappeenranta University
of Technology, Lahti School of Innovation)
Initialement pensé pour se tenir dans un espace urbain (extérieur) sur une durée de 3
jours, l’atelier performance s’est organisé sur deux (longues, riches, denses) journées
au CVI. Finalement, la Tour Montparnasse, la vue sur la Tour Eiffel, l’appropriation
de cet espace par les étudiants ont fait du CVI une aire de jeu, d’apprentissage et
d’exploration tout à fait intéressante. Nous envisageons donc de reconduire tout ou
partie l’expérience au CVI.
“We are following principals of critical action and arts-based learning process and our
pedagogical theory in use is called kaleidoscopic pedagogy. The pedagogical learning
contribution of this Atelier-laboratoire is particularly relevant in today’s leadership
challenges in society and especially how business and public organization are linked
to change which calls for all of us to be more flexible, agile, creative, democratic,
transparent, digitalized, intuitive and innovative. Atelier-laboratoire in urban space is
about finding possible worlds and building up a community, where students can be
(active) actors, who are creating meaning together with other actors outside university.”

112 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

“Theme: Social action and activism in ethical leadership – what kind of a strategies
and operative practices we need to have in order to create new business which
will build resilient futures? Topic: What is the future we are creating now?
Atelier-laboratoire purpose is to explore together (co-creation) with students
what is the future we are creating now. In a practical learning level we create
future scenarios of ethical leadership by creating possible worlds with the help
of following questions: what kind of businesses exists, what is the role of work,
what is the role of community, who am I and what does learning look like? This
process combines organizational change theory, ethics and leadership actions &
practices in a subjective site-specific and polyphonic way. Various scenarios were
created with the help of the question we defined as well as questions which
students themselves has found relevant in order to face change and to create
capacity for building resilient futures. This creation of scenarios have been done
via different types of arts-based methods (evocative encounterings, drifting, and
pretext based process drama)”.

Les étudiants ont réalisé un journal de bord. Le journal de bord est un document
personnel réalisé, à ma demande, pour accompagner et documenter l’expérience
de cette pédagogie innovante pour l’enseignement du management et aider
les étudiants à développer une réflexion personnelle, critique, des concepts et
pratiques du management présentés dans les manuels de cours en lien avec leur
vécu (stage ou jobs étudiants en entreprise).

113IMAGINER LE CHANGEMENT

Voici quelques extraits de ces carnets :

« Mon ressenti : Au début du cours je me suis dit oulala non mais franchement où la prof veut
nous mener… »
« Nous parlons de nos expériences…(un camarade) évoque le fait de « badger » dans l’entreprise...
(le professeur) nous questionne. Nous ne sommes pas tous d’accord (…)Ce débat en cours
me marque. Rien dans l’organisation n’est laissé au hasard. Madame Szendy nous pousse à la
réflexion et à l’analyse de nos expériences professionnelles.
En banque, lorsque je suis arrivée en tant que stagiaire, le Directeur m’a remis un badge. Il a fait
une sorte de « mini cérémonie d’accueil » le matin devant plusieurs membres de l’équipe. (…)
Pour en revenir à l’expérience de (camarade), je suis vraiment d’accord que tous ces badges, dress
code, créent un sentiment d’appartenance, un lien entre les employés, un partage de valeurs /
d’objectifs… Tout est mis en place pour l’entreprise et fait de façon à que ce soit normal….. »
«  Je sais pas encore ce que nous allons faire Mme Szendy nous présente Ivan Toulouse un
professeur d'art avec qui chaque mardi nous tiendrons l'atelier créative. Waouh nous allons
créer euhhh non j'aime pas l'art du coup quand il s'agit de créer un truc artistique dès les
premiers minutes de son intervention dans ma tête j'ai juste envie de fuir, non mais franchement
pas de l'art plastique, je suis pas douée pour les coloriages à plus forte raison pour les dessins.
Et s'en suit un désintérêt total. Monsieur Ivan nous propose à chacun de prendre un cahier
qu'il nous a gentiment ramené … et de faire la couverture de notre cahier selon notre envie,
une couverture qui nous représente. Je choisis mon cahier et sans trop être motivée je me
lance... Ensuite j’ai dû compléter une feuille ou certains mots avaient été effacé pour ne laisser
que des « je », nous devions écrire ce qui nous viens à l’esprit sans réfléchir. J'ai écrit le texte
suivant : Les vagues de vie

Comme je doutais je ne voulais point avoir des passages que les autres avaient connu.
J’étais individualiste porté sur mes propres intérêts quand eux mes compagnons les fous m'ont laissé je

voulais partir ailleurs.
Dans les coins les plus reculés moi l'autre étranger je connaissais tellement de choses qui n'ont pas été valorisé.
La tendance de mes erreurs plus rien de ce que j'ai décidé qu'une seule vague en valait mieux que dix vagues.

Plus de déceptions l'eau ma compagne et des vagues me réconfortaient quant à eux.
Et dès le matin je me suffisais de la nature déséquilibrée et rayonnante.
Ou le seul et rien que le seul fait que plus rien ne m'aurait paru fertile.
Je savais et le monde que je sauvais l'aurait compris et j'ai vaincu

J'ai voulu illuminé pareillement que les fleuves J'ai rêvé baissé par la circulation de l'eau et l'étourdissement.
J'ai supporté hypnotiser sans sonner l'alarme public.

114 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

J'ai honte savez-vous même d'humains souvent.
J'ai voyagé là ou pour trouver la réponse des écritures et des lois qui m'agaçaient.

Glaces,échecs où les secondes choisies ne suffisaient plus.
J'aurai voulu du fleuve des écumes certes mais mes déceptions et insécurités m'ont accompagné.

Parfumer la mer mon désir mon envol vers moi je rêvais.
Près ds rives sur mes gardes et les ficelles et je voyageais à travers mes envies des nuits.

Or moi je ne voulais que moi n'attendant qu'un silence

Libérez moi qui souffre qui portant des licornes, qui coule se plaignant quand les autres les cinglés
s'égaraient. Moi qui refuse le ruisseau au fil du vent je revivais. J'ai vu tout ce dont les autres voulaient voir.

Mais ma foi j'ai gaspillé toute mon énergie, l'amour m'a guidé ô mer,ô vague.
Si je dérive c'est la fin. Noircissant un envol, un bazar.

Je ne puis en aucun cas ni me dirigé vers la droite, ni me dirigé vers la gauche

Et puis ce fut la fin cours. Franchement à la fin du cours je me suis pris au jeu et au final j'ai bien
aimé la séance de cours avec Ivan Toulouse.»
« La séance du mardi était originale pour moi. C'était intriguant d'avoir un atelier d'art, le lien
entre l'art est le management était encore flou. Pourquoi cet atelier ? Quel est le but ?
Lorsque je devais prendre les trois éléments et le cahier, j'étais un peu sceptique car je ne savais
pas ce qui m’attendait. Cela me rappelle étrangement mon caractère, en effet je suis sceptique
et méfiante par rapport à l'inconnu. L'exercice demandé était de construire un avatar, cela m'a
soudainement fais penser dans un premier temps aux activités que j'animais dans l’hôpital où je
travaille. Dans un second temps, un souvenir qui me paraissait lointain semblait réapparaître, il
s’agissait de mes cours d'arts plastique au collège. J'adorais ça, je m'impliquais beaucoup et je me
revoyais dix ans en arrière, j'étais nostalgique pendant un moment.
J'étais inquiète quant au fait de personnaliser mon cahier mais finalement c'est allé tout seul.
Pourquoi fallait s'inquiéter ? Il n'y avait pas de raison, la tâche était pourtant simple mais
compliqué a la fois. Le mot « personnaliser » prenait tout son sens. »

« Je me rappelle que j'avais dépassé dix centimètres et il ne fallait pas que cela fasse plus que
cette mesure et Ivan a contrôlé mon travail en m'avertissant que cela dépassait dix centimètres ;
naturellement il me dit que je n'ai pas écouté, je répondis que j'avais bien entendu ce qu'il avait
dit. Il rebondit en ajoutant « Oui tu as entendu mais tu n'as pas écouté », c'est là que j'ai vu et
compris la nuance. J'ai complètement changé mon avatar en utilisant une petite gomme au fond
de ma trousse qui jusqu'ici m'avait jamais servi, un ticket de métro utilisé sinon il y aurait eu de la

115IMAGINER LE CHANGEMENT

valeur, et un emballage de gâteau en aluminium. Pour chacun de ces objets j'ai travaillé la matière
en prenant du plaisir à confectionner mon avatar dans le temps imparti. »

« L'exercice d'écriture ne m'avait pas du tout convaincu et je m'étais dit que je n'y arriverais pas
mais j'ai rempli les deux feuilles et la moitié de la dernière feuille car je n'avais plus le temps de la
terminer. En sortant de cet atelier j'étais vraiment fière de moi, de ce que j'avais réalisé pendant
trois heures, et surtout de l'exercice d'écriture. »

«  Deuxième cours, j’ai des idées plein la tête, plein de concepts, de théories qui s’emmêlent et se
rejoignent sur certains points.».
« Aujourd'hui plusieurs choses m'ont interpellé et je me posais des questions. Nous avons parlé
de Gilbreth et des 17 mouvements qu'un maçon faisait pour la construction d'un mur. Il est vrai
que je ne voyais pas pourquoi explicité autant les mouvements et les gestes. J'ai compris que
c'était pour réfléchir à quelle organisation du travail adopter pour plus de productivité et de
rendement. Le fait de filmer et de retranscrire chacun des mouvements effectués par les maçons
me rappelait le devoir que je devais faire qui était de retranscrire les mouvements et les scènes
que je voyais dans « Les temps modernes ». Le fait de le visionner pour la troisième fois et de
faire des arrêts sur image me donnait l'impression d'être plus minutieuse sur certains détails,
notamment le physique musclé.
C'est étrange, car quand j'ai regardé « Les temps modernes » j'ai pris des notes pour chaque scène
mais je n'ai pas fait attention à la musique et à la cadence qui rythmait chacun des mouvements
des ouvriers. Définir les étapes nécessaires pour le maçon ressemblait fortement à une équation et
petit à petit la finalité était le résultat. »

«  Avant de regarder ce film, il est vrai que j’avais quelques appréhensions, j’avais peur de ne pas
comprendre le film, de ne pas comprendre ce que voulais transmettre Chaplin à travers sa gestuelle, qui
était un peu bizarre pour moi. J’avais tout simplement peur de me pas m’y retrouver avec un film tourné
à une époque qui me paraissait si lointaine.
Au fur et à mesure j’ai commencé à prendre goût au film, à l’histoire qui y était racontait et au style
cinématographique de Chaplin…. »

« Lors de cette séance nous avons continué à produire des écritures créatives à partir des pochettes
surprises disposées sur le sol en plein milieu de la classe par Ivan Toulouse. Ma première pochette fût
des textes rédigés en plusieurs langues, comme le russe ou le grec, et dont l’objectif était d’imaginer ce
que racontait ces textes. L’exercice fût au début un peu perturbant… »

116 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

« Avant cet exercice, Ivan nous a lu le poème a trou et je me suis rendue compte que le mien était très
éloigné mais j'étais toujours fière de moi. AUTO ACCOMPLISSEMENT
Une fois les cinq minutes écoulées, je devais reprendre mon cahier et continuer les gribouillages de
camarade). Encore une fois cela me rappelle le déroulement d'un projet en équipe. Nous devons en effet
tous y participer. C'était vraiment un exercice intriguant. Après ça, nous prenons une première pochette
… il fallait décrire la photo d'un plongeur qui sautait de vingt sept mètres. Je devais décrire les émotions,
le début, c'est à dire avant que le plongeur saute, le moment du plongeon, l'arrivée et quand il sort de
l'eau. J'aime beaucoup ces xercices d'écritures ou il faut imaginer et décrire les sentiments et émotions.
L'autre exercice était un des meilleurs, nous avons eu de vrais fous rires. C'était le jeu des dictionnaires,
il fallait choisir un mot inconnu de nous toutes et faire deviner les définitions. Nous avions inventé des
stupidités mais j'ai vraiment pleuré de rire. »

« La consigne de la deuxième pochette était d’imaginer une carte qui représente un lieu où vivent des
personnes. À partir de cette carte, il fallait imaginer une histoire et raconter la vie de ces personnes.
Cet exercice m’a beaucoup plu et inspiré, car il y avait dans la pochette un indice pour nous donner
des idées, celui d’une carte qui représentait un paysage dans le film le seigneur des anneaux. Un film
que j’ai énormément aimé. À partir de cette carte, j’ai donc tout de suite été inspiré, et j’ai décidé de
dessiner une carte qui représente le pays imaginaire qui fait référence au film Peter Pan et où vivent
les enfants heureux. Ce pays est constitué de l’île aux rêves, du château de la joie, du lac du bonheur,
des montagnes de la paix, de la forêt enchantée et du parc des merveilles. Je pense en fait que ce pays
imaginaire est l’endroit que j’aurais aimé voir exister, un lieu de plénitude, de sérénité….Ce lieu de
plénitude pourrait aussi ressembler à l’organisation dans laquelle je souhaiterais plus tard travailler.
Un lieu où le contrôle est minime, des managers qui guident leurs employés et qui avancent en même
temps qu’eux, où les espaces sont faits de manière à ce que l’information et la communication se
fasse dans les meilleures conditions.
Ce genre d’organisation peut paraître utopique, d’autant plus que le profit est le seul objectif
des organisations aujourd’hui et qu’il prime bien souvent sur le bien être des salariés et sur leurs
conditions de travail. Cependant, je pense que si l’entreprise Favi (ndlr : un cas avec documentaire
étudié en cours de Management) a réussi à être une entreprise libérée, c’est qu’il est bien possible
que ce genre d’organisation existe et prospère. »

« …à quoi cela nous fait penser. Je participe et j’explique mon expérience en tant que stagiaire dans
une chocolaterie. Les ouvrières forment les nouvelles. Une ouvrière était plus ou moins « infiltrée
« dans la production. Elle a était embauchée temporairement, mais personne ne savait dans la
production qu’elle été la soeur d’une des employée de la partie administrative.

117IMAGINER LE CHANGEMENT

Une ouvrière lui a expliqué comment saupoudrer la poudre de coco sur les pralines lorsque qu’il y
avait un membre de la partie administrative en production et lorsqu’il n’y en avait pas. Lorsque les
ouvrières étaient seules dans la production, elle pouvait « jeter très grossièrement » la poudre de
coco. En revanche, si un employé de la partie administrative était présent, elle devait se montrer
beaucoup plus minutieuse. Car cette méthode produisait un gaspillage de la poudre de coco, et
n’était pas raffinée pour les pralines. Elle devait appliquer la poudre de coco sur une praline à la fois,
une pincé de poudre coco à la fois.
Après avoir visionné Moderne Times et suivi les cours, je me suis rendu compte que les employés à la
chocolaterie étaient toujours affectés au même poste. Aucun système de rotation n’était mis en place
afin qu’ils puissent changer leur quotidien. Pourtant cela aurait pu être mis en place assez simplement
de par la simplicité des tâches qui étaient saccadées et totalement « décomposées ».
Leur temps de pause était aussi minuté et optimisé au maximum. Elle avait 3 minutes pour aller aux
toilettes toutes en même temps et étaient surveillées de très près par la responsable de production.
Nous avons réfléchi personnellement à trois expériences positives et désagréables : certains avaient
un grand besoin de les partager : cela a duré plus longtemps de prévu !
C’est intéressant de constater que malgré le peu d’expérience que nous avons eu, nous avons tous
vécu des situations différentes mais qui ont créées les mêmes sentiments positifs et négatifs. »

« La disposition des tables : toujours différente. Maintenant je m’y suis habituée, c’est mieux. »
« Ivan nous a montré des petits livres avec des images et des textes que ses élèves ont fait, cela m'a
rappelé l'ouvrage de Paul Eluard « Les mains libres ». »

« J’ai regardé le film : 12 hommes (en colère ndlr). Pendant tout le film, on observe l’effet de groupe
de sa création, son organisation, les personnages qui tentent de s’imposer, ce qui sont plutôt
réservés sur leurs opinions, leurs attitudes corporelles et dans l’espace (salle de délibération dans
laquelle ils sont enfermés – jusqu’à ce qu’ils soient d’accord à l’humanité). »

« Plusieurs personnes ressentaient le besoin de faire le point sur le cours. Je pense que cela est
assez normal au milieu du semestre, plusieurs personnes commencent à voir le temps passer et la
fin du semestre arriver.
Cette situation est aussi exacerbée par le fait que Madame Szendy n’adopte pas une attitude
«  répressive », elle ne nous surveille pas. En revanche de temps en temps, elle nous fait des
rappels sur des lectures complémentaires, des cas à réaliser chez nous… Les devoirs s’accumulent,
les retards aussi, le rythme du cours s’accélère. Comme il n’y a pas de date « butoir », c’est à nous
de nous gérer.

118 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

Elle avait évoqué cette situation en début d’année afin de nous mettre en garde pour que nous
nous organisions de façon plus autonome. Nous sommes en master, elle nous transmet des
connaissances et essaie de favoriser notre autonomie. Elle adopte une attitude pédagogique et
humaine différente des autres professeurs, que je trouve plus professionnelle et plus en phase
avec notre âge. »
« Aujourd’hui mes camarades et moi-même avons beaucoup avancé sur notre projet de création
de livre. Nous avons plutôt bien été organisés durant tout ce processus et nous avons créé une
dynamique de groupe dans le but de mener à bien notre projet d’écriture créative….Nous avons
défini un planning nous permettant de nous donner des dates butoirs afin d’être mieux organisés
et préparer à chaque étape. Nous nous sommes par ailleurs donnés des objectifs tout au long du
projet et sommes répartis les tâches. Nous avons également choisi de ne pas élire un leader….En
effet, je pense que l’élection d’un leader aurait été une barrière dans l’avancement de notre projet
et qu’il aurait même engendré quelques conflits. En effet, je pense que pour ce projet d’édition d’un
livre nous pouvons nous autogérer, être autonome et avoir chacun des responsabilités.
Je suis assez contente et fière de voir que ce projet prend forme petit à petit »
« Distribution de fascicule de lecture …Je suis inquièt par rapport à ces lectures, j'ai l'impression
que c'est difficile et qu'il faudra beaucoup d'heures de travail pour comprendre et analyser chaque
notion. Ce qui me travaille également c'est le fait de travailler en groupe mais je ne sais pas avec
qui je vais être, je n'ai pas envie d'être avec des personnes qui ne sont pas motivées. Par la suite
nous avons parlé de la motivation, c'était intéressant car je ne savais pas la définition exacte du mot
« motivation » et j'ai appris que c'était une action de faire. »

«  Je me suis aussi rendu compte que le travail de groupe pouvait bien se dérouler, tant qu’il y a
une écouté réciproque, un partage d’idées, un respect mutuel, une absence de vouloir dominer et
d’imposer ses règles. »
« Explique de nouveau comment nous devons tenir le journal, et réfléchir. Elle nous conseille
de nous renseigner sur des journaux de dirigeants qui ont étaient publiés par plusieurs
dirigeants, et décideurs en période de guerre. Elle nous parle également de l’entreprise
Seb qui illustre bien la stratégie en générale et la stratégie de différenciation. Car si une
entreprise adopte la même stratégie que ces concurrentes, en réalité ce n’est pas une
stratégie. Seb à créé des produits contre l’obsolescence programme. C’est une pratique que
tous les concurrents exercent dans le secteur de l’électroménager. Seb va à contre-courant
tel les carpes qui remontent une rivière, et fait totalement l’inverse  ! L’entreprise refuse
maintenant de pratiquer les méthodes de production favorisant l’obsolescence programmée.
Elle décide de prolonger la garantie de ses produits et met en place un stock de pièce

119IMAGINER LE CHANGEMENT

détachée afin de pouvoir réparer et fournir aux consommateurs les éléments nécessaire à la
réparation. L’entreprise pour des raisons de coûts de stockage et de production, va investir
dans des imprimantes 3D qui permettra de produire à la demande les pièces endommagés
des électroménagers. »

« J'adore cette liberté que nous laisse Ivan de pouvoir nous exprimer à travers les dessins, mais je
ne quitte pas mon objectif premier avec (ses 2 camarades), qui est celui de créer un maximum de
contenu pour notre livre. »

« Nous avons choisi une autre pochette surprise qui contenait des petits objets …après avoir choisi la
plume, il fallait raconter une histoire. J'ai raconté l'histoire d'un oiseau qui était différent de ses frères et
soeurs et qui rêvait de voyage et de liberté, cependant il était contraint de rester pour aider ses parents.
La fin raconte que grâce à sa culture et à ses dons innés, il a pu voyager. En résumé, au début je ne voyais
que la plume et cette plume s'est transformée en une vraie histoire. Il est étonnant à quel point notre
cerveau fonctionne avec l'imagination. Selon moi, toute mon imagination est étroitement liée à des
événements passés ou à ce que j'aspire dans le futur. »

« Nous avons… fini la séance en parlant du logiciel scribus qui est très facile à utiliser. Monsieur Ivan nous
a montré des tutoriels, comment modifier les options, comment ajouter des textes ou images. J’ai pu
durant cette séance entrevoir ce lien que je cherche depuis que nous avons commencé cet atelier et nos
cours de management. »
« Les trois heures de la séance d'atelier créatif était dédiées à la mise en page du livre sur le logiciel
Scribus ». Nous avons travaillé essentiellement sur les textes en essayant de savoir quel texte serait à
côté de quelle image. À trois, nous avons trouvés des difficultés à l'utilisation du logiciel, mais nous avons
cherché des tutoriels sur divers sites pour nous expliquer certaines fonctionnalités. J'ai cherché des
informations pour savoir comment modifier la police d'un texte, (mes 2 camarades) faisaient de même
et à la fin on se disait ce qu'on avait trouvé. Dans le livre, il fallait établir un fil conducteur et c'était dur
de pouvoir réfléchir sur comment faire. Quels moyens étaient nécessaires pour mettre en place ce fil
conducteur ? Après réflexion, je regardais de mon côté ce qui était intéressant à ajouter et les textes qui
avaient du potentiel. Chacune d'entre nous faisait ce travail. À ce moment précis, je remets en question
le travail fourni, je ne sais pas si le travail sera de qualité. »

«  Aujourd'hui c'était un travail sur Omnipaint (étude de cas, sur le modèle des Cas Hravard
ndlr) , c'est une entreprise ayant diverses problèmes. Nous étions consultants et nous devions
apporter des solutions à cette entreprise. Avant de venir en cours, nous nous sommes vu avec

120 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

mon groupe à la bibliothèque pour pouvoir aborder les problématiques. Nous étions tous dans la
même dynamique, nous avons partagé les taches, chacun devait extraire les informations dans
chaque interview des salariés. En arrivant en cours nous avions tout mis en commun et on s'était
mis d'accord pour travailler de chez nous via « Google drive ». »

«… c’est la finalisation de notre livre. Les sentiments qui m’ont traversé sont la joie et l’accomplissement.
Le fait de mener à bien un projet est … gratifiant et cela l’est encore plus lorsque le projet fait appel à des
compétences et talents que nous ne maîtrisons pas forcément comme le dessin et l’écriture.
(…) Nous avons réalisé ce projet en tenant compte de certains paramètres, comme le cahier des charges
et le respect des délais. Cela nous a demandé une certaine adaptation, une certaine flexibilité, une
maîtrise de soi et une grande écoute … »

« …  je me suis découvert une passion pour le dessin, il m’a permis de mettre sur le papier toutes les
choses que je pensais sur certains sujets mais que je n’arrivais pas à exprimer oralement. »

« .. je voudrais simplement conclure sur le fait que cet atelier (même si au début j’étais perplexe voire
dubitative) m’a permis d’améliorer une qualité que je ne pensais améliorer dans ce domaine celui de
« l’ouverture d’esprit » je ne veux pas dire que je ne suis pas ouverte d’esprit loin de là, mais ce que je
souhaite exprimer c’est plutôt le fait qu’au début de cet atelier j’étais plutôt dans la réaction « est-ce une
blague ? En master fait-on vraiment du coloriage ? » et que j’étais surtout bloquée dans le fait « qu’il n’y
a qu’une manière d’étudier et ce n’est pas cela. » … »

« Pour la deuxième partie de notre atelier « imaginer le changement » nous devions participer à un
séminaire avec deux intervenants Allan (qui est anglais) et Anne (qui est finlandaise) qui durant ces deux
jours nous auront guidés, éduqués et permis d’ouvrir notre esprit et de voir plus loin que ce que nous
pensions savoir. (…)
Pourrais-je conclure sans réellement faire de conclusion mais plutôt par une question. Ce séminaire
était-il une fenêtre à notre future vie professionnelle ?.... »

BILAN PÉDAGOGIQUE : POINTS POSITIFS ET NÉGATIFS
À la lecture des extraits des journaux de bord étudiants, on peut mesurer les effets
de cette expérience sur la capacité des étudiants à intégrer et faire leurs des notions
de management, leur capacité à se projeter dans un devenir professionnel, et le
développement de compétences transversales telles que le travail de groupe, la
gestion du temps, la réalisation d’un projet, etc.

121IMAGINER LE CHANGEMENT

Nous pouvons cependant également relever la difficulté qu’a représenté cette
expérience d’une pédagogie innovante pour les étudiants du master MCI de Paris 8.
Les étudiants ont paru avoir des difficultés à faire le lien entre les séances workshop
et les séances de cours  (et ce, en dépit de la mise en place de dispositifs relevant
des pédagogies actives avec des séances de classe inversée et Class Discussion pour
les séances de cours, en dépit également du rythme et de l’alternance des séances
workshops/cours pensés comme des « allers-retours », ou encore du journal de bord
qui était pensé pour aider à «  fabriquer  » du sens par rapport à son expérience). Il
apparait que c’est essentiellement la question de l’autonomie, de la « liberté » (c’est-
à-dire du processus pédagogique non associé à un système de punition/récompense)
qui a été le plus difficile à « comprendre » ou à « croire » par les étudiants. Autrement
dit le fait que la note n’était pas l’enjeu dans ce dispositif. Cela s’explique, en partie, par
le fait que l’atelier-laboratoire était adossé à un cours obligatoire et non une UE libre.
Nous veillerons dorénavant à ce que la partie workshop avec les professionnels
intervienne après un temps de « socialisation » en cours de management stratégique
et théorie des organisations où l’on opère une introduction à la démarche critique
et historique en management, et qui prépare les étudiants à cette idée de la
nécessaire multiplication des perspectives pour saisir la complexité des phénomènes
organisationnels (et ce via le même corpus de lectures, cas, films, documentaires ou
fiction, et la même démarche encourageant débats et discussions). Autrement dit, nous
prendrons dorénavant un temps pour déconstruire les représentations du management
que les étudiants peuvent avoir en arrivant en master MCI et leur faire passer l’idée
qu’un cours de management n’est pas une suite de recettes et de « bonnes » façons
de faire qu’il faudrait pouvoir connaitre et imiter pour s’assurer d’une « place » dans
un futur emploi. Puis, nous inviterons celles et ceux qui le souhaite à un « voyage »,
une « initiation », pouvant les amener à l’élaboration de leur « devenir professionnel »,
une sorte d’«  invention de soi  » (au travail) libérée des représentations héritées de
leur culture ou de leur milieu (nos étudiants étant, pour rappel, essentiellement issus
de catégories populaires, ils sont souvent parmi les premiers de leur famille à pouvoir
aspirer à des fonctions d’encadrement ou de responsabilités en entreprise). Nous
sommes également attentifs au fait que la participation aux ateliers, le travail avec
les professionnels et/ou artistes invités soit le fait d’un choix motivé, conscient, de
l’étudiant (découplé de toute stratégie ou calcul scolaire lié à la notation).

LES PRODUCTIONS DE L’ATELIER ET LEUR VALORISATION

122 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

Les livrets ou fanzines réalisés par les étudiants ont été imprimés (une version en
ligne peut être à envisager. Des échanges sont en cours avec Antoine Lefebvre,
artiste éditeur pour envisager une valorisation dans son espace aux Grands Voisins :
http://hon-bookstore.com/about)
Par ailleurs, verbatim étudiants et photos prises durant l’expérimentation de
l’atelier-laboratoire pour un enseignement en sciences de gestion, peuvent
constituer une documentation d’une innovation pédagogique et faire l’objet de
communication en colloque.

123IMAGINER LE CHANGEMENT

Les vertiges
de la description

PAR AGNÈS HENRY

Cet atelier-laboratoire s'inscrit dans le cadre d'une collaboration entre le
master PCAI (Paris8) et le groupe d'étude et de recherche Gerphau (EA7486 –
ENSA Paris La Villette).
Dans la continuité des journées d'étude «  Vertiges de la description  »,
organisées par le Gerphau (mai 2017), nous avons proposé de poursuivre la
réflexion sur la place, le rôle, la fonction que tiennent les pratiques descriptives
dans les projets et recherches que nous menons.
Organisées au centre de veille et d'innovation, quatre journées d'étude sur
l’année 2018 (lundi 8 janvier 2018 ; vendredi 16 février ; les jeudi 3 et vendredi
4 mai) ont permis aux étudiant.e.s du master «  projet culturel et artistique
international (Université Paris 8) » et du DPEA-Immersion Gerphau (ENSA Paris
La Villette) de s'interroger ensemble sur ce que produit la description dans
leurs pratiques respectives (mise en œuvre de projets ; projets de recherche
en art et en architecture, ou autres).
Cet atelier-laboratoire s'est donc défini comme nécessairement inter-
disciplinaires et trans-pratiques, tenant le pari que ce croisement de regards
puisse encourager les étudiant.e.s à développer une approche dynamique et
imaginative dans l'énoncé de leurs propres projets.
Cet atelier-laboratoire recouvrait un double objectif. D'une part, il s'agissait

124 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

d'explorer ce que peuvent produire les pratiques descriptives dans l’élaboration
des projets et des recherches et, d'autre part, d'investir et questionner les
modes de description de ses propres projets, en cours ou encore à venir.
Ces deux lignes de réflexion et de travail devaient alors se croiser autour
du voir et du donner à voir  ; de l'observable et de l'in-observable  ; de la
description avec et sans observation. Comment décrire une chose qu'on
ne peut a priori pas observer  ? Comment décrire sans regard direct sur la
chose à décrire ? Comment la description peut-elle engager la fabrication de
nouvelles formes de savoir, et non pas uniquement la production de nouvelles
informations ?
Depuis nos disciplines et pratiques variées, l'enjeu était de pouvoir discuter
et travailler sur la description en acceptant de brouiller lesdites « séquences
de raisonnement  » traditionnelles (observation – description – analyse
– interprétation) et de troubler ses mythes de fidélité, de neutralité et
d'immédiateté. La description sélectionne dans le réel ce dont elle peut/veut
rendre compte, et s'engage avec le réel par ses principes même de sélection
et de mise en partage. À la fois observer et décrire, du même geste décrire et
interpréter.

LE OU LES MODÈLES PÉDAGOGIQUES MOBILISÉS
Pour chaque séance, nous avons mis en place des protocoles d'exercices
collectifs permettant aux étudiant.e.s de découvrir et expérimenter quelques
pratiques de description depuis les spécificités de leurs projets respectifs.
Nous avons également invité des architectes et des artistes qui ont placé
(différemment) la description au cœur de leurs pratiques afin d'en partager les
enjeux avec les étudiant.e.s de l'atelier-laboratoire. Claire Bartoli (comédienne -
conteuse non voyante) et Anne Frémy (iconographe, enseignante d'arts plastiques
à l'ENSA Paris La Villette) sont intervenues pour travailler avec les étudiant.e.s,
l'audio-description, l’audio-description des oeuvres cinématographiques et la
description d’oeuvres d’art (« description créative »).
Nous avons également invité de jeunes doctorantes en architecture (Sophie
Goupille, Anaëlle Mahéo et Philippine Moncomble) à présenter comment
l'invention de nouvelles pratiques descriptives s'inscrit dans leurs recherches :
la description comme matériaux, comme instrument, comme invention de
nouvelles formes de recherche ?

125LES VERTIGES DE LA DESCRIPTION

LE DÉROULEMENT DE L’ATELIER :
RETOUR SUR LES DIFFÉRENTES ÉTAPES, LES PROFESSIONNELS
MOBILISÉS ET LES ÉCHANGES AVEC LES ÉTUDIANTS
Pour la première séquence, nous avons tenté d'interroger les places, rôles et
fonctions de la description dans nos pratiques de recherche en élaborant une
cartographie collective et dynamique des types de matériaux et instruments
mobilisés dans nos pratiques, projets de recherche. L'objectif était alors de
nommer les agencements, de pouvoir situer où et comment y interviennent
différents modes de description.
Lors de la seconde séquence, nous avons travaillé sur la diversité des modes
et codes de description. À partir d'un jeu de cartes (de type carte postale)
préalablement établis à partir de visuels associés aux différents projets des
étudiant.e.s, il s'agissait de décrire l'image imprimée sur la carte selon des
modes de description variés. Pour chaque mode, l'objectif était d'encourager les
étudiant.e.s à investir les détails qui font la spécificité du support (l'adresse pour
une carte postale ; le slogan pour un support publicité ; le # pour une annonce sur
des réseaux sociaux ; les noms des intervenant.e.s pour l'affiche d'un colloque ;
etc.). Il s'agissait donc de faire varier les modes d'énonciation pour explorer la
multiplicité des registres de la description, mais surtout interroger leurs devoirs,
leurs pouvoirs d'interprétation et d'imagination.
La troisième séquence était organisée autour du thème de l'audio-description.
L'intervention de Claire Bartoli, artiste non voyante, a permis aux étudiant.e.s
d'interroger les rapports entre le visuel (œuvres d'arts artistiques et extraits
cinématographiques) et le langage : qu’est-ce que les mots construisent? Qu’est-
ce qui construit un regard?  Claire Bartoli a proposé aux étudiant.e.s différents
exercices d'audio-description  : d'abord une discussion sur la perception de
l'audiodescription sans image (Au revoir les enfants de Louis Malle, 1987), ensuite
une tentative d'audiodescription collective d'un extrait de film (L'homme sans
tête de Juan Solanas, 2003).
Ce travail sur l'audiodescription a également fait l'objet d'un exercice de
« description performée » des projets de recherche des étudiant.e.s. Après une
préparation en binômes, il s'agissait de simultanément dessiner et décrire son
projet de recherche. Cet exercice a permis à chacun.e de poser les bases d'une
description dessinée de son projet, à développer par la suite sous la forme d'une
cartographie commentée.

126 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

BILAN PÉDAGOGIQUE : POINTS POSITIFS ET NÉGATIFS
En invitant des étudiant.e.s issu.e.s des domaines de l'art et de l'architecture à se
rencontrer autour du thème de la description, cet atelier-laboratoire a permis à
toutes et tous d'interroger les spécificités des matériaux et instruments mobilisés
dans nos pratiques (de recherche et autres) respectives.
Les étudiant.e.s en architecture ont pu partager une certaine capacité à énoncer
graphiquement les discours descriptifs (exercice de cartographie), et les étudiants
du master PCAI ont amené le groupe à se rendre plus attentif aux modes de
communication entre les différents agents engagés dans un même projet et à
questionner comment ces modes participent aussi à l'énoncé du projet.
Notre objectif était d'amener les étudiant.e.s à investir les enjeux de la description
(qu'est-ce que produit la description dans sa pratique  ? Et, comment décrire son
propre projet de recherche?), comme une façon de faire ralentir les évidences ; de
réinterroger des modes de pensées. Si une telle poursuite pédagogique se confronte
nécessairement aux confusions, réticences et parfois résistances des étudiant.e.s,
la mise en place d'exercices collectifs et (plus ou moins) ludiques permet d'en
appréhender les enjeux, puisque déjà présentés comme partagés.
Enfin, cet atelier-laboratoire a été organisé en trois séquences espacées dans le
temps, en fonction des disponibilités laissées dans les calendriers des deux formations
investies dans le projet (PCAI et DPEA-immersion Gerphau). Une semaine intensive
et semi-immersive de travail aurait certainement été plus stimulante et engageante
pour le groupe, elle aurait facilité une circulation entre les temps d‘échanges formels
et plus informels, précieuse sur une courte durée de travail.

LES PRODUCTIONS DE L’ATELIER ET LEUR VALORISATION
Les différents exercices menés autour du thème de la description ont permis aux
étudiant.e.s d'élaborer une cartographie personnelle de leurs projets pratiques et/ou
leurs projets de recherche.

AUTRES
Un étudiant issu du master théâtre écritures etreprésentations de l’université Paris
Nanterre a également pu participer à cet atelier.

127LES VERTIGES DE LA DESCRIPTION

Muséologie
numérique

PAR BERNADETTE DUFRÊNE ET RÉMI LABRUSSE

Organisé, d’une part, avec la BnF et, d’autre part, avec l’École supérieure des Beaux-
Arts d’Alger, l’atelier-laboratoire «  muséologie numérique  » poursuit comme objectif
essentiel l’acquisition d’une méthodologie de la conduite de projets appliquée à une
forme de médiation du patrimoine, la création de sites de vulgarisation savante : en
ce qui concerne la BnF, il s’agissait d’une commande du comité d’histoire, désireux de
retracer l’histoire de la Très grande Bibliothèque sur le site Tolbiac; le projet a permis de
documenter l’histoire de l’institution et à concevoir une éditorialisation originale pour le
grand public. Le projet sur l’École des beaux-arts d’Alger a donné lieu à un site intitulé
Regards croisés sur l’École des Beaux-Arts. Bénéficiant de l’expérience de la promotion
précédente qui avait commencé à défricher un terrain peu exploré, la promotion 2017-
2018 a continué le travail sur cette institution emblématique du paysage culturel algérien
et algérois : l’École supérieure des beaux-arts, son bâtiment moderniste, ses collections
artistiques, son histoire institutionnelle sous la colonisation et après l’indépendance, sa
vie actuelle, tant du côté des étudiants que des artistes enseignants.
Dans son ensemble, l’atelier a donc eu pour but de familiariser les étudiants avec les
différentes étapes d’un projet de médiation numérique : délimitation du concept
de médiation, recherche documentaire, valorisation des sources. Les productions
ont alors été confrontées et adaptées aux attentes du monde professionnel, en
France et à l’étranger.

128 BILAN PÉDAGOGIQUE 2017 2018

LE OU LES MODÈLES PÉDAGOGIQUES MOBILISÉS
L’atelier-laboratoire s’est appuyé sur la recherche documentaire en groupes dans
différentes institutions patrimoniales parisiennes et surtout sur l’acquisition de
méthodes professionnelles sous la conduite d’une professionnelle très sûre venant de
Paris Musées pour la conception d’un site répondant à deux impératifs : l’ergonomie
et l’attractivité. Son apport a été décisif pour parvenir à des résultats qui ont donné
toute satisfaction au commanditaire qu’était la BnF (au point qu’une nouvelle
commande a été passée pour l’année 2018-2019).

LE DÉROULEMENT DE L’ATELIER :
RETOUR SUR LES DIFFÉRENTES ÉTAPES, LES PROFESSIONNELS
MOBILISÉS ET LES ÉCHANGES AVEC LES ÉTUDIANTS
Les différentes étapes (acquisition de méthodes, recherche, adaptation des contenus
aux attentes la BnF ou de l’École des Beaux-Arts lors d’un voyage à Alger) ont été toutes
productives. Les étudiants ont notamment été attentifs aux questions de médiation
(constituer une information à partir de différentes sources, la contextualiser,
réfléchir aux questions d’accès), de droit (notamment du droit des images) de design
(ergonomie et identité visuelle). L’analyse des expériences humaines est un autre
point fort de l’atelier.

BILAN PÉDAGOGIQUE : POINTS POSITIFS ET NÉGATIFS
En créant les conditions d’un travail en équipes réellement fructueux, d’une
découverte des méthodes professionnelles, en se déplaçant in situ, l’atelier-
laboratoire a à la fois favorisé une excellente atmosphère de groupe, au sein de la
promotion 2017-2018, et renforcé les compétences professionnelles des étudiants.
Les seules difficultés, normales et formatrices, ont été la relation avec les
nombreux acteurs concernés à la BnF. Les étudiants ont été ainsi confrontés à la
complexité d’une grande institution. L’accueil à l’École des Beaux-Arts d’Alger a
été, en revanche, excellent; le voyage est cité comme un moment fort du cursus
par les étudiants.

LES PRODUCTIONS DE L’ATELIER ET LEUR VALORISATION
L’atelier-laboratoire a débouché sur la création de deux sites disponibles sur le site
officiel du master :
https://www.master-mcpn.com/atelier-laboratoire

129MUSÉOLOGIE NUMÉRIQUE


Click to View FlipBook Version