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« C’est ce que j’appelle la conception du pur « visionnaire », celui qui a un « œil », ou une « vision théorique » particulièrement remarquable. Mon œil ! Il s’agit là de la résurgence de l’amateur éclairé, du génial mécène, du non-artiste particulièrement engagé et proche des artistes, en fait le pendant direct de l’artiste « inspiré ». Emmanuel Latreil

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Published by interface.art, 2016-06-12 12:00:33

HDO_7

« C’est ce que j’appelle la conception du pur « visionnaire », celui qui a un « œil », ou une « vision théorique » particulièrement remarquable. Mon œil ! Il s’agit là de la résurgence de l’amateur éclairé, du génial mécène, du non-artiste particulièrement engagé et proche des artistes, en fait le pendant direct de l’artiste « inspiré ». Emmanuel Latreil

Keywords: Ernest T, Sarks, Ipso/facto, Emmanuel Latreille, Laurence Cyrot, Luc Adami, Guillaume Mansart, Lionel Bovier, économie du collectif, le comissaire et l'artiste, Jérome Giller, Marie France Vo, Sandra Flouriot, Antoine Sansverd, "Ma'lesh"

HORSD’OEUVREle journal de l’art contemporain en bourgogne, été 2000
o
°7 Gardes à vue au

n Commissariat

n 7° Gardes à vue au
Commissariat

Nous étions plusieurs à
vouloir inventer une autre
façon de regarder l’art, à
mettre en avant les notions
d’interactivité, de temps
réel, de mixage, de
transdisciplinarité.

o

Cette attitude fait-elle du com- Elle implique que le commissaire
missaire un artiste ? dise «je» et revendique ses
choix. Les œuvres y incitent.
A quoi serverait un commis-
saire qui ne serait pas un
artiste ?

A quoi serverait un commis-
saire qui ne serait pas un
artiste ?

Commissaire d’exposition. Sous ce mot à la Pouvoir de l’art ; Pouvoir sur l’art : la fonc-
connotation autoritaire se cache une personne tion de commissaire d’exposition, en ces

chargée d’«assembler, d’entreprendre, de temps de démocratie culturelle,
risquer» une exposition, c’est-à-dire de représente un véritable enjeu politique.

«présenter, mettre en vue, dire, expliquer» l’art, «L’art, ce sont les artistes.»
l’étymologie du terme commissaire d’exposition En est-on encore sûr aujourd’hui ?

suggérant celle du Pouvoir.

Dans une actualité brûlante ... nous avons voulu faire le point au
(la nomination de Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans sein de la rédaction, sur le rôle de cette
au Palais de la jeune création à Paris suscite le débat figure naturelle (?) du milieu artistique,
sur leur rôle puisqu’ils devraient être assistés par une en donnant la parole à certains de ces
commission d’artistes pour l’acquisition des œuvres ;
l’élection de Jacques Rigaud, PDG de RTL, à la prési- commissaires, sans polémiques, afin
dence du Frac Aquitaine relance, quant à elle, le débat qu’ils nous livrent leur méthode.

sur la gestion de l’art en région),...

Commissaire au Frac L.A. / L.C. : Néanmoins, le rôle des institutions
n’est-il pas trop dogmatique ?
entretien avec Emmanuel Latreille, E.L. : Les institutions ne doivent pas être monolithiques.
directeur du Frac Bourgogne Ce qui m’intéresse dans le fait d’être responsable
d’une institution c’est de pouvoir poser des questions
Après des études de philosophie à Lyon, Emmanuel Latreille est nommé à par rapport aux idées dominantes, énoncées parfois
la direction du Frac Auvergne, de 1990 à 1995. Il est directeur du Frac par une autre institution. Je crois qu’il faut que les
Bourgogne depuis novembre 1995. institutions se répondent, qu’il y ait des échanges, des
dialogues qui amènent les amateurs, les spectateurs, à
Luc Adami / Laurence Cyrot : Dans un Frac, qui s’occupe du programme des s’interroger aussi. Je ne sais pas ce que cela veut
expositions ? exactement dire de « contester » les institutions, mais je voudrais essayer de toujours
Emmanuel Latreille : Si les responsabilités sont partagées par les membres du Comité questionner les systèmes de valeurs, au moins ceux que je suis capable d’identifier, et qui
Technique pour le choix des œuvres proposées à l’acquisition, le directeur d’un Frac a une fondent des manières de voir et de pouvoir, y compris bien sûr dans l’institution dont j’ai la
grande indépendance dans la diffusion des œuvres. C’est lui qui est responsable du charge, ou une partie de la charge. Toute exposition crée un système de valeurs, de pensée.
programme des expositions. On peut dire que le directeur est seul maître à bord en ce qui Une œuvre d’art ne peut pas être seulement considérée en terme de goût mais doit
concerne les expositions dans le lieu principal du Frac et dans l’ensemble de la région. La également être comprise dans ses enjeux intellectuels et les représentations symboliques
programmation, telle que je la conçois et telle qu’un directeur de Frac doit la concevoir, est qu’elle motive. Par un jeu d’oppositions, on dépasse cette notion du goût pour mieux
liée à un « projet artistique et culturel » qu’il met en œuvre mais qu’il énonce également. appréhender les problématiques des œuvres. Et même s’il n’y a peut-être pas effectivement
Ce projet n’est pas inconnu, peut-être n’est-il pas diffusé au niveau du grand public et des de pensée unique dominante, mettons qu’ il y a des modes, ou tout simplement qu’une
usagers de l’institution, mais c’est un projet qui est soumis au conseil d’administration pour exposition crée sa visibilité. Il faut donc interroger cette visibilité. De quoi est-elle constituée,
une durée de trois ans. Sur cette base qui énonce des perspectives générales, des actions de quoi est-elle porteuse ? Je trouve intéressant le débat créé par le monde de l’art à travers
particulières sont proposées. Celles-ci peuvent prendre pour base, par exemple, la la diversité de ses institutions. Mais peut-être ce débat ne porte-t-il pas suffisamment sur une
prospection auprès d’artistes travaillant sur le territoire régional. Cela ne peut pas faire tout diversité de préoccupations artistiques, sur les œuvres des artistes. Peut-être aussi que les
un projet mais c’est un axe possible parmi d’autres. Il peut y avoir, au contraire, durant cette institutions ne se mettent pas elles-mêmes en question, ne prennent pas beaucoup de
même période de trois ans, le souhait de travailler sur la collection elle-même. À ce moment- risques. La création est rapidement instrumentalisée dans des stratégies politiques ou
là, on entre dans un cycle d’expositions thématiques mettant en œuvre le fonds en tant que tel. individuelles qui rendent idiots bien avant l’âge de la retraite. Le dogmatisme des
Ces expositions thématiques peuvent également partir d’artistes non encore présents dans institutions n’est pas une fatalité mais je suis d’accord pour dire que c’est hélas, la pente
la collection mais susceptibles d’être montrés pour ouvrir d’autres axes de réflexion. Mais la plus naturelle : comment voulez-vous persuader quelqu’un de scier la branche sur
une fois le projet énoncé, on attend évidemment des tutelles, du conseil d’administration, laquelle il espère grimper ? Probablement pas en lui expliquant qu’elle pourrait servir un
que les opérations réalisées soient évaluées, en relation avec les perspectives annoncées. jour à le pendre…
C’est-à-dire qu’il doit y avoir ensuite une évaluation qui estime si ce qui avait été
programmé comme axes de travail a été effectivement réalisé dans les actions et quelles en L.A. / L.C. : Qu’elle est alors le statut de l’œuvre d’art dans l’institution ?
ont été les conséquences. Il faut sortir de l’idée, dans laquelle nous sommes plongés en E.L. : La place d’une œuvre dans une collection est différente de celle qu’elle a dans une
France, d’une liberté absolue, intégrale, purement subjective du directeur d’une institution. exposition temporaire. Il est évident, par exemple, que la proposition de Fabrice Gygi à
Chalon-sur-Saône pour l’exposition Xn00 est adaptée à un contexte particulier. L’artiste
Jean Dupuy : Oh ! Ce court tour tourne court - œuvres 1968-1995 prend en compte un type d’architecture et la proposition du commissaire d’exposition de
Frac Bourgogne, Dijon, 16/12/95 - 16/02/96 mettre en question l’exposition collective dans un tel contexte. En proposant un parcours de
© PhotExpress, Dijon santé, Gygi suggère une autre appréhension du lieu. Dans le cadre d’une collection, on
doit penser qu’en fonction des contextes d’exposition, l’œuvre pourra prendre différentes
C’est ce que j’appelle la conception du pur « visionnaire », celui qui a un « œil » ou une inflexions mais qu’elle doit conserver une autonomie. C’est ce que l’on veut dire, je crois,
« vision théorique » particulièrement remarquable. Mon œil ! Il s’agit là de la résurgence lorsque l’on dit que l’œuvre doit « résister ». Elle a sa raison d’être en elle-même sans
de l’amateur éclairé, du génial mécène, du non-artiste particulièrement engagé et proche forcément devoir démontrer quelque chose par rapport à l’exposition et au parcours du
des artistes, en fait le pendant direct de l’artiste « inspiré ». Je ne comprends pas que l’art spectateur. Une œuvre n’est pas là pour illustrer un propos et c’est bien ce qui rend délicat
de ce siècle ait fait une si salutaire critique de l’ « inspiration créatrice » et pas de l’exposition « thématique », c’est-à-dire tout rassemblement d’œuvres pour quelque
l’institutionnel « visionnaire », qui est en fait une figure masquée du pouvoir. En tout cas, prétexte que ce soit. Et donc a fortiori toutes les collections, mais surtout les collections
en France, elle est très utile à beaucoup d’irresponsables institutionnels qui se cachent publiques qu’il faut montrer. C’est, me semble-t-il, ce qui rend suspectes ces collections, elles
derrière elle pour se dispenser de rendre des comptes sur leur manière de diriger une sentent la trahison, l’inévitable torsion. Mais c’est quelque chose par rapport à quoi on peut
institution. Je crois en plus que cela révèle une incapacité à restituer au public des enjeux se positionner de différentes manières, et que je voudrais en tout cas, pour ma part,
artistiques en dehors de l’autorité médiatique, dans le long terme d’un programme de assumer entièrement dans le cadre d’une institution, sans illusions ni faux-semblants.
recherche. Je pense qu’il devrait y avoir de plus en plus de « contrats » explicites de
travail, de conventions qui reposent sur la base de projets culturels et artistiques précis. L.A. / L.C. : Que pensez-vous du libre usage qui est fait actuellement des
C’est du directeur que vient le projet artistique initial, validé bien sûr par l’administration œuvres d’art, notamment au sein d’expositions collectives ? Souvent, leur
qui crée les cadres dans lesquels on va faire ce que l’on a envie et ce qu’il est important autonomie est entamée, au bénéfice du concept à illustrer.
de faire. Dès lors que les perspectives de travail sont formulées, la confiance s’établit E.L. : Par le fait d’être responsable d’une collection, on peut être tenté de croire que l’on
progressivement avec les élus. Ainsi, quand je suis arrivé à Dijon, il y avait dans la dispose d’objets avec lesquels on peut faire ce que l’on veut. Ce n’est pas le cas. Chaque
collection une œuvre, alors peu connue, de Jean Dupuy. Il se trouve que j’avais déjà fait fois que l’on montre des œuvres appartenant à une collection, et si l’on est responsable, on
une exposition avec cet artiste. Montrer une grande exposition de Jean Dupuy était doit se poser la question du sens de l’exposition que l’on veut faire, avoir acquis une bonne
l’occasion de faire sortir un élément inconnu, un « point mort » de la collection, de le connaissance des œuvres dans leur singularité et impliquer, autant que possible, les artistes,
ranimer. Beaucoup de gens se sont dit que je présentais Jean Dupuy comme si c’était un au moins en les informant du projet. Dans les années soixante-dix, des artistes se sont posés
choix purement subjectif, ma « vision » de l’art. Or ce choix n’était pas totalement la question de la maîtrise de leur travail une fois vendu. Daniel Buren, par exemple,
arbitraire mais lié à une responsabilité, celle de mieux faire connaître leur collection aux propose avec chaque pièce, un « avertissement », un texte rédigé avec un juriste, qui
bourguignons. Cette grande exposition a été suivie d’acquisitions nouvelles du travail de implique la clarification des conditions d’exposition de son œuvre. La position de Buren est
l’artiste, adoptées par l’ensemble d’un Comité technique puis par un Conseil
d’administration. Cela dit, en développant cet aspect de la collection, je créais des Concert Jus de fruits : Pascale Berthelot, pianiste Compagnie 391 lors de l’exposition Jean Degottex
réactions, sur le plan local, par rapport à une certaine histoire des choix artistiques à Dijon, Cumulus & Frac Bourgogne, Dijon, 02/04/00 Art Danse & Frac Bourgogne, Dijon, 24/02/00
principalement minimalistes ou formalistes, en révélant et valorisant un autre courant
artistique, qui est Fluxus. Mais tout cela faisait sens par rapport à une histoire qui n’était pas Mises en jeu (Collection Frac Bourgogne), 2000
uniquement la mienne, mais celle du Frac et de ses divers responsables, passés et présents. Frac Bourgogne, Dijon (montage : œuvre de Patrice Carré)

2

Erwin Wurm : One minute sculpture
Frac Bourgogne, Dijon, 16/04 - 05/06/99
© Frédéric Buisson, Frac Bourgogne

Les coups (œuvres de la collection)
H. Duprat, B. Aubertin, A. Bulloch
Frac Bourgogne, Dijon, 20/11 - 30/12/99
© André Morin, Paris

Hommage à Sylvia Bossu (dépôts au Frac Bourgogne)
Frac Bourgogne, Dijon, 06/06 - 23/08/97
© Frédéric Buisson, Frac Bourgogne

importante car elle pose la question de savoir comment l’artiste peut rendre effectif le droit monographiques car ce sont les individus qui font l’art. C’est pourquoi il est inévitable,
moral qu’il conserve sur son œuvre toute sa vie, et qui se transmet même à ses ayant-droits. même pour un Frac, de faire des expositions monographiques. La confusion véritable arrive
Actuellement, il y a une tendance à vouloir contester, aux portes de l’institution, ce droit lorsque le responsable institutionnel, le critique ou le commissaire d’exposition veut se
moral des artistes. Il est vrai que la nécessité d’une certaine « productivité » dans la mettre en valeur dans une actualité, dessiner sa propre posture intellectuelle au moyen des
fréquence des expositions, pour les besoins de la diffusion vers des publics, ne favorise pas œuvres, et se dérobe à l’exercice de leur restitution la moins mauvaise possible vers le
le respect de règles trop scrupuleuses. En France, cette tendance s’accentue et s’aggrave. monde de l’art comme vers le grand public. Mais ce qui me paraît comique dans ce
Récemment, un directeur des affaires culturelles demandait à un collègue de faire signer problème, c’est une fois encore le décalage entre tout ce que les artistes du siècle ont fait
aux artistes l’abandon du droit moral sur leur œuvre au moment de l’acquisition par le Frac. pour démythifier l’acte créatif, pour le dégager de l’arbitraire subjectif, pour
Ainsi, l’institution peut être tentée de faire lâcher totalement prise aux artistes sur leur propre dépersonnaliser même les enjeux de l’art, et l’hyper gonflement des ego des grenouilles
production. Tel autre directeur de centre d’art affirme que l’on peut faire ce que l’on veut du monde de l’art et de l’institution, qui ont toutes un point de vue si particulier et si
avec les œuvres. Dans les deux cas, il me semble qu’il y a là la conséquence d’une assuré : Duchamp, Warhol, Filliou et autres Morellet auraient mieux fait d’aller plus
conception purement formelle de l’objet d’art, qui est vidé de tout contenu spécifique et peut souvent à la plage…
donc servir à bon compte toutes sortes de fantasmes. Je crains que l’abstraction et les
meilleures œuvres formelles, abordées au moyen de notions aussi malléables que celle du L.A. / L.C. : Revenons au rôle des artistes au sein du système institutionnel,
« décoratif », ne favorisent elles-mêmes de telles choses. Après des années de rigorisme un autre aspect actuel du système institutionnel français.
autoritaire, lâchons tout ! Après tout, ce n’est que la version culturelle du libéralisme E.L. : C’est, à mon avis, une hypocrisie. Les artistes n’ont pas à être au centre du système
économique. Le caractère des expositions collectives, ainsi que la nature du jugement institutionnel. Ils l’ont été dans l’Académie des Beaux-Arts pendant un siècle et demi et on
esthétique dans les conditions de la seule valorisation médiatique, font que l’œuvre d’art les en a sortis pour pouvoir montrer la création dans sa diversité. Aujourd’hui, il y a un
s’apparente de plus en plus à une marchandise. Cette tendance est liée à un marché et à retour un peu démagogique à l’idée de l’artiste contrôlant le travail du commissaire
une politique culturelle qui n’a pas toujours non plus les moyens de ses ambitions et au fait d’exposition dans l’institution. Je suis contre le fait de placer des responsables institutionnels
qu’il faut que des choses se passent. Les artistes n’ont aucun moyen pour résister à cela. sous le regard d’un comité d’artistes qui seraient là pour évaluer leur travail. On sait très
Mais la responsabilité des commissaires et des institutions est alors d’autant plus grande. bien que ce n’est pas crédible et que de telles propositions reposent en fait sur des
Ce n’est pas parce que l’autonomie absolue de l’œuvre est improbable que l’on doit oublier ambiguïtés, pour ne pas dire plus. Au moment où les pouvoirs publics se montrent incertains
qu’une œuvre est aussi chargée d’une intention spécifique : c’est cette « intention artistique» dans leur engagement pour l’art, et où parallèlement les institutions ne savent plus rendre
propre à l’œuvre que le concept d’une exposition thématique doit permettre d’approcher, compte de leur fonction sociale, on fait croire aux principaux intéressés que, comme les
de cerner mieux, et non l’inverse. élèves du monde de l’éducation, ils sont «au centre du système ». Je suis d’ailleurs étonné
que beaucoup semblent vouloir se précipiter pour ajouter au bazar général. Je suis
L.A. / L.C. : Que pensez-vous des commissaires d’exposition qui se prennent convaincu que ce sont les œuvres qui doivent être au centre du système artistique. Après,
pour des artistes ? que chacun réfléchisse un peu à la place qu’il occupe dans celui-ci.
E.L. : Au risque de vous décevoir, je dois vous avouer que j’ambitionne moi-même de
devenir un véritable artiste de l’institution ! Mais c’est très délicat, on voit bien qu’il y a sur Propos recueillis par Luc Adami et Laurence Cyrot Allan McCollum
cette voie beaucoup d’appelés et peu d’élus… Parce qu’ on ne peut pas être des deux côtés Perfect Vehicule, 1988
de la « barrière ». C’est comme le jeu des gendarmes et des voleurs, on ne peut pas être Fonds régional d’art contemporain de Bourgogne, 49 rue de Longvic, Dijon Collection Frac Bourgogne
à la fois gendarme et voleur, sans quoi ça ne peut pas jouer. L’œuvre nécessite une tél. 03 80 67 18 18 - fax 03 80 66 33 29 - e-mail [email protected] Musée de Semur-en-Auxois, 1999
critique renouvelée, riche, nombreuse. Comme je le disais tout à l’heure, la notion du
« commissaire-artiste » est une forme qui déplace l’enjeu des oeuvres hors d’elles, qui © André Morin, Paris
génère diverses manières de contrôle et de pouvoir sans assumer la tension inhérente à la
relation d’altérité. Et de fait, c’est la solution la plus commode relativement au problème de
l’exposition « thématique » : si la conception de celle-ci est le fait d’un « artiste », alors
il n’y a plus de problème quant à l’interprétation plus ou moins rigoureuse des œuvres, plus
de « complexe » à avoir certes, mais aussi moins de complexité. C’est en quoi je crains
que le commissaire-artiste ne soit surtout le garant de l’ordre, voire une des figures possibles
de l’ « apparatchik ». Il serait beaucoup plus satisfaisant de demander à un artiste,
clairement identifié comme tel, d’être responsable d’une exposition. C’est la même chose
avec les critiques, même quand ils ne se prennent pas pour des artistes. Quand un critique-
commissaire, comme Harald Szeeman avec Quand les attitudes deviennent forme, ou
Pierre Restany avec les Nouveaux Réalistes, tente de rassembler des productions artistiques
autour de telle ou telle catégorie, c’est la globalité qui l’emporte sur la singularité. Il y a
danger, pour les critiques, à vouloir toujours représenter cette figure-là car elle est
finalement assez arbitraire au regard de la singularité des œuvres et des artistes. À un
moment donné, la vraie critique doit se faire sur les artistes. Dans une institution, il faut bien
sûr montrer des expositions collectives, mais il faut revenir sans cesse à des expositions

3

Fabrice Gygi
Parcours Vita, 2000
© Espace des Arts, Chalon-sur-Saône

L’économie du collectif

Si Lionel Bovier vous dit qu’il fait du « tuning », n’allez G.M. : Quand vous parlez de « tuning », vous
pas croire qu’il se passionne à customiser sa voiture. dites que vous essayez de donner la meilleure
Ce jeune éditeur suisse, critique d’art et commissaire réception d’une pièce au public. Ne peut-on pas
d’exposition indépendant fait partie du collectif Xn qui dire que vous dénaturez l’œuvre de l’artiste ?
regroupe cinq personnalités du monde de l’art L.B. : Dans ce cas précis, je pense que c’est le
contemporain : Stéphanie Moisdon-Trembley (1), contraire, parce que précisément ces artistes
Elisabeth Lebovici (2), Hans Ulrich Obrist (3) et Jean ont tous produit quelque chose de spécifique
Charles Masséra (4). Dans le cadre des Janviers en pour le lieu, après l’avoir visité, discuté et dans le
Bourgogne organisés par la ville de Chalon-sur-Saône, but de s’accomoder d’un espace positivement
l’Espace des Arts reçoit pour la deuxième fois complexe.
l’exposition Xn. C’est Lionel Bovier qui est chargé
cette année d’organiser l’exposition et de se faire le G.M. : Les pièces qui sont ici ont pourtant déjà
porte-parole des autres membres du groupe. Nous été présentées dans d’autres lieux…
l’avons donc rencontré à cette occasion afin qu’il nous L.B. : Non, les seules qui existaient étaient celle
explique sa « politique » de commissaire d’exposition de Dominique Gonzalez-Foerster et La
et, qui plus est, de commissaire indépendant Fanzinothèque de Klat, toutes deux réadaptées
appartenant à un collectif. pour l’Espace des Arts.

Guillaume Mansart : Comment définiriez- vous le rôle de commissaire G.M. : La Grotte de Xavier Veilhan également…
d’exposition ? L.B. : Oui, mais ici elle est totalement différente,
Lionel Bovier : Il y a pas mal de définitions que je trouve incommodes. C’est une c’est-à-dire qu’il s’agissait de produire sur place une
pratique assez complexe, car elle touche à des problèmes évidemment artistiques, œuvre dont l’artiste avait déjà éprouvé la structure.
mais aussi à des problèmes de production, souvent économiques, puis de diffusion Pour lui, chaque fois c’est une nouvelle pièce, parce que la façon dont elle s’inscrit
c’est à dire souvent aussi de communication… Cette pratique est donc dans l’architecture est très importante. Elle est vraiment radicalement différente de
fréquemment mal traduite car elle est un agrégat de différentes fonctions. Il y a des celle qu’il avait produite à Brétigny. Même s’il en connaissait la technique de
métaphores que l’on utilise pour la pratique de commissariat que je trouve plus ou production, le contexte était différent. C’était une exposition personnelle, la vision de
moins drôles, mais généralement assez inefficaces. Singulièrement, on les l’extérieur était une vision en surplomb, on ne pouvait pas tourner autour, etc. Il en
emprunte toujours à d’autres pratiques artistiques. Par exemple, il y a celle de chef avait déjà éprouvé le potentiel, il avait envie de la reconstruire à une autre échelle.
d’orchestre qu’avait utilisée le dernier commissaire de la Biennale de Venise avant Pour Dominique Gonzalez-Foerster, la situation était un peu différente. Elle a
Szeemann, Achile Bonito-Oliva. Il disait : « voilà, nous les commissaires, nous présenté son Home cinéma à Manifesta au Luxembourg, dans une autre
sommes des chefs d’orchestres », donc des « performers » avec des musiciens : configuration. Personnellement, j’ai eu un vrai sentiment de frustration parce que
les artistes. On les tient dans une salle et on agite la baguette pour qu’ils sa pièce était exposée à la suite d’un cheminement d’œuvres que l’on regarde en
s’accordent et que le tout fasse un bel effet d’ensemble. Je trouve ceal tout à fait général entre dix secondes et une minute, alors que son film durait déjà dix
impropre à qualifier le travail de commissaire, particulièrement pour une exposition minutes. On restait éventuellement une ou deux minutes devant la télé et ça ne
d’art contemporain. De plus il n’est pas certain que le but soit de faire un tout fonctionnait pas du tout comme un home cinéma. Il y avait un potentiel de
harmonieux. Sur Xn00, ce n’est pas du tout ça, chacun des artistes a construit des fonctionnement mais qui n’était pas activé. Je lui ai donc dit : « Ici ce n’est pas un
espaces relativement autonomes. Il y a une autre métaphore qui est peut être plus musée, on peut donc changer les conditions de présentation, on peut par exemple
juste, c’est celle de cinéaste. C’est assez vicieux aujourd’hui, on dit que le fermer une salle. ». Ce n’est donc plus un cheminement d’œuvres, et si on va
commissaire est comme un réalisateur, car effectivement il travaille en équipe ; s’enfermer dans cette salle, on va vraiment le faire sur le mode du home cinéma (5),
c’est une dimension extrêmement importante de la métaphore cinématographique. comme si on était chez soi. Et on va pouvoir regarder le film du début à la fin. L’idée
Cela dit, s’il est le réalisateur du film, c’est un peu lui l’artiste, donc en même temps n’est pas de manipuler mais au contraire, sur la base d’une lecture personnelle
ce n’est pas tout à fait juste. Si on reste dans le champ cinématographique, je me des pièces, de la proposer aux artistes et de leur dire : « est-ce que ce ne serait
sens plus proche du producteur. Il y a plusieurs réalisateurs qui, simultanément, pas de meilleures conditions de présentation ? ». Et s’ils avaient dit non,
tournent des choses dans un espace, et moi je fournis une équipe, des moyens de évidemment on ne l’aurait pas fait. Parce que cette dimension d’instrumentaliser
production, des moyens de diffusion, de distribution. Je ne me sens pas en l’œuvre, celle du chef d’orchestre, ne m’intéresse pas du tout.
concurrence avec les artistes, il s’agit là de l’autre discours, celui de Szeemann : C’est une chose que beaucoup de commissaires d’expositions aujourd’hui
« le commissaire est aussi un artiste ». Ce serait même un super artiste qui réexplorent. C’est ce que revendique quelqu’un comme Eric Troncy dans des rpojets
travaillerait par dessus les travaux d’autres artistes pour leur créer une sorte de récents comme Dramatically Different et Whether Everything, c’est à dire d’être un
caisse de résonance, leur donner une ampleur insoupçonnée. Pour Xn00, il fallait compositeur qui arrange lui-même les œuvres dans l’optique de leur donner une
d’abord créer une situation de production inhabituelle pour un espace municipal. nouvelle lecture, une nouvelle existence (car elles existent déjà, et ont déjà été
Donc le travail de commissariat a été, je dirais 50 % de travail juridico-administratif, produites). Eric Troncy ne s’intéresse pas à la production dans ces projets, il
c’est à dire fonder une association extérieure à la ville, rédiger les statuts de s’intéresse uniquement à la présentation. Il fait du « display » si on veut. L’histoire
l’association, les budgets… Et 50 % de travail avec les artistes pour conduire les du « display » est pour moi importante, mais pas dans une situation de production
projets à leur meilleure réalisation possible. Là dedans, j’inclus ce que je disais avec de jeunes artistes, dans la situation de l’art contemporain. Je trouve très
pour cette exposition c’est-à-dire le « tuning ». Il y a des projets qui peuvent avoir intéressant de faire du « display » dans un musée, c’est un travail
déjà existé, c’est le cas pour Home cinéma, la pièce de Dominique Gonzalez- muséographique, qui n’a pas beaucoup de sens dans un centre d’art contemporain.
Foerster qui est cependant présentée ici avec un nouveau film de l’artiste. L’idée Ce n’est pas ce dont les artistes ont besoin. Ils ont besoin de partenaires,
c’est de faire un « tuning » afin que soit précisé un fonctionnement possible de d’interlocuteurs et ils vont trouver cela dans la personne du commissaire. Je fais
l’œuvre. C’est vraiment comme sur une bande F.M., on essaye de chercher la du partenariat sur chacune des pièces, par exemple, quand elles coûtent un certain
station là où l’écoute est la meilleure. Cela fait partie du travail de production. Après prix, j’essaye de trouver un co-producteur. Pour moi ce n’est pas du « display » que
ça, ce qui m’intéresse moins, c’est le rôle public, le rôle de médiateur, j’ai voulu faire sur Xn00.
d’accompagnement des journalistes, d’accompagnement même du public. La
médiation culturelle c’est un truc qui ne m’intéresse pas tellement et je pense que G.M. : Quel avantage représente le fait de travailler avec un collectif ?
d’autres, formés pour cela, le font mieux que moi. Finalement, la formule de Hans L.B. : C’est une question que j’ai trouvée étonnamment absente des comptes-
Ulrich Obrist, du « curateur » comme catalyseur est sans doute la meilleure. rendus de critiques sur la manifestation de cette année et celle de l’année passée.
Effectivement, c’est une démarche originale et totalement inédite en France, il n’y
Klat a quasiment pas d’exemple de collectif de commissaires. A mon avis, un collectif
Fanzinothèque, 2000 hétérogène qui se réunit pour travailler sur une manifestation artistique, cela devrait
© Xn00, Espace des Arts, Chalon-sur-Saône précisément susciter une discussion sur le rôle du commissariat. Tout à coup, on
n’est plus dans la figure du commissaire signataire de quelque chose, mais dans
celle de l’économie du collectif. Et l’économie du collectif, c’est une économie tout
à fait différente : on partage les décisions, les responsabilités, même si on est
moins impliqué dans la réalisation d’une année sur l’autre. De la même manière on
additionne les savoirs, ou les compétences, c’est-à-dire qu’on essaye de gérer au
mieux les différentes questions et étapes de l’exposition ensemble. Cela pourrait
servir de modèle à d’autres expériences, qui pourraient être menées, de manière
ponctuelle comme celle-ci, ou régulière. A mon avis c’est un modèle qui est en train
de faire école, j’en veux pour preuve l’exemple de l’I.C.A. (6) à Londres, un des
espaces les plus intéressants pour ce qui est de l’art contemporain en Angleterre,
et qui va être dirigé par un collectif de commissaires de nationalités différentes.

G.M. : N’y a-t-il pas un danger de fermeture, comme si vous évoluiez en circuit
fermé, en étant à la fois commissaires et critiques ?
L.B. : On pourrait imaginer un chevauchement des compétences, lorsque, par
exemple, je réalise la manifestation et que quatre personnes vont écrire sur celle-
ci. On a pu remarquer que ce n’était pas le cas.

G.M. : Mais même sans écrire les uns sur les autres, ne formez-vous une sorte
de « lobby » ?
L.B. : Mais ça c’est presque un désir politique. Nous sommes cinq personnes qui
travaillons dans l’art contemporain en France et ailleurs, et nous avons tous des
partenaires différents avec lesquels nous travaillons. C’est sûr que dans nos
fonctions nous sommes habilités à traiter avec ces partenaires que nous mettons
à profit en collectif. A mon avis, ce serait peut être du « lobbying » si nous avions

4

les mêmes goûts, si nous travaillions avec les mêmes supports, pour les mêmes G.M. : Avez-vous toutes les libertés pour monter une exposition ?
lieux, ce qui n’est pas tout à fait le cas. Plutôt que de « lobbying » moi je parlerais L.B. : Oui et non. Nous avons toutes les libertés sur le choix des artistes, enfin,
de mise en réseau. Effectivement, cela est nécessaire, parce que nous travaillons c’est la responsabilité du collectif de commissaires, on en conclut qu’on est les
de cette manière indépendante. Nous n’appartenons pas à une institution, nous seuls juges et les seuls responsables des choix artistiques qui sont faits. Par
n’avons pas de statut de salariés. Nous sommes obligés de proposer des projets contre, nous avons énormément de contraintes de réalisation, par rapport au
souvent longs à élaborer et qui ne sont rétribués que s’ils sont réalisés. Nous budget, à la sécurité, à l’aménagement du lieu, etc. De plus, il y a des
sommes obligés d’être mobiles, donc ce travail de mise en réseau nous le faisons problématiques de politiques culturelles locales auxquelles parfois on essaye de
déjà. Nous aimerions qu’il y ait une vraie réflexion sur le statut de commissaire nous confronter, des réflexions comme : « ah non, on ne peut pas faire ça, cela
indépendant. Je n’ai pas tellement peur que cela formalise un goût commun, parce vient d’être fait à côté ! ». Mais ici, nous sommes totalement libres, les vrais
qu’en fait nous sommes très différents. Et de toute façon nous ne représentons problèmes sont des problèmes d’adaptation, de fonctionnement des œuvres par
qu’une toute petite partie de l’activité curatoriale du moment, sachant que la grosse rapport au lieu. Là encore c’est du « tuning ». Nous n’avons pas à « dealer » avec
partie, la plus importante, c’est celle des institutions. Les institutionnels partagent, les problèmes de politiques culturelles, de public et de nationalité. Nous sommes
quant à eux, d’autres préoccupations, politiques par exemple. Ils font un peu des électrons libres par rapport à tout cela.
nécessairement de la politique culturelle, ce que nous n’avons pas à faire. Jje n’ai
pas tellement peur que notre travail devienne un réseau efficace, je trouve que ça Entretien réalisé par Guillaume Mansart
serait, au contraire, positif.
1. Critique d’art et co-fondatrice du Bureau Des Vidéos.
G.M. : Cela ne peut-il pas être dommageable pour les artistes ? Stéphanie 2. Journaliste à Libération.
Moisdon Trembley, dans Le Monde (7), parle de prise en otage des artistes, 3. Commissaire d’exposition indépendant et conservateur (notamment) du Musée d’Art Moderne de la Ville
sommés de choisir leur camp parmi les commissaires. de Paris.
L.B. : Cela dépend comment on conçoit la pratique de commissaire. Il y a 4. Ecrivain, essayiste.
effectivement des commissaires qui pensent être des chefs d’orchestres, ils ont 5. Pour le Home cinéma de Dominique Gonzales Foerster le visiteur peut demander les clés afin de
leurs musiciens favoris et ils n’ont pas envie que ceux-ci jouent avec d’autres gens. s’enfermer dans la pièce d’exposition.
C’est un truc de concurrence, c’est un peu leur fond de commerce. Pour Xn00 6. Institute of Contemporary Arts.
c’est une espèce de contrat d’association, de production sur une opération 7. Le Monde, 21 janvier 2000.
déterminée et je souhaite que cela se renouvelle, sans que cela soit exclusif.
Précisément, comme nous ne sommes pas des institutionnels, nous n’essayons Xavier Veihlan
pas de nous accaparer les artistes. Ce que nous essayons de faire, au contraire, La grotte, 2000
c’est de les faire circuler. Pour nous, s’approprier un artiste n’a pas vraiment de © Xn00, Espace des Arts, Chalon-sur-Saône
sens, nous n’avons pas de lieux pour cela. La seule manière dont on pourrait
l’imaginer serait que l’on devienne les agents de ces artistes, et alors on serait plus
proche du modèle des galeries que du commissariat. Or aucun d’entre nous dans
le groupe n’a un fonctionnement proche des galeristes, car nous ne sommes pas
impliqués dans la logique commerciale.

Le commissaire
et l’artiste

A l’occasion de l’exposition Xn 00 de Chalon- commissaire m’impose ses choix sans établir de dialogue, Fabrice Gygi
je refuserai alors de travailler avec lui. Il doit s’établir un Mur de sacs, 1994
sur-Saône, nous avons rencontré Fabrice Gygi, échange entre le commissaire d’exposition et mon propre cordura, papier journal, bois
travail. Il doit s’établir un dialogue entre une proposition Migraçoes : Sâo Paulo, Museu de Arte
artiste suisse qui vit et travaille à Genève. artistique et sa mise en vie dans un lieu. Par exemple, pour © Ana Moraes, Sâo Paulo
l’exposition Xn 00 à Chalon-sur-Saône, j’ai fait la
Curieux de savoir quel regard il porte sur le rôle proposition à Lionel Bovier, le commissaire, de présenter il est exposé qui est déterminant. Si un commissaire peu se
un parcours sportif qui sillonnerait l’étendue du bâtiment priver de montrer le travail d’un artiste, c’est dommage
de commissaire d’exposition et comment il de l’Espace des Arts et que j’appellerais Parcours Vita. pour lui, pas pour moi.
Le commissaire me conseilla d’appeler ce parcours
l’intégre dans son propre travail, nous lui avons « Parcours Sportif » tout simplement, et d’oublier J.G. : Pensez-vous alors que l’on puisse se priver
l’appellation « Vita ». Je m’y suis refusé catégoriquement de la figure du commissaire ?
posé quelques questions. car cette dénomination est une référence historique à la F.G. : Non, je ne pense pas, comme je ne pense pas, par
société d’assurance suisse qui est à l’origine de ces ailleurs, que le commissaire soit un artiste refoulé, qui
Jérôme Giller : Quelles sont les raisons qui vous parcours. C’était pour moi une nécessité de garder cette vivrait par procuration. Les commissaires sont des gens qui
font participer à une exposition plutôt qu’à une dénomination et c’est ce que le commissaire a bien ont la passion de l’art. Leur rôle n’est pas facile car leur
autre ? La figure du commissaire d’exposition compris. En revanche, là où je parle d’échange avec le rapport à l’art est avant tout un plaisir intellectuel. Rares
entre-t-elle en compte dans votre choix ? commissaire, c’est, dans ce cas précis, lorsque Lionel sont les commissaires d’exposition qui ne soient pas aussi
Fabrice Gygi : Moi, ce qui m’intéresse en tant qu’artiste, Bovier m’a suggéré de mettre à disposition du public un des critiques d’art, et cette dimension intellectuelle est
c’est avant tout de montrer mon travail au public. A priori, survêtement et d’utiliser en fin de parcours les douches des importante pour les artistes. L’artiste est avant tout un
je ne refuse pas de travailler avec un commissaire si ce loges de l’Espace des Arts. C’est là que la notion praticien et sa seule satisfaction est de produire. Lors des
n’est, peut-être, avec Harm Lux (1). En fait, c’est une d’échange et de complémentarité entre le commissaire échanges avec un commissaire ou un galeriste, l’artiste
question de personne. Je ne refuserai jamais une invitation d’exposition et l’artiste intervient. La proposition de Lionel voit souvent de nouveaux horizons s’ouvrir sur son travail.
à une exposition mais en revanche, je sais que je ne Bovier donnait plus de poids à mon œuvre et à la notion Cela lui permet de comprendre souvent le sens de sa
travaillerai pas de la même façon avec Eric Troncy d’autorité que je cherchais à développer pour ce production, de la situer dans un cadre social et
qu’avec Lionel Bovier ou le collectif Xn par exemple. Avec parcours. Vois-tu, tu ne pouvais plus faire l’exposition sans idéologique, et c’est important pour lui. En revanche, je
le premier, je me contenterai d’envoyer l’œuvre qu’il devenir au préalable un sportif ! pense que les commissaires devraient s’intéresser de plus
désire exposer et je lui laisserai carte blanche pour près aux lieux d’exposition alternatifs et être curieux des
l’accrochage. Avec d’autres, je n’hésite pas à me déplacer J.G. : Pensez-vous que l’on soit entré dans un initiatives privées et « underground ». Établir des ponts
pour monter moi-même l’œuvre dans l’exposition. systéme d’ « écuries » où chaque commissaire entre ces lieux et les institutions me paraît être aujourd’hui
« sponsorise » ses propres artistes, ceux avec l’une de leurs principales missions, afin que tout le monde
J.G. : Vous qui dénoncez dans votre travail les lesquels il a le plus d’affinités, et que cela soit puisse prendre en compte ce qui se fait de naissant.
abus de pouvoir, accepteriez-vous qu’un pour l’artiste le seul moyen d’exister ?
commissaire intervienne sur votre œuvre pour F.G. : S’il y a des réseaux, c’est bien possible. Mais, cela Entretien réalisé par Jérôme Giller
lui donner une meilleure réception, ou la faire ne vient pas du fait des artistes mais bien plutôt de la
entrer dans une thématique, et pensez-vous que politique culturelle en générale, de la concurrence qu’il y 1. Harm Lux s’occupe du lieu Shed im eisenwerk à Frauenfeld (Suisse).
cela soit une de ses prérogatives ? a entre les différentes institutions et les commissaires qui 2. Tribune, 1995, Collection Frac Bourgogne.
F.G. : Là, je dirai oui et non et je parlerai d’échange. Je ont en charge ces institutions. C’est une question de
pense que l’artiste et le commissaire doivent avoir un pouvoir et de reconnaissance. Je sais très bien par
travail complémentaire sur une exposition. Si le exemple, que depuis que le Frac Bourgogne a acheté une
de mes œuvres (2), je n’ai aucune chance d’être contacté
par le Consortium pour exposer. C’est a priori l’artiste qui
pâtit de ces situations mais je ne pense pas que cela
l’empêche d’exister. Un bon travail reste un bon travail,
même s’il n’est pas exposé. Ce n’est pas sur le moment
que l’on juge le travail d’un artiste. Je veux dire par là que
le travail d’un artiste doit être resitué dans son contexte
historique et que c’est ainsi que l’on peut juger de son
importance. Ce n’est pas le lieu ou les lieux dans lesquels

Fabrice Gygi
Tribune, 1996 (Collection Frac Bourgogne)
5 bancs, bâche plastique, tube acier, 200 x 600 x 140 cm
© André Morin, Paris





L’histoire est en cours Ernest T
A Pierre et Marie, Une exposition entravaux, sept. - oct. 1984
« REDONNER LA PAROLE AUX ARTISTES » 36 rue d’Ulm, Paris 5e
Qui ne connait pas dans le milieu de l'art contemporain français, l'inlassable et © Dorothée Fraim
débordante activité d'Eric Troncy, concepteur et réalisateur de nombreuses
expositions durant la dernière décennie, rédacteur en chef de la revue Documents « PUBLICATION À PARAÎTRE (SI) NÉCESSAIRE », EXTRAIT DE L’ÉDITORIAL DU N° 1
sur l'art, essayiste et critique dans de nombreux médias (Les Inrockuptibles, Beaux-
Arts, ...) ? Qui n'a pas remarqué avec quelle habileté, lui et d'autres partenaires de « Dans le numéro 3 (septembre 1985), on peut voir huit pages de photographies
la même génération ont su tirer parti de polémiques conservatrices et maladroites
pour mieux baliser un territoire, organiser des ripostes appuyées sur des positions de mode : Des corps dans le décor. À ma demande nous avons organisé avec et
théoriques intelligemment étayées et concertées ?
La lecture du recueil de ses essais (1) paru récemment est instructive à plus d'un chez Ghislain Mollet-Viéville, agent d’art, une mise en scène particulière : des
titre : en effet, Eric Troncy justifie ses activités comme une prise de position critique
vis-à-vis de certains processus de production d'expositions (de groupe), dans mannequins d’agence de mode posent sur ou devant des œuvres de la collection G.
lesquels le “commissaire” compose une sorte de partition soigneusement équilibrée
et dosée de différentes œuvres, désamorçant toute proposition conflictuelle et M-V. ». Perturbation, la lecture des œuvres est troublée, les légendes mentionnent
dérangeante. Il dénonce la tendance de certains à produire une lecture subjective
et artificielle des divers courants, à regrouper des œuvres sous des thèmes trop les œuvres et non les vêtements que portent les modèles. Elisabeth Lebovici a écrit
arbitraires, à utiliser l'art comme « lubrifiant social » ou adjuvant décoratif. «
Redonner la parole aux artistes » est son objectif majeur ; ainsi l’exposition Surface un texte drôle et incisif. Mélange des genres : art, publicité, mode.
de réparations s'affirme non comme une présentation a posteriori d'œuvres, mais
a priori d'artistes. Si l'analyse critique du milieu de l'art en France faite par Eric Le quatrième numéro de Public constitue, en janvier 1989, un prolongement aux
Troncy est souvent pertinente et justifiée, il n'est pas absolument sûr qu'il ait
toujours évité les écueils qu'il dénonce avec tant d'acuité. Ce qui est très expériences de À Pierre et Marie cinq ans auparavant. Il s'agit pour Jacques Guillot,
intéressant, par contre, c'est l’intérêt que ce commissaire de la “jeune génération”,
porte envers certaines expériences faites par une génération antérieure d'artistes. directeur alors du Magasin à Grenoble, pour Nadine Descendre (cinéaste,
Ainsi rappelle-t’il très opportunément la « formidable expérience que fut À Pierre et
Marie, une exposition en travaux qui s'est développée de janvier 1983 à octobre journaliste et critique d’art) et moi-même, d'organiser une exposition dans une
1984 » dans une église désaffectée, appartenant à l’Institut Pierre et Marie Curie,
36 rue d'Ulm à Paris. revue, une expérience nouvelle, programmée comme une vraie exposition,

PUBLIC ET LES ACTIVITES DE PHILIPPE CAZAL, ARTISTE. regroupant des œuvres choisies d’artistes français. Le titre : Il n'y a pas d'«art
« J'ai créé la revue PUBLIC après la première ouverture de l’exposition À Pierre et
Marie. Dans cette exposition, les organisateurs proposaient aux artistes de “faire” français», une exposition dans une revue (4) se veut une réponse ironique et
et de montrer autrement le travail ; nous sommes nombreux à l’avoir fait. Dans
cette période il y avait peu de choix, peu d’initiatives. Créer un support pour rendre critique au cliché qui traîne dans le milieu de l'art international. Nadine Descendre
compte de nos activités, montrer des œuvres, mettre le focus sur des artistes peu
médiatisés. C’était le but. Un esprit différent, une maquette différente, il était temps montre dans son introduction qu'il n'y a plus depuis le Nouveau Réalisme en France
de nous montrer différemment » dit Philippe Cazal. « A la différence de la situation
actuelle, le contexte de l'art contemporain en France était très peu ouvert aux et son inventeur Pierre Restany, de groupe constitué (...et repéré par des critiques
jeunes artistes ». Un peu d’histoire : en 1982, Bob Calle, collectionneur, directeur
de l'Institut Pierre et Marie Curie, informe Sarkis que cette ancienne chapelle “tendance très sur le devant de la scène“. L’Allemagne, l’Italie, l’Angleterre et les
appartenant à l’institut est un lieu vacant. Celui-ci prend l’initiative et avec la
complicité de Michel Claura, Daniel Buren, Jean-Hubert Martin et Selman Selvi (2), États-Unis nous ont habitué à ces grandes manœuvres), mais beaucoup
ils décident ensemble de monter un projet inédit basé sur de nouveaux rapports,
les artistes contactés (ils seront soixante-neuf à répondre positivement à l'appel, d'individualités positionnées sur des trajectoires singulières ont en commun une
sur toute la durée de l’exposition, de janvier 1983 à décembre 1984) vont gérer
leurs interventions dans ce lieu jusqu'à la fermeture de la chapelle pour démolition, certaine « capacité de résistance » face à la modélisation du marché de l'art. Il
en vue de la construction d’un nouveau bâtiment pour l’institut. Les conditions
financières étant très serrées, les premières sommes vont pour un éclairage s'agit de faire de cette difficulté de repérage une force, de permettre l'identification
efficace du lieu (très sombre), mais aussi pour la réalisation matérielle des œuvres
et la location de matériel. « Nous avions l'envie, forte, de faire vivre cette et la visibilité d'un choix d'artistes, et enfin de faire le lien entre les acteurs de
expérience, nous avons essayé d’assumer ce fonctionnement de responsabilité
collective. Il n’y avait pas de vernissages, les organisateurs avaient proposé des l'expérience parisienne et ceux plus jeunes, formés en grande partie au Magasin et
ouvertures. Il y en a eu dix, sur toute la durée. L’ouverture était toujours un
dimanche à 11h, l’heure de la messe ! Il y avait énormément de monde à tous ces à l'Ecole des beaux-arts de Grenoble, comme les artistes Negro/Geoffroy/Joumard
rendez-vous : artistes, amateurs, collectionneurs, professionnels français et
européens (et quelquefois outre-atlantique), institutionnels, journalistes, critiques. et Joisten/Parreno/Joseph, encore peu connu(e)s. La particularité consiste à
Louise Lawler dira même « Une église déconsacrée n'est pas un mauvais lieu pour
questionner un système de croyance » ; ce n'était pas le cas du milieu en place et proposer une exposition dans une revue. Deux parties : une exposition avec un choix
même des revues, trop habituées au système classique musées-galeries. C’est
dans ce contexte que j'ai créé la revue Public. Le numéro 1 a fait événement dans d'œuvres de chacun des dix-neuf artistes, présentées dans un espace visuel et
la presse spécialisée avec sa maquette très soignée, les œuvres reproduites en
grand format et la couverture avec une photo-souvenir de Daniel Buren (c’est la textuel spécifique, et un album, sorte de bibliographie par l'image, le tout
première fois qu’une revue française propose sa une à Daniel Buren !) ». Dans les
deux premiers numéros, on trouve un reportage sur les nombreuses interventions [volontairement] en bichromie noir et blanc, et enfin un texte en introduction qui
de l’exposition À Pierre et Marie, mais aussi des articles sur les travaux de ces
artistes ou sur d'autres artistes — d’autres propositions intéressantes. (3) « ne se veut ni critique, ni démonstratif, à une époque où l'on peut se demander si la

critique est encore possible et si elle n'appartient pas exclusivement aux artistes ». (5)

« Cette option de la revue (objet de promotion) pour échapper au lieu de

monstration traditionnel n'est pas nouvelle : nous nous inspirions des conceptions

de diffusion et de présentation des artistes conceptuels : Seth Siegelaub, en janvier

1969, propose une exposition sous la forme d'un catalogue rudimentaire de 24

pages (6) ; l’exposition a lieu uniquement dans l’objet catalogue ». Le fil conducteur

qui réunit les artistes présentés dans Il n'y a pas d'«art français», est que l'on doit

penser l'art, son mode de production et de réception sans escamoter le formel.

« Pour nous, il s'agit de défendre le retour au visuel comme une valeur

fondamentale. Et les pages d'un livre ou d'un catalogue s'ouvrent d'autant mieux aux

œuvres que celles-ci sont

travaillées avec et pour la

médiatisation, ses objets

et ses images, en

s'appuyant sur une

pensée visuelle en tant

qu'opération cérébrale,

décomposant et recom-

posant pour l'œil une manière

de penser, “sans les mots,

dans les choses“, sans

jugement, dans les faits ». (7)

UNE « EXPOSITION » TRÈS
EXPOSÉE (8)
« Déplacer le lieu de
consommation des œuvres,
le réactiver dans l’espace
d’une revue, faire voir et
penser l'art autrement,
constituèrent notre moti-
vation. Démultiplier et
exporter l’exposition en six
endroits (Grenoble, New-
York, Cologne, Londres,
Prato et plus tard Montréal),
faire accepter aux différents
espaces de jouer à fond
notre proposition — c’est-à-
dire vider les lieux de
réception de l’exposition de
toute œuvre — avec pour
toute installation : tables et
chaises pour permettre les
échanges, fut un aspect

8

Ci-dessous : Carte d’invitation de l’exposition Il n’y a pas d’«art français»,
Magasin/Cnac, Grenoble, 1989
Artistes : Richard Baquié, Bazilebustamante, Jean-Marc Bustamante,
Philippe Cazal, Gérard Collin-Thiébaut, Jacqueline Dauriac, Ernest T,
Jacques Fournel, IFP, Joisten/Joseph, Parreno, Joumard/Negro/Geoffroy,
Bertrand Lavier, Ange Leccia, Les Ready Made appartiennent à tout le monde,
Marylène Negro, Philippe Perrin, Patrick Tosani, Michel Verjux, Jean-Luc Vil-
mouth

important, complémentaire à cette Ce texte n'aurait pu être écrit sans la collaboration de PC et sans les documents qu'il nous a transmis.
exposition. Chaque lieu a envoyé une
carte d’invitation spécifique, une Philippe Cazal expose actuellement Les litanies au C.N.E.A.I. (Centre national de l'estampe et de l'art
régle commune. Les nombreux imprimé) à Chatou, du 23 avril au 18 juin 2000. Extrait du communiqué de presse : Les litanies peuvent
invités étaient conviés à une situation être vues, lues ou entendues. Les litanies sont des listes autonomes de mots et groupes de mots. Chaque
exceptionnelle, rien à voir sur les liste évoque un scénario avec amorce et chute. Malgré l’apparente incohérence d’une ligne à l’autre, Les
murs, toute l’exposition est dans la litanies se font l’écho d’une actualité géographique, politique, économique et sociale. Procédé de fabrication
revue, tout est à discuter avec les des litanies : des mots et groupes de mots sont identifiés à la lecture des journaux Le Monde et Libération.
artistes présents. Les boissons Ils proviennent de l’actualité des titres et des sous-titres. Ils sont découpés au fil des semaines puis stockés
variaient suivant les lieux, puisque le en vrac. Par la suite, ils sont étalés sur une surface plane pour en faciliter la lecture d’ensemble et procéder
public a bu du champagne au à des choix, afin de constituer des listes. Chaque liste, de dimension variable, est retranscrite sur
Magasin à Grenoble (14 janvier), du ordinateur avec une typographie neutre et unique. Dans l’exposition, Les Litanies peuvent être vues et lues
vin blanc à la Dia Art Foundation à et pourront être entendues.
New York (19 janvier), de la bière à
la galerie Esther Schipper à Cologne 1. Éric Troncy. Le colonel Moutarde dans la bibliothèque avec le chandelier (textes 1988-1998). Les
(27 janvier), du spumante au Museo presses du réel, Dijon, 1998. p. 161-174.
d’arte contemporanea de Prato en 2. Après le premier groupe qui a coordonné les présentations de la première année, c'est un autre groupe,
Italie (4 février) et tea and cakes à la constitué de Jacqueline Dauriac, Gilles Mahé, Nadine Moëc, Felice Varini, Bertrand Wicquart et moi-même,
Anthony Reynolds Gallery à Londres qui a assumé la coordination jusqu'à la clôture de l'expérience, le dimanche 21 octobre 1984.
(20 février), ...et, pour une fois, le 3. L'examen de la liste des participants montre l'émergence parmi des artistes internationaux déjà
public était invité à emporter confirmés, des travaux de Sophie Calle, Pascal Convert, Hubert Duprat, Ange Leccia, Gilles Mahé, Nathalie
l'exposition sous le bras ». Talec, etc.
Cette activité artiste-commissaire- 4. Il n'y a pas d'«art français», une exposition dans une revue, ce titre mal interprété dans sa version
éditeur est issue sans doute du sonore, peut [volontairement] influencer un mauvais positionnement des guillemets dans la version visuelle
travail multiforme antérieur mis en et évidemment en changer le sens... notes d’observation à l’attention d’un « milieu » mal-voyant et mal-
pratique par le groupe Untel, entendant, en milieu” de l’art.
certainement aussi de la 5. Nadine Descendre. Il n'y a pas d'«art français», in Public, Archives contemporaines internationales, n°4,
performance d'exposer à New York 1989.
des artistes français dans neuf lieux 6. Titre : January 5-31, 1969. Artistes : Barry, Huebler, Kosuth, Weiner. Format : 21 x 17,5 cm.
différents : Une idée en l'air 7. Nadine Descendre. Il n'y a pas d'«art français», in Public, Archives contemporaines internationales, n°4,
novembre 1980 avec Daniel Buren, Bertrand Lavier, Sophie Calle, Jacqueline 1989. Eric Troncy dans son essai : « Il n'y a toujours pas d'art français », in catalogue : Images, Objets,
Dauriac, Jacques Fournel, Patrick Saytour, Didier Bay, Untel, etc. (9), Bertrand Scènes, L’Art en France depuis 1978, Le Magasin, CNAC, Grenoble, 1997, se réfère à cette expérience
Lavier y a exposé ses premiers objets repeints et Sophie Calle Les dormeurs pour lui exemplaire et située huit ans auparavant dans le même lieu.
et les photos du South Bronx. Cet intérêt sur les conditions de monstration et 8. Texte inscrit sur le bandeau rouge entourant le numéro 4 de la revue Public.
de réception des œuvres d'art fait partie intégrante de ma démarche. 9. Les lieux d’expositions : PS1, The Clocktower, Artist Space, Franklin Furnace, Alternative Museum,
Un état d’esprit que l’on retrouvera dans l’exposition Génériques, Le visuel et l’écrit, Fashion Moda, White Columns, Grommet Studio, Creative Time. Philippe Cazal, concepteur et organisateur
1992, proposée par Nadine Descendre, à l'Hôtel des arts à Paris, avec une d’Une idée en l’air.
exposition, des salles d’archives et un programme de groupes de recherche. En 10. Frank Perrin. Cazal-city, in Anssenraum Innenstadt (catalogue de l’exposition), Sprengel Museum,
1994, la commissaire présentera une exposition Le Saut dans le vide à Moscou Hanovre, 1991.
avec plus de 350 œuvres, 128 artistes, dont Daniel Buren, Annette Messager, 11. René Viau. Philippe Cazal de A à Z, Parachute, n°48, Montréal, automne 1987, p.16-20.
Patrick Saytour, Jacques Fournel, IFP, General Idea, etc. Philippe Cazal fera œuvre
commune avec Daniel Buren. Et aussi, une action-intervention très remarquée à la
une de La Pravda de Moscou, en date du 18 mai 1994. PC négociera toute une
journée dans les bureaux du quotidien moscovite, l’achat d’un espace publicitaire,
où sera imprimé en français le générique de son travail : L'artiste dans son milieu.
Lorsque nous lisons le C.V. de Philippe Cazal, nous voyons qu'il a regroupé,
malicieusement, toutes ses activités d'artiste-commissaire-agent sous la rubrique
Faits divers. Nous devrions nous méfier, car l'artiste aime jouer avec les mots !
Comme tous les commentateurs de son travail, nous admirons avec quelle
pertinence PC (marque faussement déposée par son auteur) s'assume et s'expose
sur le devant (et le derrière) de la scène. Il se joue de fausses pistes qu’il envoie
comme des flèches : faux publicitaire, faux fabricant de produits de luxe avec tous
les accessoires, fausse marque déposée, fausse carte d’invitation (voir Philippe
Cazal, Fauves, 1981), etc. Mais sous la rubrique des faits divers se cache, en
coulisses, la posture plus modestement anonyme, essentielle (Philippe Cazal et son
double PHILIPPE CAZAL) et complémentaire de l'individu Philippe Cazal. « Par ce
trait, nous pouvons prendre la mesure d'une modalité critique émancipée de tout
ressentiment, et d'une disposition non dogmatique pour le double langage et les
registres simultanés ; le désir et l'idée, la distance et l'adhésion, l'essence et la
surface. Ainsi cette capacité de résistance n'est possible que conjointe au risque ». (10)
« Il faut bousculer son propre travail. Il faut le miner pour qu'il soit cohérent. Il ne
faut pas se poser des questions dont on sait les réponses ». (11)

Marie-France Vo

9

Sarkis « 21.01.2000 - 09.04.2000 »

interview

L’exposition monographique de Sarkis qui s’est tenue au capcMusée S.F. : Comment a été conçue cette
d’art contemporain de Bordeaux du 21 janvier au 9 avril 2000
investissait l’ensemble du lieu. La grande nef était plus exposition par rapport à l’institution ?
particulièrement occupée par de petites estrades sur lesquelles
étaient installés des tapis issus de pays en conflits. Ces tapis Au sujet de sa réalisation, quelle a été
permettaient l’installation confortable des visiteurs qui pouvaient
ainsi observer des vidéos de l’artiste. Chaque estrade possédait un votre part d’autonomie, s’agit-il d’un
téléviseur. Un son de gong oriental annonçait le début des films,
plongeant la grande nef dans une atmosphère de concentration et travail de collaboration ?
de recueillement. Ce lieu, fragment de l’exposition était aussi, trois
après-midi par semaine, le terrain de rencontre de l’artiste avec les Sarkis : Au début, quand vous imaginez une
visiteurs. Tous étaient libres d’interroger Sarkis et d’engager ainsi des
conversations et des questionnements sur l’art et le travail de l’artiste. exposition, vous vous laissez couler, vous avez
C’est à cette occasion que j’ai réalisé l’interview, en présence de
Henri-Claude Cousseau, directeur des Musées de Bordeaux. beaucoup d’images à formuler. J’ai commencé

à assumer le projet du capc il y a deux ans et

demi. Il y avait d’abord des conditions

budgétaires précises. C’était aussi aux

commissaires de me donner des limites, de me

dire : « maintenant c’est trop, on ne peut pas ».

L’exposition est d’abord un endroit de

rencontres, de paroles.

Henri-Claude Cousseau : C’est un dialogue Vue de l’exposition Sarkis « 21.01.2000 - 09.04.2000 »
presque quotidien, au moins hebdomadaire. © Frédéric Delpech, capc, Bordeaux

Nous nous rencontrons, nous en parlons, l’artiste expose, l’institution répond. C’est une

construction à deux parties, et c’est vrai qu’il y a des moments, où l’on perçoit que le projet

peut excéder ou non les limites budgétaires fixées au préalable. Je trouve d’ailleurs ces

questions abominablement prosaïques. L’exposition se bâtit au fil des jours et cela même si

elle se construit à partir d’un projet global qui est l’intention, le projet de l’artiste bien sûr.

Sarkis : Comme vous l’avez sûrement senti, je travaille avec le cœur du bâtiment et aussi

avec l’architecture, mais avec le personnel qui anime cet endroit. Je peux dire que j’ai

énormément travaillé avec les gens qui sont ici, y compris les gardiens. Tout s’est construit

autour de l’esprit de collaboration. Je n’aime pas donner des ordres. Ainsi, par rapport aux

ouvriers qui ont travaillé ici, je leur disais quelles images j’avais dans la tête, je dessinais,

j’exprimais mon désir, mais je n’ordonnais jamais.

H.-C.C. : Il faut peut-être ajouter que toutes les expositions ne sont pas de cette nature, ne

reposent pas toutes sur un dialogue entre l’institution et l’artiste. Quand c’est le cas, ça se

passe bien ou pas. En l’occurrence tout s’est très bien déroulé parce que Sarkis a

effectivement accepté de dialoguer avec tout le monde. Sa présence ici a beaucoup modifié

la perception du projet par notre équipe. Mais il y a des projets qui reposent sur d’autres

difficultés que celle là. La prochaine exposition au capc que propose Madame Bernadac,

commissaire, repose sur un dialogue avec 75 artistes. Dans ce cas, il est hors de question

que toute l’équipe du musée soit en permanence en dialogue avec ces personnes. Ce sera

au conservateur de gérer comme un chef d’orchestre les différentes parties et de les contenir

afin que tout se passe correctement.

Vue de l’exposition S.F. : De jeunes commissaires travaillent aujourd’hui leurs expositions
Sarkis « 21.01.2000 - 09.04.2000 » comme des lieux d’assimilation des œuvres d’art, partant du constat de
capcMusée d’art contemporain, Bordeaux l’émergence de ce débat, quelle est pour vous la relation artiste-
© Frédéric Delpech commissaire ? Que pensez vous de ce débat d’actualité ?
Sarkis : Jusqu’à présent, aucun commissaire n’est venu me voir en me disant : « je prends
Sandra Flouriot : Pouvez-vous nous expliquer ce qui vous a amené à concevoir tes histoires et tu restes à la maison ». Cela veux dire que je suis encore vivant et qu’ils me
l’exposition au capcMusée d’art contemporain de Bordeaux ? respectent. Mais il faut savoir que je parle beaucoup de la notion de statut. Il faut que
Sarkis : Jusqu’à présent, et je ne sais pour quelles raisons tous les artistes ont abandonné l’œuvre ou la chose trouve le sien. Par exemple, Adorno, philosophe-musicologue, voulait
leur exposition après le vernissage. Concevoir une exposition, après vingt ou trente ans être musicien. Il a travaillé avec Schœnberg, jusqu’au moment où il a senti qu’il n’était pas
d’expérience, demande beaucoup de temps et d’engagement, c’est un réel travail qui se un musicien créateur. Il est alors devenu musicologue, philosophe. Il ne singeait pas. Il faut
construit sur un projet et le vécu de l’artiste. J’ai donc pris conscience qu’il était savoir qui on est. Je ne crois pas qu’une personne puisse tout faire. Un commissaire reste un
dommageable de s’investir dans une telle expérience et de l’abandonner après le commissaire, et s’il y en a qui veulent remplacer les artistes, on verra bien comment ils feront.
vernissage. Pour le projet du capcMusée d’art contemporain de Bordeaux, j’ai voulu H.-C.C. : On n’a pas encore vraiment vu des commissaires devenir des artistes, au sens
accompagner l’exposition jusqu’à son terme, c’est-à-dire non plus le premier jour mais total et définitif de la question.
jusqu’au dernier jour de l’ouverture au public. Sarkis : Mais il y a certains commissaires qui disent qu’ils sont des artistes quand même.
Cette idée m’est venue il y a cinq ans, après une exposition que j’avais eue en Allemagne. H.-C.C. : Notre époque est quand même marquée par une interférence qui mènera peut-
Des guides professionnels m’ont rencontré afin de pouvoir expliquer mon travail au public. être à quelque-chose que l’on ignore encore et qui n’existe pas. Je ne suis pas contre, à
J’ai compris qu’en passant par leur intermédiaire je ne pouvais pas connaître ce public. Peu condition que l’enjeu soit autre que celui du pouvoir. S’il est intellectuel, artistique,
avant la fin de l’exposition, on m’a informé que 120 personnes avaient demandé à me identitaire, alors je ne suis absolument pas contre. Lors d’un accrochage, on entre dans une
rencontrer. J’ai saisi l’opportunité et je me suis rendu en Allemagne. D’après les questions intimité avec les œuvres. On peut certainement se tromper, car chacun a sa propre
qui m’ont été posées, j’ai réalisé que j’avais éventuellement raté quelque chose et que sensibilité. Je crois que l’on fait un effort de mimétisme et de fusion qui est tel, que la
j’aurais pu venir entre-temps afin d’alimenter la curiosité du public. Mais cette exposition décision s’apparente à un domaine qui relève de l’artistique. Et d’ailleurs, quand on
n’était pas préparée pour ça. Dans le rapport entre le public et mes travaux, il n’y avait s’entend avec un artiste comme c’est le cas, je crois, avec Sarkis, on fusionne, on sent les
pas d’espace pour moi. A partir de ce moment là, j’ai commencé à réfléchir à l’exposition choses. Il y a un dialogue de construction, d’invention, qui a aussi à voir avec la poésie de
suivante en tant que lieu où il serait possible de discuter avec le public. la création.
L’exposition du capc est très horizontale et fonctionne par l’accueil des visiteurs sur des
espaces de réflexion où l’on peut s’asseoir. Etant donné que je suis très attaché à l’idée de Sandra Flouriot
travailler avec des jeunes, j’ai décidé d’en accueillir un tous les matins (étudiant ou jeune
artiste), afin de discuter avec lui durant trois ou quatre heures. Pendant ce laps de temps, Rencontre avec l’artiste
nous parlons de son travail, je le conseille tout en sachant que je ne vais plus le revoir. Dans Sarkis « 21.01.2000 - 09.04.2000 »
une école d’art, on se voit par fraction, on n’élargit pas l’espace et le temps. Ici, nous nous capcMusée d’art contemporain, Bordeaux
concentrons intensément, nous discutons et essayons de sortir un travail, ce qui est
beaucoup plus proche de ma propre démarche. Le matin est réservé aux jeunes et l’après © Frédéric Delpech
midi au public. J’aime beaucoup ce contraste, le matin est un moment privé alors que
l’après-midi est public.

10

Philippe Cazal Jean Dupuy : Les bonnes à tout faire avec Madame la Marquise. Interface, Dijon, 28 - 30/10/96 Franck Pellissier, Philippe Szechter
TILT. Interface, Dijon, 24/04 - 22/05/99 Ipso Facto, Nantes, 16/10 - 06/11/99
Interface / Ipso-Facto
Agnès Geoffray Frédéric Buisson & Olivier Nerry
Fase. Interface, Dijon, 28/05 - 28/06/98 l'exemple des réseaux alternatifs Ipso-Facto, Nantes, 27/11/99 - 08/01/00

Emnauelle Radzyner Les galeries parisiennes et les institutions sont accusées de monopoliser Maxime Touratier, Marika Bührmann
Interface, Dijon, 10/04 - 08/05/98 Ipso-Facto, Nantes, 15/01 - 05/02/00
la monstration de l'art contemporain en France, les jeunes créateurs se
Putain de commissaire ! Emmanuel Licha, Christelle Familiari
Il interpelle à la Moulin : rapide et trouvant souvent condamnés à faire du porte-à-porte, leur dossier sous le Ipso-Facto, Nantes, 04 - 25/03/00
brutal.
Il analyse la tendance raide et bras... Avec la volonté de provoquer les choses, les impulsions alternatives Ipso-Facto
froid tel un Derrick. Il donne des 56, Bd Saint-Aignan, 44000 Nantes
leçons de morale et d’éthique se développent depuis quelque temps déjà, un peu partout en France. Par tél. 02 40 69 62 35
façon Navarro. Interface
Il tire sans sommation mais ses exemple, deux galeries — qui n'en sont pas vraiment au sens classique du 104 rue de Mirande, 21000 Dijon
bavures ne sont jamais tél./fax 03 80 65 19 07
condamnées : dans ce milieu, la terme, Interface à Dijon et Ipso-facto à Nantes, au parcours similaire,
police des polices est inefficace.
Son réseau d’indicateurs est proposent une autre façon d'exposer l'art d'aujourd'hui.
puissant, il travaille en « famille »
comme les Cordier. Il s’acharne sur Si, à Dijon, les "locataires" de l'appartement-galerie Interface se succèdent
les subventions à la manière de depuis 5 ans, à Nantes, c'est un ancien magasin de fleurs qui fut réaménagé
Colombo sur son suspect. en 1998, pour offrir une salle d'exposition au rez-de-chaussée avec devanture
Il pratique la garde à vue de façon en vitrine et un salon, aux dimensions modestes, au premier étage. Pour ces
abusive et l’artiste relâché sera deux lieux, une même démarche : frais émoulus de l'Ecole des Beaux-Arts, les
toujours sous contrôle judiciaire. jeunes artistes décident de se prendre eux-mêmes en main et de créer une
Quand le ministère veut des association afin de monter leur propre espace d'exposition. Ils préfèrent
résultats et qu’il n’a pas de dépenser leur énergie à mettre en place une structure plutôt que de
nouveaux suspects, il ressort des démarcher galeries et institutions. Naturellement, créer une telle structure
anciens. est l'occasion pour ces nouveaux diplômés de s'exposer eux-mêmes. Mais,
En fin de carrière, c’est un pacha une fois les plâtres essuyés, les artistes, comblés sur l'instant, ne s'arrêtent
style Maigret, il est resté pas pour autant. Ils se transforment en maîtres d'un lieu d'exposition, un lieu
charmeur façon Magnum mais a qu'ils veulent éclectique, ouvert au plus grand nombre, résident ou visiteur.
laissé de côté son look Starsky & Avant d'être un espace d'exposition, Interface et Ipso-facto sont des lieux qui
Hutch. résonnent de leur ancienne fonctionnalité. Pas besoin d'installer une
Il a déjà préparé sa retraite, un convivialité esthétique, d'implanter du "relationnel" dans ces lieux ou de forcer
poste de prestige, Interpol à les échanges. Dès l'origine, et comme une nécessité première, les initiateurs
Genève ! de ces lieux ont conçu leur espace comme ayant une identité, comme étant
un milieu dynamique non dénué d'une certaine ambiance.
Olivier Nerry
Ici ou là-bas, on ne veut pas entendre parler d' "écurie d'artistes" ou de
11 politique culturelle. Le choix des artistes et la programmation des expositions
se font essentiellement sur des coups de cœur, au gré des rencontres et des
envies. On s'attache avant tout à faire connaître et à diffuser un travail,
l'œuvre d'un artiste. Pour le jeune diplômé, ces espaces, beaucoup plus
accessibles, sont bien souvent l'occasion d'une première expérience dans le
monde des galeries. Mais il n'est pas interdit pour autant d'accueillir des
artistes confirmés qui trouvent là, le moyen de s'exprimer avec beaucoup
moins de contraintes et de pression. Dans la conception de son exposition,
toute latitude est laissée à l'artiste, derrière lequel les organisateurs se
retranchent, tout en rappelant les exigences du lieu dont ils sont les gardiens.
Ainsi, Interface privilégie la création in situ, l'artiste devant tenir compte de
l'appartement, qui doit garder sa fonction de logement privatif habitable. Ipso-
Facto préfère le choc de la confrontation, présentant dans une même salle
d'exposition le travail de deux artistes qui ne se connaissaient pas auparavant.
Pour les organisateurs, eux-mêmes artistes, le moment privilégié reste bien
évidemment celui de l'accrochage qu'ils ne peuvent concevoir sans la
présence et la participation active de l'intéressé.

Ouvertes à toutes propositions, les deux associations n'hésitent pas à
dépasser la sphère locale et à constituer un réseau de contacts avec des
artistes et avec d'autres structures du même type. C'est ainsi qu'elles se sont
rencontrées et ont décidé de mettre en place un échange artistique : en
décembre dernier, Ipso-Facto avait invité Interface à s'exposer au public
nantais, et c'est en juin prochain que les Dijonnais leur retourneront
l'invitation.

L'exemple des galeries Ipso-facto et Interface n'est pas unique. Partout en
France, des lieux identiques permettent une diffusion de l'art au sein d'un
réseau qui se propage et se développe en marge, mais tout en étant aussi
sérieux et intéressant que les structures classiques. Il serait regrettable
d'ignorer ces initiatives qui comblent le fossé qui existe entre les artistes et
une certaine idée du marché de l'art.

Antoine Sausverd

auxerre HORSD’ŒUVRE n° 7 gueugnon montbéliard Rencontre avec E. T
édité par l’association
Artothèque, INTERFACE Maison pour tous/Château d’Aux Le 10 neuf Et se tait Ernest T
Musée d’art et d’histoire 104 rue de mirande L’essai est-il ra T
21000 Dijon 17, Rue Jean Bonveri 19 Avenue des Alliés Est-ce ma tasse à T
2 bis place St-Germain - 89000 Auxerre tél. / fax 03 80 65 19 07 71130 Gueugnon 25200 Montbéliard Croit-il, est-il a T
ouvert de 10 h à 18 h 30 sauf mar. e-mail. [email protected] ouvert de 9 h à 12 h et de 14 h à 18 h, tél. 03 81 94 43 68 Certains sont dérou T
10 h - 12 h / 14 h - 18 h à partir du 01/10 sauf sam. et dim. ouvert de 14 h à 19 h du mar. au sam. D’autres sont dépi T
tél. 03 86 51 09 74 Comité de rédaction : tél. 03 85 84 43 52 le dim. de 15 h à 19 h D’aucuns sont démon T
® Frédérique Lucien : Luc Adami, Laurence Cyrot, ® « Qui plume la lune » œuvres du ® « Buenod Aires in & out » Moi je suis écla T
09/07 - 09/10/00 Jérôme Giller, Guillaume Frac Bourgogne : 20/05 - 15/06/00 C. Antoniadis, O. Blasi, F. Burgos, Mais mon temps est comp T
Mansart, Michel Rose, Antoine R. Fuertes, D. Ontiveros, M. Reyna, Et je dois me hâ T
besançon Sausverd, Fabienne Tainturier, issoire P. Siquier : 29/06 - 03/09/00 Salu, avec un T
Marie France Vô Ernest, suivi d’un T
Le Pavé dans la Mare Coordination et mise en page : Association Art Contemporain nice
Frédéric Buisson 23 mars 2000 - 17 h 30
6 rue de la Madeleine Ont participé à ce numéro : Centre Nicolas Pomel - 63500 Issoire Galerie Françoise Vigna
25000 Besançon Luc Adami, Laurence Cyrot, ouvert tous les jours de 10 h 30 à Forum de la Fnac - Dijon
ouvert du mar. au sam. de 14 h à 18 h Sandra Flouriot, Jérôme Giller, 12 h 30 et de 13 h 30 à 18 h 30 3, Rue Delille
tél. 03 81 81 91 57 Guillaume Mansart,Vincent tél. 04 73 89 07 71 06000 Nice Michel Rose
® Sandra Foltz, Laurent Sfar : Pécoil, Michel Rose, Antoine ® « Cinq propositions » Marc Camille ouvert de 15 h à 19 h sauf dim. et lun.
jusqu’au 20/05/00 Sausverd, Marie-France Vô Chaimowicz : 01/07 - 13/09/00 tél. 04 93 62 44 71 PS : L’artiste était à l’heure,
® Lin Delpierre : 15/06 - 13/07/00 ® « Stras » Ingrid Luche (participation
Couverture : joigny de Jean-Luc Verna) : 21/06 - 29/07/00 d’où ces hexamètres pour
bourbon lancy Antoine Sausverd ® « Le Capital illustré » Jean-Baptiste
texte extrait de l’interview d’E. Atelier Cantoisel Ganne : 09/00 un maître exact !
Pour l’art contemporain Troncy, Le Monde, 21/01/00
32, Rue Montant au Plalais pougues-les-eaux
Musée Municipal Double page intérieure : 89300 Joigny
Eglise Saint-Nazaire Ernest T ouvert de 10 h à 12 h et de 14 h à Centre d’Art Contemporain
71140 Bourbon-Lancy 19 h - sur rdv le dim. matin, lun. et mar.
ouvert de 15 h 30 à 18 h 30 Publié avec le soutien de la tél. 03 86 62 08 65 Parc Saint-Léger, avenue Conti
Galerie du Vieux Bourbon Direction régionale des affaires ® « Support mémoire, 20 années d’art 58320 Pougues-les-Eaux
14, Rue de l’Horloge culturelles de Bourgogne, du contemporain » Viallat, Dezeuze, ouvert de 14 h à 19 h sauf lun.
71140 Bourbon Lancy Conseil régional de Bourgogne, Pincemin, Buraglio, Bordaries, et jours fériés - tél. 03 86 90 96 60
ouvert de 12 h à 22 h de l’association Interface et de Gerbaud, Madé, Tastemain... : ® « Avenue Conti » M. Aballéa, P.
tél. 03 85 89 03 70 l’ensemble des structures 10/06 - 17/09/00 Corillon, B. Genée, A. Le Borgue :
® Rafaël Mahdavi « Sculptures de annoncées dans l’agenda 28/05/00 - 31/08/00
1995 à 2000 » : 08/07 - 31/08/00 lorraine
Impression : ICO Dijon reims
Restaurant « La Grignotte » Horsd’œuvre paraît 2 fois par an Frac Lorraine
12, Rue de l’Horloge Tirage 2 000 exemplaires Frac Champagne-Ardenne
71140 Bourbon Lancy 7, Place de la cathédrale
ouvert de 12 h à 24 h dijon 57000 Metz 1, Place Museux
® Estelle Laniol « T’en est où de ton Programme détaillé sur les expositions : 51100 Reims
régime ? (je mange, donc je suis) » : Interface tél. 03 87 74 20 02 tél. 03 26 05 78 32
08/07 - 31/08/00 fax 03 87 74 20 56 ouvert de 14 h à 18 h sauf lun.
104 rue de Mirande, 21000 Dijon www.lorraine.webstub.com ® « Filliou Today » Robert Filliou :
chalon-sur-saône tél. 03 80 65 19 07 ® Dans le cadre de « Collection été » 07/04 - 30/07/00
ouvert sur rdv une série d’expositions de la collection ® Uri Tzaig : 28/09 - 19/11/00
Chalon dans la Rue ® J.-F. Guillon, J.-F. Courtilat, J.-F. G : du Frac Lorraine : 05/05 - 31/08/00
28/05 - 14/07/00 Musée Barrois, Bar-le-Duc / Galeries st sauveur en puisaye « Ma'lesh »
Festival Transnational des artistes Poirel ; Galerie Lillebonne ; Galerie de
de la rue - 71100 Chalon-sur-Saône Frac Bourgogne Visu, Nancy / Galerie Oeil ; Castel Crac - Château du Tremblay L'installation de Jens Haaning pour la rue du Piémont devait être
tél. 03 85 48 05 22 Coucou ; Médiathèque, Forbach / située géographiquement à la lisière de la zone industrielle et
® « Festival Transnational » : 49 rue de Longvic, 21000 Dijon Ancienne huilerie, Maxey-sur-Vaise / 89520 Fontenoy-en-Puisaye commerciale et du quartier résidentiel de Planoise. La zone
20 - 23/07/00 ouvert du lun. au sam. de 14 h à 18 h Galerie d’art contemporain, St-Dié-des- ouvert de 14 h à 19 h sauf lun. industrielle et commerciale est une forêt de signes - enseignes
tél. 03 80 67 18 18 Vosges ; Musée Pierre Noël / Galerie tél. 03 86 44 02 18 d'hôtels, de grandes surfaces, de restaurants, d'usines, affiches 4
château-Gontier ® « Italian Paintings 1962 - 1965 » des Arts, Blénod-les-Pont-à-Mousson / ® « Contagion » Frédéric Buisson ; x 3, néons... Le projet de Jens Haaning consistait à placer un
Marcia Hafif : 28/04 - 09/06/00 Musée départemental d’art ancien et « Iron » Joël Weidmann : caisson lumineux de 7 m par 3m portant une inscription
Chapelle du Genêteil ® « Recherches Limite » coll. Frac contemporain ; La Lune en Parachute 07/05 - 25/06/00 typographiée en langue arabe sur le mur d'un immeuble d'habitation,
Bourgogne : 23/06 - 29/08/00 Epinal / Synagogue de Delme, Delme ® « Masques » Werner Strub ; dans une situation telle qu'elle puisse faire penser à la signalétique
Rue du Général Lemonnier / Centre culturel J. Brel, Thionville / « Paillasses et Bouffons » Clément : du siège social d'une entreprise. Les logos d'entreprise sont étudiés
53200 Château-Gontier Galerie Barnoud Première rue ; Le cube Briey / MJC J. 02/07 - 29/10/00 pour être accrocheurs, et sont toujours d'apparence soignée. Le
tél. 02 43 07 88 96 Brel, Dieuze projet d'installation de Jens Haaning reprend cette apparence, en la
ouvert de 15 h à 19 h sauf mar. 27 rue Berlier 21000 Dijon sélestat détournant de sa fonction habituelle. En effet, les logos n'ont pas
® « Harmonichaos » Céleste Boursier visites sur rdv - tél. 03 80 66 23 26 lyon pour destinataires un « public », comme c'est le cas de l'art, mais
Mougenot : 13/05 - 25/06/00 ® « Ciel/Terre » Peter Fletcher : Frac Alsace des « cibles », en termes de marketing. Ecrit dans une langue
® Jean-Michel Sanejouand : 23/05 - 08/07/00 Musée d’Art Contemporain majoritairement incompréhensible, et possédant un sens
08/07 - 10/09/00 ® Didier dessus : 09/09 - 28/10/00 1, Espace Gilbert Estève indéterminé, eu égard au contexte, pour ceux qui sont en mesure
81 quai Charles de Gaulle, 67600 Sélestat de la déchiffrer (Ma'lesh signifie : « tant pis », « peu importe » —
Centre culturel Le Carré Musée des Beaux-Arts Cité Internationale - 69006 Lyon Ouvert du mer. au sam. de 14 h à 18 h une expression particulièrement polysémique pouvant exprimer à la
tél. 04 72 69 17 18 le dim. de 11 h à 18 h fois l'indifférence, la résignation, le pardon ou une certaine
Théâtre des Ursulines Palais des États de Bourgogne ouvert de 12 h à 19 h, sauf lun. et mar. tél. 03 88 58 87 55 rancœur), l'enseigne perd toute fonction commerciale directe, pour
Couloir des cellules du couvent des 21000 Dijon (Entrée Cour de Bar) ® « La collection : Installations - ® « Dites-le avec des fleurs » Anne ne conserver que la dimension symbolique générique de ce type de
Ursulines - Place André-Counord ouvert de 10 h à 18 h sauf mar. l’exotisme sans partage » ; « White Ferrer : 07/06 - 13/08/00 signes, qu'elle fait apparaître par cette occasion. Symbole de
53200 Château-Gontier tél. 03 80 74 52 70 (ou 52 09) Nights (création) » Robert Morris : ® « Le jardin d’Eva Pora » Jean-Luc pouvoirs particuliers, la signalétique d'entreprise devient ici
tél. 02 43 09 21 50 ® « L’art des collections, bicentenaire 09/06 - 17/09/00 Brisson : 07/06 - 21/12/00 anonyme, ne laissant apparaître que sa fonction dans sa nudité. En
ouvert de 15 h à 19 h sauf mar. du musée des beaux-arts, du Siècle des rendant l'inscription dans une typographie arabe, Jens Haaning rend
® « Prières » : 08/07 - 10/09/00 Lumières à l’aube d’un nouveau Josselyne Naef - Art Contemporain tanlay également sensible l'absence généralisée de représentation de la
millénaire » : 17/06 - 09/10/00 culture qui s'y rattache dans notre société.
demigny 4 rue Jarente - 69002 Lyon ADAC - Centre d’art de Tanlay
dole ouvert du mar. au sam. Le travail de Jens Haaning porte, de façon réccurrente, sur la
L’Espace d’Art Contemporain de 14 h 30 à 18 h 30 Château de Tanlay manière dont la société est structurée, et sur les expressions du
Frac Franche-Comté / Musée des tél. 04 78 42 22 09 89430 Tanlay pouvoir (culturel, économique...) qui la traversent. L'œuvre de Jens
Place de l’Eglise Beaux-Arts ® Frédéric Diart : 16/05 - 19/06/00 ouvert tous les jours. de 11 h à 19 h Haaning ne porte pas de jugement, elle n'énonce aucune
71150 Demigny ® Muriel Olesen : 27/06 - 19/07/00 tél. 03 86 75 76 33 affirmation. Elle fait appel à la faculté de jugement de chacun en tant
tél. 03 85 49 45 52 85 rue des Arènes, 39100 Dole ® « Domiciles, de la maison à la ville, qu'individu. Une société n'est adulte que lorsqu'elle considère ses
® Perry Roberts : 06/05 - 09/06/00 tél. 03 84 79 25 85 mâcon de la construction à la ruine » 23 artistes citoyens comme tels, et fait conséquemment le pari de leur
® Thierry Boucton : 22/06 - fin été 2000 ouvert de 10 h à 12 h et de 14 h à contemporains : 27/05 - 01/10/00 intelligence. Un pari que le maire de Besançon et le service de
® Jean Pfaff : 16/07 - 19/08/00 18 h, sauf lun. (ouvert du mer. au dim. Musée des Ursulines l'urbanisme de la même ville n'ont pas jugé bon de faire, ayant
® Hartmut Böhm : 02/09 - 07/10/00 du 01/07 - 31/08) thiers interdit, le jour même de l'accrochage, la réalisation du projet en
® « Objecteurs/Artmakers » : 5 rue des Ursulines question. Appréhender cette œuvre comme une " provocation ",
delme 15/04 - 04/06/00 71000 Mâcon Centre d’art - Le Creux de l’Enfer comme l'a fait le service municipal d'urbanisme de Besançon, puis
® « Dessins anciens de la collection ouvert de 10 h à 12 h et de le Maire lui-même, est bien sûr une parfaite méprise, eu égard à la
Synagogue de Delme / du Musée » : 16/06 - 30/09/00 14 h à 18 h sauf lun. et dim. matin Vallée des Usines - 63300 Thiers nature particulièrement engagée socialement et foncièrement
Centre d’art contemporain tél. 03 85 39 90 38 ouvert de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 h progressiste de l'œuvre de Jens Haaning, qui compare lui-même
grenoble ® « Entre l’oubli et la mémoire » objets les sam. et dim. de 14 h à 19 h, sauf souvent la situation des artistes au sein de la société à celles des
33 rue Raymond Poincaré gallo-romains : 31/05 - 31/12/00 mar. et 16/09 - tél. 04 73 80 26 56 immigrés. Jens Haaning : « D'une certaine façon, l'artiste est une
57590 Delme Magasin / Cnac ® « Un siècle d’aviron » : ® « Herr monde » Claude Lévêque : sorte de marginal, et il présente des similarités avec les autres
tél. 03 87 01 35 61 01/07 - 31/12/00 11/06 - 17/09/00 marginaux que sont les immigrants, mais la grande différence, c'est
ouvert de 14 h à 19 h, sauf lun. et mar. Site Bouchayer-Viallet ® V. Boudier : 07/10 - 31/12/00 que l'artiste, contrairement à l'immigré, travaille comme un média
® Balthasar Burkhard, Bernard 155, Cours Berriat metz pour la société. On accorde beaucoup d'attention a ce qu'il a à dire
Borgeaud : 17/06 - 03/09/00 38028 Grenoble Cedex 1 troyes avec son travail ou son discours, mais il est rare, par exemple, qu'on
® « 70 x 7 Le Repas - Acte IV» Lucy ouvert de 12 h à 19 h, sauf lun. Faux Mouvement demande à un musulman de s'exprimer sur la société. » Il semble
Orta : 02/07/00 (Dieuze, Centre ville) tél. 04 76 21 95 84 CAC - Passages par contre qu'il soit beaucoup plus commun de ménager la stupidité
® Christopher Williams, Fabrice Gygi, 4 rue du change, BP 84131, ordinaire en période pré-électorale.
Michael Smith, Gary Panter : 57041 Metz Cedex 01 9 rue Jeanne d’Arc
28/05 - 10/09/00 tél. 03 87 37 38 29 10000 Troyes Vincent Pécoil
ouvert de 13 h 30 à 18 h30 ouvert de 14 h à 18 h, mer. 14 h à 20 h
Éditions Si vous souhaitez que vos manifestations soient sauf dim. et lun. sauf dim. et jours fériés publication rectificatif
annoncées dans l’agenda du prochain numéro,une ® « Comme des grands (3) » : tél. 03 25 73 28 27
participation de 100 fr minimum est demandée. 07 - 24/06/00 ® « Terriblement Forain » Jean-Michel Fabrice Gygi Dans l’interview de M.C. Chaimowicz
® « Garde-Robe » Eran Schaerf, Albérola : 15/06 - 11/08/00 (horsd’oeuvre n°6) vous me faites dire :
Bon de commande Michel Aubry, Natacha lesueur, Erwin Catalogue 80 pages - 2000 « Les nouveaux prêtres sont les artistes. »
Wurm, Franz-Erhard Walther, Marie- vassivière 23,5 x 29 cm - ill. coul. & n./bl. Je pense que M.C.C. a du mal interpréter une
Ernest T / HORSD’ŒUVRE N°7 France Uzac, Jean-Jacques Dumont... : Fr/Angl. - Prix : 195 Fr phrase que j’ai souvent « pratiquée », tirée d’une
Peinture sur palette, détail, 2000 07/07 - 30/09/00 Centre d’Art Contemporain Coprod. Magasin/Cnac, Galerie B. interview de C. Boltanski dans ArtPress il y a
600 x 420 mm van Orsouw, Galerie C. Crousel, JRP quelques années :
Impression sur Offset 250 Gr montbard 81120 Ile-de-Vassivière Editions, Frac Bourgogne, ENSBA de « Les artistes sont les nouveaux saints. »
Tirage : 50 exemplaires numérotés tél. 05 55 69 27 27 Dijon/L’Office (Rens. 03 80 30 21 27)
et signés par l’artiste + 20 E.A. Musée Buffon ouvert tous les jours de 11 h à 19 h
Prix : 300 Fr (+ 20 Fr de frais d’envoi) ® Jacques Vieille ; « Circumstance »
Rue du Parc Buffon - 21500 Montbard Simone Mangos : 06/05 - 02/07/00
Marc Camille Chaimowicz / HORSD’ŒUVRE N°6 ouvert de 10 h à 12 h et ® « La beauté du geste (l’art, le sport,
Projet de plafond pour l’Hôtel Dieu de Cluny, 1999 de 14 h à 18 h, sauf mar. et caetera » R. Buchanan, R. Fauguet,
600 x 420 mm tél. 03 80 92 50 42 J. Julien, Y. Jusidman, G. Mahé, M.
Quadrichromie - Impression sur Offset ocre 170 Gr ® « De toute nature » œuvres du Frac Negro, S. Patterson, P. Rivet,
Tirage : 99 exemplaires numérotés Bourgogne : 08/04 - 03/09/00 A. Séchas, O. Tourenc, Soussan Ltd/
et signés par l’artiste + 21 E.A. C. Delage... : 15/07 - 01/10/00
Prix : 300 Fr (+ 20 Fr de frais d’envoi)
Jean-Paul Guy


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