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« Vidéo tu retiens les ravages du temps,

Instrument du voyageur qui observe autrement

Dans la ville tu vas partout au gré du vent

En quête d’insolite et de chambardement

On dit que grâce à toi on voit différemment »

Michel Rose

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Published by interface.art, 2016-06-12 12:17:06

HDO_18

« Vidéo tu retiens les ravages du temps,

Instrument du voyageur qui observe autrement

Dans la ville tu vas partout au gré du vent

En quête d’insolite et de chambardement

On dit que grâce à toi on voit différemment »

Michel Rose

Keywords: Vidéo, Steve Mc Queen, Drum Roll, Adeline Blanchard, Chiara Pirito, Cécile Desbaudard, Mike Davis, Guillaume Mansart, Sarah Morris, Marlène Gossmann, Jordi Colomer, Géraldine Griffon, Phi Lee Lam, Albane Duvillier, Francis Alÿs, Mélanie Perrier

le journal de l’art contemporain, juin - octobre 2006HORSD’OEUVRE
dijon ® bourgogne ® france ® europe ® ... Couverture :
© Christophe Langenbach, Antenne noire, 2006
n°18 © Michel Rose, Vidéo, 2006 V idéo tu retiens les ravages du temps,
www.interface-art.com I nstrument du voyeur qui observe autrement,
D ans la ville tu vas partout au gré du vent
E n quête d’insolite et de chambardement.
O n dit que grâce à toi l’on voit différemment.

Chiara Pirito

sphère privée / sphère urbaine

Chiara Pirito : Within Image, 2003, installation vidéo (son Enrico Ascoli) Chiara Pirito est née en 1977 à Turin. Elle vit et travaille dans cette ville. Après
#2 peinture & vidéo : Dijon, appartement/galerie Interface, 06/05 - 11/06/06 avoir étudié à l’université de Lettres et Philosophie de Turin, elle a obtenu, en
2000, le diplôme de l’Ecole Nationale de la Photographie d’Arles.
Steve McQueen Son travail, vidéos et photographies, est centré sur l’exploration des limites entre
Drumroll pluralité et unicité des êtres humains. Elle filme la confrontation de personnages
anonymes à une même situation de la vie quotidienne liée à la thématique de
Une immense projection vidéo triptyque immerge le spectateur au cœur de l’univers urbain l’attente, de la transition (attente précise comme dans Within images, 2003 lorsque
et mouvementé de New York. Drumroll de Steve McQueen défie les lois de la gravité en les candidates d’un modeste concours de beauté s’apprêtent à entrer sur scène
révélant les rues de Manhattan sens dessus dessous, dans un mouvement circulaire et un mais aussi l’attente diffuse, aléatoire telle celle vécue par des passants dans la rue
tournoiement incessants. Sur la projection de droite, des voitures roulent et se retournent sans alors qu’ils s’acheminent vers leur destination dans Declinazione, 2002).
cesse, tandis que l’image de gauche montre les pas presque dansants de passants, à Les deux vidéos Exposure Athens (2003) et Exposure Maceio (2001) développent
l’endroit puis à l’envers, dans un mouvement centrifuge et régulier. La projection centrale est ce thème dans un contexte bien particulier : des personnes patientent dans une
une rotation verticale, dévoilant tour à tour le ciel new-yorkais, quelques buildings puis la voiture à l’arrêt (un taxi dans la première, la voiture personnelle dans la seconde)
chaussée dans l’obscurité totale. De temps à autre, on aperçoit une chemise rose, celle de quelque part en ville. Dans la première vidéo, Exposure Athens, le cadrage est
Steve McQueen, exécutant sa performance. Dans la cacophonie de la ville, parmi les resserré sur la vitre arrière droite du taxi ce qui permet de visualiser le visage
klaxons de voitures, les sirènes stridentes de la police, le brouhaha de la foule et les du/des passager(s). L’univers urbain n’est perceptible qu’à travers le type de
roulements de moteurs, une voix masculine retentit : « sorry, watch out ! ». C’est celle de véhicule filmé : un taxi de couleur jaune. Dans Exposure Maceio, l’avant et l’arrière
l’artiste tentant de fendre la foule tout en faisant rouler un baril d’essence contenant trois de la voiture sont visibles ainsi que l’environnement immédiat (on aperçoit la rue,
caméras : deux sur les côtés, à l’horizontale et une au milieu, à la verticale. Le reflet de Steve des passants, une vitrine de magasin…). La ville n’est plus seulement suggérée
McQueen poussant son baril apparaît de façon furtive dans les vitrines de magasins. par un élément emblématique (le taxi) mais réellement présente. La bande sonore
La triple projection révèle le processus même de sa réalisation. Le spectateur prend peu à de ces deux œuvres propose une retranscription des sonorités réellement perçues
peu conscience de la concomitance des trois images. Le son diffusé coïncide avec chacune lors de déplacements routiers citadins (bruits plus ou moins mécaniques,
d’elles. La rotation simultanée des projections , à vitesse égale, dévoile le système de répétitifs, sons de portières claquées, bribes de conversation…) proche de ce que
tournage très rudimentaire. La présence de l’artiste, soulignée par des apparitions physiques nous éprouvons durant la somnolence : l’identification des sons se dilue, une
brèves et par le son de sa voix, renforce la notion d’auteur. Sa présence est une signature déformation et un éloignement s’opèrent. Cet effet insiste sur l’altération de la
et permet de cerner la nature de l’œuvre, entre performance, film expérimental et film de cinéma. vigilance ressentie par toute personne confrontée à une situation d’attente tout en
Différents paramètres soulignent les références cinématographiques : l’absence de renforçant la mise à distance de l’espace urbain que chaque passager
narration, le son réel in situ, la caméra portable - en l’occurrence mobile - et l’absence expérimente à travers son enfermement dans la voiture. La simple présence d’une
d’acteurs au profit de non acteurs (les passants), renvoient aux dogmes du « cinéma vérité » clôture délimitée par la carrosserie génère un microcosme qui, tout en
des années 60, initié par Jean Rouch. Le grouillement continu de l’espace urbain, appartenant au macrocosme (la ville), s’isole de celui-ci. Chiara Pirito attire ici
l’esthétique de la vitesse, rappellent également la célébration de la modernité industrielle notre attention sur les notions de frontières, limites, groupes humains : à
par Marinetti dans le Manifeste futuriste (1909). Le cinéaste Dziga Vertov sera l’intérieur de la voiture, les règles comportementales ne sont plus les mêmes qu’à
particulièrement influencé par les thèses du futurisme dans son film L’Homme à la Caméra l’extérieur.
de 1929. Tourné dans la ville d’Odessa, le film célèbre le monde moderne, industriel et Si l’intérieur d’un taxi, semblablement à la rue, demeure un espace public, le
urbain. Pour Vertov, la caméra, « œil mécanique » 1 est une prolongation de l’œil humain, nombre d’occupants est particulièrement limité et sa fonction implique, pour le
instrument imparfait. Elle permet de découvrir une réalité autre, et dévoile « une nouvelle passager, une véritable passivité. Cette inactivité, la station assise, la quasi-
conception du monde » 2, à l’opposé d’une réalité objective. De la même façon, Steve solitude et la petitesse des lieux favorisent un relâchement proche de celui qui
McQueen multiplie les points de vue sur la ville, perturbant et renouvelant sa perception. s’établit dans la sphère privée. Malgré la présence de la vitre qui maintient une
Cette démultiplication visuelle déstabilise le spectateur dont les repères spatiaux sont liaison avec le macrocosme urbain, le passager du taxi s’abandonne à sa
brouillés. L’aliénation de la ville révèle une réalité nouvelle. « gestualité privée » 1 ainsi que le remarque l’artiste. La vidéo Exposure Athens
Un autre point commun entre le film de Vertov et celui de McQueen est leur musicalité. Film n’expose pas uniquement une série de portraits volés car chaque personnage
muet, L’Homme à la Caméra est pourtant construit selon un rythme très marqué. Le montage repère, à un moment donné, l’artiste qui le filme : ressurgit alors soudainement la
saccadé et la composition des images en mouvement s’assimilent à une construction « personnalité publique » du passager qui, la plupart du temps, réagit avec
musicale. Drumroll est la première vidéo sonore de McQueen. Elle superpose les bruits de inquiétude face à cette caméra.
la ville, la voix de l’artiste et le vacarme du baril. Le vidéaste décrit l’expérience sonore de Dans Exposure Maceio, il ne s’agit plus d’un taxi mais du véhicule personnel : l’un
sa performance: « Je me sentais presque comme un musicien. Tout ce que j’avais à faire, des passagers ou l’unique occupant conduit. Chiara Pirito ne cadre plus
c’était de continuer à faire rouler le baril d’essence comme on bat la mesure. Le chaos des simplement la vitre arrière droite de l’automobile mais l’ensemble de son côté
allers et venues des gens dans la rue, les déplacements des voitures et des camions étaient droit (nous pouvons donc visualiser ce qui se passe à l’arrière et à l’avant). Ce
de l’ordre de l’improvisation ». 3 cadrage affirme la notion d’ « habitacle » qui était certes développée dans la
Drumroll explore les limites de la vidéo, entre performance musicale et chorégraphique, dont précédente vidéo mais atténuée par une présentation partielle. Le parallèle entre
les protagonistes sont les acteurs de l’environnement urbain. Film expérimental, quasi cet « habitacle » et l’habitat, le domicile se manifeste avec évidence :
abstrait lors des accélérations rotatives, il est marqué par le minimalisme de son langage immobilisation du véhicule, association des vitres à des fenêtres, dualité intérieur-
filmique révélant son processus de extérieur mais aussi et surtout familiarité des échanges entre les passagers. Leur
réalisation. Ce nouveau regard comportement (détente, rires, amusement, relâchement, complicité…) parfois
kaléidoscopique sur le paysage urbain va même leur ressemblance physique nous indique qu’ils appartiennent à une même
jusqu’à la saturation des points de vue. La sphère privée. On devine des relations amicales, amoureuses et familiales. Notons
présentation de la ville en rotation continue au passage qu’un chien, l’animal domestique par excellence, fait son apparition
met à l’épreuve le spectateur jusqu’à dans l’une des voitures filmées. La dichotomie microcosme privé/macrocosme
l’ivresse tandis que l’artiste nous fait la urbain prend ici toute sa valeur, d’autant plus que les deux univers coexistent : la
démonstration littérale de « tourner » un « voiture-cocon » est entourée par la sphère urbaine (rue, passants, autres
film ! véhicules, vitrine de magasin…). Les passants – membres immédiats de la zone
urbaine – se distinguent d’ailleurs des passagers de la voiture – membres indirects
Adeline Blanchard de la zone urbaine – par leur attitude : ils sont debout et marchent.
Chiara Pirito brouille les pistes. Passants comme passagers appartiennent à
1. In : manifeste de Dziga Vertov, Ciné-Œil, 1923. l’espace urbain mais à des degrés divers, les seconds résidant en premier lieu
2. Idem. dans leur voiture. La rupture espace privé/espace public demeure perméable :
3. « I felt almost like a musician. All I had to do is to keep ces deux milieux s’interpénètrent par l’intermédiaire des vitres. À l’intérieur du
this oil drum roll almost like keeping a beat. The chaos véhicule, si la pluralité des êtres s’affirme à travers la multitude des particularités
that was recorded of people, cars, trucks, etc. was almost gestuelles, des expressions, les différences d’âge, de sexe, de types physiques,
like improvisation », in : Steve McQueen, « Steve l’attitude générale de chaque personnage soumis à cette même situation d’attente
McQueen in conversation with Gerald Matt », catalogue (relâchement, gestes autocentrés, rêveries…) traduit l’unicité du comportement
d’exposition, Kunsthalle Vienne, 2001, p.16. humain. Le procédé de création implique également une ambiguïté : le fait de
filmer les gens dans leur voiture tout en restant visible mais sans le signaler ainsi
Steve McQueen : Drumroll, 1998 que la sobriété du montage (un groupe de passagers par séquence avec un
projections vidéos simultanées, 3 x 22 min.
Courtesy Galerie Marian Goodman Paris/New York cadrage similaire pour l’ensemble)
livrent un résultat qui s’inscrit « à mi-
chemin entre télésurveillance et
reportage ». 2
Dans ces vidéos, la ville ne se
manifeste donc pas uniquement en
tant que sujet (milieu à la fois distinct
et générateur d’espace privé) mais
aussi à travers le choix du vocabulaire
plastique qui s’apparente à celui des
vidéos de télésurveillance
exclusivement produite dans et par la
ville.

Cécile Desbaudard

1. Chiara Pirito, Mulhouse 003 Les écoles d’art
en France, catalogue d’exposition, Mulhouse, 9 au
22 juin 2003, p. 37
2. Rubrique calendrier à propos de l’exposition Un
an après à Vesoul 19/09/03-11/10/03, Art

Press n° 297, septembre 2003

2

Fabrice Gygi : Palissades, 2000, métal galvanisé, grillage
16 x (220 x 300 x 80 cm) – coll. Frac Bourgogne
Photo : André Morin, Paris

Mike Davis

Au-delà de Blade Runner, Los Angeles et l’imagination du désastre

Rangez vos cartes postales, éteignez la télé, fermez cœur de la ville (prévenu par le L.A.P.D. 3 de l’imminence Car pour faire face à cette déliquescence, Los Angeles
votre dictionnaire du cinéma américain, la réalité que d’une « inondation » noire) vers un centre d’affaire est entrée dans une phase de simulation dans laquelle
nous présente Mike Davis n’a rien d’éblouissant ; elle a sécurisé (le bien nommé Bunker Hill) tient lieu de l’idéalisation tente de remplacer la réalité. Pour
définitivement attaqué le vernis glamour que l’industrie préambule à cette transformation urbaine. « Les préserver le fantasme social, on a crée des bulles
cinématographique s’était attachée à appliquer, couche connexions piétonnes traditionnelles entre Bunker Hill touristiques, reconstitué des quartiers historiques
après couche, sur Los Angeles. Au-delà de Blade et le vieux centre ont été abolies, et la circulation à pied dans des parcs d’attractions à l’extérieur de la ville.
Runner, Los Angeles et l’imagination du désastre 1 est se fait désormais au-dessus de la rue sur des CityWalk reprend « les traits caractéristiques
un essai sociologique, urbanistique, économique et « pedways » surélevés 4 dont l’accès est contrôlé par d’Hollywood, d’Olvera Street et de Mid-Wildshire
politique qui dresse le bilan de ce qui ressemble de les systèmes de sécurités de gratte-ciels individuels ». synthétisés sous forme de « petits morceaux
toute évidence à la faillite d’un système. Analysant la La privatisation de l’espace public s’accroît prémachés » destinés à être consommés par les
ville californienne (qui tient lieu de laboratoire social et dangereusement depuis 1992 et comme l’écrit Mike touristes et les résidents qui « n’ont que faire de
urbanistique) l’ouvrage de Mike Davis dresse le portrait Davis pour les entreprises privées ou pour les l’excitation produite par le sifflement des balles (…)
de l’Amérique contemporaine et présage ce que politiques, aujourd’hui « Reconstruire L.A. veut dire dans le pays du tiers-monde » que Los Angeles est
pourrait être l’évolution des sociétés occidentales. consolider le bunker ». devenu. ». Plus qu’une reconstitution CityWalk est
Désenchantement programmé. Le signe le plus manifeste de cette consolidation est présentée par ces concepteurs (MCA) comme une
Dans le film de Ridley Scott Blade Runner 2, Los sans doute la systématisation de l’ingérence policière « révolution de l’urbanisation », un exercice
Angeles est devenue une mégapole apocalyptique dans le développement des projets d’urbanisme. monumental d’hygiène sociologique.
soumise aux pluies acides et dans laquelle, sur fond de Depuis les dernières émeutes, le L.A.P.D. soutient un La réalité décrite par Mike Davis dans son ouvrage
paysage technologique, l’hyperviolence règne en programme de réduction en intervenant dans le semble tout droit sortie d’un roman de S-F (on pense
maître. Vision négative d’un futur décharné, le film processus de zonage. Dans des zones identifiées évidemment à 1984 d’Orwell, Super-Cannes de
figure ce qui semblerait être le stade terminal de la comme sensibles, il met son veto sur les permis de Ballard…). Mais elle trouve un écho plus probant dans
ville, celui à partir duquel rien d’autre n’est plus construire ou les licences légales de toutes activités l’actualité française (et c’est sans doute ce qui a incité
possible que le chaos. Mais pour Mike Davis cela n’est commerciales qu’il juge enclines à « attirer le crime ». Allia à rééditer ce livre) : émeutes de banlieues,
que fiction, du moins en partie, et si cette contre- Des « districts d’aggravations » ont été crées, des discrimination, refus de construction de logements
utopie annonce une inéluctable dérive, elle reste zones sans armes, d’autres sans drogues, à l’intérieur sociaux par certaines municipalités, interdiction de
marquée d’un fantasme moderniste qui n’a finalement desquelles les sanctions sont alourdies en cas circuler à plus de trois pour les mineurs, la fin
que peu de rapport avec la triste réalité qui recouvre d’infractions. La liberté de circulation est mise à mal programmée de la mixité sociale et le repli
aujourd’hui la ville de sa misère sauvage. Pour lui, dans certains quartiers, « En préalable à leur liberté communautaire, explosion des systèmes de
« Blade Runner n’est pas tant le futur d’une ville que le surveillée, on distribue désormais aux prostituées une vidéosurveillance et des sociétés de sécurités privées,
fantôme des rêveries du passé. », et son ouvrage tend carte partagée en secteurs, dont certaines parties pénalisation du « racolage passif », de la « mendicité
à prouver que la cité des anges est déjà entrée dans d’Hollywood, de South Central et de la San Fernando agressive »… Serions-nous alors à l’aube d’une
un futur définitivement plus trivial et inquiétant. Valley, où elles peuvent être arrêtées pour le simple fait transformation socio-urbanistique à l’échelle de celle
Dans les années 20, le sociologue Ernest W. Burgess de marcher dans la rue. » L’exclusion et la qu’a connu Los Angeles ? Le modèle social français
proposait une étude de la ville nord américaine et marginalisation sont au cœur du système urbanistique saura sans doute nous préserver de telles dérives en
établissait un diagramme archétypal représentant sa et politique de Los Angeles. Pour préserver le calme préférant l’intégration à la désintégration… N’est-ce pas ?
hiérarchie spatiale (en prenant en compte la répartition social l’isolement semble être devenu l’ultime solution,
des classes sociales, les origines, les types ainsi ce que l’on nomme officiellement les « zones de Guillaume Mansart
d’habitats…), reprenant ce schéma de référence Mike repos » qui sont en fait des districts à l’intérieur
Davis se propose de l’actualiser en y ajoutant le desquels on tente de maintenir les sans-abri pour qu’ils 1. Au-delà de Blade Runner, Los Angeles et l’imagination du désastre,
« nouveau » facteur surdéterminant de l’urbanisation évitent les « zones d’exclusion » (des quartiers aisés) Editions Allia, Paris, 2006. Parution originale dans Ecology of fear,
angelienne : la peur. Les émeutes de 1965 et de 1992 avec leur très sérieuse ordonnance… « anti-camping » ! 5 Metropolitan Books, Henry Holt and Company, New York, 1998,
(ajoutées à la récession économique, à la baisse La liste est longue, le développement argumenté : Beyond Blade Runner constitue le chapitre 7 de cet ouvrage.
considérable du nombre d’emplois ouvriers, aux stigmatisation des populations noire et latino, 2. Blade Runner (1982), tiré du roman de Philip K. Dick Est-ce que les
réductions de budgets alloués à l’aide social et à programme de surveillance du voisinage, ghettoïsation androïdes rêvent de moutons électriques ?
l’emploi public…) ont immanquablement participé à la de certains quartiers, développement de banlieues 3. Los Angeles Police Department.
redéfinition de la carte de la ville ; elles ont « froissé et vétustes à l’architecture jetable, de banlieues dorées… 4. Pedways est la contraction de pedestrian ways, c’est-à-dire, voies
restructuré l’espace urbain » (l’auteur parle de le contrôle social se confond à l’expérience urbaine. Et piétonnes.
« tectonique des émeutes »), elles ont provoqué une en même temps que la ville se délite, elle se déréalise. 5. « Ainsi que l’ont observé des militants des droits civiques, la
obsession inconsidérée pour la stratégie de district de contrôle social pénalise des individus pour leur
sécurité personnelle et une volonté simple appartenance à un groupe et ce, même en l’absence d’actes
affirmée d’isolation sociale. Alors Los criminels. »
Angeles a chuté.
Les exemples ne manquent pas,
l’argumentaire de Mike Davis s’appuie
sur des événements factuels, des
études de terrains… Ainsi la fuite en
1965 des propriétaires fonciers du

Sarah Morris ou une iconographie du réel Sarah Morris : Midtown, 1998
Vidéo – coll. Frac Bourgogne

New York, Las Vegas et plus récemment Los Angeles sont au cœur des investigations de d’information pré-digérée » 3 que Sarah Morris tente d’explorer ici. L’architecture de
Sarah Morris. À travers ces mégapoles américaines, elle poursuit ses observations sur le Manhattan représente un autre acteur de cette fiction. Animées, ces différentes surfaces
monde urbain et sa culture. Ces Character Sketches l’ont fait connaître dans les années 90. colorées deviennent une composition de lignes et de formes épurées, perturbées parfois par
L’artiste s’inspire de faits divers parus dans la presse (New York Times, New York Post…). le reflet d’une autre construction ou d’un autre élément de ce paysage urbain (ciel, foule,
Curieuse de l’impact des signes médiatiques, elle soustrait un mot récurrent de l’actualité et panneau publicitaire...). La transparence des vitres amène peu à peu le regard de la caméra
le reproduit en gros caractères sur un fond monochrome. Détourné et isolé de son contexte, vers l’intérieur des bâtiments. Différents mouvements de circulation d’hommes et de femmes
celui-ci s’intègre au champ pictural. Son impact optique interpelle. Information et forme se inscrits dans un espace intérieur et extérieur, se croisent à l’image. L’interférence de ces
retrouvent associées dans un pictogramme qui « …s’adapte et change selon le point de vue déplacements anonymes, génère un rythme et un jeu de lignes mobiles. Ces tentatives
de celui qui regarde… », devenant un « …texte ouvert qu’on peut investir à volonté. » 1 d’abstraction du réel dénudent la modernité urbaine new-yorkaise. Au cœur de sa structure,
À partir de 1997 dans Midtown, Sarah Morris va s’intéresser à l’image en mouvement. Elle Sarah Morris recadre et compile une vision fragmentée de cet univers. Elle tente de
réalise un court métrage, tourné en 16 mm. Sans fil narratif, différents points de vue de New disséquer l’identité fondatrice de cette ville tout en interrogeant la relation des individus avec
York, illustrés par une musique rythmée et un montage dynamique, se succèdent à l’écran. l’environnement architectural.
Pour elle, « Le film se base sur [s]a manière de vivre au jour le jour, en circulant à travers L’année suivante, Sarah Morris poursuit son exploration et dissection des grandes
des situations et en construisant un chemin à partir de fragments visuels… Il ne s’agit pas métropoles américaines. Dans AM/PM, elle prend pour décor Las Vegas et s’intéresse plus
d’une description de la surface des choses, mais d’une mise à nue de leur structure. » 2 particulièrement au rapport visuel entre la publicité et l’architecture. Hôtel, fast-food,
Nocturnes, les premières images présentent des formes abstraites géométriques, sortes de clignotement des panneaux publicitaires sont les protagonistes de cet univers du rêve factice,
vitraux, constitués par les grilles lumineuses et colorées des façades vitrifiées des immeubles du jeu et du plaisir. Puis se sera Los Angeles (Trailer), 2004, filmé en 35 mm, comme une
new-yorkais. La perspective en diagonale, sur ces gratte-ciels, présente également dans ces sorte de clip avec une bande sonore composée par Liam Gillick, qui présente les coulisses
tableaux, nous rappelle le générique de Saul Bass de North by Northwest d’A. Hitchcock. d’Hollywood et de ses stars.
Dans Midtown, ces visions partielles d’édifices entrecoupent différentes séquences où se À travers la caméra, Sarah Morris explore les fondements de la forme identitaire de ces cités
succèdent, à l’écran, des plans larges sur la circulation de la foule dans la rue, des américaines. Par son expérience sensible et contemporaine de ces différents espaces
captations en plans serrés d’un individu : un homme assis à côté d’une fontaine, un autre urbains, elle réussit à capter les signes qui émanent de leurs architectures, de leurs
traversant la 43 ème Rue avec un porte-documents en fumant une cigarette ou encore une populations et de leurs archétypes populaires. La réception de ces informations et de ces
femme en attente sur le trottoir. Le cadrage serré sur ses jambes chaussées de hauts talons impressions visuelles lui permet de produire et de constituer une iconographie propre à
nous évoque la série High Heels de 1996. Cette surcharge d’instants morcelés de la vie chacune d’entre elle.
quotidienne, fractions d’impressions et de comportements humains de cette réalité new-
yorkaise, s’associe dans l’imaginaire du spectateur à un « langage iconique » connu et Marlène Gossmann
diffusé par le cinéma et la télévision. Conditionné dans sa relation référencée à la réalité
par la communication visuelle, celui-ci a déjà reçu et fait l’expérience fictive de New York. 1. Propos de Sarah Morris, Michael Bracewell, Sarah Morris : Modern Worlds, Dijon, le Consortium, 1999, n.p.
Il sait déchiffrer, utiliser et comment se comporter dans cette ville. « C’est cette notion 2. Propos de Sarah Morris, ibidem.
3. Propos de Sarah Morris, ibidem.

3

© jordi colomer - édition interface, dijon - 2006



Jordi Colomer : Anarchitekton (Barcelone, Brasilia, Bucarest, Osaka), 2002-2004
Installation vidéos - coll. Frac Bourgogne

Jordi Colomer : Simo et autres histoires

En 1967, le cinéaste Jacques Tati, menine contemporaine perdue dans l’enceinte d’un palais Stieglitz entre fascination et effroi mais Jordi
observateur pointu de son temps dépeignait aseptisé, conçu sur des dimensions qui ne sont pas les Colomer l’aborde sous un angle de vue
dans un de ses derniers films, Play Time, la siennes, elle est désespérément en quête de goût et de original. L’expérience de la ville est vécue
ville, ses façades d’immeubles en grille et sa saveur. Jordi Colomer, dans ce portrait sensible de Simo, comme une lutte entre le corps et l’espace.
vie en angle droit : costards obscurs, pointe à nouveau l’exclusion violente de l’altérité issue de la L’artiste prête à ses personnages le visage de
intérieurs aseptisés interchangeables, volonté même de l’architecture moderne d’uniformiser héros contemporains qu’il soumet à des
parquets lisses et vitres transparentes, l’espace pour réduire les inégalités entre les hommes. La épreuves semblables à celles imposées à
affiches touristiques arborant un décor vidéo parle de l’espace urbain mais comme à son Sisyphe et aux Danaïdes. Absurdité et non-
planétaire identique, celui de la modernité… accoutumée elle se range du côté de l’humain et de l’intime, sens de la vie, le thème est éternel mais
Le film totalement incompris à sa sortie mettant en scène une confrontation déchirante du collectif et redouble de sens dans une société qui
détient en lui les germes d’un débat socio- de l’individuel, du social et de l’intimiste. Baudelaire affiche la consommation sans fin comme
politique très actuel et qui imprègne évoquait la « désespérante fragilité de la ville », Jordi modèle de vie. Le mythe paraît revivre dans
nettement les sujets de l’art contemporain. En Colomer mesure ici la fragile résistance de l’humain et du l’univers de Jordi Colomer, il le réactualise
effet, car si la révolte de Jacques Tati n’a pas sensible dans l’espace urbain que Simo se voit contrainte de en y insérant des images communes
encore de nom dans les années 60, celle de fuir pour survivre, sautant violemment par la fenêtre . Le duel empruntées au cinéma, aux séries télévisées.
Jordi Colomer, artiste catalan né en 1962, se révèle en effet dangereux et cruel, tel que le montre Les Jordi Colomer semble nous livrer de
sculpteur et récemment vidéaste s’exprime dans Villes. Dans cette œuvre, l’artiste expose deux scènes nouveaux contes, de nouvelles fables comme
un titre aux couleurs de la vague « anti- semblables présentées en face à face où sur chacune d’elle une réintroduction de contenu et de poésie
mondialisation » : Anarchitekton ! … une jeune femme parcourt péniblement la façade extérieure dans un monde dénué de sens. Simo ne
En 2002, Jordi Colomer, filme le combat d’un immeuble. Tandis que l’une parvient à se hisser jusqu’au ressemble-t-elle pas étrangement à Boucle
d’un homme qui semble le dernier rescapé balcon, l’autre lâche prise et s’effondre au sol parmi les cris d’Or ? De même dans Le Dortoir, Jordi
d’une manifestation. Parcourant en solitaire de la circulation. La quête effrénée d’un intérieur préservé de Colomer filme le lendemain d’une grande
Barcelone, Bucarest, Brazil, Osaka, il l’espace collectif fait emprunter aux personnages de Jordi fête à l’intérieur d’une tour de banlieue, le
brandit une maquette bricolée en carton Colomer des postures bien peu commodes. programme s’annonce dans la veine du
reprenant grossièrement l’esthétique des édifices devant La vision critique de la ville moderne par les artistes n’est documentaire social, or, il n’en est rien. Partout ses
lesquels il passe. Curieux trophée qui n’a rien d’une flamme pas un thème nouveau certes, songeons à la ville personnages, ses décors et sa lumière ont une teinte
olympique ni d’un slogan véhément de propagande. tentaculaire de Fritz Lang, aux vues documentaires de fantastique. La caméra de Jordi Colomer nous fait visiter
L’action de cet homme semble plutôt dérisoire ; le rythme chacune des pièces, dans un mouvement rapide mais qui
saccadé et le manque de fluidité des mouvements nous bientôt nous fait prendre conscience que les objets amassés
donnent à voir un personnage comme issu des premières sur le sol, disques et mégots, sont faux faisant partie d’un
expérimentations cinématographiques, l’absence de son décor grossièrement dissimulé. Les personnages assoupis sur
contribue à cet effet de film burlesque muet. Jordi Colomer des montagnes de matelas font songer à l’histoire de la
qui a suivi au cours de sa formation en architecture un princesse au petit pois. L’œuvre de Jordi Colomer a
enseignement encore bercé par les illusions humanistes quelques sonorités baroques, elle nous dévoile un véritable
modernistes, interroge dans ses vidéos le rapport de théâtre de l’existence humaine, une sorte de vanité
l’homme à son environnement. Le protagoniste contemporaine. L’artiste nous fait participer à la scène en
d’Anarchitekton ressemble étrangement aux quelques prolongeant le décor factice de la vidéo dans l’espace de
individus rebelles qui ponctuent les films de Tati. Loin des contemplation du spectateur. Jordi Colomer fait éclater à
militants acharnés, les résistants de Tati le sont sans notre vue notre condition, il nous révèle le vernis de notre
prétention, sans discours, presque malgré eux ; rebelles quotidien et la face cartonnée de nos vies. Le trompe-l’œil
parce qu’inadaptés, trop grands trop petits, non conformes ne cherche définitivement plus à tromper, la farce et le
aux mesures de l’esthétique design qui régissent masque de la comédie humaine sont mis à bas. A nous de
l’environnement moderne. Simo, héroïne d’une des chercher une fin à cette tragique histoire….
premières vidéos de Colomer pourrait appartenir à cette
famille de personnages. Dans un de ces immeubles où les Géraldine Griffon
appartements sont conçus tous sur le même modèle, vit
Simo, une naine, qui se réfugie dans une consommation Bibliographie :
malade et absurde ; une collection démesurée de boîtes à - Antich, Xavier, Colomer, Jordi. Espais obrats. Barcelone: Diputacio de
chaussures et un appétit vorace pour la confiture qu’elle Barcelone, 2003.
engloutit par poignées. Dans une société qui a la manie des - Alvarez Reyez, Juan Antonio, Colomer, Jordi. Ciudades sin nombre.
canons et des systèmes de proportions, Simo incarne une Madrid: Comunidad de Madrid, 1998.
- Jordi Colomer: algunas estrellas. Nice: Villa Arson, 2003.
- Chalumeau, Jean-Luc. La ville dans l’art. Ed. du Cercle d’Art, 2000.

Phi Lee Lam à la recherche d’une vision authentique

À l’ère de l’appréhension des paysages et de notre environnement immédiat par le biais Anguelova). L’apparition fugitive de ceux qui l’accompagnent, le pied d’un danseur, la
de technologies privilégiant la vitesse (TGV, avion, tramway…) et les informations en présence de deux corps enlacés, donnent alors l’échelle de l’espace environnant.
temps réel (système GPS pour guider les automobiles…), la cinéaste Phi Lee Lam cherche Certains films des années 2002-2004, notamment Dunes (2004, super 8) nous livrent
à établir un rapport à son environnement immédiat (urbain ou naturel) par le biais de son ainsi la trace de promenades qui sont avant tout des flâneries intérieures, dans la mesure
propre corps : par des gestes simples liés à la manipulation de la caméra en fonction des où le processus mis en place par l’artiste lorsqu’elle filme s’élabore par le biais d’une
mouvements de son corps dans l’espace environnant, en fonction de ses émotions, de ses expérience physique et mentale fondée sur l’improvisation et faisant intervenir les notions
intuitions et même dans une certaine mesure de l’inconscient. de prise en compte du hasard, de l’accident, de la spontanéité, de l’intuition et de
À la recherche d’un « mouvement authentique, d’une vision authentique 1 », Phi Lee Lam l’intervention volontaire.
tente d’être au plus proche de la relation de son corps et de son esprit avec l’espace En cela la démarche de Phi Lee Lam se distingue de la figure du piéton ou du nomade
environnant à l’instant même où elle est en train de filmer. urbain telle que l’a définie Thierry Davila pour les réalisations d’artistes contemporains
Cette pratique expérimentale de l’acte de filmer est comparable à une forme comme Francis Alys, Gabriel Orozco ou Stalker (6), pour se rapprocher de celle du
d’improvisation 2. Les films conçus par Phi Lee Lam à l’aide de sa caméra portative super promeneur méditatif, telle que peut l’incarner Richard Long 7.
8 sont à la fois la trace et l’incarnation du mouvement. Ce sont avant tout des moments A l’ère des écrans géants et des projections spectaculaires, Phi Lee Lam privilégie les lieux
vécus, fruits d’une improvisation lors de promenades avec ses amis, d’expérience privés, les audiences restreintes et les temps de projection courts pour créer une ambiance
partagée au cœur de la ville. intimiste, la possibilité d’un échange direct entre elle et le public. Placée au cœur des
La marche se trouve alors être souvent un moyen de se confronter au monde, à des spectateurs avec son appareil de projection portatif, l’artiste réintroduit la dimension
perceptions changeantes de l’espace, un prétexte pour expérimenter d’autres façons d’être performative de son travail cinématographique, en intervenant sur la vitesse de projection,
conscient de l’environnement immédiat. sur la taille de l’image, bougeant elle-même dans l’espace, proposant ainsi à chaque
Ceci n’est pas sans évoquer la figure du flâneur, qui apparaît à la fin du 19 ème siècle avec spectateur de se mouvoir à son tour… L’image projetée se déploie et se déplace au sein
l’évolution urbaine des villes pour disparaître dans les années 1930. Le flâneur, évoqué de l’espace d’exposition, jouant avec ses dimensions, passant du plafond, aux murs, au
par Walter Benjamin à propos de Baudelaire 3, ou incarné par Robert Walser 4, conçoit la sol, se reflétant éventuellement sur le corps du spectateur, évacuant l’orientation
ville comme un paysage, un espace à découvrir, à parcourir au quotidien : « Emancipé traditionnellement frontale et plane d’une projection cinématographique.
de tout attachement à un quartier particulier, faubourg ou ancien village récemment La question de la relation du corps à l’espace est ainsi au cœur même du processus de
annexé, celui-ci jouit de la liberté que procurent l’anonymat des foules et l’immensité de la projection, révélant le dispositif au spectateur, incitant chacun à adopter une attitude
ville. Le flâneur s’attarde aux devantures, se réjouit de petits riens, détourne ses pas vers (corporelle) active. Chaque nouvelle projection est ainsi un moment unique à vivre, à
ce qui au loin attire son attention. Sa marche s’assimile à une sorte de broderie, partager. Cette démarche s’inscrit dans la lignée de l’expanded cinema des années 60-70,
d’improvisation musicale, à une création permanente dont la production serait un flot un phénomène hétérogène qui peut être caractérisé brièvement par la tentative d’une
d’images, d’impressions, de sentiments. » 5 extension des limites spatiales de l’espace de projection (expanded screen) ainsi qu’une
Les déambulations de Phi Lee Lam évoquent quelque peu cette figure du flâneur héritée du critique de l’occularcentrism (cette primauté accordée au visuel) 8.
19 ème siècle et prennent pour cadre des espaces urbains souvent inutilisés, des espaces Chaque film est montré tel quel et ne fait pas l’objet d’un montage après coup. Le
provisoirement laissés pour compte, en retrait des activités urbaines : jardins publics ou montage intervient seulement lors de l’agencement de chaque film l’un après l’autre en
lieux désaffectés. Ses promenades se prolongent par ailleurs hors de la ville : en forêt, en vue d’une projection publique. Bien que n’ayant pas pour objet de représenter une fiction,
bord de mer, sur les routes abandonnées de la province de Brescia en Italie (« strade chaque film peut en soi constituer l’amorce d’une narration, une narration discontinue,
autonome » projet en cours mené par la commissaire d’exposition indépendante Katia fragmentaire, fondée sur la rupture et la juxtaposition d’évènements divers. Par la

6

Francis Alÿs : Moving gesture

Des marches de Richard Long aux ballades d’André Cadere, en passant par les possibilité d’une communauté à venir. Selon lui, la seule manière de recouvrer

dérives de Francis Alÿs, la performance a démontré depuis plus de vingt ans qu’elle l’expérience serait de faire surgir un moyen qui n’a d’autres finalités que lui-même :

pouvait s’extraire de sa pure endurance ou de l’épreuve corporelle et prendre les de réinventer le geste.

chemins de micro évènements où la marche se fait figure et les attitudes deviennent « Ce qui caractérise le geste, c’est qu’il ne soit plus question en lui ni de produire ni

formes. À l’instar de ce qu’Allan Kaprow, dès 1958, appelait de ses vœux, cette d’agir mais d’assumer et de supporter. » 2 Voilà ce que Francis Alÿs créé par cette

évolution ouvre vers un art mettant en avant « le sens de l’ordinaire » au creux de
l’expérience vécue et de la quotidienneté.
Comme bon nombre de pratiques d’interventions contemporaines, les déplacements
de Francis Alÿs s’ancrent au creux d’un geste qui fait de la marche le théâtre d’une
histoire en cours.
Parmi les déplacements parfois infimes de cet artiste belge vivant à Mexico, nous
reviendrons sur deux d’entre eux, particulièrement symptomatiques de l’économie mise
en place dans son travail : « Paradox of praxis » réalisé à Mexico en 1997 et plus
récemment « When faith moves mountains » réalisé à Lima en 2002. Paradox of Praxis
(1997) est en effet caractéristique des coulées allégoriques initiées par l’artiste.

MovingLors d’une chaude journée à Mexico City en 1997, un piéton - Francis Alÿs- entreprend
marche, la réévaluation de la causalité processus / objet. Il redonne un sens
nouveau au processus. Devenu potentialité constituante, il n’est plus astreint à
produire un objet final (l’œuvre) mais à modeler du temps et de l’espace et redonner
de l’expérience.
Au fil de ses marches aux quatre coins du monde, le geste de Francis Alÿs est
devenu plus collectif, sa marche a forci sous le poids de la multitude. S’exilant un
moment de Mexico sa ville paradigmatique, l’artiste arrive en 2002 sur les terres
du Pérou et découvre les dunes de sables de Ventanilla non loin de Lima. Devant la
précarité économique du pays à l’époque, l’artiste a voulu « proposer un « beau
geste », une réponse « épique », à la fois futile et héroïque, absurde et urgente. » 3
qu’il apporta le 11 Avril 2002 sous le nom de When faith moves mountains. 4

de pousser un énorme bloc de glace le long d’un parcours dans la ville. À la faveur du Alÿs invita alors cinq cents volontaires à venir, munis chacun d’une pelle, sur l’une

frottement au sol combiné à la chaleur ambiante de la ville, cette marche longue de des plus hautes dunes de sable de Ventanilla, pour former une ligne humaine longue

presque 12 h conduira progressivement à la disparition de la glace. En fin de journée, de près de 1600 m couronnant le flan de la montagne. Ce « peigne humain » eut

ce parcours s’achèvera par une flaque d’eau abandonnée dans les ruelles de la ville. pour mission unique de pousser le sable lors d’une ascension collective. Au terme

« Sometimes making something leads to nothing » 1 Telle est la légende qui nous est de cette marche fédératrice, ces hommes et ces femmes ont ainsi déplacé de 4

laissée par la vidéo de cette marche laborieuse. Tel est le paradoxe de cette pratique inchs (soit 10 cm) la montagne de sa position d’origine.

qui ne mène à rien, qui ne donne naissance à aucun objet. Si le déplacement se révèle être infinitésimal pour la montagne 5, le geste collectif

Mais une fois délesté d’une logique matérialiste, ce parcours nous conduit alors sur dont il découle est en revanche chargé d’une grande puissance symbolique.

d’autres terres, là où le geste entrepris par la marche laisse derrière lui un impact « L’action est réalisée avec la coordination des gens entre eux. La relation entre les

symbolique fort. Car si cette longue marche paraît n’avoir aucune finalité en soi, individus qui se tiennent proches les uns des autres établit et maintient une ligne. Cette

c’est précisément pour nous dévoiler le geste comme un moyen sans fin. ligne est une des formes fondamentales de représentation de la communauté.» 6

Ce geste de la marche soutiendrait alors l’idée d’un moyen libéré de toute relation à Dans cette œuvre (tout comme dans la précédente), le geste initié par Francis Alÿs

une fin, d’une médialité pure qui n’est plus astreinte ni à être à soi-même sa propre n’est pas un acte statique ou une action auto-référente, mais un geste en « route »

fin (comme l’agir) ni à être au service d’autre chose qu’elle-même (comme l’est le à même de produire une expérience. Elle s’engendre dans l’effectivité du geste, se

faire). Ce geste s’exposerait comme tel, entendu sous l’acception de Giorgio forme dans une correspondance simultanée. La marche n’est que la forme de ce

Agamben qui réquisitionne cette notion de geste, seul à même de reconstruire la geste mouvant qui impose sa force par l’irrationnel et l’absurde qu’il porte. Il troue

à mesure qu’il dérive, grave les esprits à mesure qu’il se répand dans le temps de

Phi Lee Lam : extrait du film Dunes, 2004, super8 l’événement et l’espace des dunes ou de la ville. L’œuvre a lieu le long de cette

montagne de sable engendrée par ces cinq cents volontaires unis, née le long de

ces rues marquées par ce bloc de glace. Les images qu’il en reste 7 deviennent alors

la trace de la mouvance du geste, résultat de cette traînée qui perdure comme

autant d’histoire en marche aux multiples implications.

« Où est le travail artistique ? voilà une question aux multiples réponses 8 » remarque

Susan Buck Moss face à ces événements et à la pléthore des propositions de

l’artiste. Mais ce dernier insiste : « Le film ne prétend pas remplacer l’événement

lui-même, il suggère simplement à travers les images en mouvement l’essence du

projet, garde l’esprit de ce jour. C’est un produit au même titre qu’un autre (carte

postale, script, livres, images…). 9 »

En écho à cette phrase du Christ qui veut que la foi puisse (littéralement) déplacer des

montagnes, Alÿs la transforme, sur les terres d’un Pérou malade, en allégorie sociale,

en effort collectif 10 fabuleux, portant avec lui l’espoir d’un nouvel ordre social.

Lorsque Cuauhtémoc Medina souligne à Lima : « La foi est un moyen par lequel

chacun renonce au présent pour croire à la promesse d’un futur abstrait » 11 n’est-

ce pas là toute la force du travail d’Alÿs, cette possibilité de croire en un futur

abstrait qu’il transforme en un mythe urbain.

De ce geste persiste alors l’histoire de ces femmes et ces hommes déplaçant une

montagne au Pérou, dont il incombe à présent de transmettre telle, une fable

contemporaine. À présent, dira l’un des participants au lendemain de cette marche

extraordinaire, nous allons peindre le ciel, boire l’Atlantique et faire fondre l’Antarctique.

Mélanie Perrier

répétition d’un même geste, l’accélération ou le ralenti d’une séquence, un gros plan 1. Parfois faire quelque chose ne mène à rien.
inattendu ou un arrêt prolongé sur un détail, Phi Lee Lam provoque l’imaginaire sans 2. Giorgio Agamben, Moyens sans fin, Notes sur la politique. Ed. Rivages, Paris, 1995, p. 68
jamais imposer un sens précis, laissant la subjectivité de chaque spectateur s’emparer du 3. Francis Alÿs, Thousands words, Francis Alÿs talks about When Faith Moves Mountains, Art Forum, n°40,
film et construire sa propre histoire. La dimension poétique de son travail prend ainsi sa Summer 2002, p. 147
source dans les libres associations d’images et de sens, les alternances de séquences 4. Mise en place en collaboration avec Rafael Ortega et Cuauhtémoc Medina
abstraites et figuratives, mais se trouve relayée aussi par la possible disparition des films. 5. Quoiqu’il faudrait attendre plusieurs milliers années, pour que le vent conduise à pareil résultat.
Chaque bobine n’existe qu’en un seul exemplaire. Chaque film porte ainsi la trace des 6. Francis Alÿs, Shoulder to shoulder, a conversation between Geraldo Mosquera, Francis Alÿs, Rafael
détériorations occasionnées lors des projections précédentes, évoquant ainsi un des Ortega and Cuauhtemoc Medina, In When Faith moves mountains, Turner Edicion, Madrid, 2005, p. 102
aspects de l’œuvre de Nam June Paik, Zen for film (1964). Le caractère fragile et délicat 7. Pour « When faith moves mountains » subsiste une installation vidéo composée de trois écrans vidéos,
des manipulations de la pellicule ressenti par le public lors des projections participe du une bande sonore et une table qui documente selon un point de vue singulier la performance originale.
désir de faire partager cette prise de risque, cette possibilité d’une perte. Chaque nouvelle L’installation nous propose l’action répétée au fil des différents angles des caméras sur fond sonore de ces
projection peut alors être perçue comme un écho discret et adouci des préoccupations pelles poussant le sol, et de ces volontaires poussant le sable.
d’Annabel Nicolson dont les performances cinématographiques comme Reel time (1973) 8. Susan Buck-Moss « Lines of Entry » in When Faith moves mountains, Turner Edicion, Madrid, 2005, p. 137
mettaient en lumière la fragilité du médium, aboutissant même à sa destruction réelle. 9. Francis Alÿs, Answer to « Lines of Entry » of Susan Buck-Moss, in When Faith moves mountains, Turner
La démarche de Phi Lee Lam, visant à dynamiser l’acte même de filmer par rapport à Edicion, Madrid, 2005, p. 143
l’espace environnant et à spatialiser le temps de la projection, renouvelle ainsi la pratique 10. Nous pourrions à ce titre la rapprocher de l’intervention de Santiago Sierra 3000 trous de 180 x 70
du film et le mode de la projection au profit d’un cinéma poétique, authentique. x 70 cm de 2002. Sur un terrain situé sur la colline d’où l’on peut voir la mer, l’océan Atlantique, le détroit
de Gibraltar et la côte africaine, l’artiste a engagé et rémunéré environ vingt immigrés africains pour creuser
des trous aux dimensions d’un cercueil. L’action a duré plusieurs jours.
11. Cuauhtémoc Medina, in Thousand Words : Francis Alÿs talks about When Faith moves Mountains, Art
Forum, Summer 2002, p. 152

Francis Alÿs : When faith moves mountains, 11/04/02, Lima (Perou) - En collaboration avec Cuauhtémoc Medina et Rafael Ortega

Albane Duvillier

Phi Lee Lam, cinéaste indépendante basée à New York, est née en 1978 à Singapour. C’est dans ce pays où la
censure règne encore qu’elle a suivi des études techniques de cinéma avant de les poursuivre aux Etats-Unis au
Purchase College dans l’état de New York, dont elle fut diplômée en 2004.
1. Entretien avec Phi Lee Lam, avril 2005
2. dans la lignée des recherches cinématographiques expérimentales américaines des années 50 (Maya Deren),
des recherches de la scène new-yorkaise des années 60, du Judson Dance Theater (Yvonne Rainer, Robert Morris,
ou encore Trisha Brown et Rauschenberg) et du groupe Anarchitecture mené par Matta-Clark dès 1973.
3. Walter Benjamin, Charles Baudelaire. Un poète lyrique à l’apogée du capitalisme, Payot, Paris, 1979.
Walter Benjamin, Paris, capitale du 19 ème siècle. Le livre des passages, Cerf, Paris, 1989.
Aragon, Aurélien
4. Robert Walser, la promenade, Gallimard, Paris, 2001.
5. Marc Desportes, paysages en mouvement, Gallimard, 2005.
6. Thierry Davila, Marcher, créer. Déplacements, flâneries, dérives dans l’art du 20ème siècle, éditions du Regard,
Paris, 2002.
7. Graham Beal, « Richard Long. The simplicity of walking, the simplicity of stones. » in cat. A quiet revolution,
Bristish sculpture since 1965, Thames & Hudson, New York, 1987.
8. Liz Kotz, « discipling expanded cinema », in X-screen, film installations and actions in the 1960s and 1970s,
Museum Moderner Kunst Siftung Ludwig Wien, Walter König, Cologne, 2004.

7

albi HORSD’ŒUVRE n° 18 CAUE de Côte d’Or mâcon nancy Abbaye Notre-Dame de Quincy
édité par l’association (org. Frac Bourgogne) (org. Centre d’art de l’Yonne)
Cimaise & Portique INTERFACE 24 rue de la Préfecture - 21000 Dijon Musée des Ursulines Galerie Art Attitude Hervé Bize Abbaye de Quincy
Aux Moulins Albigeois 12 rue Chancelier de l’Hospital Tél. 03 80 30 02 38 20 Rue des Ursulines 17-19 Rue Gambetta 89430 Commissey
41 rue Porta - 81000 Albi F - 21000 Dijon ouvert du lun. au ven. de 9 h à 12 h 71000 Mâcon 54000 Nancy tél. 03 86 72 85 31
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ouvert tous les jours de 13 h à 19 h [email protected] ® « Œuvres de la collection » ouvert de 10 à 12 h et de 14 h à 18 h de 14 h à 18 h et sur rdv de 10 à 12 h et de 14 h à 19 h
sauf mar.et jours fériés www.interface-art.com E. Bossut, J. Dupuy, G. Friedmann, sauf lun., dim. matin tél. 03 83 30 17 31 ® « Irène et autres contes »
® « Anatopies » B. Broisat, Man Ray : 03/05 - 25/08/06 ® « La collection des Ronot, ® « Carottage » Michel Dector Denis Pondruel : jusqu’au 18/10/06
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ouvert de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 h Mélanie Perrier, Michel Rose (org. Frac Pays de la Loire) Alphonse de Lamartine » : tél. 03 25 73 28 27
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A. Dobler, R. Ganahl, ouvert de 14 h à 19 h du mer. au dim. (org. Frac pays de la Loire) Le Pradel le dim. de 11 h à 18 h l'Office - ensA de Dijon)
D. Gonzalez-Forester, P. Joseph, ® « June » : Ann Veronica Janssens : Villa Lemot 07170 Mirabel ® Monica Studer & Christoph Van ® Valère Costes (Cat. & DVD (coéd.
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® « Presque réel…» S. Absuwan, Centre de Culture du pays N. Hirakawa, U. Koch, C. Lévêque, B. Bertrant Lavier : toute l’année ensA de Dijon)
T. Mahawat, K. Na Chiengmai, Nivernais Morvan Plantive, R. Signer : 23/05 - 29/10/06 Le 10neuf ® Céline Emorine (coéd. atheneum
M. Shaoanasai, A. Weerasethakul, (org parc Saint Léger) 19 avenue des alliés tanlay centre culturel de l'université de
E. Florenty : 23/09 - 31/10/06 Abbaye de Corbigny joigny 25200 Montbéliard bourgogne, l'Office - ensA de Dijon)
rue de l’abbaye tel. 03 81 94 43 58 Centre d’art de l’Yonne ® Luc Adami DVD (Coéd. Ville de
caen 58800 Corbigny Atelier Cantoisel ouvert du mar. au sam. de 10 h à 12 h, les communs du Chateau de Tanlay Dijon, l'Office - ensA de Dijon
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sauf les jours fériés de 14 h 30 à 18 h 30 27/08/06 ® « La peinture, en principe » l'Office - ensA de Dijon)
® « Une proposition de Mathieu delme ® « Le poids des choses » J. Hilliard, ® « Un peu plus que le monde » J. Ber, D. Gauthier, J-L. Gerbaud, ® Anders Werdelin (coéd.Centre
Mercier » J-L Moulène, M. Adams, V. Joumard, B. Lavier, M. Mercier, S. J-L. Bari, D. Béguet, L. Bourgeat, M. S. Hantai, P. Pantin, B. Piffaretti, commercial de la Toison d'Or, l'Office - ensA
Diller + Scofidio, R. Opalka, Centre d’art contemporain Stokvis, L. Weiner : jusqu’au 02/10/06 Guillet, J. Prévieux : C. Teisseire, C. Viallat : de Dijon)
B. Owens, A. Muntadas, Synagogue de Delme 09/09 - 12/11/06 jusqu’au 29/09/06 ® Nathalie Ruiz ( l'Office - ensA de Dijon)
H-P. Feldmann/V. Joumard/ 33, rue Poincaré limoges ® « Une partie de la campagne » ® Takemura Kentaro (coéd.
B. Peinado, B. Piffaretti, 57590 Delme Musée Beurnier-Rossel Philippe Bazin : jusqu’au 29/09/06 atheneum, l'Office - ensA de Dijon)
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ouvert de 9 h à 20 h du lun.
au ven. et le samedi de 9h à 12h.
® « Les locutions ordinaires »
David Poullard, Guillaume Rannou,
Florence Inoué : 04/10 - 22/12/2006


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