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« Avant la modernité, l’usage du texte dans la peinture n’a pas, semble-t-il, soulevé de scandale ou nécessité de querelle. Alors « quelle rupture a-t-il fallu pour que les modernes se risques à cet emploi comme à une transgression ? […] La question suffit pour introduire historiquement le problème de l’écrit dans l’art au XXe siècle comme une attitude transgressive. » Valérie Dupont

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Published by interface.art, 2016-06-12 12:16:02

HDO_10

« Avant la modernité, l’usage du texte dans la peinture n’a pas, semble-t-il, soulevé de scandale ou nécessité de querelle. Alors « quelle rupture a-t-il fallu pour que les modernes se risques à cet emploi comme à une transgression ? […] La question suffit pour introduire historiquement le problème de l’écrit dans l’art au XXe siècle comme une attitude transgressive. » Valérie Dupont

Keywords: Valérie Dupont, Henrique Martins Duarte, Barbara Kruger, Patrick Corillon, Marlène Gossman, Jérome Giller, alexanderplatz, Adeline Blanchard, Guillaume Mansart.

le journal de l’art contemporain en bourgogne, mars/juin 2002HORSD'OEUVRE
http://www.inter face-ar t.com/
LES CRIS DE L’ÉCRIT
Sur le toit ou sur le moi

n°10 Sur la toile ou sur la glace
Sur le voile ou sur la place
Sur le sol ou sur le mur
Sur le mol ou sur le dur
Sur les bords ou sur le sabre
Sur les corps ou sur le marbre
J’écris
Jet-cri
Tu écris

Tu es qui ; tuer qui ?
Il écrit, il est gris !
Ils écrivent ; ils décrivent
Iles et rives
Elles écrivent
Ailes-dérives

Sur la voie ou sur l’émail
Sur la soie ou sur le rail
Sur la terre ou sur le cuivre
Sur le verre ou sur le livre
Sur la page ou le tableau
Sur la plage ou le tombeau

26-27/10/01 - Dijon - Michel Rose

Lawrence Weiner, PLACED UPON THE WATHER UNDERNEATH THE STARS,
TAKEN FROM THE WATER & CARRIED TO THE STARS

Chagny, 1994-1995 (installation permanente)

Regarde, lis !

Avant la modernité, l’usage du texte dans la figures nodales de Duchamp et Magritte installée dans la petite ville de Chagny farsi. Dans son œuvre, Shirin Neshat utilise
peinture n’a pas, semble-t-il, soulevé de jusqu’à Weiner, Barry, Nauman, par des résonne poétiquement. L’inscription lisible les codes sociaux, culturels et religieux pour
scandale ni suscité de querelle. Alors, épisodes clés de l’art néo-avant-gardiste de sur une stèle de béton désigne des interroger les conditions de la femme
« quelle rupture a-t-il fallu pour que les Fluxus au Conceptuel, indiquant le mouvements faisant se rencontrer l’eau et musulmane et analyser une réalité
modernes se risquent à cet emploi comme à croisement des disciplines en même temps les étoiles : (deux ou trois choses) prétendument plus complexe qu’on ne l’a
une transgression ? » interrogeait André que la spécificité des matériaux, fussent-ils possiblement réalisables dans l’imaginaire imaginé. L’écriture est l’un de ces codes
Gunthert dans le numéro de Artstudio empruntés au langage. L’art conceptuel, ou de celui qui regarde et lit. L’image fait retour culturels utilisé de manière à ramener le réel
consacré à l’art et les mots1. La question plutôt l’étude syntagmatique de l’œuvre par ce qui avait permis de lui résister. à l’incertitude.
suffit pour introduire historiquement le conceptuelle a porté sur les structures, les À l’opposé de l’œuvre de Lawrence Entre Weiner et Neshat, nombreux sont les
problème de l’écrit dans l’art au XXème siècle fonctions de l’œuvre, ses relations Weiner, la série Women of Allah, réalisée artistes ayant recours à l’écrit. Moins
à la faveur d’une attitude transgressive. contextuelles à ses territoires pour retenir en en 1993 par l’artiste iranienne Shirin soucieux d’en retenir les qualités
Dans les œuvres cubistes, futuristes, priorité le remaniement de la définition de Neshat comprend elle aussi une matière spécifiques, ils l’utilisent pour exacerber en
dadaïstes, l’intrusion des mots a suivi l’art. scripturaire : des portraits photographiés de quelque sorte les possibilités du langage
l’évolution du système iconique. La perte de L’interaction entre les mots et le lieu de leur femmes revêtues d’un chador et dont les seul ou de l’image seule. Les fonctions se
lisibilité de l’image due à son éclatement inscription que nous proposons comme parties du corps dénudées – visage, mains, cumulent : narrative, descriptive, docu-
dans l’espace incertain de la toile est à angle d’observation de la création pieds – sont recouvertes de calligraphie mentaire, plastique, politique, poétique,
peine compensée par les messages écrits. contemporaine nous a amené à saisir la communicationnelle… elles se superposent
Loin de recomposer un discours homogène dimension plus hétérogène et plus ambiguë dans des expressions hétérogènes qui nous
sur le monde réel, le langage, le mot, la de l’œuvre, où le sens de l’écrit, les introduisent dans la multiplicité et la
lettre entraînèrent des potentialités nouvelles implications politiques, sociales, privées, complexité du réel.
liées à la plastique autant qu’à la sonorité, intimes de l’œuvre textuelle remplacent les
au rythme ou à la matérialité physique de la anciens paramètres d’ordre catégoriel, ou Valérie Dupont
langue, déroutant la création des voies analytiques, requis par les études
esthétiques habituelles. L’histoire conjointe modernistes. 1. André Gunthert, « Le texte fait figure », Artstudio,
de l’art et de l’écrit s’est ainsi déroulée au L’écrit n’agit plus contre le visuel. Une n°15, hiver 1989, p. 34.
gré de relations diverses marquées par les œuvre comme celle que Lawrence Weiner a

De la littéralité dans l’art contemporain

Où l’on entend parler d’Aristote, de Pol Pot et de Claude Closky

« Ut pictura poesies » disait le brave Horace, la peinture est comme la poésie : toutes deux seule ou en collaboration avec l’auteur américain Paul Auster, sont publiés par Acte Sud,
cherchent à représenter le monde, non pas tel qu’il est, mais comme l’artiste le voit. Par des Béatrice Cussol, éditée par Guillaume Dustan dans la collection « le rayon » chez Balland, ou
moyens différents, le poète et le peintre imitent, mais surtout manipulent et transforment. Cela Valérie Mrejen qui a publié deux récits autobiographiques chez Allia, ainsi qu’un court texte dans
dit, il faut reconnaître que, malgré ce lien, les relations entre arts littéraires et arts plastiques se
sont souvent confinées dans un rapport à sens unique où les seconds, soumis aux premiers, ne la défunte revue Perpendiculaire dirigée par Bourriaud et Jouannais. Dans tous ces cas,
l’œuvre littéraire est toujours étroitement liée à l’œuvre plastique ; elle constitue un
servaient que d’ornement. Pourtant, du Coup de dés… de Mallarmé aux Mots en liberté de prolongement des mêmes thèmes et préoccupations, mais par le biais du langage
Marinetti, l’analogie établie par Horace se fit entendre de nouveau et la poésie devint plastique : Reste un cas problématique : Claude Closky. Même si les brochures dont il nous inonde depuis
les collaborations entre artistes et écrivains se firent plus étroites et les cloisons qui séparaient 1989 ne sont publiées que par des lieux artistiques à quelques centaines d’exemplaires et
les deux domaines s’effondrèrent dans le tumulte des avant-gardes. Plus de hiérarchie : les même s’il n’a écrit, à proprement parlé, aucun de ces livres, la littérarité de ces textes est
artistes se manifestaient aussi bien par le langage que par l’image (Michaux, Artaud, Wyndham pourtant indiscutable. Ses productions manifestent d’un travail sur le langage dans lequel on ne
Lewis, Klossovski…), et les deux media se mirent à cohabiter dans un même espace, comme dans trouve certes pas la « patte » de l’écrivain, mais où le souci de s’approprier, manipuler et
transformer les codes du discours dominant est saillant. De manière délibérée ou non, il reprend
La Prose du Transsibérien de Cendrars et Delaunay. Depuis, le recours au texte dans l’art des itinéraires d’écriture déjà parcourus par des écrivains reconnus, mais en les détournant au
s’est répandu. Inséré dans une toile, accompagné de photographies ou utilisé seul, pour lui- profit de ses propres préoccupations. Ainsi, il développe jusqu’à l’absurde les inventaires (la série
même, le langage s’est affranchi de la république des Lettres pour occuper également le terrain
des arts plastiques. Mais lorsque l’artiste écrit pour produire des œuvres – au même titre que Tout ce que je peux…) ou les classements (Classification par ordre alphabétique des mots qui
l’écrivain – fait-il pour autant de la littérature ? Autrement dit : qu’en est-il de la littérarité des
textes produits par des plasticiens ? Sous quelles conditions peut-on affirmer qu’un écrit produit constituent un extrait de La Porte étroite de Gide) chers à Georges Perec (Tentative
par un artiste devient une œuvre d’art littéraire ?
Les critères subjectifs de goût, ici, ne sont pas opératoires : bon ou mauvais, un artiste reste un d’inventaire des aliments liquides et solides que j’ai ingurgités au cours de
artiste ; détester telle production ne retire en rien sa qualité d’œuvre d’art et, de la même
manière, avoir le Journal de Buren comme livre de chevet ne fait pas de Buren un écrivain. La l’année mil neuf cent soixante-quatorze, 81 fiches-cuisine à l’usage des
littérarité (notion introduite par le linguiste Roman Jakobson) est indépendante de la notion de
débutants, Je me souviens de Malet & Isaac…). Les collages de petites annonces
valeur. Il faut donc procéder à des distinctions objectives qui se fondent sur quelques principes
(Profils de célibataires), d’horoscopes (Prédictions), de slogans publicitaires (Osez et
énoncés dans la Poétique d’Aristote (un texte est littéraire), dans les théories de Roland
Mon catalogue) ou d’extraits de romans pornographiques (Vacances à Arcachon) rappellent
Barthes (les oppositions écrivain/écrivant dans les Éssais Critiques et texte de plaisir/texte la technique du « cut-up » utilisée par John Giorno et William Burroughs. Par le prélèvement, la
manipulation et le montage, Closky obtient des récits qui s’inscrivent dans des traditions
de jouissance dans Le Plaisir du texte) et de Gérard Genette (les notions de paratexte dans
littéraires tout en les explosant : Osez ou Prédictions, écrits à la 2ème personne, reprennent
Seuils et d’intertexte dans Palimpsestes). En bref, un texte est littéraire si :
- il est écrit dans le but d’être publié, une technique narrative expérimentée par Perec dans Un homme qui dort et par Butor dans
- il met en œuvre le langage non comme un moyen mais comme une fin en soi,
- il obéit à des contraintes formelles qui lui donnent une qualité propre, différente des emplois La Modification ; on peut considérer Mon Catalogue comme une tentative de
quotidien, communicationnel et médiatique,
- il établit un « dialogue » avec d’autres œuvres littéraires. renouvellement du genre autobiographique, Vacances à Arcachon comme le roman porno
Se trouvent alors hors du champ littéraire toutes les productions artistiques où le langage,
ultime ou Profils de célibataires comme le roman d’une époque, au même titre que le fut
échappant à l’espace du livre, est devenu un matériau plastique comme un autre dans l’éventail
des moyens de création dont peut disposer l’artiste. Mis sous verre, projeté, punaisé ou collé sur Les Choses de Perec. Ce qui fait de Closky un écrivain, au-delà de la notion ambiguë du « style
le mur d’une galerie ou d’un musée, il n’est pas plus surprenant de voir une exposition constituée », c’est le travail sur le langage pour lui-même, le travail de réappropriation d’un discours
confisqué par les médias, de donner une valeur esthétique à ce qui était destiné à n’avoir qu’une
uniquement d’énoncés écrits (Jenny Holzer, Le Procès de Pol Pot coordonné par Liam Gillick utilité économique, en portant sur lui un regard oblique non dénué d’ironie.
et Philippe Parreno au Magasin de Grenoble) qu’une autre présentant des ready-mades ou des Si la production écrite chez les artistes contemporains est importante, elle peut difficilement
vidéos. Art, certes, mais point de littérature. Il en est de même pour toutes les productions cependant revendiquer le statut d’œuvre littéraire, soit parce qu’elle est considérée comme un
outil plastique, soit qu’elle est assujettie à une volonté informative, argumentative ou explicative.
écrites par un artiste qui apportent un éclairage sur lui-même, sur son Néanmoins, certains artistes, comme Mrejen et Closky, manifestent la même exigence dans leur
œuvre ou sur ce qui l’entoure : textes critiques ou théoriques, pratique des deux media. Ainsi, en s’inscrivant dans des influences littéraires et en poursuivant
entretiens, lettres, journaux, chroniques, réflexions diverses et par l’écrit des thèmes qu’ils développent par ailleurs, ces artistes-écrivains créent ce que l’on
aphorismes variés. Que ces textes soient « bien » écrits n’empêchent pourrait appeler une extension-texte à leur œuvre plastique qui permet de partager une
en rien le fait qu’ils relèvent du document et non du littéraire. expérience sensible par un travail sur la langue.
En revanche, lorsqu’une maison d’édition ou une revue qui ne se
consacre pas uniquement aux livres d’art décide de publier un ouvrage Henrique Martins-Duarte
dont l’auteur est également un artiste, c’est que celui-ci a fait preuve
d’une qualité d’écriture, d’une exigence égale à celle mise en œuvre
dans la production artistique. Ces artistes-écrivains sont peu
nombreux, et chez les contemporains, on peut citer Michel Journiac

(Délits du corps, Éd. de la Différence, 1978), les poètes-performers
comme Arnaud Labelle-Rojoux, inscrits dans le mouvement de la poésie
sonore ou concrète, Sophie Calle dont les ouvrages, qu’elle a écrits

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Barbara Kruger Barbara Kruger, Power Pleasure Desire Disgust
Deitch Projects, New York, 1997

I don’t know the answer. I’m
just interested in the questions

Après avoir suivi une formation de graphiste, Barbara Kruger « Quel est le rôle des musées ? De la culture ? Ce sont
travaille pour une agence de publicité et pour le magazine de certainement des lieux touristiques. Mais les gens croient-il se
cultiver en regardant les tableaux ?… Qu’est-ce qu’ils regardent
mode Mademoiselle. Expérience qui lui permet d’étudier les ? C’est très compliqué. Je n’ai pas de réponses, je m’intéresse
différents protocoles de construction d’images utilisées par les simplement aux questions. »5
mass media pour la communication. Ainsi, à travers une
problématique féministe qu’elle aborde à partir des années Marlène Gossmann
soixante-dix, elle s’attaque au pouvoir de l’image et du texte
médiatique. Comment celui-ci est perçu, comment il agit, Le spectateur se trouve alors complètement immergé dans 1. Jane Weinstock, « What she means to you » in We Can’t Play Nature To
influence le public. Mais les codes réutilisés par Barbara cet espace saturé, où des slogans incisifs dénoncent la Your Culture, catalogue Kruger ICA, Londres et Bales, Kunsthalle, 1983, p.13
Kruger, à travers son vocabulaire visuel, peuvent-ils remettre passivité de sa situation (position) équivoque. 2. « Ce n’est pas la peine de sortir de la fac d’art, pour comprendre
en cause l’impact de l’image sur le consommateur ?. Toujours dans une logique de diffusion, Barbara Kruger va mon travail…Les textes que nous (J. Holzer) utilisons viennent
La charge critique des premières œuvres (1978) est évidente, propager ses œuvres en dehors des lieux d’expositions et directement de notre expérience du monde. Ils n’ont rien de
Barbara Kruger dissocie puis superpose le texte et l’image, détourner les objets consacrés à la consommation grâce à de mystérieux où de sophistiqué », Barbara Kruger.
une démarche qui s’apparente à celle du photomontage. Elle nouveaux supports tels que les affiches, les tee-shirts, les sacs 3. Barbara Kruger in New York Ailleurs et autrement, Paris : ARC Musée
utilise des photos existantes qu’elle détourne de leur support plastiques… d’art moderne de la ville de Paris,1985 p. 34
d’origine (magazines), les agrandit et pose des slogans 4-5. Une conversation avec Barbara Kruger à l’occasion de son installation,
acerbes, virulents ou encore des lieux communs propres à nos Pour la réalisation de Power, pleasure, desire, disgust Power, Pleasure, Desire, Disgust, Galerie Yvon Lambert, fév. 1999
comportements avec une typographie austère, une police de présenté en 1999, lors d’une exposition à la galerie Yvon
caractère (Le Futura Bold Italic) que l’on retrouve dans ses Lambert, l’artiste va introduire le son par le biais de la vidéo, la Depuis qu’il la voyait quitter le domicile conjugal pour aller
œuvres ultérieures. Détournant les conventions de mise en parole s’ajoute cette fois au montage texte/image ; trois films rôder autour de la maison d’Oskar Serti, Monsieur de Sélys
pages, l’artiste colle des lettres blanches sur des bandeaux sont projetés sur l’un des murs, un visage regarde le ne savait plus comment détourner sa femme des griffes de
rouges ou noirs, ou inverse les couleurs. spectateur et énonce un monologue : « Tu es vraiment trop nul, ce mielleux écrivain mondain. Mais lorsqu’il tomba sur une
mais pour qui te prends tu avec tes belles phrases, etc. ». lettre de Serti adressée à Catherine, son désespoir fut à son
Dans Your Comfort Is My Silence, Barbara Kruger « Au fond, cette pièce traite du pouvoir des images et des mots, comble; il se sentit dans l’obligation de pousser Catherine
reproduit les signes de l’aliénation féminine. L’utilisation du comme je l’ai déjà fait, mais plus particulièrement, du pouvoir à prendre une décision.
des sons, qui zigzaguent entre la tendresse et la violence Le 18 avril 1926, profitant de l’absence de sa femme,
pronom Your désigne le masculin : « position de pouvoir dans verbale. Et elle s’adresse directement au spectateur, ce qui Monsieur de Sélys alla chercher dans leur chambre à
l’ordre phallique des choses »1. Avec un énoncé simple et lisible caractérise mon travail depuis quinze ans. Il s’agit des « talking coucher toutes les lettres que lui-même lui avait écrites
par toutes et tous2, l’artiste traduit ici la pensée de celles à qui heads », format qu’on connaît de la télé. J’aime bien l’idée que lorsqu’ils étaient encore fiancés. Patiemment, il les disposa
l’on conseille de se taire et ajoute : les visiteurs entrent dans un des trois tunnels, entendent un au pied du lit en une sorte de château de cartes, prenant
« Je considère mon travail comme autant de tentatives de torrent de mots, voient une image et qu’ils sortent ensuite et bien soin de placer la lettre de Serti dans les premières
détruire certaines représentations et d’introduire une entendent un mélange des sons des trois tunnels différents. »4 fondations.
spectatrice féminine au sein d’un public masculin. »3 explique Barbara Kruger Si, lorsqu’elle découvrirait cet agencement à son retour,
Le travail de Barbara Kruger se caractérise par l’impact visuel À travers cette interpellation du spectateur-consommateur Catherine se précipitait. avidement sur la lettre de Serti, elle
direct de ses photos, où l’écriture est utilisée comme signe qu’elle entretient depuis vingt ans, Barbara Kruger mène un ferait s’écrouler d’un seul coup le fragile édifice ; mais si
pour contredire et commenter l’image, démarche directement combat qui questionne, remet en cause les signes quotidiens elle voulait arriver à ses fins sans brusquer les choses, elle
influencée par la publicité. Kruger veut dénoncer les armes et aliénants (image, slogan, stéréotype). Elle s’est adaptée à serait obligée de passer en revue une époque dont elle
les instruments du pouvoir et des médias, montrer comment l’évolution des langages de communication (photos, affiches, avait certainement oublié le charme.
notre vision de la réalité, notre conception de la normalité, nos installation puis vidéo) pour tendre une sorte de miroir sur
rôles sexuels sont influencés, admis et dictés par l’image et le notre relation avec le monde.
langage.
Dans ses premières installations (1990), Barbara Kruger sort Patrick Corillon : la lettre, 1995 (Collection Frac Bourgogne)
du cadre photographique et s’approprie totalement l’espace ci-dessous : Dernières pensées d’un condamné
d’une galerie new-yorkaise. Des mots et des images imbriqués
les uns dans les autres occupent les murs, du sol au plafond. à-la-chute-mortelle-dans-l’escalier-du-donjon, CAN, Neuchâtel, Suisse, 1996

Patrick Corillon L’écrit comme dépassement de la représentation symbolique

Patrick Corillon, artiste belge, né à Knokke-le-Zoute en concentrer de manière exclusive sur le motif. Ses sculptures en exil à Amsterdam en 1959, l’année de naissance de
1959, se présente avant tout comme un sculpteur de la diversifiées sont issues de la pratique du l’artiste. Le regardeur-lecteur suit son histoire d’exposition en
représentation. Pour comprendre les intentions qui l’animent, modelage/bricolage, aussi bien que de l’appropriation de exposition, dans des dispositifs sculpturaux qui se présentent
il faut remonter à l’année 1986, lorsque, en tant que l’objet « ready-made » ou de l’esthétique participative. sous la forme d’un texte accroché sur le mur et d’un objet
commissaire, il réunissait dans une exposition intitulée Que L’artiste comble par l’écriture le vide « narratif » laissé par posé, la plupart du temps, sur un socle. De tels dispositifs
reste-t-il ?, un ensemble de lettres de refus émanant les moyens traditionnels que sont la forme et la couleur. Il racontent le quotidien d’Oskar Serti, pris dans le tumulte de
d’institutions, en réponse à des propositions artistiques, systématise une méthode qui caractérise son travail : il mêle la vie. Alors que la fiction romanesque procède de la même
ainsi que des rebuts d’œuvres d’amis artistes. En exposant à la représentation par la forme (la sculpture), la méthode littéraire que les œuvres de la période précédente,
des matériaux abandonnés par les artistes ou refusés par les représentation par l’écriture (la littérature). Patrick Corillon puise cette fois dans l’esthétique du ready-
professionnels de l’art, Patrick Corillon interrogeait le statut L’écriture, Patrick Corillon l’utilise comme un écrivain. Il ne made les moyens sculpturaux de l’identification au
de l’œuvre finie, élevée au rang d’œuvre d’art par le seul cherche pas à questionner l’image en l’associant au texte, personnage. Les objets « ready-made », par leur caractère
principe de monstration. En donnant une existence aux tel Magritte par exemple dans son célèbre ceci n’est pas une commun, plantent le décor de l’action. Ils agissent comme
matériaux abandonnés ou refusés, il questionnait le système pipe, mais vise à créer les conditions d’émergence d’un des signes qui, à la fois, communiquent l’histoire littéraire et
de représentation : que donne à voir l’œuvre d’art ? Mais tropisme artistique. Le but de Patrick Corillon est d’emmener lui donnent une réalité dans le présent. Le regardeur est pris
aussi, qu’est-ce qui fonde sa légitimité ? le regardeur non pas face à l’œuvre, mais bel et bien dans dans l’ambivalence des représentations. Patrick Corillon
Dans une certaine mesure, l’art de Patrick Corillon rompt l’œuvre. Passée une première période de 1986 à 1988, crée là des dispositifs qui rappellent la tradition du
avec la tradition des avant-gardes. Au fil des années, durant laquelle il crée, avec l’écrit, des sculptures très pictogramme3.
l’artiste a libéré son œuvre des contraintes formelles pour se référencées – bas-reliefs en néon, rondes-bosses réalisées à Depuis 1988, l’œuvre de Patrick Corillon est empreinte de
l’aide de matériaux pauvres, panneaux signalétiques poésie. L’artiste maintient l’ambivalence entre imaginaire et
disposés dans l’espace urbain, ou sur des arbres dans les réalité, ajout et retrait dans la représentation. Son œuvre
jardins publics1 – il se concentre sur le regardeur. Il réalise est, comme certains biographes la définissent, une œuvre
des dispositifs qui le mettent en jeu, par connivence. Il crée hyper-texte. L’œuvre de Patrick Corillon n’est pas close par
des sculptures aux formes simples, épurées : des mâts, des son principe de représentation, mais au contraire, ouverte
bornes, des cubes qui contraignent le regardeur à au regardeur et à toutes les possibilités de son imaginaire.
participer, s’asseoir à côté de l’œuvre, monter sur une
chaise, saisir des fiches volantes pour voir, littéralement lire, Jérôme Giller
le motif. Dans le même mouvement, ce dernier s’épure lui
aussi. Patrick Corillon invente des personnages qu’il met en 1. Le motif de ces premières œuvres est également référencé. Patrick Corillon
scène dans une fiction du quotidien, banal, commun à notre puise son inspiration dans la vie des peintres et des écrivains, dont il tire des
vie. Il se garde de nommer et de caractériser ses anecdotes, et dans les formes de vie développées par les végétaux et les
personnages, tout juste, il situe les lieux des actions. Le choix animaux.
de ce retrait, comme celui de la participation à la sculpture, 2. Il est intéressant de noter ici, que certaines saynètes de cette époque sont
accentue l’identification du regardeur à l’œuvre. Le on, le traduites dans plusieurs langues afin d’élargir l’universalisme que l’artiste
nous, le vous, sont les véritables sujets de la fable artistique. recherche.
Patrick Corillon s’accorde là avec l’esprit de communauté 3. Sur un site internet (www.art-wall-sticker.com), Patrick Corillon propose à
qu’il cherche à créer autour de l’art2. la vente des dessins transférés sur autocollants. Ces dessins sont au sens
Depuis 1991, l’artiste met en scène un personnage, à qui il étymologique du terme des pictogrammes. Ce sont des dessins figuratifs
a donné une identité. Ce personnage se nomme Oskar d’objets issus de l’espace public (bancs publics, poubelles, lampadaires)
Serti. Oskar Serti est un écrivain hongrois né en 1881, mort accompagnés d’un texte descriptif d’une action qui trouve son origine dans
l’objet dessiné.

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Chaos Computer Club : Blinkenlights, 2001
Alexanderplatz, Berlin, Allemagne

Berlin Alexanderplatz le numéro 019 987654 depuis son téléphone portable et la
partie commence (1,20 Euros la minute) ! En appuyant sur les
L’écriture dans les médias interactifs touches 5 et 8 de son téléphone, on peut essayer de battre
l’ordinateur sous les regards des passants berlinois. Le jeu «
Pong » constitue un moyen de financement pour le groupe de

Sur la scène berlinoise de l’art, le téléphone portable fait son réactions, participe à l’œuvre. Duchamp déjà évoquait la hackers afin de maintenir l’installatBiolninkenlights au-delà
entrée en force comme médium interactif entre le spectateur perception du spectateur comme re-création de l’œuvre : « de la date butoir de février 2002. La participation au jeu
et l’œuvre. Sur Alexanderplatz, deux événements artistiques C’est le regardeur qui fait l’œuvre », déclarait-il. Dans devient alors une sorte de mécénat de l’immense installation.
concomitants et indépendants offrent la possibilité aux Berlinois L’apparition du téléphone portable, comme interface entre le
de participer à une installation à l’aide de leur « portable ». l’installation URBAN_DIARY, la participation du spectateur est spectateur et l’œuvre d’art, est parti-culièrement notoire dans
Sur le quai de métro de la station Alexanderplatz, les Berlinois double : elle se manifeste à la fois dans la réception de l’œuvre les deux installations d’Alexanderplatz de Berlin. Selon les
s’affairent, font les cent pas ou attendent, impatients, l’arrivée de mais aussi de façon essentielle dans l’émission de messages. propos de Guy Debord dans La Société du spectacle, on
leur train. Depuis le 14 novembre 2001, deux énigmatiques Lorsqu’il écrit un SMS, le spectateur devient auteur. Son rôle peut affirmer que le portable, « produit existant déjà sous une
surfaces de projection vertes ont fait leur apparition dans la participatif est alors d’autant plus remarquable. Les artistes de forme qui le rend propre à la consommation, peut devenir à son
station. Telles des animations publicitaires de quelques minutes, rude_architecture ont ainsi créé la trame, la matrice qui tour matière première d’un autre produit »13, en l’occurrence
des messages sont diffusés sur les surfaces colorées. Ce ne sont permet aux Berlinois de s’affirmer dans leur participation à l’œuvre d’art.
pas des images mais des textes très courts : « Hallo Silke, ich liebe l’œuvre. Les installations d’Alexanderplatz soulignent ainsi les
dich, Harald »1 ou bien « Ihr macht das echt super »2 ou encore Depuis le quai de métro, où se trouve le projet URBAN_DIARY, on possibilités d’interaction offertes par les télécommunications
« Hallo mein ! A happy day today. DEIN Vater Guenter »3. Ces peut remonter par les escalators jusqu’à Alexanderplatz afin dans l’art. Mais URBAN_DIARY et Blinkenlights ne sont pas
messages obscurs, ni publicitaires, ni informatifs, interloquent seulement remarquables par leurs prouesses technologiques.
les Berlinois agglutinés sur le quai de métro. Soudain, un de découvrir le deuxième projet interactif : Blinkenlights8, un Le médium seul ne fait pas l’œuvre. Les deux installations sont
message d’un autre genre (sur fond noir) annonce : « immeuble9 de douze étages, laissé à l’abandon depuis plusieurs également des lieux d’expression et d’affirmation pour les
URBAN_DIARY, le journal intime de la ville ». années, et animé depuis septembre par des lumières Berlinois, libres de diffuser, dans l’espace public, l’écriture de
clignotantes monochromes. Ce projet aux allures ambitieuses, leurs pensées, réflexions ou productions créatives.
URBAN_DIARY est un projet artistique organisé par le centre à l’initiative du groupe de hackers Chaos Computer Club (CCC),
d’art berlinois NGBK4 et conçu par le groupe d’artistes, est basé sur un principe simple ; la façade de l’immeuble, à Adeline Blanchard
designers et architectes rude_architecture5. L’installation l’allure mosaïcale, est transformée en écran géant de 40 x 30
métropolitaine offre aux citadins la possibilité d’envoyer un m s’étalant sur les huit derniers étages. Chaque fenêtre, 1. « Salut Silke, je t’aime, Harald ».
SMS au numéro suivant : 0162 89515966. Le message est illuminée par des lampes halogènes puissantes, constitue un 2. « Vous le faites super bien ».
ensuite diffusé, 24 heures après sa rédaction, sur les deux pixel de l’écran qui contient au total 8 x 18 pixels. Cette 3. « Salut mon ! A happy day today. Ton père Guenter ».
surfaces de projection de la station Alexanderplatz. Ce projet moindre précision permet à quiconque de créer avec aisance 4. Neue Gesellschaft für Bildende Kunst : Nouvelle Société pour les Arts
d’un « journal intime urbain » s’étale sur cent jours, du 15 un message ou une animation sur la façade depuis le site Plastiques.
novembre 2001 au 21 février 2002. 5. Les membres de ce groupe sont : Friedrich von Borries, Gesa Glück et Tobias
L’envoi d’un SMS depuis un téléphone portable au numéro de internet de CCC : www.ccc.de Neumann.
Le CCC, constitué de nombreux hackers10, s’est formé il y a vingt 6. Ce numéro n’est valable que pour les Berlinois. Si l’on appelle de France, il faut
URBAN_DIARY préserve l’anonymat de l’envoyeur puisque ses ans. Le groupe s’est fait connaître en 1981 en virant quelques d’abord composer le 00 49 pour l’Allemagne et supprimer le 0. Toutefois, il est
coordonnées (nom et numéro de téléphone) sont milliers de marks sur un compte après avoir détourné le système possible d’envoyer un SMS depuis le site internet de URBAN_DIARY : www.urban-
automatiquement supprimées par un ordinateur central. Un de sécurité d’une banque. Le but de l’opération n’était pas diary.de
comité de rédaction lit les messages envoyés avant leur d’usurper des milliers de marks mais de montrer la défaillance 7. « Dans l’avenir, tout le monde aura son quart d’heure de célébrité mondiale »,
projection afin d’éviter les SMS à caractère discriminatoire ou des systèmes de sécurité et du médium informatique en général. déclare-t-il.
raciste, selon une loi de protection allemande. URBAN_DIARY Juste après cette action de détournement d’argent, et après 8. « Lumières clignotantes ».
déplace ainsi le SMS de la sphère privée à la sphère publique. avoir rendu la somme « empruntée », le groupe de hackers 9. Ce fameux immeuble se nomme la « maison des professeurs » (« Haus des
Ce qui est de l’ordre du message intime est projeté dans allemands connut une certaine popularité auprès du public. Lehrers »).
l’espace public. Un tel déplacement soumet donc le message à L’installation gigantesque d’Alexanderplatz a été conçue à 10. Vingt trois d’entre eux ont participé au projet Blinkenlights.
de nouvelles lois propres à l’espace urbain. Les Berlinois, l’occasion des vingt ans d’anniversaire du CCC. Elle est dédiée 11. « Auch in Zukunft werden wir uns bemühen, die Öffentlichkeit über die
auteurs des SMS, peuvent savourer, l’instant de la au fondateur du groupe, Wau Holland, décédé l’été dernier. Gefahren der Informationstechnologie zu unterrichten, deren Einsatz weit
projection, ce moment de « célébrité » de monsieur tout le Depuis plus d’une décennie, le CCC se veut le porte-parole de mehr als nur das Internet umfabt », in : www.ccc.de/WarmWelcome.html
monde, ces quelques minutes de notoriété de tout un chacun tous les hackers du monde. La mission du groupe se résume 12. La participation à ce jeu sur un écran aux dimensions importantes n’est pas
par le biais des nouveaux médias. Un phénomène propre à ainsi : « Dans l’avenir encore, nous tenterons d’enseigner au sans évoquer, d’un point de vue ludique et formel, les installations de Pierre
notre société médiatisée et déjà souligné par Andy Warhol7. public les dangers de la technologie d’information qui ne se limite Huygue, Atari Light et Les Grands Ensembles, présentées à la Biennale de
pas seulement à l’internet »11. Les « bons » hackers berlinois Venise 2001.
L’installation URBAN_DIARY offre toutefois une diffusion de mettent en évidence et dénoncent les failles et les menaces 13. Guy Debord, La Société du spectacle, éditions Gallimard, Paris, 1992,
messages limitée à un espace public précis dans une ville des nouvelles technologies. Ces virtuoses de la souris ont un p.119.
déterminée. Elle est loin de l’ampleur médiatique de la télévision rôle informatif et pédagogique d’importance auprès du public.
par exemple. La vulgarisation de leurs connaissances pointues des hautes Jenny Holzer : Lustmord, 1993-1994 - détails (avec la collab. de Tibor Kadman)
Les messages diffusés donnent lieu à des réflexions technologies constitue un point essentiel de leur démarche. Par
philosophiques, coups de gueules, messages privés, le truchement de cette installation interactive, le spectateur se
déclarations d’amours, messages amers, règlements de transforme en acteur démiurge, créateur de messages animés
compte en public, rendez-vous galants, mises en garde, ou d’images. Le groupe CCC fournit aux spectateurs l’outil pour
plaisanteries, provocations. Tout est permis ou presque. La
rédaction supervise. Certains Berlinois se payent la tête de une participation inventive à l’œuvre. Toutefois, Blinkenlights
leurs lecteurs attendant le métro : « regardez fixement votre est une installation plus élitiste que la précédente
voisin d’à côté jusqu’à ce que le premier d’entre vous deux éclate
de rire ! ». D’autres se posent des questions « existentielles » (URBAN_DIARY). En effet, seules les meilleures animations sont
diffusées.
: « What the fuck is URBAN_DIARY ? ». D’autres se paient le luxe
Pour les moins avertis, Blinkenlights offre une seconde
de messages d’une inanité exemplaire : « Hallo ! :-) ». option participative : jouer depuis son téléphone portable au jeu
le plus archaïque qui soit, « Pong »12. Deux ébauches de
Naturellement, le SMS est limité à cent soixante signes et raquettes se font face et tentent de renvoyer la balle. Pour
cette participation ludique au projet, il suffit de se placer sur
génère de ce fait un langage parti-culièrement laconique, Alexanderplatz, face à l’immeuble lumineux, de composer

fourmillant d’abréviations et

de signes iconiques

nouveaux, les dits « La peau

smileys ». Ceux-ci ne sont pas

régis par des règles précises.

Il y a quelques smileys de

base à partir desquels on La peau est paradoxale, elle affiche autant qu’elle contient, elle est un interstice du langage, une surface qui exprime,
comme on exclame, tout comme un voile charnel qui enferme. La peau n’est pas le corps, elle le retient, le capte, mais
peut créer des variations à l’homme l’a prise pour support originel de son image, créant ainsi une rupture entre un corps biologique et un corps
symbolique. « Epilation jetable, soins du visage, U.V.A. Votre peau parle de vous, elle vous représente ! » clament les
l’infini. Une sémiotique grosses lettres de la vitrine d’un petit institut de beauté. Lisant cette annonce, un rien menaçante (notre peau en dirait-elle
trop ?), on comprend alors cette séparation qui nous promet une rivalité auto-personnelle délirante.
nouvelle, propre au langage La peau est un moyen, elle donne autant qu’elle cache, la peau est élastique. Elle est ce trait d’union entre le corps et
l’image, entre les corps entre eux : contact épidermique, frôlement, les organes jouent ensemble. Les corps qui s’échappent,
du SMS est ainsi mise en se complètent, comme dans ces tatouages de Jean Dupuy, le vert et puis le rouge, qui s’inscrivent sur les êtres comme pour
revendiquer une appartenance, celle de l’un à l’autre : « Moi vert ! Toi rouge ! Nous trou, nous verge ! » (« So let’s have
exergue. La rédaction d’un fun together », pourrait ajouter l’artiste). Car quand la peau s’écrit, se grave, se tague, quand le symbolique s’en prend au
biologique, il est question de désir et donc de violence (le désir cette violente passion).
SMS depuis un téléphone Dans ses séries photographiques Looking for love ou Good Fellows débutées en 1995, l’artiste suisse, Daniele Buetti
détourne des images. Il fait de ces effigies, icônes hypra-lookées des magazines de mode, filles photoshopées à l’irréalité
portable n’est pas des plus probante, des mannequins marqués (dans tous les sens du terme) au fer rouge. Images de désirs incarnés, leurs peaux, déjà
manipulées, sont déroutées par l’artiste, devenant les supports d’incisions publicitaires. L’épiderme lissé par la norme se
aisée. La petitesse des grave alors d’un Versace, Mac Donald ou autre General electric, comme écrits à la lame sur un cuir vivant.
Curieusement ces scarifications factices, effectuées par Buetti au revers des pages à l’aide d’un stylo bille, ramènent à une
touches et de l’écran ne certaine réalité des femmes devenues (comme leur papier) glacées. « L’ultime branding ! » s’exclameraient les personnages
d’un Brett Easton Ellis ; Buetti, lui, envisage de répondre coup pour coup à cette violence de l’agression publicitaire qui
facilite pas la tâche. C’est colonise le corps humain, prête à en faire une propriété susceptible d’être marquée comme du bétail. Mais rassurons-nous,
la violence appliquée par Buetti n’est qu’illusion, simples stigmates virtuels, sorte de prévision bienveillante, qui blessent
pourquoi l’apparition de comme ils dénoncent.
On retrouve l’esthétique publicitaire dans les photographies de Natacha Lesueur, mais chez elle, pas de détournements,
signes nouveaux, quelques

peu réducteurs, permet de

faciliter l’écriture de

messages concis. Face à la

projection des messages, les

réactions des lecteurs sur le

quai de métro sont variées :

indignation, gène, rires,

indifférence, réflexion,

étonnement.

L’implication du spectateur

dans cette installation du

groupe rude_architecture

est très forte. En effet, le

spectateur, par ses simples

rude_architecture : URBAN_DIARY, 2001 6
Alexanderplatz, Berlin, Allemagne

ci-dessous :
Philippe Cazal : Retour en avant, 2001
de l’appartement à la galerie et vice versa, Galerie Barnoud & Interface, Dijon

Petits arrangements avec les mots toiles, bleu sur fond rouge et Sorbonne où ils sont peut-être apparus la première fois,
inversement. Les tableaux, tels réapparaissent de manière inattendue dans l’appartement
contigu à la galerie, sur les vitres de la véranda. Le texte,
des panneaux publicitaires, découpé de manière anarchique, est réparti sur toute la
surface d’un carré bordé de noir, en gardant le sens de
rythment les baies vitrées de lecture. Les beaux caractères Frutiger, dessinés par le
graphiste designer suisse du même nom pour la signalétique
l’une des agences. Dans de l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle – remplacent
l’écriture manuscrite des slogans originaux. L’ensemble,
l’autre, le même texte gravé sur sobre et discret, s’intègre parfaitement avec la structure
métallique du lieu. Confronté au mystérieux chaos des mots
une petite plaque en laiton méconnaissables, on s’obstine à en dénicher le sens. On
découvre alors toute l’actualité ou la désuétude, la poésie,
partage la vitrine avec le titre la candeur de ces slogans usagés que PC a réactivés en leur
créant un nouvel habillage.
Version originale, une en- Mutin et ironique, PC sème le désordre avec l’élégance d’un
designer graphiste. En détournant une esthétique actuelle,
seigne lumineuse. Les couleurs familière et attractive, il promeut des messages aux
connotations subversives, qui s’opposent à la surenchère
vives, vibrantes et contrastées, aliénante de la presse écrite et des messages publicitaires.
Avec lui, le regard s’aiguise.
la clarté du néon frappent
Laurence Cyrot
l’œil. Quant aux textes, ils
1. Titre de son exposition en 1985, à la galerie des Arènes à Nîmes.
relancent le débat sur le statut 2. Diversione, 1990, galerie Paolo Vitolo, Rome.
Cette composition texte blanc sur fond orange est toujours très actuelle
social de l’artiste et gagnent puisqu’elle correspond à la charte graphique conçue récemment pour un
opérateur de téléphone français.
encore en efficacité, vu la 3. Il existe une autre version « kit » de cette pièce, réalisée sur deux plaques
de métal, avec système d’accrochage fourni.
spécificité du lieu qui les 4. Retour en avant, 1998, Kitakanto Museum of Fine Art, Maebashi, Gumma,
Japon, et 2001, Interface et Galerie François Barnoud dans le cadre de
accueille. Dans le même l’exposition De la galerie à l’appartement & vice-versa. Le titre de la pièce fait
référence au mouvement éphémère créé par les étudiants en grève des Beaux-
registre ironique et pro- Arts de Paris : l’Atelier populaire, qui se consacra à la création d’affiches
illustrant les slogans révolutionnaires tout neufs. Sur la dernière affiche, des
Bordeaux, 1975 : Philippe Cazal, en homme-sandwich, vocateur, en 19902 il réalise, à l’aide d’agrandissements moutons accompagnaient le texte Retour à la normal.

déambule dans les rues, une planche peinte en blanc sur le photographiques, une série de « tableaux » minimalistes Philippe Cazal : mobilier de collectivité, 2001
Arrière plan, premier plan, Frac Languedoc-Roussillon, Montpellier
dos, sur laquelle est inscrit en gros caractères noirs le mot ayant pour thème le statut social de l’artiste. Sur fond blanc
Natacha Lesueur
FIN. Il distribue également des tracts sur lesquels le même le même mot répété est inscrit en noir : « gold », « publicité » Sans titre, 1999 - 150 x 110 cm

mot est tamponné. Les moyens sont dérisoires. Très lisible, le et, une fois de plus le mot « fin », tous basculés

petit mot de trois lettres surgit, énigmatique, au-dessus des verticalement. Les polices de caractère utilisées diffèrent

têtes, concurrence et ponctue les messages sur les affiches, pour chacun et donnent, en quelque sorte, le ton : fine et

les enseignes, qui encombrent la ville et sollicitent les élégante pour le mot « gold », grasse et appuyée pour le

regards. mot « fin ». Un autre tableau est recouvert d’une trame

Cette performance de Philippe Cazal, une de ses toutes constituée d’un pictogramme alterné noir sur blanc / blanc

premières réalisations, marque le début des stratégies sur noir, représentant un verre à champagne. En bas et à

visuelles qu’il ne cesse de développer depuis, avec des droite de chaque panneau, là où l’artiste signe

moyens techniques très diversifiés, tels que photographie, habituellement son oeuvre, un rectangle orange est apposé,

peinture murale, sur toile, sur émail, sculpture, affiches, sur lequel est inscrite en blanc la formule générique «

néons, stickers... Ses travaux ont pour plus grand l’artiste dans son milieu » *3. Mises en avant avec autant

dénominateur commun les mots et les signes qu’il dispose, d’efficacité qu’une page publicitaire, les notions de succès,

met en page. Calquant son savoir-faire sur celui des richesse, célébrité et luxe, propres à la société de

graphistes publicitaires, PC met en scène typographies et consommation en général et au monde de l’art en

couleurs dans des compositions impeccables, qui mettent en particulier, nous interpellent et s’interpellent elles-mêmes.

avant la dimension visuelle des textes et leur contenu, à Les slogans font aussi partie du matériel écrit utilisé par PC,

caractère socio-politique. Dans le travail de PC, il est soit qu’il les invente : « l’art ne fait pas crédit » (variation

toujours question, comme il le dit lui-même, « de l’art, de amusante et critique sur le thème de « La maison ne fait pas

l’artiste, de langage et de sens ». Dès 1985, il « labellise » crédit »), soit qu’il se les approprie, comme ceux de mai

sa production au moyen d’un logo créé par une agence de 1968. Là encore, la forme sert le contenu. Tableau (1989)

graphisme et qui n’est autre que son prénom et son nom consiste-en un kit, semblable à ceux vendus chez IKEA

alternant en noir et blanc dans un cartouche rectangulaire comprenant deux plateaux en bois peints en blanc sur

blanc encadré de noir. Il dispose également d’une charte lesquels sont inscrits les slogans « Alors l’élite expliquez-vous /

graphique qui codifie rigoureusement l’ensemble de ses Alors l’élite expliquez-nous », munis d’un support marqué du

compositions « écrites », depuis ses propres réalisations logo-signature. En fonction du montage choisi, on obtient

jusqu’aux cartons d’invitations et catalogues d’expositions, une table basse ou un tableau, dont le design épuré

instaurant, notamment, l’utilisation de polices de caractère contraste avec l’insolence des deux phrases interpellatrices

sobres, élégantes et très lisibles (Futura demi bold jusqu’en et qui sème un peu le désordre dans l’espace, privé ou

1993 puis Frutiger). La fonction du logo-signature ne se institutionnel, qui les accueille. De désordre il est aussi

réduit pas à l’identification et l’authentification appuyées de question dans Slogans (1999). Deux phrases Le vide est

l’œuvre sur laquelle il est apposé. En 1988, il devient ailleurs et La victoire de l’économie inscrites en gros

sculpture sous la forme de barres en Plexiglas sérigraphiées caractères sur le mur, comme de gros titres de journaux mais

sur les quatre faces en alternant avec le mot « collection » et en alternant les couleurs bleu et jaune, sont brisées par des

qui, dans leurs dimensions les plus réduites, évoquent césures pratiquées aux mauvais endroits. Le texte refuse de

irrésistiblement des objets publicitaires. La même année, à livrer son sens à la première lecture ; à cause de cela, il est

l’invitation du festival Nouvelles Scènes, PC se produit à plus frappant. PC pratique le même type de « chirurgie »

Dijon, dans les vitrines de deux établissements bancaires. avec Retour en avant4. En 2001, à l’invitation d’Interface et

Pour l’occasion il réemploie la phrase-titre « l’artiste dans de la Galerie François Barnoud, il fait imprimer sur adhésif

son milieu * »1 sous la forme de grandes lettres peintes sur transparent six slogans de mai 68 qui, des murs de la

juste un regard subtil et ironique posé sur un procédé commercial qui fragmente le corps de la femme pour créer du désir. « Il existe deux formes d’excitation pour l’homme : il y a
Dans nombre de ses photographies sans titre, dites « Les tests optiques » de 1999-2000, les peaux de ses modèles, aux d’une part, la chair, l’érotisme ; d’autre part, le livre, le
poses lascives et confortables, morceaux de corps dénudés offerts au regard, sont, elles aussi, marquées de lettres. De texte, l’excitation intellectuelle », explique Peter Greenaway
lettres, non de mots, il s’agit d’empreintes d’alphabet ophtalmologique, obtenues par l’application de cataplasmes à base à propos de son film The Pillow Book (1996) dans lequel
de farine de moutarde. Réglons notre vue : « Z U M C F T N…, femme alanguie ! ». Difficile de se concentrer. Mais s’agit- l’héroïne, Nagiko, écrit sur la peau de ses amants les
il réellement de voir ou est-il question de regard ? chapitres d’un livre en devenir. Mais le corps écrit, s’il
Car on regarde ces corps sans visage, à demi-nus, allongés sur un lit ou sur un canapé (plié/déplié), plus qu’on ne voit le véhicule l’idée du désir, tire aussi, nous le voyons, sa part
test alphabétique. On se rend compte alors que le voyeur regarde plus qu’il ne voit. Et on pense à Jean Clair : « Le regard d’ombre, celle de la douleur, de la violence, de l’agression.
est l’érection de l’œil. ». Greenaway lui-même ne s’y trompe d’ailleurs pas, Le livre
Il n’y a pas de récit ici, juste des lettres empreintes qui structurent les photographies et soulignent le corps-image. L’œuvre est de l’amant de Nagiko s’écrit en effet sur le corps suicidé de
ambivalente, elle est faite d’un « dispositif multiple, contradictoire, bourré de pièges, qui tente vers la mise en abîme des illusions l’être aimé, comme un symbole.
corporelles et psychologiques du monde contemporain. », explique Robert Fleck. Chez Natacha Lesueur, la peau ne s’écrit
pas, elle se frappe de lettres, comme autant de signes intrinsèquement parlants. L’écrit est sans importance, seuls comptent Guillaume Mansart
les signes de la calligraphie médicale comme symbole ironique de la violence du regard porté sur le corps de la femme.
A l’opposé, on connaît l’intérêt de Jenny Holzer pour la phrase, le truisme, l’aphorisme. L’artiste américaine, qui depuis la
fin des années soixante-dix, utilise le langage comme moyen d’expression plastique et de dénonciation, présente en 1994,
sa série Lustmord (Meurtre sadique). Abandonnant alors les affiches et les tableaux électroluminescents, Holzer écrit à même
les peaux. Dénonçant les sévères violences des abus sexuels commis durant la guerre en ex-Yougoslavie, elle marque les
épidermes de femmes de phrases énoncées par des agresseurs, des victimes ou des témoins. Elle cherche ainsi à lier à une
expérience personnelle, le poids des mots (et le choc des consciences). Extraits désordonnés : « Je l’ai trouvée accroupie et
cette position m’incita à la prendre par derrière. », « Je fais du sang caillé. », « Je prends son visage aux cheveux si fins.
Je place sa bouche. », « Je suis éveillée là où les femmes meurent »… Les extérieurs nus se mettent à raconter une réalité
nue. La peau s’approche d’un autre langage, celui de l’indicible et de l’indélébile. Le tatouage est interne, il transpire des
pores, rappelant à la vue les cicatrices ouvertes, vers l’intérieur.

7

altkirch HORSD’ŒUVRE n° 10 limoges L’inamovible Duchamp
édité par l’association
Crac Alsace INTERFACE Frac Limousin
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ouvert du mer. au dim. de 14 h à 18 h tél. / fax : 03 80 73 45 08 87100 Limoges
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H. Bohnert, T. Bonnichon, A. Joachim, de 14 h à 18 h le sam.,
V. Moser, E. Premel-Cabic, G. Wagner, Comité de rédaction : sauf jours fériés Parler de l’écrit et de ses supports dans l’art
N. Weber ; « De l’interprétation » Laurence Cyrot, Valérie Dupont, ® « Il prestigiatore » Gabriele contemporain sans évoquer, voire invoquer Marcel
Éditions Rémy Bucciali : 17/03 - Astrid Gagnard, Guillaume Di Matteo : 15/03 - 29/05/02 Duchamp, équivaudrait pour un historien du Rock à
21/04/02 Mansart, Michel Rose, Marie- privilégier les Beatles au détriment des Crickets de
France Vô lons-le-saunier Buddy Holly.
auxerre Marcel Duchamp fut, on le vérifie tous les jours, un
Coordination et mise en page : Musée des Beaux-Arts grand initiateur, et l’écriture et la linguistique Pointant le canon dans sa main
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2 bis place St-Germain 39000 Lons-le-Saunier L’on sait par ses déclarations que pour son « Vers une vierge à demi nue
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ouvert de 10 h à 18 h 30 sauf mar. Cyrot, Valérie Dupont, Jérôme E. Samak, W. Laib, F. Gonzalez-Torres, écrivains. Sa bibliothèque est en ce sens éloquente Le célibataire en éveil
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Zac Espérance Bourgogne, Dijon, 01 - 03/02 cahier d’inventaire Drôle de genre » : » est en fait l’appel à (Blanche)neige, vierge notoire Jamais n’atteindra le soleil
90000 Belfort 17/01 - 17/03/02 doublée d’une servante toujours prête (Ready
tél. 03 84 36 62 10 © Photo : André Morin, Paris ® Alain Girel : 2ème quinzaine 03/01 maid) installée dans un cercueil de verre (!) et
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07/03 - 27/04/02 l’esprit des écrivains admirés par Duchamp.
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T. Bernard, E. Amelitos, D. Pontoreau : Lawrence WEINER ces quelques lignes, hommage reconnaissant d’un
10/05 - 07/06/02 C’EST BONNET BLANC ET BLANC La Périphérie énième exégète à un Maître incontournable que je flétrissure,
BONNET, L’UN VAUT BIEN L’AUTRE, 17 rue Rouget de Lisle remercie pour m’avoir fourni le premier
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LA POURSUITE DU BONHEUR, 2001 tél. 01 46 57 70 10 dicté en mai 1999 lors d’une nuit mémorable par...
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® Carte blanche à Morgane Rousseau : 21000 Dijon Marie-France Uzac : 21/03 - 11/05/02 Et son manche bien raidi m’aide
09 - 26/04/02 tél. 03 80 66 23 26 A rimer la fin de mon chant.
® Cécile Desvignes : 02 - 24/05/02 visites sur rdv
® Richard Fauguet : 30/05 - 20/06/02 ® Patrick Neu : 03 - 04/02 Michel Rose - Dijon
® « Art Chicago 2002 » D. Firman,
caen G. Garcin, P. Gronon, C. Hyvrard, Bibliographie :
V. Marnat-Leempoels, G. Rousse, ROSE, Michel, « L’importance de la linguistique et des
Frac Basse-Normandie M. Temkina : 09 - 13/05/02 procédés de création littéraire de Jean-Pierre Brisset
9 Rue Vaubenard ® « Les petits monuments » Colette et Raymond Roussel sur la conception du Grand Verre de
14000 Caen Hyvrard : 06/02 Marcel Duchamp ». Mémoire de Maîtrise d’Histoire de
tél. 02 31 93 09 00 l’art. Dijon, Université de Bourgogne, juin 1998.
ouvert de 14 h à 18 h sauf jours fériés Galerie Interface ROSE, Michel, « La poésie dans le titre de la pelle à
® « Flags Vision » Franck Scurti : 12 rue Chancelier de l’Hôpital
12/01 - 03/03/02 21000 Dijon neige de Marcel Duchamp In advance of the
® « Œuvres de la collection du Frac Basse- tél. 03 80 73 45 08
Normandie » : 09/03 - 14/04/02 ® Réouverture d’un nouvel broken arm (En avance du bras cassé) ».
® Martine Aballéa : 27/04 - 16/06/02 appartement-galerie : 04/02 Mémoire de DEA d’Histoire de l’art. Dijon, Université de
® Prog. : renseignements par tél. Bourgogne, juin 1999.
château-Gontier
dole En avance du bras cassé
Chapelle du Genêteil Il tient sa pelle comme un manche,
Rue du Général Lemonnier Frac Franche-Comté /
53200 Château-Gontier Frac Lorraine C’est un pelleteur du dimanche,
tél. 02 43 07 88 96 Musée des Beaux-Arts Plan d’eau du Saulcy Son outil est très mal placé.
ouvert de 14 h à 19 h les mer., jeu., 85 rue des Arènes 57000 Metz
ven., dim. / de 10 h à 12 h et 39100 Dole tél. 03 87 74 20 02 pougues-les-eaux saarebrück troyes
de 14 h à 19 h le sam. tél. 03 84 79 25 85 ® Isle Roman : 18-19/05/02
® « T’es faché ? » Françoise Quardon : ouvert de 10 h à 12 h et ® Marthe Wéry : 24/05 - 31/07/02 Centre d’Art Contemporain Stadtgalerie CAC - Passages
06/04 - 02/06/02 de 14 h à18 h, sauf lun. 1ère Rue, Cité radieuse Le Corbusier/ Parc Saint-Léger St Johanner Markt 24 9 rue Jeanne d’Arc
® Paul-Armand Gette : lecture ® Thomas Huber : 22/02 - 26/05/02 Briey ; Église des Trinitaires/Metz Avenue Conti 66111 Saarbrücken - Allemagne 10000 Troyes
à 18 h 30 le 23/05/02 ® Victor Huguenin : 15/06 - 29/09/02 58320 Pougues-les-Eaux tél : 00 49 0681 936 83 21 ouvert de 14 h à 18 h, mer. 14 h à 20 h
montbéliard tél. 03 86 90 96 60 ouvert du mar. au dim. de 11 h à19 h, sauf dim. et jours fériés
clermont-ferrand genève ouvert de 14 h à 18 h sauf lun. mer. de 12 h à 20 h, fermé le lun. tél. 03 25 73 28 27
Le 10 Neuf ® « Asja Collective » L’université du ® « Digression à la frontière » Coll. ® « Assupisma »Stephan Vee :
Galerie Garde à vue MAMCO 19 Avenue des Alliés cartable : 26/01 - 24/03/02 Frac Lorraine : 23/02 - 20/05/02 28/03 - 07/05/02
16 Rue de la Préfecture 10, Rue des Vieux Grenadiers 25200 Montbéliard ® « Animagus » L. Duthion, ® « Vis à vis, traces / mémoire /
63000 Clermont-Ferrand 1205 Genève tél. 03 81 94 43 68 R-F. Hammerstiel, L. Laâbissi, C. Le Talec, sélestat publics » : 15 - 25/05/02
® «Sin titulo (sin principlo, sin fin) » Suisse ouvert de 14 h à 19 h du mar. au sam. T. Monin : 08/04 - 22/06/02 ® « Sens giratoire » : 06/06 - 23/08/02
Santiago Reyes : 29/03 - 12/04/02 tél. 00 41 22 320 61 22 le dim. de 15 h à 19 h Frac Alsace
ouvert de 12 h à 18 h, sauf lun., ® Alain Clément : 16/03 - 19/05/02 reims 1, Espace Gilbert Estève publications
dijon nocture le mardi jusqu’à 21 h ® Anne-Marie Pêcheur : 67600 Sélestat
® « Vivement 2002 ! Plus encore » 01/06 - 01/09/02 Frac Champagne-Ardenne tél. 03 88 58 87 55 L’Office - ENSBA de Dijon
Frac Bourgogne P. Vadi, Moké, B. Cornand, C. Hahn : 1, Place Museux Ouvert du mer. au sam. de 14 h à 18 h 3, Rue Michelet
49 rue de Longvic 27/03 - 28/04/02 nancy 51100 Reims le dim. de 11 h à 18 h 21000 Dijon
21000 Dijon ® « Rien ne presse/Slow and Steady/ tél. 03 26 05 78 32 ® « Spinosa / Spinoza » et « Reour tél. 03 80 30 21 27
tél. 03 80 67 18 18 Festina Lente ! ; Jokes » A. Séchas, Galerie Art Atttitude Hervé Bize ouvert de 14 h à 18 h sauf lun. d’exploration (2) » C. et F. Hungingen : e-mail : [email protected]
ouvert du lun. au sam. de 14 h à 18 h P. Mayaux, P. land, R. Matta, G. Lilanga, 17-19 Rue Gambetta ® Janaina Tschäpe : 15/02 - 14/04/02 27/03 - 12/05/02 ® Orlan - Le Plan du Film, CD + livret,
® « dialectique, pneumatique » D. Shrigley, P. Saul, B. Martin, 54000 Nancy ® Cécile Le Prado, Emmanuelle Huynh- ® « Seul(s) au monde » Guy Limone : Les films Al Dante / Coprod. Sade &
Taroop & Glabel - Guest Star : C. Trouille : 23/05 - 22/09/02 ouvert du mar. au sam. Thanh-Loan : 17/05 - 28/07/02 05/06 - 18/08/02 l’Espace
Étienne Bossut : 22/01 - 23/03/02 de 15 h à 18 h 30 et sur rdv ® « Jardin du Frac » Michel Aubry : ® Harald Fernagu, livre d’artiste /
Lecture de Lefevre Jean Claude le grenoble tél. 03 83 30 17 31 roubaix toute l’année Coprod. Le Consortium (Dijon)
24/03 à 11 h ® Taroop & Glabel : 01/03 - 04/05/02 ® Lavotopic Tour 2001 - Road Book,
® « Nous tournons en rond dans la nuit » Magasin / Cnac Espace Croisé tanlay Cat. d’expo / Coprod. Asso. Ergo
A. Benoît, H. Fernagu, Tu Yen Fong & Site Bouchayer-Viallet nantes Grande Place - BP 40534 (Label lavotopic)
C. Sionneau, V. Marnat-Leempoels, 155, Cours Berriat 59059 Roubaix Cedex 1 ADAC - Centre d’art de Tanlay
J-C. Ruggirello, R. Buchanan, L. Raguénès, 38028 Grenoble Cedex 1 Ipso Facto tél : 03 20 66 46 93 Château de Tanlay à paraître :
P. Piscitelli : 19/04 - 01/06/02 tél. 04 76 21 95 84 56 Bd Saint-Aignan ouvert du mar. au sam. de 14 h à 18 h 89430 Tanlay ® Lilian Bourgeat, Cat. d’expo. /
® C. Robert Tissot : 21/06 - 24/08/02 ouvert de 12 h à 19 h, sauf lun. 44100 Nantes et sur rdv pour les groupes tél. 03 86 75 76 33 Coprod. Centre d’art de Castres,
® « Concerts jus de fruits » les dim. ® Jack Goldstein : 03/02 - 28/04/02 tél. 02 40 69 62 35 ® « [des]enchanté(e)s » L. Parsons, ouvert tous les jours. de 11 h à 18 h 30 Le Consortium (Dijon)
10/03, 28/04 et 23/06 à 11 h ouvert le sam. 14 h à 18 h et sur rdv A. Klamroth, F. Lefever, B. Achour, ® « le portrairt s’envisage » : ® Eric Duyckaerts, Cat. mono. /
joigny ® Grégory Duhamel, Marie maillard : J. Bartoloméo, A. Bernardini, Jo Lansley 01/06 - 29/09/02 Coprod. Crac de Sète, Frac
02 - 23/03/02 & H. Bendon, R. Perray, V. Roux : Bourgogne, Galerie E. Perrotin (Paris)
Atelier Cantoisel ® Thomas Bernardet, Christophe Viart : 19/01 – 13/04/02 thiers ® Nathalie David, Ed. DVD / Coprod.
32 Rue Montant au Palais 13/04 - 04/05/02 ® « Kinshasa Congo » Fabien Rigobert / C.N.C. (Paris), Kulturbehörde (Hambourg),
89300 Joingy Moke, Cheri Samba : 17/05 – 13/07/02 Centre d’art - Le Creux de l’Enfer Art Entreprise (Villeurbanne),
tél. 03 86 62 08 65 nice Vallée des Usines Art 3 (valence), Mamco (Genève)
® « Œuvre du Frac Bourgogne » st sauveur en puisaye 63300 Thiers ® Passeport Toison d’Or pour l’Europe
P. Corillon : 03 - 04/02 Galerie Françoise Vigna tél. 04 73 80 26 56
3, Rue Delille Crac - Château du Tremblay ouvert de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 h (S. Berger, I. Damour, S. Moreau, I.
le creusot 06000 Nice 89520 Fontenoy-en-Puisaye les sam. et dim. de 14 h à 19 h, sauf mar. Tursie & W. Mille), Cat. d’expo /
tél. 04 93 62 44 71 ouvert de 14 h à 19 h sauf lun. ® « La peinture et les jours » Coprod. Conseil général de Côte d’Or
LARC - Scène Nationale ouvert du mar. au sam. tél. 03 86 44 02 18 Bruno Bellec ; « Géologistes : Nord ® Denis Pondruel, Cat. mono. /
Place de la Poste de 15 h à 19 het sur rdv ® « Artistes contemporains icaunais » : contre Sud » Yuri Leiderman : Coprod. Afaa, Toka
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ouvert de 13 h 30 à 19 h du mar. au Maguet - feat. Erik Fostinelli : ® C. Cehes, B. Delrieu, A. Bascoul :
ven. / de 15 h à 18 h le sam. et dim. 30/03 - 04/05/02 12/05 - 23/06/02
sauf 31 mars, 1er et 8 mai
tél. 03 85 55 37 28 Si vous souhaitez que vos manifestations soient annoncées dans l’agenda du prochain numéro, une participation
® Sabine Weiss : 08/03 - 07/04/02 de 20 Euros minimum est demandée.
® Gérard Breuil : 19/04 - 12/05/02


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